Cet article sur Jean 9.1-5 a pour sujet la raison de la condition de l'aveugle-né: est-ce sa faute ou celle de ses parents? Jésus répond que c'est afin que les oeuvres de Dieu soient manifestées en lui par la guérison qu'il opère.

Source: Les miracles de Jésus. 3 pages.

Jean 9 - Guérison de l'aveugle-né - À qui la faute?

« Jésus vit, en passant, un homme aveugle de naissance. Ses disciples lui demandèrent : Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle? Jésus répondit : Ce n’est pas que lui ou ses parents aient péché; mais c’est afin que les œuvres de Dieu soient manifestées en lui. Il nous faut travailler, tant qu’il fait jour, aux œuvres de celui qui m’a envoyé; la nuit vient où personne ne peut travailler. Pendant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde. »

Jean 9.1-5

1. Ceux qui ont posé la question avaient déjà tiré des conclusions de cette longue histoire. Leur première prétention était que toute souffrance est nécessairement la conséquence du péché. Qui a péché, pour que cet homme soit né aveugle? C’est là une affirmation que nous trouvons dans beaucoup de psaumes. C’est là aussi la question posée par ses amis dans le livre de Job, sauf par Job lui-même. C’est là la conviction explicite des hindous et des bouddhistes. D’après ceux-ci, vous recevez ce que vous méritez, que ce soit dans la vie présente ou dans la vie à venir. C’est là aussi l’idée de beaucoup de personnes qui se croient chrétiennes! N’entendons-nous pas très souvent : Qu’ai-je fait pour mériter ce malheur-là? Pourquoi ceci doit-il m’arriver à moi, précisément à moi, et non pas à d’autres?

Ceux qui se posent de telles questions n’ont saisi, en réalité, qu’une demi-vérité. En effet, tout péché a comme résultat une punition, soit d’ordre physique, soit d’ordre moral et spirituel. Il y a la cirrhose du foie due à l’alcoolisme. Il y a des maladies qui sont la conséquence de certains péchés ou de certains abus, il y a nécessairement la pauvreté de celui qui vit dans la paresse.

Tout péché engendre une souffrance, mais cela ne veut pas dire que toute souffrance est nécessairement liée à un péché particulier. Nous avons connu sans doute beaucoup de personnes qui ayant mené une vie exemplaire, furent victimes de beaucoup de malheurs et d’épreuves.

Jésus nous enseigne ici que la mesure de justice que Dieu emploie à notre égard n’est pas celle que nous connaissons et pratiquons. Le soleil et la pluie sont donnés à toute créature sans discrimination, aux justes et aux injustes, aux bons et aux méchants. Ceux sur qui tomba la tour de Siloé n’étaient pas meilleurs ou pires que leurs voisins.

2. L’autre prétention derrière cette question est la suivante : le destin de tout homme est nécessairement lié à celui de ses parents. Qui a péché, cet homme ou ses parents? Cette question est aussi partiellement vraie. Il est vrai qu’humainement parlant, nous sommes le produit de nos parents. Humainement parlant aussi, mes premières obligations doivent aller à mes enfants. Des législations sociales limitent très souvent les avantages matériels qu’un homme peut accorder à ses enfants. Mais personne ne peut limiter le droit et la volonté de leur laisser une bonne éducation, un exemple remarquable, un nom respecté.

Il est également vrai que, très souvent, des infirmités physiques sont dues à une lourde hérédité. Les péchés des parents peuvent avoir une profonde répercussion sur leurs enfants et laisser dans leur vie des traces ineffaçables. Nous ne sommes pas des unités séparées. Nous sommes responsables les uns pour les autres, mais en définitive, chacun de nous reste seul. Ce que nos parents ont fait, le résultat de leur comportement, peut être déterminant pour le début de notre vie, mais non pour son accomplissement, pour son déroulement vers son but.

3. En réalité, la question posée est insidieuse. Qui a péché, cet homme ou ses parents? On attendait que le Seigneur jette le poids de la responsabilité sur l’un ou sur les autres. Mais voilà que le Seigneur donne une réponse totalement inattendue : « Ce n’est pas que lui ou ses parents aient péché; mais c’est afin que les œuvres de Dieu soient manifestées en lui. »

Jésus n’a pas voulu dire que la gloire de Dieu exigeait le malheur de cet homme-là. Aucun homme n’est le cobaye de Dieu, le jouet de ses caprices. Dieu ne veut pas employer ce pauvre homme, mendiant pendant de longues années, pour manifester d’une manière écrasante toute sa puissance. La cécité de l’homme est l’occasion d’un puissant appel à l’action. Christ ne se pose pas de questions intellectuelles, il ne s’arrête pas devant des énigmes insolubles. Cet homme se trouve sur son chemin, comme tout homme se trouve un jour ou l’autre sur son chemin en quête de secours, de compassion et de lumière. C’est un homme doublement désespéré. Aveugle et pauvre à la fois. De temps à autre, il reçoit une petite aumône, mais une parole d’espérance, qui pourra donc la lui donner? Un jour, Jésus passera devant lui; sa parole jettera un premier rayon de lumière, déchirant le voile de la fatalité. Cet homme est là pour quelque chose. L’aveugle avait pensé que la vie des autres avait un but, mais que la sienne n’en avait aucun. Mais Jésus surgit et il déclare : « Cet homme est là afin que les œuvres de Dieu resplendissent en lui. » Ce mendiant doit devenir témoin de la magnificence et de la toute-puissance de Dieu. Dieu a un plan pour cet homme-là. Il n’a pas à désespérer de sa vie. Quel rayon d’espérance!

N’ayons pas la présomption de croire que nous pouvons nous suffire à nous-mêmes. Si le monde et les hommes ne sont pas détruits, c’est que Dieu veut faire éclater envers nous sa grâce et sa fidélité. Il l’a fait autrefois en envoyant les prophètes. Il le fait les derniers temps en envoyant son Fils. En Jésus-Christ, il a déployé toute sa grâce. Quel que soit le poids de l’hérédité ou de la nature de nos infirmités présentes, notre vie prend un sens : celui de manifester l’œuvre de Dieu. C’est son œuvre qui compte et qui donne un sens au monde, et non pas le progrès de la science et de la technique.

C’est pourquoi, en revenant à l’histoire de cet aveugle-né, nous pouvons dire que les disciples ont posé une fausse question et ce n’était pas leur affaire de poser des questions en tant que curieux. Il y avait une autre manière d’approcher cet homme, qui est de se demander : Qu’est-ce que nous pouvons faire pour lui?

Le problème de la souffrance demeurera, je crois, toujours incompréhensible. Mais ce sera un problème que nous pourrons envisager dans la compassion. Ce récit est aussi un appel à agir dans le sens où Jésus a agi. Le but de notre vie n’est pas tant de comprendre que d’aimer. Ce n’est pas par notre intelligence, mais par notre bonté que nous pourrons manifester les œuvres de Dieu. Pour cela, nous connaissons que Dieu s’est identifié à nous, qu’il a pris part à la souffrance humaine. La croix de Jésus-Christ est la preuve que Dieu ne demeure pas étranger à nos soucis et à nos épreuves. En regardant le crucifié, nous ne pouvons pas nous poser des questions telles que : « Qui a péché? Est-ce lui ou son père? » Mais devant la croix, nous sommes saisis et réconfortés à la fois, car c’est là où les œuvres de Dieu ont été manifestées, œuvres de pitié et d’amour, œuvre de guérison et de rétablissement, œuvre qui a pris en charge toutes nos infirmités et celles du monde.