Cette fiche de formation a pour sujet la discipline exercée avec amour dans l'Église, par chacun des membres et par le ministère des pasteurs, des anciens et des diacres, en vue de vivre ensemble par la grâce et dans la sainteté.

Source: La discipline de l'amour. 8 pages.

La discipline et l'amour (4) - Pastorat et diaconat

  1. Discipline et amour
  2. Anciens et diacres
  3. Amour et discipline?
  4. Le débordement de la grâce
  5. Annexe – Anciens et diacres

Nous avons dit que chaque membre de l’Église a une part de responsabilité pour ce qui est de la discipline : dans sa vie d’abord, puis dans l’Église. Rappeler cela ne s’oppose pas au principe d’une responsabilité particulière qui est confiée aux ministères dans l’Église. Nous connaissons la position des réformateurs : affirmer le sacerdoce commun des croyants n’annule pas la reconnaissance des ministères donnés par Christ à son Église. Les ministères ne font pas partie du bien-être, mais de l’être de l’Église, car ils assument, ensemble, le ministère de Christ au sein de son Église — ce qui ne contredit pas le fait que toute l’Église assume le ministère de Christ sur cette terre.

Nous n’allons pas examiner les cinq ministères d’Éphésiens 4 (malgré l’intérêt qu’il y aurait à le faire), mais les deux ministères de base que sont les anciens et les diacres. En un sens, les ministères d’Éphésiens 4 sont comptés parmi les anciens, selon ce qu’écrit Pierre (1 Pi 5.1). La salutation de la lettre aux Philippiens comme le chapitre 3 de la première lettre à Timothée nous autorisent à retenir ces deux ministères-là, en tout cas au niveau de l’Église locale1.

Je retiens ce sujet à cause de la part qui est confiée aux ministères dans l’Église, mais aussi parce que le diaconat touche la question du soutien aux pauvres qui correspond à une réelle préoccupation aujourd’hui. Cela se traduit par la mise en place, en maints endroits, de services d’entraide, actions sociales et autres aides humanitaires. Comment s’y reconnaître? Quelle discipline en la matière? Quel est le rôle de l’Église à cet égard? On est bien dans le sujet : discipline et amour.

1. Discipline et amour🔗

Il se peut que la position que je vais présenter ici étonne tel ou tel parmi vous. Plus un sujet est délicat à aborder et plus les enjeux sont importants, plus il importe de vérifier les présupposés sur lesquels on va construire son engagement. Si cela n’est pas fait sérieusement, beaucoup de nos engagements risquent d’être hasardeux. L’apôtre Paul (mais pas lui seulement) nous démontre combien le fondement doctrinal (le rocher de l’enseignement biblique et pas seulement quelques versets) doit sous-tendre la mise en pratique. Ce lien fort, contraignant, permanent, c’est peut-être la discipline primordiale que nous avons à entretenir. Ne croyons pas que ce soit si facile.

Mon propos se décline, par commodité, en sept propositions que j’expose succinctement.

a. La Bible n’est pas anthropocentrique, elle est christocentrique🔗

La finalité, c’est Christ. Le salut de l’homme est un moyen vers cette finalité. « Tout a été créé par lui et pour lui. Il est la tête du corps de l’Église […] afin d’être en tout le premier » (Col 1.16-18). De même, la finalité de l’Église, ce n’est pas l’Église, c’est Christ (1 Co 11.3). Cela me paraît capital (c’est le cas de le dire) et peut nous éviter de faire de l’Église un club ou une idole.

b. Christ et l’Église (avec tous ses membres), c’est tout un🔗

Christ et tous les membres de l’Église constituent un tout (Rm 12.4-5, 13; 1 Co 12.12, 27). La préoccupation principale (unique) des lettres de Paul (de toute l’Écriture) se situe là : non pas l’humanité, mais le peuple racheté (Za 2.8; 1 Co 6.4; 15.23). « Je supporte tout à cause des élus » (2 Tm 2.10). On est sur un terrain qui ne peut être assimilé à celui des Droits de l’homme.

c. Les ministères sont pour l’Église🔗

Éphésiens 4 le dit sans ambiguïté. Christ nourrit et prend soin de son Église de multiples manières, mais notamment par les ministères suscités en son sein. L’objectif n’est pas l’assujettissement, mais « l’équipement des saints », en vue de l’édification du corps de Christ, en vue de « professer la vérité dans l’amour ». Noter que la notion biblique d’édification est toujours communautaire : édifier, c’est construire, ce n’est pas se faire du bien (Ép 4.12-16; 1 Pi 2.5).

