Cet article a pour sujet l'institution divine du mariage, son origine (Genèse 2), sa permanence, son caractère sacré, ainsi que la monogamie, la dualité homme femme, la source du véritable amour, et le reflet de Jésus et de son Église.

Source: Homme et femme il les créa. 8 pages.

L'institution divine du mariage

  1. L’origine divine du mariage
  2. Monogamie, permanence et caractère sacré du mariage
  3. L’homme créé à l’image de Dieu et la dualité homme femme
  4. Un reflet de la relation entre Jésus-Christ et son Église
  5. La source du véritable amour
  6. Le couple participe à l’œuvre de création

1. L’origine divine du mariage🔗

En nous plaçant sur le terrain biblique, nous reconnaissons que le mariage est une institution divinement établie. Inventé et organisé par le Dieu Créateur, son importance compte jusqu’à l’éternité. Considéré de ce point de vue, le mariage ne saurait être assimilé à aucune autre relation sociale. Du fait que nous nous plaçons sur ce terrain de la révélation biblique normative, et à la suite de toute la théologie réformée, nous refusons également de le tenir pour un sacrement parmi d’autres. Une telle notion du mariage lui conférerait un statut et lui attribuerait une fonction étrangers au plan initial de Dieu, tel que les dévoile l’Écriture sainte.

Du fait même de son institution divine et de son organisation spéciale, le mariage est un état et demeure un rapport sacré. Il l’est à plusieurs égards, bien que pas davantage que d’autres aspects de l’existence humaine ou d’autres fonctions temporelles dont nous sommes investis. À l’heure actuelle, comme d’ailleurs dans le passé, il semble résumer et récapituler en lui-même la corruption morale, individuelle ou collective, résultat de la chute. Néanmoins, en dépit de cette corruption de fait, en dépit même des violents assauts dont elle est sans cesse la cible, l’institution du mariage persiste. Ce n’est assurément pas le signe d’une vitalité qui lui serait inhérente, d’un dynamisme propre au couple comme tel, mais il le doit à son origine divine.

De façon déjà empirique, un grand nombre de nos contemporains considèrent l’adultère comme étant un rapport anormal et, à leurs yeux, le mariage demeure le rapport normal entre homme et femme. Même de nos jours, l’opinion publique acceptera dans l’ensemble que c’est dans les liens conjugaux que s’établissent et s’épanouissent les relations sexuelles.

Si la violation de chaque commandement est une grave transgression, celle du septième commandement semble encore plus grave par rapport aux autres. Ce commandement interdit l’adultère de manière négative; positivement, ce même commandement déclare la sainteté du mariage. Simultanément, il résume d’autres transgressions, telles que le vol, le faux témoignage et la profanation du nom de Dieu, qui sont toutes en étroit rapport avec l’adultère, considéré comme la forme extrême de l’immoralité. Bien qu’en pratique tous les mariages ne puissent invoquer et s’appuyer sur l’approbation de Dieu ni s’attendre à sa bénédiction, en soi-même le mariage demeure le don du Créateur.

Ce n’est donc point la situation de fait qui lui confère la dignité d’institution divine, mais la décision initiale de Dieu et son initiative lors de la création. « Homme et femme il les créa » (la traduction littérale de l’original hébreu devrait être « mâle et femelle il les créa », version assez crue, mais qui surtout de nos jours, où le nivellement des sexes semble la norme générale chez les détracteurs de la révélation, dit ce qu’il en est dans l’institution originale du mariage; l’homme et la femme sont différents, l’on est mâle et femelle, un point c’est tout). Dieu les unit ensemble afin qu’ils soient « une seule chair ».

On se rappellera diverses théories humanistes relatives à l’origine du mariage et à son organisation actuelle. Toutes sans exception tiennent le mariage pour une invention humaine ayant passé par diverses phases évolutives; l’homme ayant débuté par vivre dans une promiscuité totale, s’attachant tantôt à une partenaire, tantôt à une autre. Progressivement, ses rapports sexuels auraient évolué jusqu’à atteindre une forme plus « raffinée » que serait la polygamie. Enfin, après bien d’autres expériences (?) et à la suite d’une lente et pénible maturation, il aurait abouti au mariage monogame, étape définitive, la meilleure, pour ne pas dire l’idéale, pour des rapports sexuels harmonieux dans le couple humain.

