Cet article sur Matthieu 1.23 a pour sujet l'incarnation et la naissance du Fils de Dieu, la venue sur terre de l'Emmanuel, Dieu avec nous. Il s'est fait homme et s'est identifié à nous afin d'aller mourir sur la croix pour notre salut.

Source: Croire pour comprendre. 4 pages.

Matthieu 1 - Emmanuel, Dieu avec nous

« Voici que la vierge sera enceinte; elle enfantera un fils et on lui donnera le nom d’Emmanuel, ce qui se traduit : Dieu avec nous. »

Matthieu 1.23

Que la fête de Noël soit devenue la grossière caricature de la joie qu’apporte la naissance de Jésus, il n’est nul besoin de le démontrer. Réjouissances païennes, ripailles indécentes, affaires en marche, le tout accompagné de l’ignorance la plus totale de la signification véritable de cette commémoration, ont obscurci le sens de l’événement extraordinaire, le plus extraordinaire qui soit dans l’histoire des hommes : à savoir la naissance du Sauveur.

Incapables de mettre fin aux festivités de mauvais aloi et aux mobiles mercantiles, nos cœurs, au lieu de se réjouir, s’affligent un peu plus à l’approche de Noël. À tel point que nous souhaiterions parfois supprimer cette saison de notre calendrier chrétien. Impuissants et affligés, nous assistons au spectacle de la préparation quasi frénétique de ces fins d’année. Les interminables files d’attente dans les magasins, le lèche-vitrine devant les devantures achalandées, l’affairisme des fabricants et des commerçants… Ces hommes et ces femmes épuisés peuvent-ils encore décemment célébrer Noël comme une fête chrétienne? Est-ce la Bonne Nouvelle qui retentira dans des oreilles recueillies ou bien le vacarme des festivités païennes?

Autrefois, il y a bien des siècles de cela, l’Église chrétienne, armée de la pureté de sa foi et forte de ses convictions évangéliques, avait réussi à transformer une fête païenne en anniversaire de la naissance du Fils de Dieu. On se souvient que, dans le monde romain, le 25 décembre était la fête du solstice d’hiver annonçant le prochain et imminent retour du soleil. Qu’y avait-il de plus indiqué, pensèrent les chrétiens, que de faire de cette date et de cette fête païenne une date au contenu chrétien? Selon le cantique de Zacharie, le soleil levant n’avait-il pas déjà visité ceux qui vivaient dans les ténèbres?

Il fallait annoncer au monde non chrétien le salut offert par la naissance du Sauveur. De nos jours, nous assistons, hélas!, au renversement des rôles. La démission des chrétiens en ce domaine est flagrante. Nous assistons à la résurgence du paganisme. Toutes ces lumières artificielles, ces décors de carton, le symbolisme même du Père Noël sont là pour nous en convaincre. Un paganisme nouveau et agressif s’infiltre et s’empare de l’existence des hommes de notre génération.

D’aucuns nous feront remarquer qu’il n’y a pas lieu de s’affliger. Après tout, un peu de frivolité à la fin d’une longue et morne année, n’est-ce pas chose nécessaire? Comment concevoir Noël avec des esprits mélancoliques et des visages allongés?

Loin de nous la pensée de proposer un Noël attristé par un excès de sévérité! Bien au contraire, nous voulons vous inviter à participer à cette fête avec votre cœur et avec toute votre joie. Mais nous voulons vous donner surtout les véritables raisons d’une telle joie.

Cette joie découle de l’incarnation du Fils de Dieu, de l’apparition parmi les hommes d’Emmanuel « Dieu avec nous ». Notre foi n’est pas fondée sur un système de pensée humaine hautement élaboré, sur un système moral très élevé, ni sur des formules de sagesse et de bon sens. Elle est encore moins une légende que l’on devrait démythifier pour l’adapter à la mentalité présente et aux besoins des hommes d’aujourd’hui. La foi chrétienne est fondée sur la révélation, sur un événement qui s’est déroulé dans l’histoire ordinaire des hommes, sous Auguste, Tibère, Hérode et Ponce Pilate. Enfin, c’est un événement dont la répercussion sur notre vie est décisive et radicale. La foi chrétienne est tout à la fois doctrine, histoire et expérience.

Vous connaissez l’engouement de nos contemporains pour les extra-terrestres : soucoupes volantes ou habitants d’autres planètes tiennent périodiquement la vedette de l’actualité et alimentent l’imagination des hommes. Comme si ces derniers avaient toujours gardé la secrète nostalgie d’un autre monde et qu’ils souhaitaient renouer avec ce monde-là, d’où l’homme fut banni, mais qu’il n’a jamais cessé de chercher avec une obstination passionnée.

D’après l’Évangile et la confession de foi de l’Église, Dieu en personne est venu nous rendre visite. Foulant aux pieds nos conceptions sur Dieu, l’Évangile montre qu’en Jésus de Nazareth, Dieu s’est fait homme et qu’il a participé à toutes les limitations propres à la créature humaine. Le Dieu inaccessible par sa grandeur et par sa majesté a pris notre mesure. Il s’est identifié si complètement à l’homme qu’il est devenu « chair et sang », a eu faim et soif, a souffert et finalement est mort.

