Cet article sur Exode 20.17 a pour sujet le 10e commandement qui interdit la convoitise, source de toute idolâtrie, et qui demande un coeur pur. La publicité attise souvent la convoitise.

Source: Les dix commandements (ÉK). 4 pages.

Les dix commandements (13) - Le dixième commandement

« Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain; tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni rien qui appartienne à ton prochain. »

Exode 20.17

Nous voici parvenus au dixième commandement, le dernier du Décalogue, que nous lisons dans l’Ancien Testament à deux reprises : d’abord au chapitre 20 du livre de l’Exode, ensuite au chapitre 5 du livre du Deutéronome. Ce dixième commandement est formulé ainsi :

« Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain; tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni rien qui appartienne à ton prochain » (Ex 20.17).

Le dernier commandement du Décalogue souligne un aspect de la loi que nous avons relevé à plusieurs reprises : la loi s’adresse à l’homme intérieur, à ses pensées les plus profondes, celles qu’à part lui-même, seul Dieu connaît et juge. Ce sont ces pensées qui peuvent mener l’homme à violer des commandements comme : « Tu ne commettras pas de meurtre, tu ne déroberas pas, tu ne commettras pas d’adultère. » Le Seigneur Jésus-Christ l’a rappelé à ses interlocuteurs préoccupés par la pureté extérieure effectuée par des rites consacrés, lorsqu’il leur a dit : « C’est du cœur que viennent les mauvaises pensées, meurtres, adultères, prostitutions, vols, faux témoignages, blasphèmes » (Mt 15.19). À cet égard, le Catéchisme de Genève, dans son explication du dixième commandement, est très explicite. Voici le passage concerné aux questions 212 à 214 :

« Toute la loi est d’ordre spirituel : nous l’avons rappelé à chaque commandement. Ils ont tous pour but non seulement de régler notre comportement extérieur, mais d’agir sur les dispositions de notre cœur. Que nous dit donc de plus ce commandement? — Dans les neuf autres, le Seigneur voulait gouverner nos intentions et nos sentiments. Ici, il impose sa loi à des pensées non encore formulées, mais qui portent déjà en elles les germes de la convoitise. »
« Veux-tu dire que les moindres tentations qui s’insinueraient dans le cœur des fidèles, ou leur viendraient occasionnellement à l’esprit, seraient coupables, même s’ils ne leur cédaient en rien, mais au contraire leur résistaient? — Un fait est certain : toute pensée mauvaise, même lorsqu’on se garde d’y céder, vient de la corruption de notre nature. En tout cas, je dis que ce commandement condamne les désirs malsains qui flattent et séduisent le cœur, sans pour autant conduire à des intentions précises et délibérées. »
« Ainsi, Dieu condamne les mauvaises pensées auxquelles les hommes se laissent si complaisamment aller. Mais son exigence va plus loin encore : la pureté de nos cœurs doit être telle que nul désir coupable — porte ouverte au péché — n’y ait le moindre accès. »

Je citerai également ce que dit le Catéchisme de Heidelberg au sujet du dixième commandement :

« Que nous ordonne le dixième commandement? — De n’avoir jamais, dans notre cœur, la moindre envie ou pensée contraire à la loi de Dieu, mais de détester en tout temps le péché et de prendre plaisir à toute justice. »

En parlant de la sorte, le Catéchisme insiste sur la totalité de la loi, que la convoitise transgresse par excellence. Car la convoitise, quel que soit son objet, est la source de toute idolâtrie.

En ce sens, le dixième commandement fait écho au premier, qui, vous vous en souvenez, défend d’avoir un quelconque autre Dieu que l’Éternel, le Dieu qui se révèle dans sa loi. La convoitise nous ramène aussi au début de l’histoire de l’humanité, avec la tentation du serpent. Cette tentation consistait à convoiter le statut divin : « Dieu sait que le jour où vous mangerez du fruit de l’arbre, vous serez comme des dieux », a susurré le serpent à Ève (Gn 3.5). Et, nous rapporte le chapitre 3 du livre de la Genèse : « La femme vit que l’arbre était bon à manger, agréable à la vue et propre à donner du discernement. Elle prit de son fruit et en mangea; elle en donna aussi à son mari qui était avec elle, et il en mangea » (Gn 3.6). Tentation et convoitise vont en effet de pair : elles sont l’œuvre du tentateur, qui s’oppose systématiquement à Dieu, mais que Dieu a déjà vaincu pour nous dans la personne de son Fils Jésus-Christ.

Ce rapport entre tentation et convoitise est mis en évidence au début de la lettre de Jacques, dans le Nouveau Testament, lorsque Jacques écrit :

« Que personne, lorsqu’il est tenté, ne dise : C’est Dieu qui me tente. Car Dieu ne peut être tenté par le mal et ne tente lui-même personne. Mais chacun est tenté, parce que sa propre convoitise l’attire et le séduit. Puis la convoitise, lorsqu’elle a conçu, enfante le péché; et le péché, parvenu à son terme, engendre la mort » (Jc 1.13-15).

