Cet article a pour sujet la possibilité de la rupture de l'alliance d'amour de Dieu avec son peuple, avec les exemples d'Ésaü et de Jacob.

Source: L’alliance d’amour. 5 pages.

22. L’alliance peut-elle être rompue?

  1. L’exemple d’Ésaü
  2. Rompre l’alliance
  3. Et Jacob?

La question de savoir si l’alliance peut être rompue a déjà reçu une réponse, du moins par implication, dans le chapitre précédent. La réponse est affirmative. Si l’alliance et l’élection ne doivent pas être confondues, et il ne faut pas parler d’une alliance avec les élus, il en découle que l’alliance peut en effet être rompue.

Certains tentent d’échapper à cette conclusion, comme nous l’avons vu, en parlant de deux alliances, l’une « intérieure » et l’autre « extérieure ». L’alliance intérieure est l’alliance authentique, mais l’alliance extérieure ne possède que les traits d’une alliance, non sa substance. L’alliance extérieure peut être rompue; l’alliance intérieure non. Cela, néanmoins, ne constitue pas le point de vue de l’Écriture, qui nous enseigne qu’il n’y a qu’une seule alliance et qui parle de personnes qui ont rompu l’alliance.

L’Ancien Testament nous offre de nombreux exemples de telles personnes. Caïn était un enfant de l’alliance et à sa naissance sa mère reconnut l’aide gracieuse de Dieu. Caïn connaissait les exigences de l’alliance de Dieu et offrait même des sacrifices à l’Éternel. Il ignora pourtant l’avertissement particulier de Dieu, il pécha délibérément, il se rebella de plus en plus et finalement tua son frère. La conséquence fut que Dieu le rejeta de devant sa face. Dieu ne peut tolérer ceux qui méprisent son alliance.

La Bible elle-même utilise l’expression : « … il a rompu mon alliance » (Gn 17.14 ; NBS), par exemple dans le cas d’une personne qui ne respecte pas la circoncision comme signe de l’alliance de Dieu. L’usage biblique devrait trancher la question. L’on doit réellement faire partie d’une alliance avant de pouvoir la rompre et il est clair que l’alliance comme relation peut en effet être rompue sans espoir de retour.

1. L’exemple d’Ésaü🔗

Un autre exemple de rupture claire de l’alliance est celui d’Ésaü, tel qu’il est décrit dans Genèse 25 ‒ 36. Il y a bien sûr la déclaration prophétique à la naissance d’Ésaü et de Jacob, « … le plus grand sera assujetti au plus petit » (Gn 25.23), et ainsi nous apprenons que tout ce qui arrive dépend de la volonté souveraine de Dieu. En lien avec cela, Paul, dans Romains 9, fait référence au « dessein d’élection » de Dieu (v. 11). Cela toutefois n’annule pas la responsabilité d’Ésaü.

Dieu n’est pas injuste (Rm 9.14) : Ésaü récolte ce qu’il a lui-même semé. Dans Galates 6.7-8 nous lisons :

« Ne vous y trompez pas : on ne se moque pas de Dieu. Ce qu’un homme aura semé, il le moissonnera aussi. Celui qui sème pour sa chair moissonnera de la chair la corruption; mais celui qui sème pour l’Esprit moissonnera de l’Esprit la vie éternelle. »

Cette vérité doit toujours demeurer présente à l’esprit des enfants de l’alliance.

Ésaü et Jacob grandissant, nous remarquons qu’Ésaü, habile chasseur, possède un esprit agité et vagabond; c’est « un homme des champs » (Gn 25.27). Non que cette préférence soit pécheresse en elle-même, mais elle pousse Ésaü toujours plus loin des tentes de son père et aussi des responsabilités qui lui incombent en tant que fils aîné. La place d’Ésaü est davantage avec le monde qu’avec le peuple de Dieu.

Cela est exposé plus en détail lors de l’incident du potage. Ésaü, rentrant affamé à la maison et cherchant à apaiser sa faim au plus vite, vend son droit d’aînesse à son frère en déclarant : « À quoi me sert ce droit d’aînesse? » La Bible déclare : « C’est ainsi qu’Ésaü méprisa le droit d’aînesse » (Gn 25.32,34). Le droit d’aînesse ne se limite pas au droit aux propriétés terrestres de son père, mais revêt ici aussi un sens spirituel : la promesse qui lui est faite dans l’alliance. À quoi sert le droit d’aînesse à Ésaü? Il n’a que peu d’intérêt aux affaires de l’Éternel; son cœur aspire aux plaisirs du monde. Ses besoins doivent être immédiatement satisfaits.