d. Ce que l’on fait à un membre du peuple de Dieu, on le fait à Dieu🔗

Ce qu’on fait à un membre de Christ, on le fait à Christ. C’est là, à mes yeux, une clé de lecture pour toute l’Écriture (Za 2.8; Ac 9.5; Mt 25.40 [avec ses textes parallèles : Mt 10.42; Mc 9.40]; Hé 4.10…). Les implications pratiques de ce principe sont innombrables. Je mentionne ici l’extrême importance de la douceur dans la pratique de la répréhension fraternelle, mais aussi du soutien aux frères en difficulté. Toute personne fragilisée (seule, démunie, malade ou âgée) est susceptible de réagir avec une extrême sensibilité aux paroles et aux gestes que l’on aura envers elle. La condescendance, les conseils faciles, les remarques déplacées peuvent traduire un esprit de supériorité ou de domination qui s’avérera blessant. L’amour pur et le désintéressement doivent caractériser la démarche des diacres en particulier, et avec eux de tous les membres de l’Église.

e. Les uns les autres🔗

Les expressions « les uns les autres », « réciproquement », « mutuellement »… s’appliquent toujours aux relations à l’intérieur du peuple de Dieu. Je crois aussi que la quasi-totalité des fois où le mot « tous » est employé dans le NouveauTestament, il s’applique aux élus, aux saints : tous, mais eux seulement; eux seulement, mais tous. Il y a là, pour le moins, une piste importante en matière de discipline. Deux observations :

  • L’amour entre les chrétiens est (normalement) le même que celui de Christ pour chacun de nous (Jn 13.34-35).
  • La juxtaposition des propositions b et d permettent de dire ceci : Quand j’aime mon frère chrétien, c’est Christ que j’aime à travers lui, et c’est Christ qui l’aime à travers moi. C’est grand!

f. Les frères🔗

Le terme « frère » désigne logiquement ceux qui ont le même père. Cela concerne donc Israël et l’Église2. Il n’y a pas d’exception. Ainsi, à l’amour fraternel correspond la formule paulinienne : l’assistance destinée aux saints (Rm 12.13; 1 Co 16.1; 2 Co 8.4; 9.1, 12). Par ailleurs, je suis de plus en plus persuadé que le terme « prochain » désigne lui aussi les membres du peuple de Dieu. Dans un sens large sans doute, mais quand même; y compris dans le sommaire de la loi; y compris dans la parabole du bon Samaritain3. Écoutons seulement ce que dit Paul en Éphésiens 4.25 : « Que chacun parle selon la vérité à son prochain, car nous sommes membres les uns des autres. » Ici, je demanderais seulement qu’on n’écarte pas trop rapidement cette proposition, sous le prétexte qu’elle est rarement formulée.

g. Les pauvres, les veuves, les orphelins, les petits🔗

Je crois que dans toute la Bible, chaque fois qu’il est question des pauvres, des veuves, des orphelins, des petits, etc., il s’agit des membres du peuple de Dieu. Je pourrais démontrer cela, je crois. « Ils nous recommandèrent seulement de nous souvenir des pauvres » (Ga 2.10; voir Rm 15.25-26). Actes 11.29 permet de comprendre qu’il s’agit des pauvres de l’Église de Jérusalem4. De même, les veuves d’Actes 6 sont celles de l’Église, pas celles de la ville…

Tout cela est porteur d’implications pratiques, nombreuses. Notamment en matière de discipline.

2. Anciens et diacres🔗

Nous l’avons vu : Philippiens 1.1 et 1 Timothée 3 associent ces deux ministères. On pourrait également citer 1 Corinthiens 12.28 qui associe le don de gouvernance et celui du service. Nous remarquons que les recommandations qui les concernent sont très semblables; seulement, pour les diacres, il n’est pas fait mention de l’aptitude à enseigner. Par contre, ces deux ministères revêtent un caractère spirituel (Ac 6.3; 1 Tm 3.9) et ont en commun de contribuer à l’unité spirituelle de l’Église qui, nous l’avons vu, est indissociable de l’amour fraternel et de la sainteté de vie.

En effet, qu’en est-il de l’unité spirituelle de l’Église si, après avoir été bien enseignés, certains membres sont honorés et d’autres méprisés (Jc 2.1-4), si certains sont dans l’abondance alors que d’autres manquent du nécessaire (1 Jn 3.16-18)? Regardons ce que dit Paul en 1 Corinthiens 12.24-25 : « Afin que les membres aient également soin les uns des autres, de telle sorte qu’il n’y ait pas de division dans le corps. » Noter qu’il ne s’agit pas ici de division doctrinale, mais d’une division due au fait que certains parmi les frères sont négligés et donc attristés! La communion est en jeu; la bénédiction se perd; la parole est démentie.