Toute autre est l’explication biblique, dont nous avons dès le départ énoncé l’essentiel. Le fondement du mariage se trouve en son institution divine. Qu’il soit rappelé aussi en passant que promiscuité et polygamie ne sont pas des faits limités et constatables exclusivement aux débuts de l’apparition de la race humaine. Elles sont répandues et pratiquées jusqu’à nos jours.

2. Monogamie, permanence et caractère sacré du mariage🔗

Si le mariage peut se décrire comme une relation mutuelle, une disposition sociale, un accord légal, aucune de ces définitions n’en épuise cependant la signification totale. C’est parce que le mariage est ordonné et institué divinement que le mariage biblique et chrétien est saint et sacré.

Considérons les facettes suivantes de l’enseignement biblique. L’identité de l’homme et de la femme est ancrée dans l’activité créatrice de Dieu : « Dieu créa l’homme à son image, il le créa à l’image de Dieu, il le créa homme et femme » (Gn 1.27). Du contexte qui suit, il devient évident que cette similarité fondamentale (image de Dieu) avec la différence essentielle du sexe (mâle et femelle) voit la relation étroite et intime entre l’homme et la femme comme la relation de l’époux avec l’épouse. Outre le récit de la Genèse nous informant de l’origine du mariage, nous avons également la déclaration de Jésus confirmant l’authenticité du récit du premier livre biblique, y plaçant le poids de son autorité divine.

« N’avez-vous pas lu que le Créateur, au commencement, fit l’homme et la femme, et qu’il dit : C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme, et les deux deviendront une seule chair. Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Que l’homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni » (Mt 19.4-6).

Dans l’intention de Dieu, la femme doit compléter l’homme. Elle sera son aide. En effet, Dieu déclare : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, je lui ferai une aide qui sera son vis-à-vis » (Gn 2.18). Du côté de l’homme apparaît le besoin profond d’une compagne, ainsi que l’indique son exclamation : « Voici cette fois celle qui est os de mes os et chair de ma chair » (Gn 2.23). Le mariage tel que Dieu l’ordonne et le sexe tel qu’il le crée sont parmi les dons les plus élevés et les plus sacrés que Dieu fait à l’homme. Le mariage précède même l’institution du sabbat. Ainsi que l’écrivait un auteur chrétien : « L’Écriture débute par un mariage, célébré dans le jardin d’Eden, et se termine par un autre, les noces du Christ, célébrées avec son Église dans la nouvelle création. »

Tout couple chrétien marié devrait se souvenir et se réjouir du fondement sur lequel est basée sa vie conjugale. L’intimité du lien du mariage, telle que Dieu l’a voulue, est indiquée dans la manière dont il créa la femme. Tirée de la « côte » d’Adam, elle est véritablement chair de sa chair. Ceci est suivi d’un second ordre, que nous examinerons plus loin. « C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair » (Gn 2.24). Le fait de l’institution divine du mariage est encore souligné, avec une très grande beauté, par la phrase : « L’Éternel Dieu forma une femme de la côte qu’il avait prise à l’homme et il l’amena vers l’homme » (Gn 2.22). La permanence du lien conjugal est soulignée par l’accent que l’Écriture place sur la fidélité, par de constants avertissements, par la condamnation de l’adultère et par l’instruction donnée par Jésus dans Marc 10 (voir Mt 19) concernant le mariage et le divorce.

De ce qui précède, et nous reviendrons sur ce point encore plus loin, il ressort que le mariage biblique ne connaît d’autre forme que celle de la monogamie. Un couple seul, un homme et une femme, sont unis par Dieu pour la vie, à l’exclusion de tout autre lien sexuel, soit illégitime, dans la prostitution, la fornication ou l’adultère, soit légalement reconnu comme dans le cas de la polygamie (un mari ayant plusieurs femmes ou concubines), de la polyandrie (une femme ayant plusieurs maris) ou encore dans la plurogamie (qu’on nous accorde la liberté d’inventer ce terme) ou « mariage » entre deux ou plusieurs couples d’hommes et de femmes (voir Gn 2.18,24; Mt 19.4-6; 1 Co 7.2; Ép 5.33).

