Cet article a pour sujet la préparation d'une prédication: analyse ou exégèse du texte (signification grammaticale), synthèse (message théologique), formulation (besoins de l'Église locale), évaluation (unité et structure d'ensemble).

5 pages. Traduit par Beth Pham-Ngoc

Comment préparer une prédication historico-rédemptrice

Cet article est une traduction légèrement abrégée et modifiée de l’article publié en supplément dans le livret du Dr C. Trimp De Preek (La prédication), intitulé « Une méthode de travail pour préparer des prédications sur les textes narratifs de l’Ancien Testament ». Sa méthode consiste en quatre phases, qu’il appelle l’analyse, la synthèse, l’administration et l’évaluation.

  1. L’analyse
    a. Regarder en arrière
    b. Regarder autour
    c. Regarder en avant
  2. La synthèse
    a. Que révèle ce texte sur Dieu?
    b. Que révèle le texte au sujet du bénéficiaire de l’alliance?
    c. Le « déjà »
    d. Le « pas encore »
    e. Le « plus jamais »
    f. L’« encore » du Nouveau Testament
  3. L’administration (la réflexion homilétique)
    a. Observer la continuité entre le temps du passage et le présent
    b. Observer la discontinuité entre le temps du passage et le présent
    c. Noter les éléments d’importance secondaire du texte
    d. La situation de l’assemblée pourra inciter à souligner des éléments spécifiques du texte
  4. L’évaluation

1. L’analyse🔗

L’analyse renvoie à la première phase du processus de préparation d’une prédication : l’exégèse. Les étapes exégétiques habituelles doivent être suivies (établir la signification des mots et des phrases, etc.). On se doit de prendre en considération le contexte afin de connaître les caractéristiques spécifiques du passage. Pour ce faire, l’exégète doit regarder en arrière, autour et en avant.

a. Regarder en arrière🔗

Regarder en arrière signifie étudier l’arrière-plan historique du passage, dans le contexte particulier de ce livre de la Bible et dans le cadre global de la Parole de Dieu. Par exemple, si l’on prêche sur un des rois de Juda, comme Ézéchias, on devra tenir compte de la norme royale établie par Dieu durant le règne de David (« Il fit ce qui est bien aux yeux de l’Éternel, entièrement comme l’avait fait David, son père », 2 R 18.3).

b. Regarder autour🔗

Regarder autour signifie replacer le passage biblique dans la culture et la situation de l’époque. Par exemple, lorsque l’on prêche sur le rejet de Dieu et de son autorité au temps des rois d’Israël, on devra tenir compte de la situation politique et militaire du moment (« La colère de l’Éternel s’enflamma contre Israël. Il les livra entre les mains de Hazaël, roi de Syrie, et entre les mains de Ben-Hadad, fils de Hazaël », 2 R 13.3) On doit aussi considérer les raisons pour lesquelles l’idolâtrie attirait tant le peuple (« Les Israélites [] ont craint d’autres dieux. Ils ont suivi les principes des nations que l’Éternel avait dépossédées devant les Israélites », 2 R 17.7-8).

c. Regarder en avant🔗

Regarder en avant signifie étudier le message de ce livre de la Bible. Qu’est-ce que le Seigneur veut accomplir dans ce livre? Que font les gens sous le regard de Dieu? Par exemple, la Bible parle souvent des intentions de Dieu et de la désobéissance du peuple élu (par exemple dans Dt 32; Jos 24; 2 R 17.7-17; Ps 78; 105; 106).

2. La synthèse🔗

Après cette première exégèse, le prédicateur doit analyser le texte de manière plus synthétique, en réfléchissant aux thèmes théologiques qui s’y révèlent. Le prédicateur doit se poser deux questions : 1. Que révèle ce texte sur Dieu? 2. Que révèle-t-il sur le croyant, bénéficiaire de l’alliance divine?

a. Que révèle ce texte sur Dieu?🔗

L’approche trinitaire est utile ici. Que révèle le texte sur le rôle de la création et de la providence divines (le travail du Père)? Que révèle le texte sur l’action salvatrice de Dieu (c’est-à-dire le travail du Fils)? Que révèle le texte au sujet de l’œuvre de sanctification de Dieu, des dons de repentance, de foi et de persévérance que Dieu accorde à son peuple (l’action du Saint-Esprit)? L’étude du livre de Ruth par H.J. Schilder est une bonne illustration de cette approche1.

b. Que révèle le texte au sujet du bénéficiaire de l’alliance?🔗

L’homme est-il fidèle? Est-il faible? Est-il capable de résister à la tentation? Fait-il confiance à son propre pouvoir ou au pouvoir de Dieu? Vise-t-il sa prospérité immédiate ou l’avenir promis par l’Éternel? Hébreux 11 donne de nombreux exemples de cette approche historique.

