1 Jean 2 - À la croisée des chemins
1 Jean 2 - À la croisée des chemins
« Je vous écris ceci, enfants : vos péchés vous sont pardonnés à cause de ce que Jésus-Christ a fait. Je vous écris ceci, pères : vous connaissez celui qui est dès le commencement. Je vous écris ceci, jeunes gens : vous avez vaincu le diable. Je vous le confirme, enfants : vous connaissez le Père. Je vous le confirme, pères : vous connaissez celui qui est dès le commencement. Je vous le confirme, jeunes gens : vous êtes forts, la Parole de Dieu demeure en vous et vous avez vaincu le diable. N’aimez pas le monde ni rien de ce qui fait partie de ce monde. Si quelqu’un aime le monde, l’amour pour le Père n’est pas en lui. En effet, tout ce qui fait partie du monde : les mauvais désirs qui animent l’homme livré à lui-même, la soif de posséder ce qui attire les regards, et l’orgueil qu’inspirent les biens matériels, tout cela ne vient pas du Père, mais du monde. Or le monde passe avec tous ses attraits, mais celui qui accomplit la volonté de Dieu demeure éternellement. »
1 Jean 2.12-17
Dans la vie nous sommes souvent placés à la croisée de plusieurs chemins, devant des choix qui engagent notre futur de manière très sérieuse : quelle carrière professionnelle choisir, vers quel pays émigrer, peut-être sans espoir de retour, avec quel époux ou quelle épouse s’engager pour la vie? Nous pouvons être confrontés à une croisée des chemins lorsque nous devons enterrer un être cher, sachant bien que notre vie ne sera plus jamais la même. De tels moments interviennent dans la vie de tout un chacun et nous forcent à opérer des choix décisifs lors de notre pèlerinage terrestre. Mais, dans la vie, la croisée des chemins n’est pas seulement quelque chose de très épisodique. Car en y regardant de plus près, nous sommes chaque jour confrontés à des choix qui peuvent avoir des conséquences dramatiques sur notre existence. Rester fidèle à son conjoint, agir avec intégrité dans une situation où on nous a confié des responsabilités financières très sensibles, garder le contrôle de soi en dépit de pressions presque intolérables qui pourraient nous amener à commettre un geste irréparable…
Un auteur chrétien du 17e siècle, John Bunyan, a parlé de la croisée des chemins de manière frappante dans un livre écrit en prison, et qui est devenu un classique de la littérature chrétienne mondiale : je veux parler du Voyage du Pèlerin, qui est une allégorie sur le pèlerinage que constitue la vie chrétienne. Le personnage central, Chrétien, quitte la Cité de la Destruction chargé d’un fardeau extrêmement lourd à porter. En dépit des moqueries de son entourage proche, il s’en va seul, son lourd fardeau attaché aux épaules, se dirigeant vers la Cité céleste dont il a pris connaissance en lisant un livre bien particulier. Sur son chemin, il rencontrera bien des obstacles, bien des personnages qui lui recommanderont de se diriger sur telle ou telle route, bien des croisements de chemins où il lui faudra faire un choix décisif. Lors d’un moment crucial lors de ce périple, il parviendra à la colline de la Croix, et c’est là que le lourd fardeau dont il est chargé tombera enfin de ses épaules. Mais il s’égarera souvent aussi, prenant la mauvaise route, ayant été invité à prendre des raccourcis qui semblent offrir bien des avantages; il sera exposé à des dangers ou des tentations quasi insurmontables, mais il parviendra finalement à destination.
Dans le texte de la lettre de Jean cité plus haut, l’auteur nomme de tels dangers, « tout ce qui fait partie du monde » : « les mauvais désirs qui animent l’homme livré à lui-même, la soif de posséder ce qui attire les regards, et l’orgueil qu’inspirent les biens matériels, tout cela ne vient pas du Père, mais du monde ». En employant ce mot, « le monde », il ne veut pas dire la bonne création de Dieu, l’univers qui reflète la gloire de son Créateur, mais un état de déchéance spirituelle qui englobe l’humanité et qui devient le terreau de toutes sortes de turpitudes, de convoitises, de tendances à la fois alléchantes et destructrices. On n’en finirait pas de nommer ces tendances et la manière dont elles s’expriment dans la vie des hommes : l’arrogance de la jeunesse, qui se croit invincible et immortelle, les désirs jamais assouvis de posséder sexuellement autant de partenaires que possible, la poursuite effrénée de la richesse matérielle, la soif du pouvoir, la tendance calculée à manipuler émotionnellement les autres pour exercer sur eux une forme de contrôle psychologique, que sais-je encore…
« N’aimez pas le monde ni rien de ce qui fait partie de ce monde. Si quelqu’un aime le monde, l’amour pour le Père n’est pas en lui », écrit Jean. Mais il ne fait pas que mettre en garde ses lecteurs, il leur montre quelles sont les armes par lesquelles ils vaincront. En s’adressant d’abord aux enfants, puis aux jeunes gens, et enfin aux pères, il pourrait signifier différents degrés de maturité spirituelle, plutôt que différentes classes d’âges. Dans ce cas, aux enfants dans la foi, c’est-à-dire à ceux qui y sont récemment parvenus, il leur rappelle l’assurance que leurs péchés ont été pardonnés grâce au sacrifice accompli sur la croix par Jésus-Christ.
