Cet article a pour sujet les problèmes dans la mission auprès des musulmans, les difficultés rencontrées, les raisons possibles de l'échec apparent du travail missionnaire auprès de l'islam.

Source: Connaissance de l'islam. 8 pages.

Connaissance de l'islam - Les problèmes dans la mission auprès des musulmans

  1. Quelle perspective théologique doit-on avoir sur l’islam?
  2. Des efforts missionnaires passés peu fructueux
  3. Des difficultés actuelles rencontrées sur le champ missionnaire
  4. Quelles sont les raisons de l’apparent échec de la mission?
  5. La désaffection religieuse parmi les musulmans
  6. La résistance de l’ennemi

1. Quelle perspective théologique doit-on avoir sur l’islam?🔗

Les éléments d’information donnés précédemment nous permettront d’aborder maintenant la question de la mission parmi les musulmans. Nous avons reconnu qu’il existe de très profondes divergences entre la foi en l’Évangile et la croyance islamique. Elles ne sont pas d’ordre historique, mais ont un fondement théologique. Si nous interrogeons l’Écriture sainte au sujet de l’islam, elle ne nous répondra pas directement. La Bible nous informe au sujet des religions en général, notamment celles contemporaines de l’ancien Israël ou des temps apostoliques. Celles-ci sont, sans exception, considérées comme étant d’inspiration et d’origine païennes.

Dans sa lettre aux Romains, l’apôtre Paul déclare que le paganisme a été la conséquence directe de la chute, fruit de la corruption de l’esprit humain. Durant la période de l’Ancien Testament, Dieu a permis aux hommes, sauf à Israël, de persister dans leur ignorance religieuse. Cette thèse, l’apôtre la soutient également dans son discours prononcé sur la colline de Mars à Athènes, ainsi que lors de son bref séjour dans la ville de Lystre en Asie Mineure. En d’autres termes, la pensée biblique relative aux religions est sans ambiguïté : les païens, qu’ils soient animistes ou adhérents d’une religion dite spirituelle, vivent dans l’ignorance totale et, en tout état de cause, incorrecte et déformée de Dieu. C’est à travers la proclamation de l’Évangile que Dieu les invite à la repentance et à la foi en Jésus-Christ, son Fils unique, le Sauveur incarné.

Au sujet des rapports entre le judaïsme et la foi chrétienne, la Bible souligne un autre point encore. Depuis la venue du Christ, le judaïsme n’est pas seulement coupable d’avoir rejeté l’Évangile, dont la « religion » des ancêtres avait été l’annonce prophétique, mais encore d’avoir déformé la révélation divine contenue dans l’Ancien Testament. Fondamentalement, le judaïsme est une religion anti-messianique, car il refuse de croire en l’avènement du Messie promis, d’accepter Jésus le Christ. Dans sa lettre aux Romains, saint Paul explique encore quel est le statut religieux actuel des juifs, à partir de l’avènement du Christ.

Que doit-on en conclure et quelle est la vérité biblique qui s’applique à l’islam à partir de la connaissance que nous avons des religions païennes? Trouvons-nous dans la Bible un message explicite, spécifique et concret au sujet de la foi islamique? Ce serait en vain que nous y chercherions quelque chose de très explicite pour entrer en controverse avec lui, pour la simple raison que l’islam est né quelque sept siècles après le christianisme. En outre, la prophétie biblique relative aux événements qui se produiront entre les deux avènements de Jésus-Christ ne s’applique pas et ne s’adapte par directement à l’islam. On ne peut l’affirmer d’après le style paulinien. Dès lors, quelle perspective théologique peut-on envisager sur l’islam? Nous n’avons pas le droit de nous aventurer dans une mission en nous servant de n’importe quel outil conceptuel sans auparavant nous assurer d’avoir souscrit sans réserve aux vues bibliques relatives aux religions et à la mission. Il ne faut pas davantage nous décourager dans notre lecture biblique, laquelle, à défaut de références explicites, projette quand même une lumière suffisante pour évaluer la place et le rôle de cette religion dite « monothéiste ».

Le Nouveau Testament nous fait remarquer qu’à la fin des temps de faux prophètes et des hérésies abonderont. Le Christ en personne, dans ses discours eschatologiques, le laissait déjà entendre, et de son côté, saint Paul, dans son discours d’adieux à l’Église d’Éphèse, le déclarait clairement. De nombreux passages bibliques le rappellent (Actes 20; 2 Thessaloniciens; 1 et 2 Timothée; 1 et 2 Pierre, Jude, les lettres de Jean, etc.). Ces données bibliques devraient suffire pour préparer l’Église à faire face à l’apparition de l’Antichrist.