Le refus de cet ordre, le mépris moderne pour l’institution du mariage, est non seulement incompréhensible, mais encore extrêmement dangereux pour le bonheur et l’équilibre des hommes « modernes et civilisés », qui se marient et qui divorcent avec une telle légèreté et une telle rapidité qu’on peut se demander s’ils portent un intérêt quelconque envers leur propre mariage.

Apparemment, aucune condition extérieure ne semble obliger à maintenir certains liens conjugaux. Si le mariage subsiste, en dépit de tant de malentendus et de tant de méprises, l’explication ne se trouve nulle part ailleurs que dans la providence de Dieu, qui opère dans l’existence des hommes, même irrégénérés, et leur permet d’être fidèles dans l’union conjugale. En dépit donc de divorces demandés et dispensés avec tant de facilité par les législations modernes, l’action préventive de Dieu protège le mariage et le maintient comme une institution permanente, ainsi qu’est le cas de l’Église et de l’État, ceux-ci étant aussi des institutions divines, ordonnées et mises en place par Dieu, afin de préserver le monde d’une corruption totale et absolue.

Il nous faut insister sur cette origine divine, de peur que le mariage ne soit considéré comme une relation que souhaiterait et qu’établirait l’homme. La création de celui-ci, homme et femme, mâle et femelle, l’apparition de la femme à partir de l’homme époux, l’injonction adressée à ce dernier de quitter son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, la bénédiction afin qu’ils soient féconds et se multiplient, voilà de claires indications de l’origine divine du mariage.

3. L’homme créé à l’image de Dieu et la dualité homme femme🔗

La première édition de notre étude comprenait une section dans ce chapitre traitant de la deuxième raison comme fondement biblique du mariage, à savoir le fait que l’union du couple refléterait l’être même de Dieu. Une étude plus serrée du thème de l’image de Dieu en l’homme nous amène à réviser nos convictions antérieures.

Dans une certaine mesure, Karl Barth avait raison de s’opposer à des idées patristiques, notamment celle de Grégoire de Nysse, pour qui la création homme et femme serait une sorte de départ, si ce n’est une déviation par rapport au prototype! Il n’entre pas dans notre intention de résumer ce débat entre le Père de l’Église du 4siècle et le grand théologien de notre siècle; encore moins d’examiner les divers aspects de la question de la création de l’homme à l’image de Dieu. Nous tenons plus simplement à corriger une idée que, sans doute inconsciemment (?), nous avions emprunté à Karl Barth, mais dont nous ne voyons plus la légitimité biblique.

Grâce à l’excellente étude de notre ami et grand théologien réformé Philip Egcumbe Hughes, hélas récemment disparu, son ouvrage en anglais The True Image nous a permis de cerner de plus près l’idée biblique. Certes, souligne Hughes, même chez Barth le langage est analogique, une analogie de relation et non une analogie ontologique, c’est-à-dire qu’il n’existe pas une analogie de l’être entre l’homme et Dieu; nonobstant, on peut lui objecter que les relations entre les personnes de la déité n’ont jamais le sens de relation sexuelle. De même, fait remarquer Hughes, les relations interpersonnelles dans la société humaine, bien qu’intimement exprimées dans l’union sexuelle entre l’homme et la femme, et à laquelle s’attache une sainteté particulière, ne dépendent pas de la sexualité. Songez par exemple à l’amitié, aux rapports parentaux et à la multiplicité des associations quotidiennes qui gèrent les rapports sociaux humains et dans lesquels la sexualité n’a peu sinon aucune place ou importance. Il est plus raisonnable de lier l’affirmation « homme et femme il les créa » au commandement de « multiplier » qui suit, plutôt qu’à la déclaration de la formation de l’homme selon l’image divine qui précède, puisque la différenciation et la reproduction sexuée, ou procréation, s’appartiennent.

