Cet article sur le Symbole de Nicée-Constantinople a pour sujet l'ascension de Jésus (Actes 1.9), que la science ne peut pas prouver, mais qui nous garantit notre place au ciel et nous assure sa présence par son Esprit et sa divinité.

Source: Nous croyons - Explication de la foi chrétienne en suivant l'ordre du Symbole de Nicée-Constantinople. 5 pages.

Nous croyons - L'ascension du Christ

« Il fut élevé pendant qu’ils le regardaient, et une nuée le déroba à leurs yeux. »

Actes 1.9

Parler encore aujourd’hui de l’ascension de Jésus et de sa session à la droite de Dieu doit susciter chez les uns de sérieuses objections intellectuelles et chez d’autres une ironie sceptique. Que peut signifier de nos jours l’expression du Symbole de Nicée-Constantinople : « Il est monté au cieux, il s’est assis à la droite du Père »? Notre conception du monde nous permet-elle des représentations préscientifiques imagées ou même naïves? Les trois niveaux du monde tel que se le représentaient les anciens — le ciel au-dessus, la terre au milieu et l’enfer en bas — ont cédé la place à une rigoureuse observation scientifique de l’univers. Notre astronomie est une science exacte, nous savons même quelle énergie est nécessaire pour propulser dans l’espace des engins avec des cosmonautes. Certains affirmeront qu’on doit reléguer cet article du Credo, ainsi que les récits de la Bible relatifs à l’ascension, dans le domaine des contes et des légendes qui gênent notre intelligence et qui sont inutiles pour notre connaissance du monde.

Ainsi la technique moderne et ses progrès sont tellement montés à la tête des hommes qu’ils ne tiennent pour vrai que ce qu’ils peuvent vérifier et contrôler. Et pourtant, si les seuls faits valables ou dignes de notre confiance étaient les travaux de laboratoire ou les données que nous pouvons obtenir des ordinateurs, d’ailleurs si souvent manipulées, les graves problèmes qui se posent à l’existence des humains resteraient sans aucune réponse satisfaisante. La connaissance scientifique n’a pas permis d’arrêter la guerre; bien au contraire, elle s’en est fait l’instrument le plus docile. Elle n’a pas déchiré l’épais brouillard du désespoir qui envahit et remplit tant d’êtres humains. Elle n’a pas été capable d’ôter l’embarras final devant la mort ni de donner une qualité nouvelle à notre vie. S’il ne restait aux hommes que le recours à la connaissance scientifique pour affronter et pour résoudre les problèmes, surtout ceux de leur propre existence, il vaudrait mieux qu’ils cherchent dès maintenant d’autres solutions pour combattre le chagrin et pour oublier leurs angoisses.

À cet égard, bien des jeunes sont en quelque sorte plus lucides. Terriblement et désespérément, faudrait-il ajouter, puisque faute de trouver une réponse acceptable à leurs questions, ils cherchent l’oubli dans les rythmes endiablés de leurs danses ou bien en absorbant des drogues. Mais lorsque la virulence de la sensualité s’amenuise et s’estompe; lorsqu’il ne reste plus aucune fougue ni apparemment aucune raison de vivre, faut-il se coucher et attendre la mort? Ou encore, se précipiter vers elle pour essayer de fuir une existence devenue intolérable?

Mais pourquoi ne pas accepter plutôt l’alternative de la foi, croire en l’ascension du Christ et à ce que confesse le Symbole de la foi chrétienne? Ceci exige, bien entendu, une très grande humilité de notre part. C’est dans une telle attitude que l’on découvre l’authentique humanité. Croire en l’ascension ne demande pas un sacrifice intellectuel. Croire, c’est accepter nos limites pour nous fier et pour nous confier en Dieu. Toutes les réalités de la vie ne peuvent pas être vérifiées à l’aide de la science.

Dans le domaine qui nous intéresse, Dieu n’a pas eu recours à une instrumentalité humaine. Il ne se rencontre pas au bout de nos recherches et il n’est jamais l’objet de notre découverte. Il ne peut pas être prouvé à coup d’arguments. Mais Dieu ne nous laisse pas seuls, abandonnés à notre destin tragique avec de fausses consolations, celles de la science y comprises. Il a pénétré notre monde avec toute la réalité de sa présence, il a habité parmi les hommes, il s’est manifesté comme le Dieu d’amour. Et maintenant, il intercède auprès de Dieu en notre faveur; il se tient devant lui pour plaider notre cause et pour régner sur le monde et sur nos vies. Nous pouvons vraiment prendre à la lettre ce que la Bible, sa Parole, nous dit à son sujet.

