Cet article sur Exode 20.16 a pour sujet le 9e commandement qui interdit le mensonge et le faux témoignage et nous demande de protéger la réputation de notre prochain. Jésus est venu rétablir la vérité sur Dieu.

Source: La loi de la liberté - Méditations sur le Décalogue. 4 pages.

Exode 20 - Le faux témoignage - 9e commandement

« Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain. »

Exode 20.16

« Le problème de la véracité dans le Décalogue en particulier et dans l’Écriture sainte en général n’est pas un problème intellectuel. La véracité est directement commandée par l’extraordinaire et mystérieuse présence à nos côtés de notre prochain. Elle n’est même pas avant tout une affaire de comportement individuel et privé. Elle nous engage publiquement à un comportement précis envers l’autre. »

Aussi, le neuvième commandement n’interdit pas le mensonge en général, mais place l’accent sur le « faux témoignage ».

« C’est ainsi qu’il approfondit les commandements qui le précèdent. Le faux témoignage, le mensonge contre le prochain, la médisance, les jugements injustes sont une forme raffinée de l’irrespect et du vol. La médisance porte atteinte à l’autorité, à la renommée de notre prochain; les mensonges et les insinuations sont source d’adultère, empêchant mon prochain de jouir de la considération à laquelle, selon l’humanité, il peut prétendre auprès des autres, et sont à l’origine d’un incontestable préjudice qui l’atteint dans sa vie et dans ses droits » (Pierre Marcel).

Peut-être nous nous sommes si bien accoutumés à la présence du faux témoignage et du mensonge autour de nous que nous sommes surpris de lire un commandement particulier à ce sujet. Après tout, diront certains, pourquoi tant de scrupules pour une affaire aussi triviale? Devrait-elle commander une prescription aussi nette et tranchée? Quel mal y aurait-il à user d’une certaine liberté sur le compte d’autrui; bavarder un peu sur sa personne; parler de tel ou tel bruit qui court quand même sans notre concours? Il est vrai que les circonstances extérieures nous incitent, parfois à notre insu, à nous adapter à une atmosphère plutôt intolérable. Des façons d’agir et de parler s’imposent à nous.

La diplomatie et ses subtiles tromperies, la presse à sensation et ses grossières calomnies, le mensonge dans les affaires, la publicité malhonnête vantant des qualités douteuses, la petite actualité polluée par des racontars mesquins, les insinuations malveillantes sur telle ou telle vedette du jour, etc., etc., nous ont rendus insensibles au faux témoignage. Notre intérêt, il faut dire notre zèle pour la vérité, s’estompe lâchement. Slogans politiques dans les pays démocratiques, lavage de cerveau sous les régimes totalitaires, autant de procédés qui finissent par conditionner l’esprit du public, qui cesse alors de réagir avec un sain jugement critique.

Peut-être, après tout, sommes-nous heureux tant que les méfaits des méchantes langues ne nous atteignent pas directement… Car, lorsque cela nous arrive, avec quelle énergie ne nous défendons-nous pas! Lorsque son amour-propre est blessé, même superficiellement, celui qui se divertit au détriment de l’autre se dresse comme une bête féroce pour se venger. Que de luttes acharnées pour rétablir la réputation perdue, que d’amertume et de désolation pour l’honneur bafoué!

Dieu demande que tout homme jouisse de l’honneur qui lui est dû et d’une bonne réputation parmi ses semblables. Comme dans le troisième commandement, il veille sur la bonne réputation de son nom, ainsi défend-il ici celle de l’homme qu’il a créé selon son image. D’après l’Écriture, celui qui a perdu sa bonne réputation a perdu quelque chose de vital. Il est condamné à un isolement dans la vie et au milieu de la société. « La renommée est préférable à de grandes richesses », nous dit le livre des Proverbes (Pr 22.1). Le faux témoin est donc aussi coupable vis-à-vis de l’homme que le voleur ou que le meurtrier.

C’est pourquoi Dieu veut exercer sur nous un contrôle plus efficace qu’une machine à détecter le mensonge! Sa Parole est cet outil incomparable qui, semblable à une épée à deux tranchants, divise l’être intérieur et descend jusqu’au tréfonds de notre cœur, où se tapit le mensonge qui sape et qui ruine nos relations avec notre prochain et détruit notre authenticité humaine. Dieu nous commande, face à tous les mensonges et à tous les faux témoignages de ce monde, de proclamer la seule vérité de la Parole qui annonce sur les êtres et les événements à la fois son jugement et la grâce qu’il offre en Jésus-Christ, l’anéantissement de ce monde des ténèbres, mais aussi l’apparition d’un monde nouveau.