Certes, une difficulté surgit notamment lorsqu’il s’agit de l’islam, car il ne peut aisément être classifié dans l’une ou l’autre des catégories religieuses familières à la Bible, et qu’Ancien comme Nouveau Testament combattent vigoureusement. L’islam n’est pas une hérésie chrétienne. L’hérésie s’accroche à certaines vérités bibliques, se réclamant de son autorité, appliquant des vérités partielles, en déformant totalement d’autres; elle parvient ainsi à manipuler des consciences. Sans exception aucune, les hérésies issues de l’Église se réclament de la foi chrétienne, ce qui n’est pas le cas de l’islam. Celui-ci possède son livre propre, le Coran, considéré comme révélation divine, parole même de Dieu, devant remplacer toute autre révélation antérieure. Islam signifie soumission à la volonté absolue d’Allah.

Soyons assez lucides pour nous rendre compte que l’étude de l’islam ne dissipera pas toujours le mystère dont il s’entoure, et bien souvent nous risquons de nous trouver dans un épais brouillard.

2. Des efforts missionnaires passés peu fructueux🔗

Quelle sera notre tâche chrétienne? Nous contenterons-nous uniquement de maintenir une attitude polémique, retournerons-nous à l’agression armée comme jadis? Il serait plus opportun de nous rappeler qu’on ne témoigne de l’Évangile qu’avec les armes de l’Évangile.

En contact avec l’islam depuis ma première enfance, il était normal que le chrétien et le missionnaire évangéliste que je suis se préoccupe de leur évangélisation. Je ne suis ni plus ni moins qualifié que d’autres pour le faire, ne prétendant à aucune érudition particulière. J’ai esquissé les grandes lignes de son histoire et espère avoir rendu fidèlement les principaux points de sa théologie. Je l’ai fait sans esprit partisan ni fanatisme. Je m’estime cependant suffisamment informé pour parler au nom de l’Évangile aux adhérents de l’islam au même titre que je le fais à d’autres. Cette responsabilité s’explique par le fardeau qui m’est imposé de prêcher l’Évangile à toute créature, dans le monde entier.

Je m’aperçois cependant combien les efforts faits depuis tant de siècles pour atteindre l’islam, pour convertir des musulmans, ont été humainement parlant peu fructueux. Les maigres résultats obtenus ne pourraient, à vues humaines seulement, justifier le prix par moments exorbitant consenti pour l’évangélisation des musulmans. Certainement, la déception ressentie en est grande. L’entreprise missionnaire sur ce terrain se trouve parmi les plus ardues qui soient, à tel point que certains préconisent soit d’y renoncer purement et simplement, soit, tout aussi grave, d’opérer une adaptation de la foi évangélique telle que, finalement, celle-ci devient méconnaissable au regard du chrétien le plus ordinaire.

Passons pour commencer très brièvement en revue les facteurs externes qui ont favorisé son expansion, à vrai dire prodigieuse. L’un de ceux-ci, parmi les premiers, est certainement l’échec de n’avoir pas pu faire connaître aux Arabes le véritable contenu de la Bible. À la fin du 6siècle de notre ère, l’Église chrétienne orientale avait quasiment épuisé ses forces spirituelles et perdu toute préoccupation missionnaire. Les Arabes vivaient à la périphérie de l’Église syriaque et palestinienne, sans pour autant être véritablement en contact avec l’Évangile. Certaines tribus arabes du sud de la Syrie avaient adopté le christianisme, mais elles n’en avaient qu’une connaissance rudimentaire. Cette forme de christianisme quelque peu abâtardie était incapable d’influencer le mode de vivre ou de penser des nomades arabes. L’Église du Yémen, en étroit rapport avec celle d’Éthiopie, n’avait pas davantage réussi à faire rayonner l’Évangile parmi les tribus du nord de la péninsule arabique.

