Cet article sur Actes 2 a pour sujet le don et la plénitude de l'Esprit lors de la Pentecôte. Le baptême de l'Esprit n'est pas une deuxième expérience, comme le dit le pentecôtisme, mais désigne la réception initiale de l'Esprit.

Source: Méditations sur les fêtes chrétiennes. 5 pages.

Actes 2 - Que s'est-il passé à la Pentecôte? Message de la Pentecôte

Actes 2

Nous nous entretiendrons cette fois-ci d’Églises et de chrétiens qui, tout en demeurant dans le cadre de leurs confessions et théologies traditionnelles, semblent attirés par la non-théologie du mouvement charismatique. Des chrétiens et des Églises réformées n’ont pas échappé à une telle séduction.

L’essentiel du mouvement pentecôtiste, quelles que soient ses diverses tendances et prolongations, est constitué par la conviction d’une expérience spéciale du Saint-Esprit qui serait tout à fait distincte de l’expérience de la conversion. Il faut signaler la forte insistance du mouvement sur le livre des Actes, notamment sur le chapitre 2, à l’exclusion des épîtres du Nouveau Testament. Il est par conséquent très urgent de nous demander ce qui s’est réellement passé à la Pentecôte d’après Actes 2.

La réponse fondamentale et évidente est que les disciples furent remplis du Saint-Esprit. Mais cette expérience ne peut se démarquer avec rigueur de celle appelée la réception de l’Esprit, ou le baptême de l’Esprit, ou dans l’Esprit. Ce même événement est décrit dans Actes 2 à l’aide de divers termes. Dans Actes 1.5, le Seigneur promet aux disciples qu’ils seront baptisés de l’Esprit. Dans Actes 10.47, Pierre rend clair le fait que l’expérience de Corneille et de sa maisonnée fut identique à celle de la Pentecôte. Pourtant, sa terminologie est différente. « Peut-on refuser l’eau du baptême à ceux qui ont reçu le Saint-Esprit aussi bien que nous? » Dans Actes 10.44, nous trouvons une autre variation encore : « Le Saint-Esprit descendit sur tous ceux qui écoutaient la parole. » Il devient évident qu’une seule expérience peut être également décrite comme étant la réception de l’Esprit, en être baptisé, en être rempli… Par conséquent, nous ne pouvons pas distinguer toujours nettement entre ces termes comme s’ils faisaient allusion à des expériences différentes.

Il est peut-être plus important de conserver à l’esprit l’idée qu’être rempli de l’Esprit n’est pas un privilège limité à quelques « élus », à des chrétiens « de première classe »… Dans Actes 2.4, ils étaient tous remplis de l’Esprit. Ce tous représente l’ensemble du collège apostolique et tous les disciples réunis autour d’eux, à savoir tous ceux qui continuaient d’un même accord dans la prière et les intercessions (Ac 1.14), qui choisirent Matthias pour remplacer la place laissée vacante par Judas (Ac 1.26) et qui, le jour de la Pentecôte, se trouvaient tous d’un même accord dans le même lieu (Ac 2.1). L’effusion et la plénitude de l’Esprit n’ont laissé personne en dehors.

L’essentiel même de la Pentecôte et de la dispensation qu’elle inaugura consistait, ainsi que l’avait prédit le prophète Joël, en l’effusion de l’Esprit Saint sur chaque membre individuel de l’Église. Tous allaient avoir part au charisme (Jl 3.1-5). Tout disciple chrétien, partout dans le monde, serait rempli ou baptisé de l’Esprit Saint. Ce serait là la règle de la nouvelle dispensation. La réponse de Pierre à la question posée : « Hommes frères, que ferons-nous? » est claire : « Repentez-vous et soyez baptisés » et « vous recevrez le don du Saint-Esprit » (Ac 2.37-38). Il est tout à fait clair que, du moment où l’on croit et l’on devient disciple, on bénéficie de l’effusion de l’Esprit telle qu’elle avait été annoncée par le prophète Joël et dans Actes 1.4; il ne fallait pas s’attendre à un don additionnel.

Ceci est largement confirmé et explicité par d’autres passages du Nouveau Testament. Par exemple, Paul écrit dans Romains 8.9 : « Si quelqu’un n’a pas l’Esprit du Christ, il ne lui appartient pas. » Si l’on prend la Bible au sérieux, il est impossible d’être d’accord avec l’absurde prétention qui voudrait que, si tous les chrétiens régénérés ont reçu le Saint-Esprit, tous n’aient pas reçu le baptême ou « la promesse du Père ». Car nulle part le Nouveau Testament n’établit une telle distinction dans l’emploi des termes. Le passage de l’épître aux Romains que nous avons cité plus haut dit en quelque sorte : « Si quelqu’un n’a pas le baptême de l’Esprit, il n’appartient pas au Christ. » Paul exprime le même sentiment dans 1 Corinthiens 12.13 : « Car c’est dans un seul Esprit que nous tous, pour former un seul corps, avons été baptisés… » Nous avons tous été baptisés en le même Esprit. Chacun de ceux qui appartiennent au corps du Christ a été baptisé dans son Esprit, c’est-à-dire le Saint-Esprit. Plus frappant encore est le passage de la lettre aux Galates, où l’apôtre affirme que le but même de la mort du Christ consistait en ce que la bénédiction d’Abraham put être accordée aux païens. Ensuite, il ajoute : « Afin que nous recevions la promesse de l’Esprit par le moyen de la foi » (Ga 3.1,14).