« Il n’y avait parmi eux aucun indigent » (Ac 4.34). En d’autres termes, « l’assistance destinée aux saints » (Rm 15.25; 2 Co 8.4; 9.1, 12) contribue à l’unité de l’Église autant que la prédication. Elle manifeste l’amour « en action et en vérité » (1 Jn 3.18). De plus, cette assistance est source de nombreuses actions de grâce (2 Co 9.12), ce qui a un rapport direct avec le culte! Le service (mutuel) des saints est une preuve de maturité spirituelle de l’Église (Rm 16.1-2) et un gage de sa croissance (Ac 2.47; 16.5).

J’aborde rapidement six domaines liés au ministère des anciens et des diacres.

a. La vocation🔗

Dieu adresse vocation à des hommes et des femmes qu’il équipe. La vocation se démontre par le désir de servir pour répondre à un besoin, de manière généreuse, désintéressée. L’Église doit susciter et discerner les vocations en son sein. Toute vocation bien assumée engendre des vocations. Est-il utile de rappeler que si c’est à l’Église de reconnaître les vocations, c’est Dieu qui les suscite, ce qui implique un discernement de son appel, confirmé de manière collégiale.

Pour les ministères de nature pastorale, le discernement s’attachera notamment à la fidélité en matière de doctrine et de discipline personnelle.

Pour les ministères de nature diaconale, le discernement s’attachera notamment à la discipline personnelle et à l’esprit de service. Prendre soin de personnes fragiles comporte des risques pour soi-même et les autres. De nombreuses précautions sont nécessaires qui doivent devenir des réflexes.

b. L’importance des modèles🔗

Il est important de rappeler la dimension du « pastorat mutuel » et de la diaconie qui implique l’ensemble des membres de l’Église, sans exception. Cependant, tous ne sont pas pasteurs ou anciens et tous ne sont pas diacres (diaconat). Le critère de reconnaissance à retenir est sans doute celui du modèle (1 Tm 3; 4.12). Certes, le modèle est encore en chemin; c’est d’ailleurs en cela aussi qu’il est un modèle! Mais il a déjà démontré une certaine maturité. Il a été éprouvé. Il a pris au sérieux les mots ou expressions « irréprochable », « irrépréhensible », « il faut que », « veiller sur soi-même » (1 Th 2.10). Ces mots, peu faciles à prononcer, donnent à l’autorité des ministères (et du Seigneur) son assise, sa légitimité. Or, l’autorité est hautement secourable en cas de difficulté. Les modèles dans l’Église valent bien des prédications!

c. Une nécessaire unité🔗

Pasteurs et anciens doivent être unis entre eux, sans dissimulation, sans médisance. Je crois qu’une forme d’unanimité est souhaitable dans les prises de décision, chacun étant à même de s’exprimer. Il devrait en être de même pour les diacres. Ainsi, les différentes délégations auxquelles on procédera ne mettront pas à mal la vision commune.

d. La complémentarité🔗

Anciens et diacres doivent également être unis et complémentaires — peut-être d’une manière semblable à celle des conjoints dans un couple. Christ a enseigné et secouru. Nous en avons un rappel émouvant dans le témoignage que Paul donne en 1 Thessaloniciens 1, alors qu’il se compare tour à tour à une nourrice (paradigme du ministère diaconal) et à un père (paradigme du ministère pastoral).

Ces deux ministères ont besoin l’un de l’autre, s’appuient l’un l’autre. Un membre fragile de l’Église (âgé, malade, seul ou démuni) qui est secouru par une initiative de nature diaconale sera réceptif à l’instruction de la Parole de Dieu, désireux de la mettre en pratique et de contribuer, selon ses moyens, à l’édification.

e. La constance🔗

Est-il besoin de tout organiser? Non. C’est pour cela que nous avons parlé de pastorat mutuel et de diaconie. Mais certains services doivent être organisés, être l’objet d’une veille attentive. Une visite pastorale par an ne fait pas avancer grand monde. Bien des situations nécessiteront un suivi pastoral, une régularité, de la constance. Il en est de même pour le diaconat. Certains soutiens se situeront sur du long terme : ils seront exigeants en temps et peut-être en argent. Comment l’Église va-t-elle faire face à sa responsabilité sans s’épuiser, sans se perdre?

f. Le repas du Seigneur🔗

Comme nous l’avons déjà dit, la vie de l’Église peut toute entière se construire autour de la discipline pastorale concernant la Cène : instruction, accueil, mise en garde, responsabilité, grâce, encouragements, implications communautaires, dons spirituels, ministères, hospitalité, soutien…