L’Église n’avait pas songé à traduire la Bible en langue arabe. Six siècles avaient passé depuis l’incarnation du Fils de Dieu et son ascension, mais personne n’avait songé à traduire les paroles du Christ en cette langue. Les prédicateurs ne manquaient certes pas; il ne manqua pas davantage d’hommes qui n’hésitèrent ni devant les privations matérielles ni les périls physiques, pour aller jusqu’aux recoins les plus éloignés de ces régions, afin de proclamer les insondables richesses de la grâce divine manifestée en Jésus-Christ. Mais de Bible traduite, il n’en existait point. Signalons toutefois en passant qu’à cette époque l’arabe ne possédait pas encore d’alphabet propre. Ses premières lettres dériveront plus tard du syriaque. Les Arabes appelaient les juifs et les chrétiens « les gens du livre ».

Les versions égyptiennes et arméniennes de la Bible avaient été publiées avant l’apparition de l’islam. Or, sans une traduction de la Bible, l’Évangile ne saurait être adéquatement proclamé. Ceci explique le fait que ce fut un Christ apocryphe qui fut prêché à Mahomet et non celui des pages des Évangiles ou des écrits canoniques du Nouveau Testament. On peut donc conclure que le manque de vision missionnaire d’une part, la non-traduction de la Bible en arabe d’autre part, comptent parmi les facteurs ayant contribué à l’échec chrétien parmi les tribus arabes.

3. Des difficultés actuelles rencontrées sur le champ missionnaire🔗

Énumérons à présent quelques-unes des difficultés actuellement rencontrées sur le champ missionnaire, en dépit de tant d’efforts déployés, de tant de zèle et de persévérance.

Durant le 19siècle, l’expansion du christianisme fut véritablement prodigieuse en dehors des pays occidentaux. Depuis, des millions d’hommes ont entendu la Bonne Nouvelle, et parmi les moyens ainsi déployés pour la proclamation de l’Évangile, il convient de mentionner l’un des plus récents et sans doute aussi le plus efficace et le plus sûr pour notre époque : le ministère radiophonique, celui que nous exerçons depuis plus de deux décennies. Sans être exagérément optimiste et sans nous baser sur des statistiques souvent triomphalistes et par moments purement fantaisistes, qui prévoient une christianisation rapide des pays dits du Tiers-Monde, l’on peut quand même admettre que des pays qui étaient plongés dans le paganisme le plus foncier il y a à peine un siècle, bénéficient actuellement des lumières de la révélation biblique chrétienne. Le nombre de conversions au Christ, celles des élus que Dieu a prédestinés d’avance pour les faire entrer dans son Église militante, devrait quand même nous impressionner. Nous avons la certitude que la promesse faite par le Christ à ses disciples n’a pas été vaine, qu’il accompagne effectivement son Église tous les jours, depuis 2000 ans, pour la conduire et la gouverner par son Esprit et par sa Parole.

Hélas!, tout n’est pourtant pas lumière sur le tableau de la mission chrétienne. Près d’un cinquième de la population mondiale actuellement est adepte de l’islam et dans le « monde musulman » les conversions restent rares. Les missionnaires qui, depuis plus de treize siècles, y ont œuvré se plaindront avec raison comme les disciples du Seigneur : « Maître, nous avons travaillé toute la nuit et nous n’avons rien attrapé. Mais à cause de ta parole, nous jetterons le filet » (Lc 5.5).

Durant de longs siècles, les chrétiens furent forcés de se convertir à l’islam sous des menaces de mort. Le chrétien ne devrait pas accepter le développement des inimitiés. La tâche de la réconciliation demeure toujours actuelle. Cette tâche est un lien très étroit avec la mission de Jésus qui est venu « afin de réunir dans un seul corps les enfants de Dieu dispersés » (Jn 12.52) et nous envoie les uns vers les autres avec un salut de paix : « Dans quelque maison que vous entriez, dites d’abord : que la paix soit sur cette maison » (Lc 10.5). Comme l’a écrit saint Paul, nous avons reçu « le ministère de la réconciliation » (2 Co 5), qui, après nous avoir rétablis en communion avec Dieu, nous rapprochera les uns des autres.

