Cet article sur Jean 5.1-18 a pour sujet la guérison du paralysé de Béthesda qui, dans sa détresse extrême, a retrouvé la santé par la puissance de Jésus. Par la foi en lui, nous avons le pardon, la vie et l'espérance de la résurrection.

Source: Afin de croire et d'avoir la vie - Méditations sur l'Évangile selon Jean. 4 pages.

Jean 5 - Le paralytique de Béthesda

« Après cela, Jésus s’en alla de l’autre côté de la mer de Galilée (ou) de Tibériade. Une foule nombreuse le suivait, parce qu’elle voyait les miracles qu’il opérait sur les malades. Jésus monta sur la montagne et là, il s’assit avec ses disciples. Or la Pâque, la fête des Juifs, était proche. Jésus leva les yeux, vit qu’une foule nombreuse venait à lui et dit à Philippe : Où achèterons-nous des pains pour que ces gens aient à manger? Il disait cela pour l’éprouver, car il savait ce qu’il allait faire. Philippe lui répondit : Les pains qu’on aurait pour deux cents deniers ne suffiraient pas pour que chacun en reçoive un peu. Un de ses disciples, André, frère de Simon Pierre, lui dit : Il y a ici un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons; mais qu’est-ce que cela pour tant de personnes? Jésus dit : Faites asseoir ces gens. Il y avait à cet endroit beaucoup d’herbe. Ils s’assirent donc, au nombre d’environ cinq mille hommes. Jésus prit les pains, rendit grâces et les distribua à ceux qui étaient là; il fit de même des poissons, autant qu’ils en voulurent. Lorsqu’ils furent rassasiés, il dit à ses disciples : Ramassez les morceaux qui restent, afin que rien ne se perde. Ils les ramassèrent donc, et ils remplirent douze paniers avec les morceaux des cinq pains d’orge, qui restaient à ceux qui avaient mangé. Ces gens, à la vue du miracle que Jésus avait fait, disaient : Vraiment c’est lui le prophète qui vient dans le monde. Jésus, sachant qu’ils allaient venir l’enlever pour le faire roi, se retira de nouveau sur la montagne, lui seul. Le soir venu, ses disciples descendirent jusqu’à la mer. Ils montèrent dans une barque pour se rendre à Capernaüm de l’autre côté de la mer. Les ténèbres étaient déjà venues, et Jésus ne les avait pas encore rejoints. Un vent violent soufflait et la mer se soulevait. »

Jean 5.1-18

« Dans ce chapitre, le voile qui recouvre la divinité du Fils de l’homme est diaphane, presque transparent. La majesté du Seigneur, qui, selon la volonté de Dieu, est cachée à nos yeux, ne peut plus passer tout à fait inaperçue. On pourrait, semble-t-il, toucher du doigt la grandeur du Christ, on voit le rayonnement de sa majesté. Pour ne pas en être ébloui, il faudrait être frappé de cécité; pour ne pas entendre, il faudrait être sourd. Soyons donc attentifs à ce qui se passe ici et aux paroles qui nous sont dites. […] Ce n’est pas seulement la majesté du Seigneur qui nous est révélée ici, mais aussi notre misère humaine » (Walter Lüthi).

Mais c’est de nouveau l’affirmation de la puissance de vie de Jésus que met en lumière l’épisode du paralytique de Béthesda. Pour la première fois, elle est proclamée à Jérusalem devant les chefs spirituels du peuple de Dieu et devant la foule rassemblée pour la fête.

Cette manifestation n’est pas seulement verbale; elle s’exprime dans la rencontre du Fils de Dieu avec l’extrême misère humaine. Le paralytique de Capernaüm (Mc 2.1-12) avait ses quatre amis qui l’ont amené à Jésus. L’officier royal (Jn 4.43-54), dans sa détresse, mettait son espérance dans la puissance de Jésus. Les malheureux de Jérusalem, qui étaient sous les portiques de la « maison de miséricorde », espéraient pouvoir profiter du pouvoir salutaire de la source bouillonnante, car ils avaient encore assez de force pour s’en approcher ou des parents prêts à les y porter au moment opportun. Lui, il est seul, sans force, abandonné de tous, livré à son mal et au désespoir depuis trente-huit ans! En vérité, il n’est même plus capable de désespérer; dans son malheur, il y a une sorte d’amère résignation. Ce n’est plus qu’une loque, un mort-vivant.

