Cet article a pour sujet le salut en Jésus-Christ qui procure le pardon et la vie éternelle. Toutes les autres religions (paganisme, religion des Égyptiens, mazdéisme, bouddhisme, islam, État moderne) ignorent l'idée du salut.

Source: Le salut et la conversion. 3 pages.

Notre salut en Dieu

Délivrance, préservation, victoire, voire santé physique, tels sont quelques-uns des sens, riches et variés, du terme biblique « salut » (sotéria en grec). Salut aussi bien spirituel et éternel que physique et matériel. Une certitude éclatante du triomphe final perce dans chacun des sens évoqués plus haut.

L’idée païenne du salut est tout autre. Là, le terme salut signifie essentiellement fuite. Et le deus ex machina du théâtre gréco-romain en offre une excellente illustration. Il apparaît soudain sur scène, au moment où l’on s’y attend le moins, pour sortir l’homme qu’il choisit des impasses inextricables où il s’est embourbé. Homère, dans l’Iliade, nous offre un bon exemple de l’intervention de ce deus ex machina dans le cas de Pâris. Ménélas, le mari trompé de la belle Hélène, rencontre son rival et l’accule à une position plus qu’inconfortable. Le séducteur se trouve dans une situation de véritable détresse; mais Vénus arrive à son secours et délivre le jeune homme. Elle l’enveloppe d’obscurité et le conduit dans sa chambre parfumée. Puis elle appelle Hélène auprès de son amant, et alors tous les deux se dirigent vers le lit.

On a dit de la religion des Égyptiens qu’elle était le bonheur et la béatitude posthumes, car elle ne promettait de félicité qu’après la mort. Cette religion ne connaissait aucun salut temporel, mais uniquement une retraite éternelle. Ses dieux orientent l’adepte vers une sortie de secours, mais jamais vers une victoire qui domine la situation présente. D’ailleurs, les dieux égyptiens eux-mêmes étaient incapables de contrôler la situation. Ils pouvaient même faire l’objet d’une menace, par exemple de la part d’un amant qui n’obtiendrait pas satisfaction. Le Livre des Morts égyptien fait dire à Osiris : « Je suis celui qui vient pour avancer, dont le nom est inconnu. Je suis le jour d’hier. » Osiris, le dieu égyptien, est la force qui évolue du jour passé, mais qui ne connaît ni son nom ni sa nature. Simultanément produit et producteur, il est autant cause qu’effet.

La religion mazdéenne de l’ancienne Perse ne connaissait pas davantage l’idée de salut. Son dualisme, c’est-à-dire, l’affirmation de l’égalité des forces du bien et du mal, l’empêche d’envisager une quelconque possibilité de salut à la manière de l’Écriture chrétienne. Ahura Mazda est incapable de sauver, car il est sans cesse engagé dans une guerre impitoyable contre son rival Angra Mainyu, l’esprit du mal. C’est l’homme qui doit œuvrer tout seul pour acquérir son salut. Mais un monde où l’homme doit travailler pour sa propre délivrance et dans lequel ses dieux ne lui sont d’aucun secours, n’est-il pas le monde de l’absurdité totale? C’est pourquoi le pessimisme hante les esprits et surplombe les autels païens, et la désintégration finale demeure la seule attente et le seul avenir.

Tel est aussi le cas du bouddhisme. Chez lui, toute l’existence implique la souffrance due aux désirs insatiables du mortel. La souffrance ne se terminera que lorsque l’on saura vivre dans la modération et que l’on ne désirera plus rien. Remarquons que le bouddhisme n’établit aucune distinction entre bons et mauvais désirs. Car tout désir devra être supprimé dans le nirvana. Le nirvana signifie l’oblitération de toute conscience, de tout désir, de toute perception, voire de tout sentiment et de toute émotion. Il procure une paix privée d’émotion, au-delà de toute conscience, au-delà même du néant. Le moine bouddhiste prétend connaître ou éprouver, dès ici-bas, le vide absolu de l’esprit et de sa propre personnalité.

Une autre religion, l’islam, est, elle aussi, malgré l’apparence trompeuse d’activités extérieures, une religion de fuite. Elle ne connaît pas de salut véritable. À ses yeux est croyant celui qui l’est extérieurement, par des actes extérieurs et légalistes. Quelques points de son catéchisme offrent un aperçu de son essence : répétition des formules, prières cinq fois par jour, pratique de l’aumône, observation du grand jeûne annuel, et, enfin, pèlerinage dans un lieu réputé saint. Dans le livre sacré de l’islam, on ne rencontre qu’une seule fois le terme de salut (naja). Mais ce salut n’est qu’un procédé pour échapper aux châtiments de l’enfer. Il ne signifie pas une véritable transformation de la personne dès ici et maintenant. Comment le pourrait-il, puisqu’il ne connaît pas la vraie notion de péché et ne voit pas la nécessité d’une véritable conversion? Son seul but est de le soustraire aux peines à venir. Et puis c’est tout.

