Cet article a pour sujet le refus des militants du transgenrisme de reconnaître leur responsabilité à l'égard des atrocités commises contre les personnes qui ont "transitionné" et leur volonté de rejeter la responsabilité sur les chrétiens et les conservateurs.

3 pages. Traduit par Paulin Bédard

Nous serons tenus pour responsables des crimes commis par les transgenres

Il y a plusieurs années, j’ai assisté à une manifestation de rage devant la bibliothèque publique de Toronto. La féministe Megan Murphy, partisane de la critique du genre, avait été invitée à s’exprimer, et les militants transgenres canadiens ont considéré cette invitation comme une menace active pour leur existence même. Regarder la foule hurler et menacer ceux qui assistaient à un événement auquel participait une oratrice qui défend des points de vue progressistes sur pratiquement tous les sujets a été profondément troublant, et je me suis interrogée : Si c’est à ce point qu’ils détestent quelqu’un qui partage l’essentiel de leur vision du monde, à quel point détestent-ils le reste d’entre nous?

C’est alors, en observant leurs visages contorsionnés, que j’ai réalisé qu’il n’existait aucun scénario dans lequel ces personnes admettraient un jour qu’elles avaient tort. L’envie est l’une des formes les plus puissantes de la haine, et ils ne se contenteront jamais de laisser les chrétiens élever leur famille en paix. Même lorsque l’expérience transgenre s’effondrera — un processus qui a commencé — même alors, je le soupçonne, ils s’en prendront à nous avec acharnement. Lorsqu’ils se retrouveront impuissants, stériles, physiquement et physiologiquement endommagés, nous serons tenus pour responsables de leur misère.

Pour de nombreux militants transgenres et personnes transidentifiées, il sera hors de question de rejeter la faute sur le mouvement transgenre. Depuis plusieurs années, je pense que nombre d’entre eux chercheront à rejeter la responsabilité sur les chrétiens et les conservateurs pour les retombées mêmes dont nous les mettons en garde depuis le début du phénomène transgenre et de la médicalisation de masse des enfants dysphoriques. Ils nous reprocheront non seulement d’avoir fait campagne contre le changement de sexe des enfants, mais aussi d’être responsables de la souffrance de ceux qui ont subi ces opérations.

La vision optimiste que nous pouvons avoir de la trajectoire du mouvement transgenre est que la bulle idéologique éclatera lorsque le flot de personnes ayant subi une détransition qui racontent leur histoire se transformera en raz-de-marée et que les professionnels de la santé qui ont causé les dommages seront inondés de procès. Il y a de bonnes raisons d’être optimiste, qu’il s’agisse de l’abandon, dans de nombreux pays européens, du modèle dit « affirmatif » de prescription de bloqueurs de puberté et d’hormones transsexuelles ou de procès importants tels que celui de la Britannique Keira Bell.

Mais comme je l’ai noté dans un précédent essai1, nombreux sont ceux qui ne seront pas en mesure d’accepter qu’ils se soient trompés sur le transgenrisme, en particulier les parents qui ont poussé leurs enfants sur la voie de la transition, en leur faisant prendre des médicaments et en les inscrivant à des opérations chirurgicales. Il y a aussi un autre groupe : les militants transgenres et les professionnels de la santé qui ont poussé à la mise en place de ces politiques et qui ont perpétré ces atrocités. Pour eux, admettre qu’ils ont tort, c’est avouer leur culpabilité, et leur radicalisme ne permettra pas cette conclusion.

Il semblerait que certains commencent déjà à défendre cette rhétorique. Helen Webberley, par exemple, est médecin et fondatrice de GenderGP, un service qui permet aux personnes transidentifiées, y compris les mineurs, d’entamer le processus de « transition ». Webberley a fait l’objet d’un scandale dans le passé, sa licence médicale lui ayant été temporairement retirée pour avoir fourni des bloqueurs de puberté à des enfants. Elle ne s’est pas excusée et affirme que son travail « sauve des vies ».