Ainsi, conclut Hughes, l’image de Dieu en l’homme ne peut pas être démarquée en pointant à la différenciation et à la relation particulière qu’est la relation sexuelle. Il s’agit de l’image de Dieu en laquelle l’homme a été créé qui pénètre son existence dans sa totalité et qui est la cause de sa transcendance sur le reste de la création de Dieu. La vie de l’homme dans tous ses modes, y compris la dualité d’homme et de femme, est rehaussée et élevée par le fait central de sa constitution à l’image divine, qui le rend entièrement responsable devant son Créateur. Contrairement à Karl Barth, conclut l’auteur, la dualité homme femme n’offre pas la clé de l’intelligence de l’image divine en laquelle l’homme générique, et non mâle, a été formé.

Cette conclusion nous amène par conséquent à supprimer tout ce que nous avions affirmé antérieurement et qui ne nous paraît pas se fonder solidement sur une exégèse et une théologie biblique rigoureuses. La section antérieure supprimée, comprenant des considérations sur la Trinité et les relations entre les trois personnes de celle-ci, même si en un certain sens était correct, nous éloignerait beaucoup trop de notre sujet.

4. Un reflet de la relation entre Jésus-Christ et son Église🔗

La sainteté du mariage apparaît surtout dans le fait qu’il reflète la relation entre Jésus-Christ et l’Église chrétienne. Trois mystères fondamentaux, la sainte Trinité, l’incarnation du Fils de Dieu et l’union du Christ avec son Église remplissent toute la révélation biblique. À lui seul, le mariage chrétien reflète ces trois mystères. En instituant le mariage, Dieu ne songera pas à lui-même, si l’on peut s’exprimer de la sorte. Dans son dessein bienveillant, il prévoyait déjà le temps où, à cause de la chute, devait apparaître le second Adam, Jésus-Christ, son Fils unique, le Seigneur et la Tête de l’Église. Ainsi, sur les pages de la Bible s’offrent deux modèles pour le mariage : d’une part, l’être trinitaire de Dieu, d’autre part l’union du Christ avec son Église. Le mariage n’appartient pas exclusivement au domaine de la création, mais encore à celui de la rédemption. Le texte paulinien d’Éphésiens 5.22-23 traite de cette idée essentielle.

Parfois, il nous semble étrange que les enfants devenus adultes doivent abandonner leurs parents pour s’attacher à un étranger ou à une étrangère. Tout enfant pensera inconcevable qu’il y eût un temps où son père et sa mère ne se connaissaient pas. Pourtant, un jour, il découvrira qu’il existe dans la vie une relation plus profonde encore que celle qui le lie à ses parents. C’est de cette manière analogique que nous pourrions saisir le rapport entre nous et Adam, notre ancêtre commun. Il est notre « père » à tous. Et toute la race humaine, malgré toutes ses diversifications raciales ou linguistiques, descend de lui. Comparée à cette relation « naturelle », physique et psychique, notre relation avec le Christ paraîtra sensiblement abstraite, peut-être même irréelle. Il nous semble plus facile de comprendre que le péché et la corruption furent introduits dans le monde et dans notre existence par l’intermédiaire d’Adam, mais plus difficile de nous imaginer qu’en Christ nous avons été crucifiés et ressuscités, que sa justice et sa sainteté soient devenues les nôtres. Quiconque connaît le mariage, soit par expérience soit par observation, ne verra pas la difficulté d’une union transcendant celle d’avec ses propres progéniteurs humains. La relation du Christ avec nous se reflète dans notre union conjugale. Deux personnes mariées deviennent mutuellement possesseurs et possession (1 Co 7.4-5).

Déjà dans l’Ancien Testament les relations de Dieu avec le peuple élu étaient illustrées par l’analogie du mariage. Les prophètes de l’Ancien Testament ont eu recours à l’image de l’union conjugale pour assurer le peuple de Dieu de son amour envers lui (És 54.5). De même, l’apostasie et l’infidélité religieuse ont été illustrées en matière d’infidélité conjugale. Le plus poignant des livres de l’Ancien Testament, celui du prophète Osée, est bâti autour de ce thème dramatique.