« “Il a voulu à partir du juif et du païen créer en lui un seul homme nouveau en établissant la paix, et les réconcilier avec Dieu tous deux en un seul corps” (Ép 2.15-16). Sans doute cette unité sera-t-elle pleinement consommée par la communion dans la foi au Christ; mais elle doit, dès maintenant, nous conduire à vivre la charité par-dessus toutes les barrières, comme le prouve la parabole du bon Samaritain. L’Église ne peut donc renoncer à chercher la réconciliation. Notre conviction profonde, comme chrétiens, c’est qu’en Jésus-Christ nous découvrons le vrai visage de Dieu et la vraie vocation de l’homme. Vivre à la manière de Jésus autant que la faiblesse humaine le permet, c’est proposer à nos interlocuteurs notre façon d’être devant Dieu, notre manière de comprendre la fidélité à l’appel de Dieu et de vivre la religion qui l’honore vraiment. Notre mission en pays musulman est de rendre témoignage à Jésus-Christ et à son Évangile.1 »

4. Quelles sont les raisons de l’apparent échec de la mission?🔗

Les explications sont nombreuses et divergentes, souvent pénibles pour les missionnaires eux-mêmes. C’est avec une grande honnêteté que ceux-ci se rendent compte de leur apparent échec. Sommes-nous remplis de la plénitude du Saint-Esprit?, s’interrogent-ils. Ils ont la lucidité de reconnaître leurs manquements ou de confesser leurs défaites. Ils estiment qu’ils n’ont pas suffisamment prié. Ou bien l’échec s’expliquerait-il par le petit nombre de missionnaires à l’œuvre ici? D’autres mettent en cause leurs méthodes d’approche. On a certes fondé des écoles et des hôpitaux, on s’est adonné à des œuvres sociales et de philanthropie, mais on n’a pas accordé assez d’importance à l’évangélisation proprement dite! On a servi des particuliers, mais négligé les institutions et les structures sociales; on n’a pas su attirer les familles à l’Église. Ou bien n’a-t-on pas présenté la foi chrétienne avec des habits occidentaux au lieu d’en indiquer l’origine orientale? On a cherché à tirer les hommes hors de leur culture islamique au lieu de les encourager à rester des amis et admirateurs de Jésus.

Il aurait fallu dialoguer avec les musulmans, dit-on ailleurs, au lieu de disputer et de polémiquer. La grande controverse autour de ce qu’on appelle la contextualisation de l’Évangile, ou l’acculturation, résulte de cette dernière réflexion. On a cherché à adapter le message chrétien aux conceptions musulmanes. Le titre de Fils de Dieu devrait être abandonné, et nous devrions éviter de mentionner la doctrine de la Trinité pour affirmer l’unité de Dieu. Insister davantage sur l’humanité et la fraternité du Christ plutôt que sur sa divinité, souligner les similarités entre les deux croyances au lieu d’accentuer les divergences. On espère ainsi éviter tout conflit et attirer le musulman plus près de Jésus qui est fils de Marie.

Nous résumerons ici un exposé du pasteur Leon F. Blosser, présenté en novembre 1981. L’auteur rappelle, pour commencer, un article du grand théologien réformé Benjamin B. Warfield, datant de 1898 et intitulé Quelques dangers pour la vie missionnaire. Il énumérait cinq dangers courants. Parmi ceux-ci, celui du missionnaire converti à la religion de ses auditeurs, et le danger qui consiste à accommoder le christianisme aux modes de penser païens, dans l’effort de leur faire accepter le christianisme. En un mot, pour aplanir les difficultés on évacue totalement la foi chrétienne de son contenu spécifique. Nombre de missionnaires dans des pays musulmans, ajoutait Warfield, expliquaient le dogme chrétien de la Trinité de telle manière que le musulman n’avait aucune peine à l’admettre. La méthode de conversion par concession est, selon le grand théologien, une tentative pour tromper les hommes, pour leur faire croire que la foi chrétienne n’est pas du tout ce qu’elle semble être, qu’elle est bien plus facile à vivre que ne le pensent les hommes. Blosser, qui cite ces propos, souligne leur validité pour la situation présente, notamment depuis l’apparition de ce que l’on appelle la contextualisation de la mission. Le problème soulevé et exposé dans ce document est le suivant :