Récemment, Webberley a publié une déclaration sur X (anciennement Twitter) qui indique un changement dans la rhétorique que les activistes transgenres essaieront de créer autour des détransitionneurs, qui causent d’énormes dommages à leur mouvement et à leur crédibilité avec leurs témoignages personnels. Webberley a écrit :

« La détransition n’est pas l’accomplissement des “je vous l’avais bien dit” comme certains voudraient nous faire croire. Lorsque les personnes transgenres détransitionnent, elles ne disent pas “Oups, j’ai fait une erreur. J’ai changé d’avis, je ne suis plus transgenre”. Ce qui se passe en réalité, et je l’ai personnellement constaté à de nombreuses reprises au cours de ma carrière, c’est que les personnes transgenres essaient de vivre ouvertement dans le genre qu’elles préfèrent, et que la discrimination, la haine et les agressions qu’elles subissent n’en valent pas la peine. Elles sont toujours transgenres dans l’âme.
Cependant, la vie d’une personne ouvertement transgenre peut être difficile. Et après avoir vécu dans un monde qui ne leur témoigne que des agressions, de la discrimination et de la haine, il est souvent plus facile de retourner vivre en tant que personne transgenre en secret. La détransition ne signifie pas que la personne n’est pas transgenre. Cela signifie que leur transition a été regrettée, et ces regrets sont dus à la société actuelle. Les taux de détransition ne devraient JAMAIS être utilisés dans les débats sur les droits des transgenres. Les personnes transgenres ne changent pas d’avis; elles choisissent l’option la plus sûre pour survivre dans un monde qui pourrait refuser de les accueillir.2 »

Webberley est prise à partie — dans un langage très fort — par les détransitionneurs qu’elle mentionne sous cette déclaration, car ils sont à juste titre livides de constater qu’elle rejette leurs expériences. Il est toutefois extrêmement important de prendre note de sa déclaration, car elle élabore la rhétorique que je soupçonne depuis longtemps d’être celle à venir : L’agonie des personnes ayant subi une détransition n’est pas due aux activistes, chirurgiens et thérapeutes qui ont détruit leur corps et leur santé mentale, mais à la société transphobe qui a refusé de les accepter et qui les a donc « forcées » à détransitionner.

Il s’agit d’une stratégie insidieuse, mais astucieuse. Les détransitionneurs racontent-ils leurs regrets, leurs souffrances et leurs pertes? Malgré ce qu’ils disent, affirme Webberley, ils sont toujours transgenres. Les jeunes femmes qui pleurent la perte de leurs seins et de leur fertilité ne sont donc pas les victimes du mouvement transgenre, elles sont les victimes de ceux d’entre nous qui s’opposent au mouvement transgenre. Leur regret, dit Webberley, signifie qu’elles souhaitent ne pas avoir fait de « transition », mais elles sont toujours secrètement transgenres.

En bref, si un garçon de trois ans prétend être une fille, nous devons le croire et procéder immédiatement à sa transition sociale. Mais si une jeune femme partage son expérience vécue — comme tant d’autres l’ont fait ces dernières années — nous devons, selon Webberley, croire qu’elle ment. Quoi qu’elle dise, elle est toujours transgenre, et si elle ment, c’est parce que ceux qui s’opposent à l’idéologie du genre et aux changements de sexe pour les mineurs ont créé une société qui ne lui permettra pas de vivre en tant qu’homme. Sa souffrance est de notre faute.

Ne sous-estimez pas cette stratégie. Je soupçonne que la rhétorique de Webberley va s’imposer à mesure que les militants transgenres chercheront à neutraliser leurs critiques les plus virulentes, celles qui ont subi les conséquences prévues de leur idéologie. Leur première tactique a été de ne tenir aucun compte des personnes ayant subi une détransition; leur deuxième a été d’expliquer leur détransition comme étant celle d’une minorité marginale, un activiste faisant remarquer que toute forme de chirurgie (même celle du genou!) s’accompagne d’un certain regret après coup. Mais aujourd’hui, ils sont trop nombreux à détransitionner et une nouvelle rhétorique est nécessaire pour expliquer ce phénomène. Cette rhétorique est effrontément trompeuse, mais efficace, et conforme à l’approche du décervelage3 privilégiée par les activistes trans. Nous devons être prêts à y répondre.

Notes

2. Sur le compte X de la Dr Helen Webberley.

3. NDT : En anglais, l’auteur utilise le terme gaslighting connu en français sous le nom de détournement cognitif, que l’on peut également traduire par décervelage ou abrutissement. Il s’agit d’une forme de manipulation par laquelle l’information est déformée, présentée sous un autre jour, omise ou faussée, dans le but de faire douter la victime de sa mémoire, de sa perception de la réalité et de sa santé mentale. Le terme gaslighting provient de la pièce Gas Light de 1938 et de son adaptation cinématographique dans le film Gaslight d’Ingrid Bergman en 1944.