Selon cette déclaration, c’était précisément pour que nous puissions recevoir l’Esprit promis, c’est-à-dire la promesse du Père, que le Christ est mort. Participer aux bénéfices de la mort du Christ et à la rédemption signifie, tout simplement, être rempli de l’Esprit de Dieu.

La même conclusion s’ensuit du fait de notre union avec le Christ. Rien n’est plus fondamental au chrétien que d’être en Christ, fait qui est déclaré éloquemment dans Éphésiens 1.3-14. Combien aveugles sommes-nous pourtant aux implications de celle-ci! Nous ne pouvons être en le Fils sans être aussi et simultanément en l’Esprit, et en vérité aussi en le Père. En fait, l’union entre le Fils et l’Esprit est tellement intime et étroite que Paul peut dire : « Le Seigneur c’est l’Esprit » (2 Co 3.17).

La Bible n’autorise personne à s’imaginer que lorsqu’on est en Christ on n’aurait que des bribes ou dons spirituels partiels. Au contraire, être en Christ signifie bénéficier de toutes les bénédictions spirituelles (Ép 1.3) : acceptation, rédemption, pardon, héritage, sceau de l’Esprit et encore bien d’autres bénédictions. Dans les paroles mêmes de Colossiens 2.10, nous sommes déjà complets en Christ. Le Consolateur ne vient pas dans la vie du membre véritable de l’Église juste pour compléter un ministère partiel et limité! Il vient habiter les croyants en vue de les équiper pour toutes les exigences de la vie chrétienne. La volonté de Dieu engage nombre de responsabilités dans la vie chrétienne, qui peut comporter des tentations violentes ou subtiles; elle peut exiger souffrance et endurance. Mais la consolation en face de tout ceci est que l’Esprit de notre Père exercera un ministère tellement complet que non seulement aucun d’entre nous ne sera tenté au-delà de ses forces, mais qu’en dépit de tout ceci « nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés » (Rm 8.37).

Le fait que tout croyant a été rempli de l’Esprit a des implications profondes. Nous ne sommes pas autorisés à diviser les chrétiens en deux catégories, dont l’une aurait reçu l’Esprit et l’autre ne l’aurait pas reçu. Bien entendu, il y a d’infinies variations parmi les croyants en ce qui concerne leur degré de certitude, d’assurance, de la marche dans la foi, c’est-à-dire de la sanctification, des fruits de la foi ou du zèle pour le Seigneur Jésus-Christ. Mais nous ne devons pas expliquer ces variations en termes d’une différence constitutionnelle entre chrétiens; nous ne pouvons pas davantage permettre aux gens de croire qu’ils pourraient manquer de toute expérience chrétienne et, malgré cela, penser encore qu’ils puissent se dire chrétiens.

La réalité est tout autre. La Bible nous affirme cette réalité incroyable : la sainte Trinité a élu habitation chez le chrétien régénéré. Il est le Temple du Saint-Esprit. La vie de Dieu lui a été infusée. Ceci est vrai non parce qu’il serait plus qu’un chrétien, mais tout simplement parce qu’il est un chrétien normal et ordinaire.

Certes, la vie spirituelle d’un grand nombre de chrétiens laisse beaucoup à désirer. Comment de tels membres de l’Église peuvent-ils donner des signes aussi peu convaincants de leur foi? Mais une telle objection pourrait aussi s’appliquer à d’autres doctrines bibliques. Par exemple, comment croire que Satan est lié et que le Christ exerce une autorité universelle dès à présent déjà? Comment penser que tel ou tel chrétien, parfois illustre, a pu traiter aussi misérablement l’un ou l’autre de ses collègues? La vérité est que le péché est une contradiction en nous de tout ce qui est virtuellement chrétien. Les chrétiens charnels de Corinthe ne manquaient pas de l’Esprit; leur sainteté n’était pas remise en question par Paul; ils appartenaient même à une Église à qui l’Esprit avait accordé de nombreux dons spirituels. On ne peut donc pas les taxer de chrétiens de seconde classe, et lorsqu’ils commirent de pécher dans leur corps, ils péchèrent et profanèrent le Temple de Dieu ou le Temple du Saint-Esprit (1 Co 6.15).

La grande réalité du baptême de l’Esprit est expliquée dans nombre d’endroits du Nouveau Testament pour faire comprendre aux croyants leur responsabilité solennelle envers un tel privilège et la monstruosité d’un style de vie qui le déshonore.