L’Évangile ne nous explique pas le comment de l’incarnation. Il constate avec étonnement et témoigne avec force qu’un homme comme nous, exposé à toutes les absurdités qui marquent nos jours terrestres, et sujet à toutes les tentations qui nous assaillent, est resté à la fois homme et Dieu. Renonçant à la lumière, il s’est enveloppé de nos ténèbres pour mieux nous aimer. Cette naissance dans une bourgade orientale d’un enfant pauvre et démuni est le fait le plus important de toute l’histoire de l’humanité. Depuis ce jour-là, l’histoire se divise en deux périodes : il y a avant Jésus-Christ et il y a après Jésus-Christ.

Mais l’incarnation n’est pas une fin en soi. Le Fils de Dieu est venu pour une œuvre précise et pour une heure précise. Il a cherché cette heure et il l’a vécue. L’incarnation est devenue le moyen de notre salut. « Emmanuel » doit porter un prénom humain ordinaire, celui de Jésus, qui signifie « Sauveur ». C’est l’heure précise de la coupe amère, du baptême mortel, l’heure de l’enfantement douloureux et celle de la croix, lorsqu’il donna sa vie en rançon pour la multitude. Il devint le remplaçant qui subit à notre place le châtiment de Dieu. Il subit en sa personne la colère de Dieu et le fardeau du péché; et sur la croix du Calvaire se révéla d’une manière incompréhensible, mais certaine la justice de Dieu. « Celui qui n’a pas connu le péché, il l’a fait devenir péché pour nous » (2 Co 5.21).

Le drame de notre perdition et de notre salut ne se joue pas en dehors de lui. Il vint pour nous replacer dans le bon ordre, pour montrer que le mal qui nous frappe n’est pas la différence entre le fini et l’infini, mais dans la rupture de l’alliance, dans notre trahison personnelle, dans notre révolte absurde contre Dieu. La rédemption balaye toutes nos excuses. Elle nous met en cause personnellement. Elle dégonfle la baudruche de notre vanité, démasque notre mensonge et notre condition devant Dieu. Tout s’effondre en la présence du Dieu de Bethléem et du Golgotha. Oui, les premiers chrétiens avaient raison quand ils disaient que la crèche et la croix étaient faites du même bois!

L’incarnation, la venue d’Emmanuel — du Jésus Sauveur — est l’inauguration d’une ère nouvelle, l’offre d’une vie renouvelée. En ce sens, nous pourrions dire qu’il est vain de croire à la naissance du Christ si le Sauveur ne prend pas possession de nos vies. Avoir le Christ en nous signifie justement avoir saisi ce salut dont nous avons un si urgent besoin. « Lorsque l’enfant naît, le cercle de famille applaudit à grands cris », écrivait Victor Hugo. Pourtant, s’il est vrai que toute naissance est l’occasion de joie, il est aussi légitime d’évoquer le tragique de la naissance. Naître signifie devoir occuper une place qu’on n’a pas postulée, assumer une responsabilité qu’on n’a pas cherchée, vivre une vie et mourir d’une mort qu’on n’a pas désirée. Job exprime le tragique de la naissance et de la vie dans une interrogation qu’un jour ou l’autre chaque homme aux prises avec la souffrance fait monter vers le ciel : « Pourquoi m’as-tu fait sortir du sein maternel? » (Job 10.18). Effectivement, nul d’entre nous n’a choisi de venir au monde.

« Personne n’a choisi de vivre cette vie qui tour à tour nous enthousiasme, nous inquiète ou nous effraie. Malgré nous, nous sommes propulsés dans l’existence où notre sort est d’être étrangers à nous-mêmes et étrangers vis-à-vis de Dieu. Nous subissons, dès notre premier cri, tout le poids de l’existence et chaque jour nous en augmentons la culpabilité. » (H.M. Matter et P. Verseils, La foi mise en question).

Mais voilà « Emmanuel », Dieu est avec nous, et cette étonnante vérité vient éclairer toute notre existence dès notre venue au monde. Le Fils de Dieu est né et il est mort pour nous libérer.

Quiconque rencontre Jésus aujourd’hui dans sa Parole, sur les pages de l’Écriture et dans le rendez-vous fixé par son Esprit, n’est pas un souffle insignifiant, une passion inutile destinée uniquement à souffrir et à mourir. Il appartient à une race nouvelle, solidement ancrée dans les profondeurs de l’éternité.

Par la foi en « Emmanuel », des hommes et des femmes ont goûté à travers les siècles — à présent comme jadis — cette nouveauté de vie. Toutes nos souillures ont été balayées pour faire apparaître la pureté; l’anxiété a cédé la place à la sérénité, et les nourritures terrestres, insuffisantes et souvent immondes, sont remplacées par le Pain de vie qui descend du ciel.