Ces questions aideront le prédicateur à acquérir une bonne compréhension des aspects historiques et rédempteurs du passage biblique. Pour affiner ces aspects, quatre points formulés par le professeur B. Holwerda peuvent être utilisés : le « déjà », le « pas encore », le « plus jamais » et l’« encore »2.

c. Le « déjà »🔗

Même dans l’Ancienne Alliance, l’alliance entre Dieu et son peuple leur apportait une relation richement bénie, grâce à l’œuvre médiatrice du Fils de Dieu et à travers l’action du Saint-Esprit. Ceux qui étaient sous l’Ancienne Alliance ne vivaient pas pour autant une relation appauvrie avec Dieu. Noé bénéficiait d’une bonne compréhension de l’action divine, meilleure que Sédécias (comparez Gn 6 à 9 et 2 R 24.19). La joie d’Abraham à la naissance d’Isaac était liée à Christ (voir Jn 8.56).

d. Le « pas encore »🔗

Moïse était capable de voir une bonne partie de la gloire de Dieu (Ex 33.19), mais les disciples purent en voir davantage (Jn 1.14). Voyez aussi Luc 10:23-24. Sous l’Ancienne Alliance, on pleurait la mort du grand-prêtre (Nb 20.29). Ceci renvoie à la joie de la foi en raison de la prêtrise éternelle de Christ (Hé 7).

e. Le « plus jamais »🔗

Israël devait distinguer les animaux purs des impurs, pour apprendre à travers des actes quotidiens quelles étaient les intentions de Dieu à leur égard et la sainteté à laquelle il les appelait (Dt 14.3-21). Cette forme de service a été abolie dans la Nouvelle Alliance (Ac 10.9-29, Ga 2.11-16, Hé 8 à 10). Néanmoins, la vérité et la substance de ce que ces symboles et cérémonies représentaient demeurent (article 25 de la Confession de foi des Pays-Bas) : notre vie sera sanctifiée par l’Esprit du Christ.

f. L’« encore » du Nouveau Testament🔗

La « crainte de l’Éternel » est une exigence de l’alliance qui est devenue encore plus forte par la révélation de Dieu en Christ et par l’Esprit (voir Hé 10.26-31). La joie des croyants de l’Ancien Testament au moment de l’exode d’Égypte (Ex 15) est ressentie encore plus puissamment par les fidèles du Nouveau Testament lorsqu’ils célèbrent la sainte Cène.

Le prédicateur n’a pas à traiter ces quatre points explicitement dans son sermon. Il doit plutôt les utiliser pour parvenir à une compréhension plus profonde du texte.

3. L’administration (la réflexion homilétique)🔗

À travers cette étape, nous tentons d’établir l’autorité précise du passage biblique pour l’Église spécifique à laquelle nous prêchons. Il nous faut donc réduire l’écart historique.

Ce qui est accompli pendant cette phase déterminera le contenu de la prédication. On distinguera quatre aspects.

a. Observer la continuité entre le temps du passage et le présent🔗

Il peut y avoir deux niveaux de continuité. Premièrement, on trouvera une continuité dans la révélation de Dieu lui-même. Dieu est encore le Dieu qu’il était auparavant. Quand nous voyons comment il agissait avec des croyants tels que Noé, Abraham, Isaac, Jacob, etc., nous apprenons à connaître le Dieu qu’il est encore pour nous aujourd’hui. Le Dieu des patriarches est notre Dieu. Deuxièmement, on observera une continuité dans les comportements humains. Nous portons certes d’autres vêtements aujourd’hui, mais nos cœurs n’ont pas changé. À travers la révélation des joies, des craintes et des péchés des croyants de l’Ancien Testament, nous entendons notre propre histoire.

b. Observer la discontinuité entre le temps du passage et le présent🔗

L’Église actuelle appartient à la même alliance que le peuple d’Israël, mais il s’agit d’une nouvelle disposition, donc également porteuse d’importantes différences. Voyez dans la partie précédente les paragraphes « pas encore » et « plus jamais ».

c. Noter les éléments d’importance secondaire du texte🔗

Une vieille règle d’homilétique veut que chaque passage possède un message central, mais aussi plusieurs autres usages (usus). Habituellement, on trouve beaucoup de sagesse et de « bonnes nouvelles » à différents niveaux du texte. Ces éléments peuvent être d’importance secondaire, cependant ils donnent au texte une saveur particulière. Par exemple, une prédication sur Noé et ses fils (Gn 9.18-27) ne doit pas se réduire à un sermon sur l’ivrognerie, mais le prédicateur fera bien de souligner, au moins brièvement, l’avertissement contre l’ivrognerie dans ce passage.

d. La situation de l’assemblée pourra inciter
à souligner des éléments spécifiques du texte🔗

Un texte peut avoir des « usus » variés, comme nous l’avons vu au point précédent. Il est donc légitime que la situation de l’Église locale puisse influencer la décision du prédicateur quant aux éléments qu’il choisit d’accentuer.

4. L’évaluation🔗

La phase finale de la préparation d’une prédication est l’évaluation du résultat. Après avoir établi la signification grammaticale, le message scripturaire et les éléments secondaires, puis formulé ceux-ci en fonction de l’Église locale, nous devons nous poser les questions suivantes : Ces différents éléments convergent-ils ou se contredisent-ils? Forment-ils une unité harmonieuse? Permettent-ils de faire ressortir le thème? Produisent-ils ensemble un résultat bien composé et bien structuré? On retiendra à cette étape que la simplicité et la clarté sont des caractéristiques essentielles de toute bonne prédication.

Notes

1. H. J. Schilder, Richteren en Ruth : Een vacature vervuld, Kampen : Kok, 1982.

2. B. Holwerda, Begonnen hebbende van Mozes…, 2éd., Kampen 1974, p. 111.