C’est à cause de cette extrême misère que Jésus s’approche de lui. D’habitude, on vient à Jésus, on crie, on l’appelle au secours. Cette fois-ci, c’est Jésus qui prend l’initiative et qui, dans son amour clairvoyant, discerne le plus malheureux des hommes et vient à lui. Le Seigneur ne se contente pas d’entendre l’appel de ceux qui demandent son aide et qui cherchent en lui leur salut; il est auprès de ceux qui, dans leur malheur, n’ont aucune espérance et s’abandonnent à la fatalité, ignorant tout du Sauveur.

Le voilà qui se penche avec une infinie miséricorde sur celui qui « n’a personne ». « Veux-tu retrouver la santé? » (Jn 5.6). Qui est donc cet étranger au visage inconnu? Que lui veut-il et pourquoi se moque-t-il ainsi cruellement de lui? Et pourtant, le misérable, frappé par le ton de cette voix, lève des yeux las sur son interlocuteur et découvre, sans en prendre même conscience, un amour et une puissance qui pénètrent en lui comme une flamme, éveillant au fond de son être la lueur de l’espérance qui subsiste toujours chez tout homme créé à l’image de Dieu. Dans cette « terre desséchée », un faible espoir refleurit, qui n’ose encore se montrer et qui se cache derrière la description que l’homme fait de sa misère et de son atroce solitude.

Alors retentit la parole créatrice du Fils de Dieu. Car, « comme le Père ressuscite les morts et les fait vivre, de même aussi le Fils fait vivre qui il veut » (Jn 5.21). Il appelle ce malheureux à la foi et en même temps la suscite en lui. Et la foi, ici, ce n’est pas une simple acceptation confiante comme celle de l’officier royal, c’est une reconstruction de tout un être qui s’était affalé dans la mort, c’est un acte de vie, c’est une manifestation de volonté : « Lève-toi, prends ton lit et marche! » (Jn 5.8). Oui, un acte impossible un instant auparavant, qui devient possible, nécessaire, indispensable, puisque maintenant, inexplicablement, l’homme croit à la puissance de Dieu qui travaille en lui (Jn 5.17) et qui le rend à la vie. Alors, le miracle s’accomplit. La foi produit son fruit. Et le paralytique s’en va, portant le lit qui l’a si longtemps porté!

Cela suffit pour déclencher l’hostilité des chefs du peuple. Au lieu de reconnaître dans cet acte miraculeux un signe de la puissance messianique annoncée par l’Ancien Testament et enfin présente parmi les hommes, ils ne voient que la transgression du sabbat, à cause de leur fausse interprétation des commandements sur le jour du repos, aggravée et codifiée par leur mesquine casuistique.

Pour certains Pères de l’Église, et peut-être pour l’évangéliste, les chefs du peuple, nourris des Écritures, auraient dû comprendre que le paralytique était le symbole vivant de l’état spirituel d’Israël après les trente-huit ans dans le désert. Cette guérison miraculeuse était donc, d’après cette interprétation, le signe que le moment était venu pour lui d’entrer dans la véritable terre promise, dans le Royaume de Dieu, sous la direction de ce nouveau Josué.

L’homme qui a été guéri ne connaît pas son bienfaiteur, qui s’est perdu dans la foule. Dans sa joie reconnaissante, il monte au Temple, et là, il le rencontre. Jésus achève son œuvre en lui montrant que la guérison de son corps, destiné à périr un jour, serait peu s’il n’obtenait de Dieu le pardon de ses péchés et le don de la vie éternelle, manifestés dès maintenant par une existence totalement renouvelée : « Ne pèche plus! » (Jn 5.14). Comprit-il cette exhortation? Cela ne nous est pas dit, mais ce que nous savons, c’est qu’il alla trouver ceux qui l’avaient interrogé et qu’il put leur faire connaître (par reconnaissance, ou au contraire par crainte, ou par bêtise) le nom de celui qui l’avait sauvé.