Que dit-elle au juste au sujet de l’ascension du Christ? Nous ne pouvons pas nous permettre de choisir dans la Bible tel texte et tel récit et en laisser d’autres de côté. En matière de foi, elle est la seule autorité, et notre raison ne peut pas être autonome, elle doit se soumettre à la Parole de Dieu. Ou bien la Bible est Évangile d’un bout à l’autre et nous l’acceptons, ou bien nous la contestons et alors elle n’est plus qu’un tissu de mensonges. Supprimez de ses pages le témoignage qu’elle rend à la résurrection, et la croix ne sera plus qu’une misérable défaite où meurent toutes nos espérances. Supprimez l’ascension et, à son tour, la résurrection perdra presque toute son importance. Inversement, supprimez la croix et la résurrection, et l’ascension se réduira à quelque apothéose trop éloignée de notre condition pour nous être d’aucun secours.

Plusieurs textes du Nouveau Testament parlent de l’ascension. Nous y trouvons des références directes ou indirectes. Le Symbole, prenant ces affirmations à son compte, nous montre son extrême importance pour notre salut. Comme la résurrection, l’ascension a trait avant tout à notre salut. Jésus lui-même avait d’avance annoncé à ses disciples qu’il remonterait vers son Père, là où il était auparavant, et il leur dit, dans les adieux de la chambre haute : « Je vais au Père, et vous ne me verrez plus » (Jn 14.12,19; 16.16). L’évangéliste Luc relate cet événement à deux reprises. Il le fait une première fois à la fin de son Évangile et la deuxième fois au début de son livre appelé « les Actes des apôtres ».

Luc relate l’ascension du Christ avec une simplicité empreinte de calme et de beauté. L’événement est décrit avec des mots simples, accessibles à tous, sans passion ni surenchère. Luc était un homme cultivé, un médecin d’origine grecque qui en savait certainement plus sur le monde et sur la science que nous ne sommes peut-être disposés à le reconnaître. Son récit n’a rien qui puisse choquer les auditeurs ou les lecteurs en quête de rigueur. Son langage dépouillé exprime l’émerveillement, avec une calme discrétion comme lorsque dans son Évangile il relate la naissance du Sauveur et les détails qui l’accompagnent. Il ne doute pas que ce qu’il rapporte est un fait historique, dont il veut être le messager, c’est-à-dire le témoin qui y prend part. S’il avait employé un langage compliqué, peut-être son message aurait-il dépassé l’entendement humain et aurait produit plus de confusion qu’il n’aurait clarifié les choses.

Comme toute l’Écriture, Luc ne s’égare pas dans les descriptions détaillées, mais veut nous persuader en vue de notre salut, et en cela il est vraiment digne de notre confiance. Deux phrases résument l’ascension de Jésus : « Il fut élevé pendant qu’ils le regardaient, et une nuée le déroba à leurs yeux » (Ac 1.9). Quelle remarquable sobriété!

Quel est le ciel dont il parle? Où est-il? Dans l’Écriture sainte, le ciel dénote toujours la présence de Dieu. Là où il se tient, là est le ciel. Inutile de parler de Dieu étant là-haut ou là-bas, comme s’il s’agissait de lieux pouvant être localisés géographiquement ou spatialement, car cela ne nous avance pas beaucoup. Nous ne pouvons pas localiser ni pointer dans le cosmos l’endroit de l’habitation de Dieu. Pour la Bible, « là-haut » est une réalité qui pour le moment nous dépasse. Mais si Dieu a une place dans notre vie, le ciel commence déjà pour nous ici-bas. Il faut préciser toutefois que Dieu ne se confond pas avec sa création. Il est le Dieu transcendant.

L’évangéliste nous donne encore un autre détail : celui de la nuée. Nous avons ici également une expression typiquement biblique qui désigne la présence de Dieu dans un endroit précis. La nuée, nous dit l’Ancien Testament, précédait les Israélites en marche vers la terre promise. Elle venait camper aussi autour de l’assemblée du peuple dans le désert. Elle était en même temps le symbole de la sainteté de Dieu et de sa perfection. « Nuée brillante, claire et glorieuse », aucune créature ne pouvait l’approcher ou la regarder sans danger de mort. Jésus monta dans cette présence de Dieu, pénétra dans le domaine où se tient son Père et notre Père enveloppé de cette nuée.

