Cet article a pour sujet les méfaits de l'alcoolisme et de la toxicomanie, car l'alcool et les drogues font des ravages. La crise spirituelle actuelle ne trouve de remède que dans la rencontre avec Dieu.

Source: L'obéissance de la foi. 4 pages.

Intempérances

Parler contre l’intempérance c’est risquer de se faire traiter de prophète ou d’illuminé! Mais l’alcoolisme, la plus connue et la plus répandue des intempérances, est là, entraînant à sa suite des désordres sociaux et produisant inévitablement la déchéance complète de la personnalité. Il ne se passe pas un jour où nous ne lisions dans la presse un fait divers dû à ses effets. Crime, viol, accident, incendie. Sur des milliers d’enfants qui ne peuvent pas suivre des classes scolaires, leur niveau intellectuel étant bien bas, 60 % en moyenne subissent la conséquence de l’intempérance de leurs parents. Les dangers qu’elle présente ne sont pas des rêves, mais la pure réalité. Des races entières ont disparu autrefois et il n’y a aucune raison que cela ne se produise pas de nos jours si on ne lutte pas à temps avec énergie.

L’usage de l’alcool pose continuellement un problème à l’alcoolique et à sa famille, à tous les niveaux de la vie, social, familial, celui du travail ainsi que pour le respect envers soi. Les ravages énormes qu’il cause dans des pays en voie de développement commencent à attirer l’attention du grand public. La prise de conscience par les nations industrialisées de la nécessité d’aider ces pays est un fait dont on ne peut que se réjouir. Mais il faut admettre que les aspects et les conséquences de ce fléau social, déjà très inquiétants dans nos pays occidentaux, peuvent l’être bien davantage chez les populations sous-alimentées et soumises depuis des siècles aux maladies épidémiques. Le développement de la tuberculose est, comme toujours, en étroite relation avec celui de l’alcoolisme. L’alcoolique a perdu, à un certain degré, sa capacité de contrôler l’usage de la boisson. Dans beaucoup de cas, il faut dix à quinze ans de boisson pour développer un alcoolisme du dernier degré.

Mais la perte de contrôle est graduelle, de telle sorte que la victime ne s’en rend pas compte. Chez certains invétérés de la boisson, on entend dire : « l’alcool tue lentement; nous on n’est pas pressé! » Il y a là la preuve d’une inconscience totale pour ne pas dire un cynisme criminel. Pourquoi boit-on? Le préalcoolique estime que les propriétés anesthésiques de l’alcool sont grandes. Aussi, s’imagine-t-il pouvoir se procurer une sorte de secours temporaire, une décharge émotive de ses sentiments de détresse, en un mot un médicament qu’il se prescrit. En buvant avec excès, il croit diminuer une certaine agonie physique et psychologique. Mais ce qui au début n’était qu’un faible « symptôme » devient petit à petit un « symptôme emballé ». L’altération biochimique est achevée. Le subconscient lui-même est « imbibé » de telle sorte que, dès qu’on lui retire l’alcool, le buveur éprouve une très grande détresse. L’alcoolisme est devenu une maladie de toute la personnalité; des troubles graves ne tarderont pas d’apparaître. La psychose, la psychonévrose, toutes sortes de désordres psychopathiques.

Une autre forme d’intempérance, qui se manifeste de nos jours est plus répandue qu’autrefois, la toxicomanie, et l’usage de toutes sortes d’hallucinogènes. La drogue est passée hors les murs des laboratoires scientifiques et a cessé d’être un médicament. Son abus augmente sans cesse et les conséquences sur le comportement de la société seront à brève échéance catastrophiques. L’homme a trouvé un nouveau moyen de se détruire, dit une sommité médicale, non celui des armes thermonucléaires ou bactériologiques, mais simplement la drogue. Le docteur Pierre Bensoussan, médecin-chef des hôpitaux psychiatriques de Paris, écrit ces lignes dans le journal Le Monde :

« Ce qui est particulièrement caractéristique c’est l’extension actuelle de la toxicomanie à toutes les couches sociales et surtout aux catégories d’âges les plus jeunes. Il n’est pas rare, si incroyable que cela puisse paraître, de trouver de nombreux intoxiqués habituels dans les classes secondaires, c’est-à-dire dès l’âge de quatorze, quinze et seize ans. Ce qui est caractéristique c’est en général l’ignorance totale des dangers réels encourus par ses usagers inconscients. Là aussi si on leur reproche souvent cette ignorance, il est permis de se demander où ils auraient pu recueillir quelques éclaircissements. »

Et l’éminent médecin de conclure :

« Qu’on ne s’y trompe pas; ce problème n’est pas de ceux où il est encore permis de s’endormir sur l’opium d’un optimisme béat. Au début d’un incendie, des moyens simples suffisent souvent à le circonscrire. Quand toute la forêt flambe, il est trop tard. Si nous voulons agir, c’est dès maintenant qu’il convient de le faire. »

Ainsi, l’usage de LSD est devenu une maladie pandémique et comme tant d’autres maladies contagieuses, elle doit être prévenue. Une petite quantité de LSD dans la canalisation d’eau d’une ville moyenne suffirait pour causer des troubles psychiques graves dans la population pendant plusieurs jours. Quant au nombre des suicides chez les jeunes ayant fait des expériences « psychédéliques », il n’est pas besoin d’insister beaucoup pour convaincre le grand public; la grande presse nous informe suffisamment à ce sujet.

Mais pourquoi donc ce recours à la toxicomanie et surtout au LSD? Nous serons vraiment étonnés d’apprendre les raisons; voici donc quelques explications. L’emploi de LSD, dit-on, chez des habitués, est une sorte de renaissance religieuse. Il n’y a d’expérience valable que par ce seul moyen. L’homme est heureux lorsqu’il s’y adonne. La vie n’a pas de but, ni de sens aucun, sauf dans un état psychédélique. On découvre des dimensions nouvelles de la vie, jusque-là ignorées, et qui échappent à la perception d’un individu ordinaire. Une telle expérience permettrait même la rencontre avec Dieu.