Nous lisons dans Genèse 26.34-35 :

« Ésaü, âgé de quarante ans, prit pour femmes Judith, fille de Beéri, le Héthien, et Basmath, fille d’Élon, le Héthien. Elles furent un sujet d’amertume pour le cœur d’Isaac et de Rebecca. »

Il y a ici deux éléments que nous devrions noter. Premièrement, Ésaü épouse des Cananéennes avec lesquelles aucun lien n’existait. Ce faisant, il entre dans une alliance avec les Cananéens et ignore l’alliance avec l’Éternel. Deuxièmement, Ésaü se comporte comme le monde en prenant deux femmes. Cela nous rappelle Lémec, fils de Caïn, qui fit la même chose (Gn 4.19).

Ces deux femmes sont mentionnées par leur nom et le nom de leur père. Cela peut indiquer qu’elles étaient issues de familles hittites influentes. Ésaü se fait ainsi sa place dans le pays. Il établit une alliance avec les Hittites et, ce faisant, méprise l’alliance de l’Éternel.

Les parents d’Ésaü, Isaac et Rebecca, ressentirent beaucoup d’amertume à cause des agissements de leur fils. Nous pouvons présumer que ces femmes s’installèrent dans les tentes d’Isaac (c’est-à-dire dans son camp) et continuèrent de pratiquer leur fausse religion. Isaac et Rebecca étaient ainsi quotidiennement confrontés à leur idolâtrie. Ce fut pour eux une source constante d’amertume (Gn 26.35).

Lorsque plus tard Ésaü apprend que Jacob est allé à Paddan-Aram pour y trouver une femme, il se rend coupable d’un autre acte impulsif. Nous lisons :

« Ésaü comprit ainsi que les filles de Canaan déplaisaient à Isaac, son père. Et Ésaü s’en alla vers Ismaël. Il prit pour femme […] Mahalath, fille d’Ismaël, fils d’Abraham, et sœur de Nebajoth » (Gn 28.8-9).

S’il est question de garder les choses dans la famille, il y a toujours Ismaël qui est moins loin; pourquoi aller jusqu’à Paddan-Aram? Mais, encore là, une alliance est conclue avec une famille que Dieu ne reconnaissait pas comme des enfants de son alliance. Ésaü éprouve de la rage lorsque Jacob le trompe, mais n’exprime aucune repentance à l’égard de ses propres méfaits.

Dans Genèse 36, nous lisons la fin de la vie d’Ésaü : il quitte Canaan et part pour la montagne de Séir. Il devient le père des Édomites, un peuple qui deviendra un ennemi farouche de la nation de l’alliance de Dieu. Les pires ennemis de l’Église du Christ sont souvent ceux qui sont nés dans l’Église, mais qui méprisent leur héritage. L’alliance est ainsi rompue.

2. Rompre l’alliance🔗

Il existe d’autres exemples dans l’Écriture qui offrent le même tableau. Nous devons comprendre que rompre l’alliance ne se fait pas du jour au lendemain, mais qu’il s’agit du résultat d’un processus par lequel l’on devient de plus en plus séparé de Dieu et de son peuple. À la fin, un choix conscient pour le monde se fait parce que le monde permet un style de vie pécheur. Cela se produit souvent à des moments clés, lorsqu’on doit faire le choix d’un métier ou de se marier. Prenons-nous alors pleinement en compte le fait que nous sommes des enfants de l’alliance de Dieu?

La mise en garde contre la rupture de l’alliance ne s’applique pas seulement dans le contexte de l’Ancien Testament. Dans l’épître aux Hébreux, qui parle de la plus grande gloire de la nouvelle alliance, le mépris d’Ésaü pour l’amour de Dieu est rappelé pour servir d’exemple aux croyants du Nouveau Testament. Dans Hébreux 12.16-17, nous trouvons cet avertissement :

« Veillez à ce qu’aucun de vous ne fasse preuve d’immoralité sexuelle ou ne se montre profanateur comme Ésaü, qui pour un seul repas a vendu son droit d’aînesse. Vous savez que plus tard il a voulu obtenir la bénédiction, mais a été rejeté; en effet, il n’a pas pu amener son père à changer d’attitude, bien qu’il l’ait cherché avec larmes. »

Le mot « profanateur » signifie ici « impie », non consacré à Dieu, mais entiché du monde.