« Comment puis-je, moi qui suis né et élevé dans une culture donnée, prendre la vérité de la Bible qui s’adressait à une culture autre que la mienne et la communiquer actuellement à une culture différente, sans courir le risque de la falsifier et de la déformer? Et lorsque ce message est compris et reçu, comment faire pour associer les gens, qui appartiennent à une culture différente, à celle dont est issue la prédication de l’Évangile? Et comment adapter leurs mœurs et modes de vie à la nouvelle vie ecclésiale? Pour répondre à ces questions, on forgea le terme de contextualisation. Certes, on mit en garde contre le danger du syncrétisme. On réaffirma l’autorité de la Bible. Où réside alors le danger? Selon Blosser, il doit être débusqué du côté de la tentative de rendre la tâche missionnaire l’équivalent de la traduction de la Bible. La révélation accordée à l’Église est alors ramenée au même niveau que les formes culturelles propres, spécifiques, de ceux à qui on s’adresse. Ce faisant, on évacuait notamment toute théologie systématique sous prétexte qu’elle serait culturellement aliénée. On a réduit la révélation spéciale de la Bible au rang de la révélation générale, et la théologie systématique est ravalée au niveau d’une discipline relative et dont toute communication interculturelle devrait s’affranchir. Toute affirmation dogmatique et théologique se trouve en défaveur. La pensée, ou l’esprit religieux contemporain, craint comme la peste toute affirmation doctrinale, lui préférant ce qui est tangible et pratique, et qui peut se sentir dans une expérience immédiate. Ce qui n’empêche pas que les partisans de ce type de contextualisation établissent eux-mêmes, et de manière fort dogmatique, ce qu’ils considèrent comme communication transculturelle.
Ces quelques exemples de contextualisation suffiront pour indiquer le climat dans lequel un certain nombre de chrétiens, même du côté dit “évangélique”, envisagent le problème des rapports entre foi et islam. »

Il n’y a pas de doute que tous les efforts déployés en vue de l’accomplissement de la mission chrétienne ont leurs avantages. Les chrétiens devraient en toute humilité chercher toutes les voies pour pénétrer dans des forteresses et briser des barrières socioculturelles ou religio-philosophiques. Cherchant certes leur direction dans la Parole, ces réflexions n’ont pourtant pas produit les conversions escomptées en terre d’islam!

La religion musulmane est un système hautement développé, solide, avec un livre reconnu comme la révélation de Dieu, possédant une théologie parfaitement élaborée et une brillante culture historique. Elle contient des points avec lesquels tout chrétien pourrait être d’accord. Sa doctrine est certainement plus facile à saisir que le mystère chrétien de la Trinité ou celui des deux natures du Christ. Les pratiques prescrites sont bien plus aisées à mettre en pratique que la recherche chrétienne de la sanctification. N’importe qui peut les observer. Étant donné que, dans notre mentalité actuelle, ce qui vient en dernier devrait avoir priorité sur ce qui l’a précédé, on estime que l’islam, qui est apparu six siècles après le Christ, lui est forcément supérieur. Selon le Coran, l’islam est la révélation définitive accordée par Dieu aux humains. Aussi, la religion coranique est-elle considérée comme la plus parfaite de toutes, elle seule répondant à tous les hommes et aucune autre ne devant la supplanter.

Le Coran, considéré comme la Parole de Dieu, est par conséquent considéré comme infaillible, et tout enseignement contraire à celui-ci sera tenu pour faux. Si l’on parle au musulman du Christ comme étant le Fils de Dieu et faisant un avec lui, comme mort sur la croix, enseveli et ressuscité, lui disant qu’il n’a jamais prédit l’avènement de Mahomet, mais qu’il prévint ses disciples contre les faux prophètes, qu’il ressuscita d’entre les morts et qu’il sera le Juge de l’humanité, celui-ci rejettera soit la totalité du christianisme, soit au contraire, par un miracle de la grâce, les prétentions coraniques pour embrasser la foi au Christ. Mais lorsqu’on sait combien il est difficile d’abandonner des convictions acquises depuis sa plus tendre enfance, il n’est pas étonnant que le musulman préfère rester fidèle à l’islam.

Il estime aussi que le succès que remporte l’islam actuellement et le nombre de conversions opérées sont le signe infaillible de la bénédiction divine sur l’entreprise. Dieu approuve l’islam puisqu’il permet l’établissement d’un empire islamique! Le triomphe des musulmans serait-il possible sans l’approbation de Dieu?

5. La désaffection religieuse parmi les musulmans🔗

Dans le passé, quand un musulman rendait visite au missionnaire chrétien, il cherchait à lui prouver la supériorité de l’islam. De telles confrontations n’étaient pas toujours amicales; pourtant, elles offraient au chrétien l’occasion non seulement d’expliquer et de défendre sa foi, mais encore de démontrer de la patience et de l’amour. En tout cas, les musulmans s’intéressaient vivement aux affaires religieuses. Plus récemment cependant, il semble que comme résultat de l’extension de l’éducation sécularisée et de l’emploi de la radio, de la télévision et des affaires, le monde musulman ait été également atteint par la vague de la sécularisation, ce qui fait décroître passablement l’intérêt des musulmans pour la religion.