3. Amour et discipline?🔗

Ces deux mots semblent s’exclure l’un l’autre. Est-ce réellement le cas? Tout dépend du sens que l’on donne à chacun d’eux! Quelques éléments de réflexion :

L’amour agapé est l’amour parfait. C’est l’amour de Dieu. C’est l’amour qui a été révélé en Christ et que les chrétiens ont reçu. C’est l’amour que le Saint-Esprit verse dans le cœur des rachetés (Rm 5.5). C’est de cet amour que les chrétiens sont appelés à « s’aimer les uns les autres, comme ils ont été aimés » (Jn 13). Ce « comme » n’indique pas une imitation, mais une conséquence possible, logique, dans l’ordre de la grâce.

Dieu aime son peuple d’un amour particulier. Personnellement, je ne vois pas mentionné explicitement l’amour de Dieu pour tous les hommes5. Mais je vois que Christ a aimé « les siens », qu’il a donné sa vie « pour ses brebis », qu’il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie « pour ses amis ». Et les ennemis? C’était nous, son peuple6 (Rm 5.8)!

Une comparaison peut s’avérer éclairante : un homme aime-t-il sa femme comme les autres femmes? Une femme aime-t-elle ses enfants comme les autres enfants? Tel est l’amour de Dieu pour les siens.

Comment cela va-t-il se traduire dans le domaine de la diaconie, du diaconat? Par la mise en place d’une nécessaire discipline, sans laquelle la communauté pourrait rapidement se trouver ruinée! Tant que l’amour fraternel demeure dominical et le soutien symbolique, il n’y a pas grand danger. Pas grands fruits non plus. Mais si une Église entend vivre l’amour et le soutien fraternels de manière conséquente, alors elle s’apercevra qu’un accompagnement pastoral et une discipline s’avèrent absolument nécessaires.

D’innombrables exemples pourraient être évoqués ici. Telle personne nouvellement arrivée dans l’Église est présente à chaque rencontre. En difficulté financièrement, elle est soutenue par la communauté. Cependant, il apparaît que cette personne effectue des achats inconsidérés et se plaint si quelqu’un ne répond pas entièrement à son attente. Que faire? Trois hypothèses se présentent. Il est possible que cette personne passe par une période de trouble et qu’il faille user de patience envers elle. Il est possible que cette personne soit peu instruite de la Parole de Dieu et agisse par ignorance. Il se peut enfin qu’elle ne soit pas réellement convertie et qu’elle ait trouvé auprès de cette Église une situation avantageuse pour elle. Pour chacun de ces trois cas, une mesure appropriée s’impose.

Ainsi, il y a des mesures de restriction, des conditions à remplir, des délais à observer, des évaluations qui sont nécessaires dans la gestion de l’entraide fraternelle. L’épisode d’Ananias et Saphira en Actes 5 en est une illustration frappante. Ce n’est pas pour nuire, c’est pour aider. On pourrait évoquer la question de l’interdit (Nb 15.32-36) qui maintient tout le peuple en situation de captivité, de défaite. On pourrait le dire ainsi, peut-être : il y a des personnes qui attendent et qu’il ne nous est pas possible d’atteindre ou d’accueillir parce que d’autres personnes sont là qui ne devraient pas y être… On comprend que tout cela doit être appréhendé avec autant de précautions que de courage.

4. Le débordement de la grâce🔗

La croissance numérique de l’Église est en partie conditionnée par sa croissance en maturité, comme il est écrit dans le livre des Actes : « Les Églises se fortifiaient dans la foi et augmentaient en nombre de jour en jour » (Ac 16.5).

Cette maturité se démontre notamment par l’attachement à ce triple objectif dans la vie du chrétien et dans la vie de l’Église. Nous remarquons que chacun d’eux est accompagné d’une promesse.

L’unité spirituelle : « Qu’ils soient un afin que le monde croie » (Jn 17).

L’amour fraternel : « À l’amour que vous aurez les uns pour les autres, tous sauront… » (Jn 13).

La sainteté de vie : « … des enfants de Dieu irrépréhensibles au milieu d’une génération perverse et corrompue parmi laquelle vous brillez comme des flambeaux dans le monde » (Ph 2.15); « Ayez au milieu des païens une bonne conduite, afin qu’ils remarquent vos bonnes œuvres » (1 Pi 2.12).

La croissance par débordement est un fruit naturel de la communion de chaque chrétien avec Dieu et avec ses frères et sœurs dans la foi. Tout chrétien « en bonne santé » désire ardemment cette double communion et se rend immédiatement compte quand elle est « abîmée ».