Car l’origine et la source de tout mensonge sont plus profondes que nous ne pourrions le croire. Notre tromperie n’est ni apparente ni superficielle. Elle n’est pas due aux circonstances extérieures ni à la difficulté de vivre sous la pression des événements. Elle relève du domaine obscur des forces du mal, qui nous travaillent sans cesse. Celles-ci mènent une lutte dès le début de l’histoire et s’opposent à toute vérité. Le monde est devenu leur champ de bataille et la vie de tout homme est l’enjeu de ce conflit gigantesque. Ce n’est qu’au prix d’un engagement total que la vérité pourra être maintenue. Jésus révéla la nature profonde du mensonge lorsqu’un jour il déclara à ses adversaires :

« Vous avez pour père le diable et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement, et il ne s’est pas tenu dans la vérité, parce que la vérité n’est pas en lui. Lorsqu’il profère le mensonge, ses paroles viennent de lui-même, car il est menteur et le père du mensonge. Et moi, parce que je dis la vérité, vous ne me croyez pas! » (Jn 8.44-45).

Un tel langage heurte et agace. On aurait volontiers substitué à celui-ci un faux témoignage, pourvu qu’il ne blesse pas l’orgueil…

Mais Jésus, l’homme parfait, devenu semblable à nous en toutes choses sauf le péché, nous offre le modèle de la condition humaine véritable. Il a été le seul à porter le vrai témoignage, à parler et à vivre la vérité totale. Il a opéré un renversement complet de notre manière habituelle de parler et d’agir. Il s’est engagé totalement dans le conflit qui oppose la lumière de la vérité aux ténèbres du mensonge. Il a d’abord rétabli la vérité sur Dieu, car celle-ci a été la première à subir l’assaut du père du mensonge, le Malin et le faux témoin par excellence… « Dieu a-t-il réellement dit…? » (Gn 3.1). Dans le jardin où, jusque là, on n’avait entendu que la vérité, le rusé serpent insinua que Dieu ne l’avait pas dite. Ayant semé le doute et l’incrédulité dans l’esprit de l’homme, il réussit à le détourner de son Créateur.

Cette même attaque, violente et apparemment réussie, fut dirigée plus tard contre Jésus. « Qu’est-ce que la vérité? » (Jn 18.38), demandait Ponce Pilate avant de livrer son exceptionnel prisonnier entre les mains de la foule déchaînée. « Qu’est-ce que la vérité? », ce n’était pas la question d’un ignorant la cherchant avec sincérité. Elle était celle d’un sceptique et même d’un cynique. Pilate se rendait parfaitement compte de la menace qui pesait sur lui si la vérité venait faire subitement irruption dans sa vie. Il était au courant de la lutte qui se déroulait dans l’âme noire des hommes qui entouraient Jésus. La vérité sur celui-ci devait être étouffée coûte que coûte. Personne ne se souciait de faire la lumière sur une affaire nourrie et fomentée dans l’obscurité du mensonge, de la haine et des pensées meurtrières. Qu’est-ce que la vérité? Ce n’était pas Pilate qui se serait risqué à la faire connaître! Alors que l’innocent succombait, accablé par le poids insupportable des injures et des faux témoignages, personne ne voulut se risquer pour elle… Qu’ils étaient mesquins, mesquins et criminels, les mobiles qui avaient amené de bonne heure le matin les souverains sacrificateurs, les prêtres, les pharisiens envieux et les sadducéens pleins d’arrière-pensées!

Même les disciples, tout à l’heure réceptifs à la vérité, succombaient l’un après l’autre et s’enfuyaient, le laissant seul. Qu’était-ce donc que la vérité pour Pilate, pour Caïphe, pour Pierre et pour la populace de ce vendredi matin devant le prétoire romain de Jérusalem? Il importait avant tout de rejeter Jésus, de le condamner à mort, de salir sa réputation et de noyer dans l’épais brouillard du mensonge le nom du seul innocent…

Oserions-nous espérer mieux aujourd’hui, lorsque l’Évangile de Jésus-Christ devient la première cible que la politique malhonnête et mensongère des hommes veut atteindre à tout prix?

Cependant, le sort qu’on réserve à celui-ci est plus étroitement lié à la vie et au bien des hommes qu’on ne veut l’admettre d’ordinaire. La liberté humaine et l’avenir même de toute civilisation en dépendent. Si l’on cherche à restituer la vérité sur l’homme et sur le monde, il faut d’abord rétablir la vérité sur Dieu. Mais Dieu s’est chargé de faire seul cette œuvre. Malgré l’éclipse ou la défaite apparente de la vérité, que ce soit dans le passé ou dans le présent, aucune somme de mensonge et de tromperie n’a réussi vraiment à la faire disparaître. Elle revient constamment pour confondre les uns et pour sauver les autres.

C’est là le paradoxe et l’ironie divins qui nous surprennent toujours. Parfois, au cours de l’histoire, le mensonge a servi, contrairement à toute attente, à la cause même de la vérité de Dieu! Le faux témoignage des prêtres juifs et d’autres adversaires ont été un instrument pour répandre, malgré eux, l’Évangile du salut. C’est pourquoi, si l’Évangile est refusé, il ne peut que contribuer au jugement et à la perte de ses détracteurs et de ses adversaires.

Le grand jour est proche, lorsque le trône blanc s’établira et que les livres seront ouverts et les morts jugés. Le livre de la vie s’ouvrira également. Lequel de ces registres célestes contiendra votre nom? Les menteurs, nous dit le livre de l’Apocalypse, n’entreront pas dans le Royaume. Le neuvième commandement nous invite et nous prépare à cette entrée dans la cité où règne la vérité.