Ésaü rechercha plus tard les avantages matériels qui accompagnaient l’alliance. Il ne put cependant changer la nature profonde de sa pensée. Il n’y avait pas repentance; les larmes qui furent versées étaient des larmes de crocodile. À l’extérieur, Ésaü montra de la tristesse, mais il n’y avait pas de vrai changement de cœur. Paul met plus loin en garde les Corinthiens contre la tristesse qui n’est pas la vraie repentance. « En effet, la tristesse selon Dieu produit une repentance à salut dont on ne se repent jamais, tandis que la tristesse du monde produit la mort » (2 Co 7.10).

Rompre l’alliance résulte d’un processus de désobéissance croissante à l’encontre de Dieu et de séparation de plus en plus grande de l’Église. On finit par rejoindre le monde, parce que c’est là que se trouve le cœur. Et une fois ce processus achevé, il est, humainement parlant, pratiquement impossible de revenir en arrière. Grande est la grâce de Dieu lorsqu’un enfant de l’alliance revient au service du Seigneur. Grande est la joie lorsqu’un fils prodigue rentre à la maison.

3. Et Jacob?🔗

Quelqu’un pourrait avancer : mais Jacob n’était pas vraiment meilleur que son frère Ésaü. Après tout, il reçut la bénédiction de son père en trompant et en mentant. Il profita des faiblesses de son frère au lieu de l’encourager à suivre le bon chemin. Ésaü se plaint plus tard amèrement : « Est-ce parce qu’on l’a appelé du nom de Jacob qu’il m’a supplanté deux fois? Il a enlevé mon droit d’aînesse, et voici maintenant qu’il vient d’enlever ma bénédiction » (Gn 27.36).

La vie de Jacob est en effet aussi remplie de péché et de faiblesse. Les enfants de l’alliance de Dieu ne sont en aucune manière parfaits. Ce n’est pas une excuse, c’est une réalité. La Bible est honnête et franche en ce qui a trait aux péchés du peuple de Dieu. Et ne vous y trompez pas, Jacob dut souffrir les conséquences de ses péchés. Voyez ce qui arriva dans sa propre famille, parmi ses propres fils et de quelle manière ces derniers lui firent du mal. Le trompeur devint le trompé. Au sein de l’alliance nous devons toujours être sur nos gardes contre nos propres faiblesses, car par nos péchés nous faisons non seulement honte au nom de Dieu, mais « [blessons] très gravement [notre] conscience » (Canons de Dordrecht, V, article 5). Les conséquences du péché sont graves et doivent parfois être subies pour toute la vie.

Dans la vie de Jacob toutefois, la foi eut le dernier mot. Dans Hébreux 11.21, nous lisons : « C’est par la foi que Jacob mourant bénit chacun des fils de Joseph, et qu’il adora, appuyé sur l’extrémité de son bâton. » Il ne fait aucun doute que l’épître aux Hébreux fait référence à la bénédiction des fils de Joseph pour montrer que Jacob accepta l’ordre déterminé par Dieu selon lequel le cadet serait plus grand que l’aîné (Gn 48.17-20). Jacob avait appris à se courber sous la grâce souveraine de Dieu et à rendre toute gloire à Dieu.

Lorsque l’on garde l’alliance de Dieu, cela ne témoigne pas de notre bonté ou de notre capacité; il s’agit d’un signe de l’amour et de la grâce de Dieu. Lorsque l’on peut dire : « J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi » (2 Tm 4.7), ce n’est pas de la vantardise, mais reconnaître le fait que Dieu prend soin de nous et nous guide.

L’histoire d’Ésaü et de Jacob nous montre à quel point notre responsabilité est grande au sein de l’alliance d’amour. Apprenons à vivre conformément aux préceptes divins et ayons ainsi pour objectif de recueillir la bénédiction de ses promesses.