Tout comme Chrétien, le héros du livre de John Bunyan, est libéré du fardeau qu’il portait jusque là et est rendu désormais capable de poursuivre sa route de manière allégée, les enfants dans la foi sont libres de marcher sur la voie royale tracée pour eux, sans que leur conscience les accable constamment. Les pères dans la foi, eux, savent que Jésus-Christ était dès le commencement, avant même la fondation du monde. Quant aux jeunes gens, ils ont vaincu l’adversaire le plus redoutable, le prince de ce monde, Satan. Notez bien le temps passé que Jean utilise : « vous avez vaincu le diable », et non pas « vous allez vaincre le diable », comme si cela relevait d’un futur encore non réalisé…
Mais de quelle arme disposent-ils donc, ces jeunes gens qui ont vaincu le diable? « Je vous le confirme, jeunes gens : vous êtes forts, la Parole de Dieu demeure en vous et vous avez vaincu le diable. » La Parole de Dieu est l’arme principale dont les pèlerins sont équipés lors de leur long voyage. Elle est aussi une carte qui nous aide à nous diriger au cours de notre vie, une carte que nous pouvons consulter à chaque croisée des chemins. Au centre de cette carte se trouve Jésus-Christ, il en éclaire tous les angles, toutes les facettes.
Pour utiliser une autre image, la vie peut être comparée à un puzzle fait de pièces éparses que chacun d’entre nous tâche de reconstituer. Le point de départ de cette reconstruction, la pièce par laquelle il faut commencer, c’est Jésus-Christ; c’est à partir de lui que les pièces s’emboîtent dans le bon ordre. Autrement, on s’acharne à emboîter des pièces qui ne vont pas ensemble, et l’on n’arrive jamais à reconstituer de manière satisfaisante l’image d’ensemble. On pense bien y parvenir, mais c’est une image déformée, à l’instar de nos fantasmes, que l’on construit. Ce qui fait partie du monde, comme le décrit Jean, guide nos tentatives infructueuses, que nous nous obstinons cependant à prendre pour des succès. Or, a-t-il conclu, « le monde passe avec tous ses attraits, mais celui qui accomplit la volonté de Dieu demeure éternellement ».
Je vous propose de terminer cette méditation sur la première lettre de Jean en en lisant le début du premier chapitre, afin que la lumière de la Parole de Dieu éclaire votre cheminement de pèlerins; afin qu’à la croisée des chemins, vous soyez équipés de la seule carte qui vaille la peine d’être consultée :
« Nous vous annonçons le message de celui qui est la vie. Nous vous annonçons ce qui était dès le commencement : nous l’avons entendu, nous l’avons vu de nos propres yeux, nous l’avons contemplé et nos mains l’ont touché. Celui qui est la vie s’est manifesté : nous l’avons vu, nous en parlons en témoins et nous vous annonçons la vie éternelle qui était auprès du Père et qui s’est manifestée pour nous. Oui, ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, à vous aussi, afin que vous aussi vous soyez en communion avec nous. Or, la communion dont nous jouissons est avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ. Si nous vous écrivons ces choses, c’est pour que notre joie soit complète. Voici le message que nous avons entendu de Jésus-Christ et que nous vous annonçons : Dieu est lumière et il n’y a aucune trace de ténèbres en lui. Si nous prétendons être en communion avec lui, tout en vivant dans les ténèbres, nous sommes des menteurs et nous n’agissons pas comme la vérité l’exige de nous. Mais si nous vivons dans la lumière, tout comme Dieu lui-même est dans la lumière, alors nous sommes en communion les uns avec les autres, et parce que Jésus, son Fils, a versé son sang, nous sommes purifiés de tout péché. Si nous prétendons n’être coupables d’aucun péché, nous vivons dans l’illusion, et la vérité n’habite pas en nous. Si nous reconnaissons nos péchés, il est fidèle et juste et, par conséquent, il nous pardonnera nos péchés et nous purifiera de tout le mal que nous avons commis. Mes chers enfants, je vous écris ceci afin que vous ne péchiez pas. Si, toutefois, il arrivait à quelqu’un de commettre un péché, nous avons un Défenseur auprès du Père : Jésus-Christ le juste. Car il a apaisé la colère de Dieu contre nous en s’offrant pour nos péchés — et pas seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux du monde entier » (1 Jn 1.1 à 2.2).