En outre, la sainteté du mariage se révèle dans le fait que son composant essentiel se nomme amour. C’est l’amour et non une cérémonie légale qui unira réellement un homme et une femme pour faire d’eux une « seule chair ». Le Dieu de la révélation est amour et, en-dehors de lui, il n’en existe point. Les modernes parlent et chantent l’amour en termes de « divin ». Sans doute ne connaissent-ils pas exactement la portée de leur discours. Pourtant, même les incroyants rencontrent l’amour au cœur de leur mariage. La littérature mondiale, depuis l’antiquité, nous offre maints exemples d’amour et de fidélité conjugale. Sur ce chapitre, les « enfants de ce siècle » pourraient parfois nous confondre, nous autres « enfants de lumière ». Soyons reconnaissants à Dieu de ce que l’amour ne soit pas le seul apanage des chrétiens, ce qui prouve une fois de plus que l’action générale de Dieu opère dans la vie de tout homme, même dans celle de ceux qui ne le connaissent pas, qui lui résistent ou qui le rejettent.

5. La source du véritable amour🔗

Cependant, en définitive, il n’y a que le chrétien qui puisse connaître et reconnaître la source et la nature véritable de l’amour. Nous n’oserons pas affirmer que l’amour véritable pourrait provenir de n’importe quelle source et qu’avec désinvolture nous dirions : « Pourvu qu’on s’aime »! De même que l’incroyant n’a pas une connaissance correcte et suffisante de l’ordre de la réalité créée qui l’entoure, ni du sens de l’univers, pas plus que de sa propre existence, de même, en dernière analyse, il ignore la véritable signification de l’amour dans la totalité de sa portée. Il n’y a que le chrétien qui puisse déclarer : « Nous aimons parce qu’il nous a aimés le premier. » On pourrait rétorquer certainement que les règles de l’arithmétique sont universellement valables et que, pour tout homme logique, deux et deux font quatre toujours et partout. Nous ferons remarquer que tel n’est pas absolument le cas, puisque selon l’intelligence de la foi chrétienne, deux et deux ne font quatre que parce que le Dieu Créateur en a ainsi décidé!

Il en est ainsi du mariage et de l’amour qui l’habite et l’anime. Ôtez toute référence à l’Évangile et supposez un instant qu’il n’existe aucun critère chrétien pour les relations entre personnes et individus, classes sociales et races. Notre monde cesserait aussitôt d’être un endroit vivable pour devenir un enfer total. Or, en dépit de cette ère appelée « post-chrétienne » et de la sécularisation moderne des coutumes et des habitudes, l’esprit chrétien qui a pénétré la société maintient celle-ci dans une situation vivable.

Pensons à l’exemple de l’amour maternel. Est-il exact qu’il soit dû à un sentiment d’affection naturel? Selon le passage de Romains 1, il existe nombre de gens dépourvus de toute affection naturelle. Là où la grâce de Dieu est absente, non seulement l’amour fera défaut, mais encore sera absent de ce que nous appelons l’instinct maternel. Qu’en serait-il de notre société si la loi ou l’opinion publique, et surtout l’exemple chrétien, étaient totalement absents? Nous vivons malgré tout à une époque et dans une société passablement imprégnées de christianisme, d’idées et de morale chrétiennes bibliques. Au temps de l’Église primitive, les païens montraient les chrétiens avec admiration : « Regardez comme ils s’aiment! » Cela nous amène à ajouter que, même si, grâce aux soins de Dieu, l’amour se manifeste encore dans le monde hostile à Dieu, le chrétien, lui, par son exemple, dépassera son voisin non chrétien (Mt 5.46). Si l’amour rencontré ou perçu chez le non-chrétien est de nature à nous confondre et à nous appeler à l’humilité, rappelons-nous qu’il n’est rien de moins que l’effet de l’action de Dieu limitant les effets de la corruption dans le monde.

6. Le couple participe à l’œuvre de création🔗

Finalement, le caractère sacré du mariage, institué par Dieu, apparaîtra dans le fait que le couple participe directement à l’œuvre de la création. Que l’homme soit une créature de Dieu est déjà en soi un fait remarquable (voir Ps 139). Mais il existe un fait plus merveilleux encore : celui de savoir que cette créature peut en engendrer une autre, à son image et selon sa ressemblance.