Quelle est la signification de l’ascension? La confesser est pour le chrétien de la plus haute importance, à la fois existentielle et cosmique. Parce que Jésus-Christ a accompli sa mission sur terre, il a été reçu dans la gloire de Dieu. Quarante jours après sa résurrection, ses apparitions cessèrent. Son ascension prouva que Dieu l’avait vraiment ressuscité, que Jésus, le Christ, est vivant et ne peut pas mourir. Ses apparitions n’ont rien en commun avec les expériences des spirites, qui prétendent communiquer avec les morts. « Je suis sorti du Père et je suis venu dans le monde; maintenant, je quitte le monde et je vais vers le Père », avait dit Jésus (Jn 16.28). Il est vrai homme et vrai Dieu. Selon sa nature humaine, il n’est plus sur la terre, mais selon sa nature divine, sa majesté, sa grâce et son Esprit, il ne s’éloigne jamais de nous. Il s’agit d’une présence spirituelle parfaitement réelle.

C’est en notre propre nom que le Christ est entré dans le ciel de la même manière qu’il en était descendu pour nous. Il rend ainsi possible notre entrée dans la maison du Père et nous assure que la porte auparavant fermée par nos péchés nous est maintenant ouverte. Nous avons notre propre corps en sa présence dans le ciel, dès aujourd’hui. Il est la tête, nous sommes ses membres et il nous prendra avec lui là-haut. Il est le chef de cordée. Si nous mettons nos pas dans les siens, nous parviendrons à la même destination avec lui.

Il n’y a désormais plus de séparation entre le ciel et la terre. L’abîme qui les séparait a été comblé par lui. Jésus-Christ y intercède pour nous. Aussi longtemps que le mal, le péché et la mort domineront le monde, il partagera nos épreuves humaines et nos tribulations. La croix restera jusqu’à la fin dressée au cœur de Dieu. Notre Avocat a souffert plus qu’aucun être humain n’aura souffert sur cette terre; les souffrances du monde ont coûté beaucoup plus cher à Dieu qu’à nous-mêmes.

Ainsi, la venue de Jésus parmi nous et son retour au ciel ne représentent pas un engagement temporaire dans nos joies et nos tristesses, mais un engagement total jusqu’au jour où les tristesses, les soupirs et le mal disparaîtront définitivement. Jésus règne au ciel dans sa gloire. Sa victoire est déjà acquise. « Mon royaume n’est pas de ce monde », déclarait-il (Jn 18.36). À présent glorifié, il exerce les pleins pouvoirs que Dieu lui a délégués. En tant que vainqueur et souverain, il a reçu le nom le plus élevé. Il attend et prépare le temps où toutes choses, déjà assujetties, seront tout à fait soumises à Dieu. Les forces du mal en l’homme et dans le monde seront écrasées.

Pouvons-nous dire que dès maintenant le Christ règne sur nos vies? L’ascension adresse un appel de soumission totale, obéissante et joyeuse. Si elle n’est qu’une idée bizarre, si Jésus-Christ n’est pas monté au ciel, si son corps repose dans un sépulcre palestinien, alors il n’est pas nécessaire de l’adorer ni de le servir; oublions-le plutôt. L’Église chrétienne n’aurait aucune chance de survie si elle servait un sauveur mort.

« L’Éternel a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’aie fait de tes ennemis ton marchepied » (Ps 110.1). Jésus a réclamé pour lui cette place d’honneur et de puissance devant ses juges du Sanhédrin (Mt 26.64), proclamant par là, au moment même où sa cause paraissait irrémédiablement perdue, la certitude de la victoire.

« C’est l’expérience de cette victoire, commencée et rendue manifeste par l’intervention toute-puissante du Christ, même s’il reste pour le moment invisible, qui soutenait les persécutés et les martyrs sous les Césars. Les Césars ont disparu; l’expérience de la royauté victorieuse du Christ, elle, demeure.
Que signifient, à travers l’histoire et dans nos propres vies, la soudaine défaite des forces du mal, muselées par une main mystérieuse, les secours imprévus, les délivrances inespérées et les prières exaucées à l’heure où tout appui fait défaut, sinon l’intervention de celui qui est assis à la droite de Dieu? C’est lui que le diacre Étienne, dans sa vision de martyr, voyait debout comme s’il allait descendre vers son témoin, l’arracher à ses bourreaux et l’endormir doucement dans ses bras… 1»

Si nous cherchons avec une foi vivante et ferme notre salut et celui des hommes, nous devons accepter ce fait et répéter avec le Credo de l’Église universelle : « Il est monté aux cieux, il s’est assis à la droite du Père »! Oui, le Christ règne; il veille, il relève et sauve. Que craindraient ses fidèles? Il est à la droite de Dieu et il intercède pour nous! (Rm 8.34).

Note

1. A. Westphal.