Les peuples teutoniques ne connaissent pas, eux non plus, l’idée de salut. Ils ne cherchaient qu’à fuir les effets des puissances maléfiques. La victoire remportée sur celles-ci n’était qu’une victoire extérieure, car la victoire païenne ne signifie jamais régénération de la personne. Elle est un subterfuge pour échapper à l’emprise d’un mal extérieur à l’homme. Toutes les religions païennes, version ancienne ou moderne, ignorent l’idée du salut tout simplement parce qu’elles refusent le Dieu des origines. Elles ne connaissent pas d’univers moral dans lequel serait possible une victoire morale. L’idée du péché leur étant étrangère, elles se font de l’homme une idée tout à fait erronée. Car dans le paganisme, l’homme cherche à se débrouiller tout seul et à échapper aux problèmes extérieurs qui se dressent devant lui. L’homme prépare tout simplement sa retraite et, en attendant d’y parvenir, il refuse d’assumer sa responsabilité morale devant Dieu ici et maintenant. Il refuse d’admettre qu’il est moralement coupable vis-à-vis de Dieu. L’échec de la religion païenne à offrir un salut n’est pas fortuit; il est dû au fait qu’elle dénie toute autorité au Dieu souverain. Elle retient donc la vérité de Dieu captive. Aussi, à la place de salut elle offre, ou prétend offrir, une retraite.

On me fera remarquer que cette idée est largement répandue même chez des chrétiens. J’en conviens. Nombre de chrétiens ont transformé la foi au Dieu vainqueur en une police d’assurance pour se protéger des peines éternelles…

Quelqu’un exprimait d’ailleurs parfaitement cette idée avec un sarcasme blasphématoire : « La meilleure façon de tirer parti de l’existence serait de se convertir cinq minutes avant sa mort! » En effet, nombre de chrétiens ont été contaminés par l’idée païenne du salut. À leurs yeux, le salut n’est que sécurisation, assurance tout risque. Jamais une transformation morale actuelle. Il n’y a pas de prise de conscience des responsabilités qu’implique ici et maintenant la conversion au Dieu unique et souverain. Cette conception parachrétienne du salut se contentera alors de rites et de cérémonies vides de sens, d’une pratique légaliste et formelle de la foi, sorte de prévision et de prévoyance au cas où…

Remarquons qu’à l’heure actuelle le pouvoir politique, quelles qu’en soient la forme et la couleur, prétend assurer à l’homme cette espèce de prévision. Comme jadis l’empereur romain, l’État est considéré à l’heure actuelle comme sauveteur et providence. L’État moderne est la personnification de l’idée païenne du salut. Dans la politisation radicale et quotidienne de la vie, on attend de l’État qu’il assure à tout prix la sécurité de tous, depuis la crèche jusqu’à la tombe. À la providence chrétienne se substitue le régime de la sécurité sociale…

Or, Dieu seul, celui qui s’est révélé aux prophètes et qui a parlé par la bouche des apôtres, le Dieu Père, Fils et Saint-Esprit, est l’unique Sauveur. Il est celui qui, au commencement, créa les cieux et la terre et devint le Rédempteur en Christ-Jésus. Le salut selon la Bible est libération, tandis que le salut politisé, en dépit des slogans, est synonyme d’oppression et usine d’esclavage. Et ce qui est encore plus grave, il est la contrefaçon de la rédemption par pure grâce à travers la foi en Christ, le Fils de Dieu.

L’homme chrétien, celui de la foi, ne placera pas sa confiance en aucune idole, version ancienne ou moderne. Il n’accordera pas à l’État le droit de régir son existence et sa conduite, et n’acceptera pas que celui-ci lui impose sa pseudo-providence dans tous les domaines de la vie. Car Christ est le seul qui l’affranchit du mal radical appelé péché, et qui l’arrache au pouvoir de la mort et aux griffes démoniaques de l’Adversaire.

La religion païenne fait dire à son adepte : « Mangeons et buvons, car demain nous mourrons » (1 Co 15.32). Le chrétien connaît un autre motif; celui du : « Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur » (Ph 4.4). Il attend un avenir heureux parce que, dès à présent, il a été aiguillé, non pas vers une hypothétique sortie de secours, d’ailleurs véritable impasse, mais sur la voie de la vérité, et cela pour toute sa vie. Dès à présent, il se sait participant de la vie éternelle et transporté, en Christ, dans les lieux célestes.

Assuré, confiant, heureux et même victorieux, il pourra dire avec l’apôtre Paul chaque jour et jusqu’à la fin : « Je n’ai pas honte de l’Évangile; c’est une puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit » (Rm 1.16).