Une question se pose : les autorités publiques peuvent-elles punir des intentions qui n’ont pas débouché sur des actes concrets, comme le meurtre? Peut-on faire des procès d’intention? Dans certains cas, le désir ou l’intention devient si manifeste qu’il leur est licite de le faire, par exemple dans le cas d’appels à la haine ou à la spoliation d’une partie de la population. Dans le même ordre d’idée, les tentatives d’insurrection violentes peuvent être réprimées lorsqu’elles menacent la société tout entière. La question qui se pose bien sûr est de savoir qui punit l’État lorsque celui-ci convoite le bien de ses sujets ou encore les territoires de pays voisins.

Le récit biblique du roi Achab convoitant la vigne de son sujet, Naboth, est exemplaire à cet égard (1 R 21). Naboth refuse de vendre au roi l’héritage de ses ancêtres. La reine Jézabel, pour satisfaire la convoitise de son époux royal, fait écrire des lettres au nom d’Achab, les fait sceller du sceau royal et les fait porter aux responsables de la ville où habite Naboth. Dans ces lettres, elle leur ordonne de convoquer le conseil de la ville, de faire placer Naboth au premier rang de l’assemblée et de faire venir de faux témoins. Ceux-ci accuseront faussement Naboth d’avoir maudit Dieu et le roi, crime passible de mort d’après la loi de Dieu, et Naboth sera immédiatement condamné et lapidé. Ce plan criminel est exécuté à la lettre, et, une fois Naboth mort, Achab peut se rendre dans la ville de Jizréel et prendre possession de la vigne de Naboth qu’il convoitait avec tant d’ardeur. Dans cet épisode, non seulement le dixième commandement a été transgressé, mais aussi le sixième (« tu ne commettras pas de meurtre »), le huitième (« tu ne déroberas pas ») et le neuvième (« tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain »). Sans parler du troisième (« tu ne prendras pas le nom de l’Éternel, ton Dieu, en vain »), car les faux témoins dans ce procès inique et arrangé de toutes pièces ont prêté serment au nom de Dieu.

Le dixième commandement interdit-il tout désir dans le cœur de l’homme? Pas du tout. La Bible ne recommande pas l’absence de désir ou d’émotions, mais condamne les désirs qui nuisent aux autres ou à soi-même. Il est tout à fait légitime de désirer de bonnes choses, comme une nourriture saine, un époux ou une épouse, une éducation supérieure, un toit pour sa famille, une carrière où l’on peut exercer les talents accordés par Dieu pour le service des autres, un voyage d’agrément, etc. Cependant, le cœur de l’homme étant devenu corrompu après la chute, ces désirs légitimes sont facilement transformés en idolâtrie, et c’est précisément ce qu’interdit le dixième commandement.

Jésus-Christ nous éclaire merveilleusement là-dessus, lorsqu’il enseigne : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données en plus » (Mt 6.33). Tous nos désirs doivent être soumis au motif du Royaume de Dieu et sa justice. Cela veut dire que la loi de Dieu doit régner dans nos cœurs et purifier nos désirs. Ceci implique que nos désirs doivent bien souvent être soit réprimés, s’ils ne sont pas conformes à cette loi, soit réformés pour que le motif du Royaume et de sa justice devienne vraiment notre priorité et guide notre cœur, nos yeux et nos sens.

Mais, que dire de la publicité commerciale qui a envahi notre vie et nous incite à désirer posséder toutes sortes d’objets de consommation? Certes, elle est parfois très subtile et joue avec beaucoup de force de persuasion sur les fibres sensibles des consommateurs. La publicité dont les médias modernes nous entourent est-elle légitime? Faut-il rejeter en bloc cette manière de présenter les produits commerciaux aux acheteurs potentiels? Il serait exagéré de soutenir cette position. Il est légitime qu’un produit de qualité soit présenté sous un jour avantageux aux consommateurs, pour autant qu’il ne s’agisse pas d’une publicité mensongère qui trompe le public sur la qualité du produit. L’existence de la publicité souligne aussi la responsabilité de chacun de ne pas se laisser emporter par une convoitise idolâtre. Il serait très naïf de croire qu’en supprimant la publicité, on supprime en même temps la convoitise. Celle-ci n’a pas attendu l’émergence des techniques publicitaires modernes pour se manifester dans le cœur de l’homme. Cependant, il est tout aussi clair que de nombreux messages publicitaires rejettent plus ou moins ouvertement les normes présentées dans la loi de Dieu. Le produit présenté dans la publicité est justement dépeint comme quelque chose qui doit être convoité de manière idolâtre. Le corps de la femme est souvent employé comme technique pour souligner cette convoitise. Ici, il est évident que le septième commandement (« tu ne commettras pas d’adultère ») est aussi transgressé.

Vous le voyez, la portée du dixième commandement est très étendue et couvre en fait tous nos désirs intérieurs. Comme je l’ai mentionné au début de cette émission, ce commandement fait écho au tout premier, qui défend d’avoir d’autre dieu que le seul vrai Dieu, celui qui se révèle dans sa loi et en Jésus-Christ. Dans le prochain article, nous méditerons sur le contenu général de la loi et sur la relation entre la loi et l’Évangile.