Désormais, l’hostilité des Juifs, déjà manifestée lors du précédent séjour de Jésus à Jérusalem, va devenir plus forte. D’ailleurs, les plus intelligents d’entre eux discernent dans les actes de ce guérisseur, derrière ses « infractions » à la loi du sabbat, une attitude profonde qui les trouble et les inquiète, une autorité inexplicable, pour tout dire une majesté qui leur semble sacrilège. Aussi le scandale éclate-t-il lorsque Jésus déclare : « Mon Père travaille jusqu’à présent. Moi aussi je travaille » (Jn 5.17).

N’est-ce pas précisément la vocation d’Israël de lutter dans le monde contre toute exaltation de l’homme qui veut, d’une manière ou d’une autre, se faire dieu? N’a-t-il pas pour message essentiel d’affirmer que l’Éternel seul est Dieu et que tous les hommes sont des pécheurs? Or, voilà que cet homme qui est en face d’eux parle de Dieu comme de son Père à lui, et non pas comme du Père du peuple d’Israël. Il invoque une filiation unique entre lui et Dieu. Bien plus, il se met sur le même plan, il compare l’activité créatrice du Tout-Puissant avec ses actes sacrilèges qui violent la loi.

C’est pour lutter contre ce terrible malentendu que Jésus va prononcer le premier de ses grands discours dans Jean 5.19-47, où il montre que, bien loin d’être un homme mortel qui « se fait lui-même égal avec Dieu », il est vraiment venu du sein du Père et demeure en parfaite communion avec lui. Il ne fait rien par lui-même, mais il accomplit tout par la puissance créatrice de Dieu qui est en lui. Cette unité avec Dieu est affirmée avec force par ce nom de Père qu’en cette occasion Jésus donne à Dieu quatorze fois. Ne pas honorer le Fils, voir en lui un homme qui veut prendre la figure de Dieu et non le Dieu qui accepte de venir parmi les hommes, c’est se détourner de Dieu.

L’heure est grave, les temps sont venus où le peuple d’Israël doit choisir. Des miracles de vie et de résurrection, bien plus importants encore que la guérison du paralytique, vont avoir lieu. Ne pas accepter ce témoignage que le Père donne au Fils, récuser celui de Jean-Baptiste et celui de l’Écriture, en particulier celui de Moïse, c’est se placer sous le jugement de l’Éternel, c’est se priver de la vie éternelle.

Et déjà éclate, en conclusion de ces reproches si graves, la douleur du Sauveur devant l’incrédulité de ceux qui représentent le peuple élu : « Vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie! » (Jn 5.40).

Nous vivons dans un extrême dénuement d’espérance. Le Christ vient en ce lieu, lui le Sauveur du monde, nous ne savons ni pourquoi ni comment. Il n’est aucun endroit, si dénué d’espoir soit-il, qui lui est inaccessible ou qu’il a abandonné. Le paralytique était la personnification même du désespoir. Mais voici Jésus, l’espérance faite chair.

La maladie et la mort sont douloureuses, mais l’endurcissement dans le péché est pire. Le Père veut opérer des miracles non seulement dans les corps, mais aussi dans les âmes. Il ne se contente pas de guérir miraculeusement, il offre encore à l’homme la grâce et le pardon de ses péchés. Le cœur du Christ nous est ouvert. Le don le plus glorieux qu’il offre n’est pas de mettre sur pied un homme paralysé, mais d’accorder aux pécheurs la résurrection et la vie.

Quand nous pensons à notre temps gaspillé et à l’imminence du jugement, nous découvrons que nous sommes nous-mêmes, bien que sauvés en Jésus-Christ, des cas désespérés de paralysie et que nous infligeons chaque jour des peines infinies à notre Seigneur. Mais le Christ est tout-puissant; devant lui, aucun cas n’est sans espoir. Il peut guérir et changer notre cœur et sa souveraineté resplendit à nos yeux. Une fois encore, les anges poussent des cris d’allégresse devant la face de Dieu.