Cet article sur 2 Pierre 1.5-7 a pour sujet l'empressement que nous devrions avoir à mettre en oeuvre notre salut parfaitement accompli en Jésus-Christ. C'est en entrant dans son repos que nous pouvons porter du fruit.

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2 Pierre 1 - Faites tous vos efforts

« À cause de cela, faites tous vos efforts pour ajouter à la foi la vertu, à la vertu… »

2 Pierre 1.5-7

Comment faut-il entendre l’expression : Faites tous vos efforts (2 Pi 1.5).

On remarque tout d’abord que ce verset 5 est fortement attaché à ce qui précède, puisqu’il commence ainsi : « Pour cette raison… » Quelle est cette raison-là? « La divine puissance de Dieu nous a donné tout ce qui contribue à la vie et à la marche avec lui » (2 Pi 1.3). En d’autres termes, Dieu a pourvu et continue à pourvoir entièrement. Tout ce qui est nécessaire nous est donné en Christ. En aucun cas, il ne faut chercher ailleurs ou tenter d’ajouter quelque chose à cela par nos propres moyens.

Évidemment, cela apporte un éclairage précieux sur l’expression : Faites tous vos efforts que, pour ma part, je ne traduirais pas ainsi. En effet, traduite ainsi, elle donne l’impression que nos efforts pourraient accomplir ou être la garantie de quoi que ce soit. Cette compréhension est très malheureuse, car elle porte à croire qu’il faudrait compléter ce que Dieu a accompli — peut-être un peu comme Mahomet est censé compléter ce que Jésus a accompli, selon la compréhension musulmane, ou comme les œuvres devraient s’ajouter à la foi, dans la compréhension populaire catholique…

Le texte porte bien la notion d’ajouter (de joindre) de nouvelles choses. Cela voudrait-il donc dire que Dieu a commencé l’ouvrage et que maintenant c’est à nous de terminer, un peu comme si un entrepreneur en maçonnerie s’en serait allé après avoir coulé les fondations? Cette compréhension-là ne correspond pas à ce qui est écrit par ailleurs sur la grâce de Dieu et sur la marche dans la foi.

Je crois que la difficulté tombe si on traduit le verbe grec spoudatsô non pas par : faites tous vos efforts, mais par : empressez-vous, ne reportez pas à plus tard, ne soyez pas négligents. C’est un peu différent, et c’est le sens que donne le dictionnaire à ce verbe.

Le même verbe, en effet, apparaît en Hébreux 4.11. Louis Segond traduit, là aussi : « Efforçons-nous d’entrer dans ce repos. » C’est d’ailleurs un peu paradoxal : faire des efforts (comme pour soulever une pierre) pour entrer dans un repos! Il est de loin préférable de traduire : Empressez-vous d’entrer dans ce repos, ne reportez pas à plus tard. En effet, c’est dans ce repos que les forces nécessaires seront données! Le contexte le confirme : Parce qu’ils sont sortis du repos (c’est-à-dire de la foi), les Hébreux ont désobéi. Ils ont compté sur eux-mêmes, et ils ont été découragés.

Dans la perspective de Dieu, il y a certes un repos promis après les combats, mais il y a aussi un repos pour tout de suite, avant le combat et en vue du combat. C’est le repos de la foi qui mise sur ce que Dieu a accompli et continue d’accomplir. Ce n’est pas le résultat d’un combat, c’est le résultat de la fin d’un mauvais combat! Nous l’avons saisi pour ce qui est du salut. Il nous faut aussi le saisir pour ce qui est de la marche chrétienne.

Il y a donc bien quelque chose à faire, mais à la manière des serviteurs, pas à la manière des mercenaires. Dans la parabole des talents, il fallait « placer cet argent, et il aurait lui-même rapporté plus » (Lc 19.16). Il ne s’agit donc pas tant d’un travail à accomplir, à la sueur de notre front, que de permettre à ce que Dieu nous a donné de porter du fruit. Il est vrai qu’à ce niveau la paresse est jugée sévèrement.

L’image qui peut illustrer 2 Pierre 1.5-7 (s’empresser de joindre à la foi la vertu, etc.) pourrait être la suivante : la maman a disposé sur la table tout ce qui est nécessaire pour mettre le couvert. Rien ne manque. Elle dit ensuite à son enfant : Maintenant, tu peux mettre la table. L’enfant peut le faire sans inquiétude, avec joie, tout de suite. Le verbe ajouter (joindre à) est évidemment piégé lui aussi, car il n’y a justement rien à ajouter! Ajouter quoi? Et des choses qui viendraient d’où? De nos efforts, de notre bonne volonté, de nos capacités ou vertus naturelles? Jamais de la vie. La doctrine de la corruption totale nous empêche de songer à cela un seul instant, bien que ce soit notre tendance naturelle (passer de la paresse aux efforts…). Les vertus qui sont énumérées ici sont en fait « le fruit que produit l’Esprit » (Ga 5.22).

Pour éviter tout risque d’efforts tout humains, on pourrait traduire ainsi : N’empêchez pas l’Esprit Saint d’accomplir son œuvre jusqu’au bout dans votre vie. N’interrompez pas le processus de la grâce agissante au-dedans de vous. Désirez pleinement ce que Dieu veut accomplir lui-même dans votre vie. L’auteur, c’est Dieu. « Celui qui vous a appelés est fidèle, et c’est lui qui le fera » (1 Th 5.24).

C’est d’ailleurs le sens de ce que Paul écrit aux Philippiens (mal) traduit par L. Segond : « Ainsi, mes bien-aimés, comme vous avez toujours obéi, travaillez à votre salut avec crainte et tremblement » (Ph 2.12). Cette formulation est évidemment pleine d’équivoques. Le verbe katergadzomaï serait mieux rendu par : Mettez en œuvre votre salut, ou : ne le laissez pas improductif. On le retrouve, avec ce sens, en Éphésiens 6.13. En d’autres termes : Ne négligez rien de ce qui vous a été donné, car tout est utile (là, il s’agit des armes du chrétien).

Ainsi, la responsabilité du chrétien est bien soulignée, mais dans la cadre de la souveraineté de Dieu, dans la dynamique de la grâce, dans la foi qui reçoit et qui sert, sans jamais désirer ajouter quoi que ce soit à ce que Dieu donne, à ce que Dieu accomplit lui-même en nous et au travers de nous.