Si chaque chrétien, aimé de Dieu, aime ses frères et sœurs chrétiens de cet amour et si, en vertu de la réciprocité propre au peuple de Dieu, il est aussi aimé de cet amour, alors une sorte de perfection de la grâce se manifestera, qui sera la démonstration de la présence vivante et agissante du Seigneur au milieu de son peuple7. Par une telle démonstration, beaucoup seront touchés à salut, « en aussi grand nombre que le Seigneur notre Dieu les appellera » (Ac 2.39).

5. Annexe
Anciens et diacres🔗

Quelques références historiques

La Confession de foi de La Rochelle (1559) le dit explicitement dans son article 29 :

« Quant à l’Église véritable, nous croyons qu’elle doit être gouvernée selon l’ordre établi par notre Seigneur Jésus-Christ : à savoir qu’il y ait des pasteurs, des anciens (surveillants) et des diacres, afin que la pureté de la doctrine y soit maintenue, que les vices y soient corrigés et réprimés, que les pauvres et tous les affligés soient secourus dans leurs besoins, que les assemblées se tiennent au nom de Dieu et que les adultes y soient édifiés, de même que les enfants. »

Le professeur Émile Doumergue, qui fut le doyen de la faculté de théologie de Montauban, écrit dans un rapport en 1929 :

« Comme organisation, dès son origine, notre Église posséda un Conseil presbytéral et un Diaconat, deux pieds dirai-je, et deux mains d’un même corps. Tout de suite, ce qui s’était passé pour le Conseil presbytéral se passa pour le diaconat. De nouveau, se dressant contre la pratique catholique, l’Église réformée restitua aux diacres, devenus de simples domestiques du culte, la dignité que l’Évangile leur avait donnée : le soin des pauvres. Il importe de noter les propres paroles de Calvin pour constater avec quelle pleine conscience notre Église a opéré cette double révolution : “Voulons-nous montrer qu’il y a réformation entre nous? Il faudrait qu’il y eût des diacres qui eussent le soin des pauvres.” »
« Ne croyez pas que je sois aveugle et ne voie pas l’effort d’action qui se manifeste un peu partout dans nos milieux religieux, dans les milieux protestants, et en particulier dans nos milieux protestants réformés. N’est-ce pas le protestantisme réformé qui est à la tête des œuvres dites sociales, du christianisme dit social? Je suis loin de contester que beaucoup de ces œuvres, si diverses, entreprises avec tant d’ardeur et poursuivies avec tant de persévérance, ne puissent être bonnes, utiles.
Seulement, voici ce qu’il m’est impossible de ne pas constater. Ce renouveau des œuvres plus ou moins religieuses a coïncidé avec le moment où notre Église était le plus dépourvue de ses organes essentiels d’action, de ses anciens Conseils presbytéraux et de ses anciens Diaconats. De plus, ce renouveau a coïncidé avec la crise religieuse qui a séparé de plus en plus l’action de l’idée, les œuvres religieuses des doctrines fondamentales de notre ancienne Église, et c’est ainsi que, tout naturellement, l’effort des œuvres s’est établi à côté de l’Église, hors de l’Église…
À mesure que les bonnes œuvres se multiplient et se développent, l’Église s’évide, s’étiole. Elle perd de plus en plus ce qui attire, ce qui émeut les cœurs, ce qui passionne; l’Église, corps étriqué, devient de plus en plus impropre à exercer cette cure d’âmes pleine, incessante, ardente, universelle, exercée par ses anciens Conseils presbytéraux et ses anciens Diaconats. »

Notes

1. Voir l’annexe Anciens et diacres.

2. Dieu est le Créateur de tous les hommes. En Christ, il devient le Père des croyants.

4. Le SEL (association protestante de solidarité internationale) s’est autorisé à faire de cette formule « Souvenez-vous des pauvres » un slogan pour mobiliser les chrétiens contre la pauvreté dans le monde. C’était bien trouvé, mais pas fondé bibliquement.

5. Chacun pensera à Jean 3.16 ici, mais il n’est pas évident que « le monde » signifie « tout le monde ». Voir Jn 17.21. Mais je reconnais que c’est là un sujet difficile.

6. De même pour nous : je crois que les ennemis en question sont les membres du peuple de Dieu en situation d’inimitié (comparer Mt 5.21-26, 43-44; 1 Co 6.1-11).

7. L’amour fraternel est une des marques visibles de la régénération (1 Th 3.12-13; 1 Pi 4.8-11; 1 Jn 3.10; 4.7; 4.21 à 5.1).