Cet article a pour sujet le salut offert par l'oeuvre de Jésus à la croix qui est une folie aux yeux du monde et des autres religions.

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La folie de la croix

Est-il raisonnable de croire en Jésus-Christ? Cette question, nous devons nous la poser, car le monde dans lequel nous vivons nous semble souvent sans pitié, sans espoir et sans avenir : corruption et crime, lâcheté et indifférence, faux-semblants et faux-fuyants, pauvreté et violence sont le lot quotidien de bien des habitants de la planète. Où est Dieu?, demande-t-on; comment croire qu’un salut puisse exister lorsque tout ce que nous voyons autour de nous semble témoigner au contraire de la désintégration morale et sociale de ce monde? Certes, les jours se suivent, le soleil brille encore et l’herbe pousse toujours, des enfants naissent et les hommes écrivent encore des poèmes ou composent toujours des chansons d’amour, mais tout cela a-t-il vraiment un sens? La vie ressemble bien plus à un cycle répétitif qui finira sans doute par s’achever un jour, mais auquel nous sommes soumis bon gré mal gré, et que nous devons essayer de supporter au mieux de notre capacité, jusqu’à l’extinction de notre propre vie.

Bien des religions dans le monde ont en gros cette idée : nous sommes pris dans un cycle inexorable de malheur, nous n’en sortirons que par la mort, cherchons donc dès maintenant à tuer en nous toute velléité, tout enthousiasme, car cela ne sert de rien. La sagesse consiste à faire le vide en soi, et la paix n’est obtenue qu’à ce prix. D’autres religions, qu’on appelle vitalistes, ou animistes, pensent trouver une réponse à la question de la mort en invoquant toutes sortes d’esprits qu’elles croient discerner derrière les divers éléments de la nature (eau, feu, arbres, etc.). L’invocation de ces forces naturelles peut conjurer les forces du mal, voire les appeler sur celui ou celle qu’on cherche à détruire. Certes, pour ces religions comme pour les autres, la mort est un horizon constant, mais en invoquant les esprits, on peut susciter la renaissance de la vie et surpasser la mort en favorisant la fertilité et la procréation. Des rites appropriés sont là pour ce faire. Dieu est bien là-haut quelque part, mais on ne peut avoir accès direct à lui, donc pour trouver de l’aide il faut invoquer la chaîne d’esprits qui se trouvent sur l’échelle qui sépare les hommes de Dieu.

Mais aujourd’hui, une nouvelle nébuleuse religieuse, le Nouvel Âge, annonce encore autre chose, sur fond de religions orientales : nous devons cesser de voir Dieu comme étant transcendant, c’est-à-dire totalement séparé de ses créatures dans son être, totalement autre et éternel. Il faut au contraire voir Dieu en nous-mêmes en dans toute la réalité physique et matérielle qui nous entoure; il faut le voir dans la nature, dans le cosmos, et trouver la paix en vivant en harmonie avec ce cosmos. En somme, l’univers tout entier est dieu incarné, le monde en soi est l’expression de dieu, et il ne faut pas le chercher ailleurs. Découvrez-vous donc comme une parcelle de dieu, et vous aurez saisi le sens de votre destinée.

Au milieu de toutes ces croyances, la personne de Jésus Christ offre un contraste saisissant. Voilà le Fils de l’homme, comme il s’appelle lui-même, qui déclare être la lumière du monde, qui dit être un avec le Père, être sorti de Dieu, être sans faute ni tache et accomplir les œuvres de Dieu. On penserait qu’un tel personnage se présente au monde de façon éclatante, entouré d’une suite luxueuse, habillé de vêtements d’apparat, paré d’ornements uniques. Après tout, il est notoire qu’il est un descendant de David, le glorieux roi d’Israël. Eh bien non! Tout au contraire, Jésus se présente au monde sans apparat, sans rien d’extérieur qui puisse séduire les foules. Il se mélange aux humbles, il fait route avec les gens du peuple, il dort de manière inconfortable, voyage à pied, mange la nourriture ordinaire des pauvres, connaît tous les désagréments d’une existence sans demeure fixe. Il fréquente aussi bien les gens dits religieux que ceux dont la vie laisse beaucoup à désirer sur le plan de la morale.