Le LSD est la réponse au rêve universel d’une religion humaniste. Pourtant, l’extase et la mystique ici sont divorcées de la responsabilité envers Dieu. On ne peut pas s’empêcher de se rappeler ce que nous rapporte le livre de Genèse à ses débuts. « Si vous mangez du fruit de l’arbre défendu, vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des dieux » (Gn 3.5). C’était, comme vous vous rappelez, le tentateur qui s’était approché d’Ève. Les effets produits par la drogue sont dus à une cause naturelle, résultats d’effet biochimique de la drogue sur la perception sensorielle de l’homme et sur l’ensemble du fonctionnement de son cerveau. On ne peut nullement atteindre par cette voie la réalité et encore moins la transcendance de Dieu.

Que faut-il faire devant cette intempérance, soit celle de l’alcool, soit devant l’usager de la drogue? Il ne suffit pas de s’alarmer et d’alerter l’entourage. Il ne suffit même pas de moraliser et de tourner le problème en une simple discussion passionnée. Il faut secourir et il faut guérir. Les alcooliques et les toxicomanes nous présentent le visage des nouveaux pauvres qui jonchent sur nos routes. Ils sont sans espoir et sans respect pour eux-mêmes. Auprès d’eux, nous avons l’occasion d’accomplir un service important et vital. Nous pourrions leur apporter la libération et en Christ, leur annoncer la vie nouvelle.

Pour réussir un tel service il nous faut d’abord comprendre leur situation et les causes profondes des troubles moraux et spirituels qui les jettent dans une telle déchéance. Nous ne pouvons les rejeter simplement et leur porter un jugement sévère. Il faut les aimer. Nous pourrions commencer, dans la plupart des cas, à les amener à un médecin ou à solliciter l’aide d’un psychiatre. L’hospitalisation des alcooliques est une tâche urgente qu’il ne faut pas négliger, quel que soit le degré d’intoxication. Il faut aussi faire briser le cycle de l’intempérance en faisant comprendre à la victime que la boisson n’est pas une solution, mais qu’au contraire elle constitue son problème principal, le mal qu’il faut combattre.

On peut aussi avoir recours à des groupes qui combattent l’alcoolisme. Je pense spécialement aux sociétés antialcooliques qui accomplissent dans certaines grandes villes une œuvre sociale remarquable. Un alcoolique disait « qu’aller à des réunions était pour lui ses vitamines quotidiennes ». Il faut comprendre l’alcoolique comme étant un malade physique et psychologique, sans pour autant oublier qu’il y a chez la victime une part de responsabilité morale. Mais l’approche qui soulignerait d’abord la responsabilité morale ne serait d’aucune utilité ou d’efficacité. Lorsqu’on moralise devant lui, l’alcoolique refuse toute aide. Il se plongera davantage dans sa misère. Il lui faut trouver une nouvelle manière de vie qui le satisfait, afin de remplacer celle qui est orientée par la boisson.

Cependant, une thérapeutique aussi adéquate soit-elle, sur le plan médical, si elle ne place pas le malade sous le regard de Dieu et ne le met pas en relation avec lui, sera insuffisante. Il faut donc avant tout que celui-ci connaisse l’expérience décisive, c’est-à-dire la rencontre avec Dieu. Lorsque la victime suit une nouvelle forme de vie, alors seulement, elle est tout à fait libérée. L’expérience prouve que l’alcoolique ayant trouvé Dieu trouve du même coup une assurance contre la rechute. Cela est valable pour le toxicomane. Là où Dieu est présent, l’aide du médecin et de la psychologie peut parfois être superflue. L’homme malade trouve en lui le seul vrai et grand médecin. L’alcoolisme et la toxicomanie, comme toutes les autres formes d’intempérance, sont en réalité les symptômes les plus graves de notre maladie spirituelle. Mais elles nous offrent l’occasion de constater comment nous ne saurions vivre, ne serait-ce qu’un seul instant, loin de Dieu.

La crise spirituelle que traverse notre société n’est pas différente de celles qu’ont connues d’autres générations. Mais aucune solution humaine, aucun progrès, ni aucune révolution n’ont pu les guérir. Aucune société ne peut trouver le remède au mal profond qui l’accompagne dès sa naissance jusqu’à sa fin. Pourquoi la société tout entière est-elle malade? Il faut chercher les racines de son mal. Tous les hommes, qu’ils soient normaux ou anormaux, cherchent la guérison dans un mouvement tourné vers l’intérieur, vers eux-mêmes. Il faut pourtant tourner le regard vers Dieu pour pouvoir échapper au démon du désespoir, l’homme moderne cherche en vain à dépasser le nihilisme en recourant à une expérience mystique dénuée de tout fondement. L’emploi de LSD est le témoignage le plus tragique de l’incapacité de l’homme à trouver le sens de sa vie et à percer le mystère de Dieu.

Mais il faut écouter Dieu, le Dieu vivant révélé en Jésus-Christ. Nous sommes faits par et pour sa Parole. Saint Paul a quelques mots d’à-propos que je veux citer en terminant. « Soyez remplis, non pas de vin, mais du Saint-Esprit » (Ép 5.18). Et dans l’Épître aux Colossiens, il exhorte ses lecteurs :

« Si donc vous êtes ressuscités avec Christ, cherchez les choses d’en haut où Christ est assis à la droite de Dieu, affectionnez-vous aux choses d’en haut et non pas à celles qui sont sur la terre » (Col 3.1-2).