Ces « modernes » ne réciteront pas leurs prières ou n’observeront pas le Ramadan, même s’ils rencontreront toujours le chrétien pour discuter des affaires religieuses. À leurs yeux, l’islam demeure un héritage culturel précieux plutôt qu’une foi personnelle. La religion passe pour être un fardeau qu’ils ne cherchent pas à porter, quoiqu’ils soient prêts à en prendre la défense. On pourrait espérer que l’éducation moderne ainsi que d’autres contacts avec les pays occidentaux non musulmans favorisent la rupture des chaînes et libèrent les consciences de nombreux asservissements. De telles espérances ne sont pas toujours concrétisées. Ces musulmans pensent que la foi chrétienne est aussi lourde à porter que l’islam, sans se rendre compte qu’il s’agit d’une puissance qui libère. Ils ignorent que le joug du Christ est léger.

Mentionnons également le petit nombre d’ouvriers dans ce champ missionnaire. Lorsque le Seigneur Jésus vit les multitudes, il exhorta ses disciples à prier pour que le Maître de la moisson envoie d’autres ouvriers (Mt 9.37-38). S’il faut amasser la moisson, il faut un nombre suffisant de moissonneurs, ainsi que l’écrivait saint Paul (Rm 10.14). Ajoutée à d’autres difficultés déjà mentionnées, une raison importante pour la rareté des conversions dans le monde musulman consiste dans le petit nombre de missionnaires. Il y eut des croisades qui recrutèrent des milliers de zélateurs chrétiens pour combattre l’islam, mais combien de véritables missionnaires pour l’évangéliser? Le terrain est extrêmement ardu, aussi le zèle et les efforts des chrétiens ont-ils été déployés dans d’autres champs. Peut-être les chrétiens ont-ils failli, à de rares exceptions près, à se préoccuper des pays musulmans. On doit se rappeler les paroles du grand missionnaire : « Evangéliser n’est pas pour moi un sujet de gloire, car la nécessité m’en est imposée; malheur à moi si je n’évangélise! » (1 Co 9.16).

6. La résistance de l’ennemi🔗

Finalement, il existe un seul obstacle fondamental et universel à l’évangélisation et à la conversion du musulman, celui dont Jésus disait qu’il était l’œuvre de l’ennemi, de Satan. L’adversaire a cherché à écraser Jésus, même en citant la Parole de Dieu. Mais Jésus l’a emporté sur lui (voir Ép 6.12).

Les témoins du Christ savent que Satan déploie une activité incessante s’opposant à l’œuvre de rédemption. Il nous semble que Satan s’occupe plus particulièrement du champ islamique pour empêcher l’œuvre missionnaire chrétienne. Certains sont allés jusqu’à penser que l’islam était une œuvre de Satan, son invention la plus réussie pour égarer les hommes, que les révélations accordées à Mahomet, loin d’être issues de Dieu, ont été des illusions produites par l’adversaire. Puisque celui-ci est un menteur (Jn 8.44), tout enseignement contraire à la Parole prend son origine en lui, que ce soit en chaire chrétienne ou dans une mosquée arabe. Nous avons été prévenus : Satan vient tel un ange de lumière (2 Co 11.14), et, en parlant de ce qui est vrai et bon, il cherche à mettre à exécution ses funestes projets.

Tandis que la Bonne Nouvelle est proclamée aux musulmans, le dieu de ce monde sème la pagaille et la confusion (2 Co 4.4).

Lorsque l’invitation du Christ est adressée : « Venez à moi vous tous qui êtes fatigués et chargés et je vous donnerai du repos » (Mt 11.28), Satan en obscurcit les esprits, paralyse la volonté et empêche qu’on comprenne et se convertisse. Les chrétiens en pays d’islam connaissent ce qu’est la présence et l’action de Satan. Pourtant, ils doivent se rappeler que, dans ce conflit-là, la tête du serpent a déjà été écrasée sur la croix.

La mission chrétienne rencontrera en terre d’islam d’énormes difficultés. Mais le Christ nous dit qu’il nous sera accordé selon la mesure de notre foi. Aux hommes, ces choses sont impossibles, mais à Dieu, tout est possible.

Note

1Unité chrétienne, p. xx. Conclusion.