Quelle raison aurait-on d’accepter ce Jésus comme Maître et Sauveur? Pourquoi donc devrions-nous suivre son enseignement? Ne vaut-il pas mieux être du côté des forts, des puissants, des gens riches ou influents? Et puis, a-t-il laissé des livres, des traités, qui nous renseignent sur sa doctrine? Même pas. Seul ce que ses contemporains ont rédigé à son propos nous est parvenu. À la différence de Mahomet, il n’a pas conquis des villes et des peuples par la force des armes, il n’a exercé aucune domination politique sur les hommes, et pourtant… Et pourtant, son enseignement captive les foules, on le suit de toutes parts, on sait qu’il a le pouvoir de guérir toutes sortes de maladies, c’est la raison pour laquelle on lui amène tous ceux qui souffrent d’un mal quelconque : aveugles, boiteux, lépreux, paralytiques, possédés. Il les guérit sans demander rien pour lui-même, sans exiger de paiement, mais seulement en insistant sur la reconnaissance due à Dieu seul, et en soulignant qu’il a non seulement le pouvoir de guérir les maux physiques, mais aussi de pardonner les péchés, pouvoir considéré par les Juifs comme une prérogative exclusivement divine.

Son enseignement captive, mais rebute aussi les traditionalistes, ceux qui pensent pouvoir enfermer la totalité de la révélation divine dans leurs pratiques rituelles, ceux qui ne peuvent concevoir que le Messie, l’envoyé de Dieu tant attendu, se présente au peuple de cette manière. Car ce Jésus parle de la grâce ineffable de Dieu, une grâce qui surpasse tout ce que les hommes ne pourraient jamais tenter d’accomplir pour faire la paix avec Dieu.

Et voilà que la nature humaine fière et arrogante l’emporte chez les chefs religieux : on n’a guère besoin d’un prédicateur itinérant comme Jésus pour être en règle avec Dieu, fût-il doué du don de guérison, fût-il un orateur hors pair dont l’enseignement captive les foules et tranche avec celui de leurs propres docteurs de la loi. Et puis, ce Jésus est un danger pour la caste des dignitaires religieux. Si le peuple le suit, c’est toute la hiérarchie religieuse qui en pâtira, son prestige s’affadira et sa position sociale bien en vue s’effritera. L’identité du peuple juif, croient nos dignitaires religieux, risque de disparaître avec eux. Alors, la solution est claire : il est avantageux pour le peuple qu’un seul homme, ce Jésus, meure, plutôt que le peuple tout entier périsse.

Un complot est donc tramé, qui repose sur la trahison d’un de ceux qui sont proches de Jésus. Son arrestation s’ensuit, à laquelle succède un procès complètement tronqué, fabriqué de toutes pièces; une exécution cruelle, précédée de tortures physiques, couronne le tout, si l’on peut dire. Mais peu après sa mort, ses disciples, d’abord eux-mêmes incrédules, annoncent à qui veut les entendre que Jésus est revenu de la mort à la vie, et qu’il a rejoint le Père au ciel, d’où il règne désormais, et d’où il reviendra pour exercer un jugement final sur l’humanité, instaurant une domination éternelle au sein de laquelle ni la mort, ni l’injustice ni la haine n’auront de place.

Arrivés à ce point, posons de nouveau notre question initiale : Est-il raisonnable de croire en Jésus-Christ plutôt qu’en toutes les autres religions? Croire, c’est-à-dire non pas avoir une vague sympathie pour ce personnage apparemment hors du commun, mais être persuadé que ses paroles sont vraies, qu’il est bien celui qu’il prétend être, c’est-à-dire le Fils incarné du Père éternel. Croire, c’est-à-dire mettre sa confiance en lui comme en la seule personne qui puisse nous sauver de la mort, nous réconcilier avec Dieu et nous accorder la vie éternelle. Voilà le défi de la foi. Est-il raisonnable de voir dans ce supplicié, victime des autorités religieuses de son temps et de l’occupant militaire et politique d’alors, le Fils de Dieu et le maître de la création? Depuis le début, les sceptiques disent tout simplement « non ». Dieu ne saurait se manifester aux hommes sous une forme humaine, qui plus est mourir crucifié sur une croix, le supplice infâme qu’on n’infligeait qu’aux criminels. Le croire, c’est soit de la folie, soit un scandale. Les chrétiens, quant à eux, sont possédés de la conviction inébranlable que telle est pourtant la vérité.