On s’est souvent posé la question de savoir si l’homme était supérieur ou non aux anges. Certains ont fondé la supériorité de l’homme dans la réalité de son existence physique. Les anges, dit-on, doivent servir l’homme, ce qui montre qu’ils lui seraient inférieurs. On a également soutenu qu’hommes et anges sont des esprits, à ceci près que les premiers possèdent en outre un corps. À notre avis, la différence essentielle entre ces deux créatures ne réside pas sur ce point. « Être créé à l’image de Dieu » signifie, entre autres choses, être capable de se reproduire par l’instrumentalité du corps. Bien que créatures merveilleuses, les anges ne peuvent se reproduire. Ils n’ont pas de sexe! À l’heure actuelle, il n’existe pas un seul ange qui n’ait été créé dès le premier jour! Tandis que l’espèce humaine se reproduit à chaque génération, les anges, eux, ne connaissent pas la joie de la procréation et ils ne savent pas ce qu’est d’être cocréateur avec Dieu.

Grâce à la naissance du Christ, l’homme bénéficiera du salut offert par le Fils incarné de Dieu, qui prit sur lui notre chair lors de sa naissance et devint semblable à nous. C’est par l’incarnation qu’il a pu expier nos fautes. Le Rédempteur n’aurait pu s’incarner… d’une autre manière! Il ne se serait pas incarné! Il n’y aurait pas eu de Rédempteur issu des rangs angéliques. Il n’existe point de famille d’anges. En revanche, c’est grâce à la médiation de la famille que le salut nous est acquis, tandis que les anges rebelles n’ont jamais eu une seconde « chance » après leur révolte d’être sauvés.

On pourrait objecter que les animaux, eux aussi, se reproduisent! Certes, mais la ressemblance demeure purement d’ordre physique. Leur « progéniture » meurt et disparaît à jamais. Telle n’est pas la destinée de l’homme qui est appelé à l’immortalité par la résurrection de la chair pour hériter la vie éternelle.

Diverses théories ont tenté d’expliquer la manière dont l’être humain prend naissance et la manière dont l’âme se transmet des parents à leurs enfants. Énumérons-les sans les développer. La recherche d’une meilleure anthropologie biblique ne nous permettra pas d’adopter l’une ou l’autre de ces théories. Notre propos n’étant pas d’offrir une définition anthropologique, nous nous bornerons à mentionner trois de ces théories en soulignant que la troisième reste la favorite des théologiens calvinistes.

1. Dieu aurait créé simultanément toutes les âmes. L’âme particulière de chaque « individu » serait ajoutée à son corps au moment de sa naissance. Avant une telle union, son âme se trouverait dans un état inconscient. Cette théorie de la préexistence détruit l’unité de la race humaine. Si elle était correcte, les hommes seraient « distincts » les uns des autres, à la manière des anges, ce qui ôte toute possibilité d’admettre l’unité de la race humaine.

2. Le « créationnisme » (la théologie luthérienne s’en est réclamée) pense que l’âme serait créée par Dieu en même temps que le corps. Le défaut de cette théorie consiste dans l’idée que Dieu continue à créer après les six jours de la création. Or, d’après le témoignage de l’Écriture sainte, la création parfaite a été achevée avant le septième jour. Autrement, Dieu nous aurait créés tous, individuellement, de manière isolée. Si ç’avait été le cas, Dieu créerait actuellement des êtres imparfaits… Cette théorie détruit l’unité du genre humain.

3. Le traducianisme admet que l’âme est créée par Dieu par l’intermédiaire de la procréation humaine. Nous recevons de nos parents non seulement le corps, mais encore l’âme, c’est-à-dire toute notre personnalité.

Pour notre propos, ce qui est important c’est de savoir que Dieu ne crée pas sans le concours de l’homme. Or, l’homme seul n’aurait pas pu donner naissance à d’autres hommes. Ici intervient donc l’institution du mariage. Nul d’entre nous ne peut individuellement devenir procréateur. Il faut le concours d’un couple, homme et femme. (Nous n’aborderons pas dans ces pages l’hypothèse, voire la possibilité envisagée du cloning!). Le fait que, lors de son incarnation, Jésus a suivi une voie extraordinaire, recevant son humanité exclusivement de sa mère vierge, reste exceptionnel et impossible à se répéter. Tout enfant normal naîtra d’un père et d’une mère. Quelle tragédie lorsqu’un couple ne peut se rendre compte de cette sacralité du mariage!