Une autre implication de cet enseignement du Nouveau Testament est que nous n’avons pas le droit de presser les chrétiens à chercher le baptême de l’Esprit. Saint Paul dut affronter des problèmes d’une complexité inouïe dans toutes les Églises qu’il fonda ou visita. Nulle part il ne laisse entendre que la panacée universelle pour les résoudre sur le champ était une deuxième réception ou baptême du Saint-Esprit. Il n’affirme nulle part que ses ex-paroissiens n’avaient pas reçu l’Esprit ou qu’ils n’en avaient pas été baptisés. Même aux Églises de Galatie il déclare que leurs membres avaient reçu l’Esprit par l’écoute de la Parole, dans la foi. Ces hommes et ces femmes n’avaient pas fait l’expérience d’une seconde bénédiction. Il ne préconise pas comme remède à tous leurs maux le baptême de l’Esprit. Les auteurs du Nouveau Testament demandent simplement aux nouveaux et anciens convertis la repentance dans la foi, de vivre de manière digne de leur vocation et de ne pas attrister le Saint-Esprit. Car ils avaient tous reçu l’Esprit et en avaient été baptisés. La « sanctification de crise » est une illusion. Il ne peut pas y avoir une transformation spectaculaire et soudaine par le baptême de l’Esprit conduisant miraculeusement chaque croyant sur le chemin d’une sainteté parfaite et sans faille, du jour de la conversion jusqu’à sa mort… Nous devons travailler durement tous les jours, dans notre vie quotidienne et ordinaire, « avec crainte et tremblement » à notre salut; ressentir faim et soif de justice, mortifier la chair, renoncer à nous-mêmes, renier notre ego…

Car on ne reçoit pas la sainteté comme un cadeau de Noël, joliment empaqueté… Il y a une lutte et une persévérance qui vont de pair avec la vie chrétienne chaque jour, tous les jours. Ce que nous recevons, c’est la grâce, afin d’être en mesure d’endurer l’épreuve et de payer le prix de notre marche « dans l’Esprit ». Même la joie, qui est pourtant l’un des dons de l’Esprit, n’est pas quelque chose qui déborde toujours et sans discontinuer dans la vie du croyant. Certes, elle fait partie de l’expérience chrétienne; il peut y avoir la joie dans notre cœur et des chants sur nos lèvres, mais la dépression spirituelle fait aussi partie de la vie chrétienne. Même l’apôtre s’écrie : « Misérable que je suis, qui me délivrera de ce corps mortel? » (Rm 7.24).

Nous pensons que tant de slogans promettant une vie remplie de joie et de plénitude sans faille, accompagnée de guérisons et de miracles à longueur de vie chrétienne est un enseignement qui peut être extrêmement dangereux, car le croyant est toujours confronté à un moment ou à un autre à la réalité, pas toujours brillante, de sa vie chrétienne; il peut alors penser que le Saint-Esprit l’a quitté et il peut tomber dans le plus profond découragement, dans l’angoisse même, doutant qu’un véritable renouveau soit encore possible pour lui.

Pourquoi, malgré tant d’attente et de ferveur, la guérison et le miracle ne se produisent-ils pas forcément? Le doute envahit le croyant charismatique lorsqu’il cherche et prie pour la guérison et le miracle, et que ceux-ci ne se produisent pas… Il pense facilement que la raison en est qu’il n’est pas suffisamment spirituel, ou qu’il ne prie pas avec assez de foi, ou qu’il n’a pas le Saint-Esprit… Le danger est grand, dans certains milieux, de rechercher frénétiquement l’exaltation à n’importe quel prix, et nous savons, hélas!, quel prix a été payé par beaucoup pour ce genre d’expériences. Pourquoi dans la vie quotidienne rencontrons-nous tant de pentecôtistes charismatiques anxieux et même angoissés en ce qui concerne leur vie spirituelle? L’Esprit les aurait-il désertés? Seraient-ils devenus des chrétiens de seconde zone?

Une telle appréciation est totalement étrangère aux données révélées du Nouveau Testament. Dieu ne promet pas que son enfant sera miraculeusement guéri parce qu’il le lui demande. Après tout, un jour ou l’autre, la mort vient faucher la vie des chrétiens comme celle d’autres êtres humains. L’homme spirituel n’a aucune garantie qu’il ne connaîtra pas le découragement. Les grandes figures bibliques ne furent pas toutes des êtres euphoriques, vivant toujours au « beau fixe ». Elles descendirent dans des gouffres effrayants et tâtonnèrent dans les ténèbres, éprouvèrent des craintes et des regrets, crièrent leur repentir, chantèrent aussi leur joie et leurs louanges, mais demeurèrent perplexes face à des calamités inexplicables. Ces hommes et ces femmes se plaignirent et connurent parfois même la défaite. Le baptême du Saint-Esprit n’est pas une « assurance tout risque » contre les fluctuations dans notre vie de croyants, car même en étant spirituels nous sommes aussi simultanément pécheurs; bien que mortels, nous sommes destinés sûrement à la vie éternelle…

Et avec le psalmiste, nous savons qu’un cœur brisé et contrit est l’offrande qui plaît à Dieu (Ps 51.19).