Cette conviction, ils le savent, ne vient pas d’eux-mêmes, car la nature humaine est encline à ne pas croire une telle affirmation. Leur foi, affirment-ils, leur est donnée par l’Esprit même de Dieu. Mais alors, est-elle raisonnable? Elle est tout à fait raisonnable, sans pour autant pouvoir être atteinte par la raison naturelle, qui est limitée dans sa compréhension des choses spirituelles. La foi chrétienne est plus que raisonnable lorsqu’elle découvre dans la révélation biblique que la personne et l’œuvre de Jésus-Christ ne sont pas des accidents de l’histoire, mais bien plutôt l’accomplissement parfait d’un plan divin de salut pour les hommes, plan proclamé progressivement des siècles auparavant dans les écrits de l’Ancien Testament, et attendu avec impatience par le peuple à qui il avait été dévoilé.

La foi chrétienne s’émerveille de la sagesse et de la miséricorde divine qui a présidé à un tel plan, qu’aucun homme n’aurait jamais pu ni inventer ni réaliser, mais qui a été révélé dans sa totalité dans la vie et l’œuvre de Jésus-Christ. La foi chrétienne comprend que la folie et le scandale des hommes consistent bien plutôt à croire qu’ils sont par eux-mêmes en état d’avoir accès à Dieu, sans avoir besoin d’un Médiateur qui soit parfait, donc lui-même divin. La foi chrétienne s’émerveille de ce que ce plan ait été accompli en dépit de ceux qui s’y opposaient, voire que ceux-là mêmes qui s’y opposaient soient devenus, bien malgré eux, les instruments à la fois actifs et impuissants d’une telle réalisation.

Concluons en lisant ensemble, si vous le voulez bien, le chapitre 53 du livre du prophète Ésaïe, rédigé plusieurs centaines d’années avant la venue de Jésus-Christ, et qui nous parle du serviteur fidèle de Dieu :

« Qui a cru à ce qui nous était annoncé? À qui le bras de l’Éternel s’est-il révélé? Il s’est élevé devant lui comme un rejeton, comme une racine qui sort d’une terre assoiffée; il n’avait ni apparence ni éclat pour que nous le regardions, et son aspect n’avait rien pour nous attirer. Méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et habitué à la souffrance, semblable à celui devant qui l’on se voile la face, il était méprisé, nous ne l’avons pas considéré. Certes, ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est chargé; et nous, nous l’avons considéré comme atteint d’une plaie; comme frappé par Dieu et humilié. Mais il était transpercé à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes. Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. Nous étions tous errants comme des brebis, chacun suivait sa propre voie; et l’Éternel a fait retomber sur lui la faute de nous tous. Il a été maltraité, il s’est humilié et n’a pas ouvert la bouche, semblable à l’agneau qu’on mène à la boucherie, a une brebis muette devant ceux qui la tondent; il n’a pas ouvert la bouche. Il a été emporté par la violence et le jugement; dans sa génération qui s’est soucié de ce qu’il était retranché de la terre des vivants, à cause des crimes de mon peuple, de la plaie qui les avait atteints? On a mis sa tombe parmi les méchants, son sépulcre avec le riche, quoiqu’il n’ait pas commis de violence et qu’il n’y ait pas eu de fraude dans sa bouche. Il a plu à l’Éternel de le briser par la souffrance; après s’être livré en sacrifice de culpabilité, il verra une descendance et prolongera ses jours, et la volonté de l’Éternel s’effectuera par lui. Après les tourments de son âme, il rassasiera ses regards; par la connaissance qu’ils auront de lui, mon serviteur juste justifiera beaucoup d’hommes et se chargera de leurs fautes. C’est pourquoi je lui donnerai beaucoup d’hommes en partage; il partagera le butin avec les puissants, parce qu’il s’est livré lui-même à la mort, et qu’il a été compté parmi les coupables, parce qu’il a porté le péché de beaucoup et qu’il a intercédé pour les coupables. »