Confession de foi des Vaudois (1655)
Confession de foi des Vaudois (1655)
Brève confession de foi des Églises réformées de Piémont, publiée avec leur manifeste, à l’occasion des effroyables massacres de l’an 1655.
Parce que nous avons appris que nos adversaires ne se contentant pas de nous avoir persécutés et dépouillés de tous nos biens, pour nous rendre d’autant plus odieux, vont encore semant beaucoup de faux bruits, qui tendent non seulement à flétrir nos personnes, mais surtout à noircir par des infâmes calomnies la sainte et salutaire doctrine, dont nous faisons profession, nous sommes obligés, pour désabuser l’esprit de ceux qui pourraient avoir été préoccupés de ces sinistres impressions, de faire une brève déclaration de notre foi, comme nous l’avons fait par le passé et conformément à la Parole de Dieu, afin que tout le monde voie la fausseté de ces calomnies, et le tort qu’on a de nous haïr et de nous persécuter pour une doctrine si innocente.
Nous croyons :
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Qu’il y a un seul Dieu, qui est une essence spirituelle, éternelle, infinie, toute sage, toute miséricordieuse et toute juste; en un mot toute parfaite; et qu’il y a trois personnes en cette seule et simple essence : le Père, le Fils et le Saint-Esprit.
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Que ce Dieu s’est manifesté aux hommes par ses œuvres de création et de providence, et aussi par sa Parole, révélée au commencement par diverses sortes d’oracles, puis rédigée par écrit dans les livres qu’on appelle l’Écriture sainte.
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Qu’il faut recevoir, comme nous recevons, cette sainte Écriture pour divine et canonique, c’est-à-dire pour règle de notre foi et de notre vie, et qu’elle est contenue pleinement dans les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament. Que dans l’Ancien Testament doivent être compris seulement les livres que Dieu a confiés à l’Église judaïque et qu’elle a toujours approuvés ou reconnus pour divins, à savoir les cinq livres de Moïse, Josué, les Juges, Ruth, 1 et 2 Samuel, 1 et 2 Rois, 1 et 2 Chroniques, Esdras, Néhémie, Esther, Job, les Psaumes, les Proverbes de Salomon, l’Ecclésiaste, le Cantique des cantiques, les quatre grands prophètes et les douze petits; et dans le Nouveau, les quatre Évangiles, les Actes des apôtres, les épîtres de Paul, une aux Romains, deux aux Corinthiens, une aux Galates, une aux Éphésiens, une aux Philippiens, une aux Colossiens, l’épître aux Hébreux, une de Jacques, deux de Pierre, trois de Jean, une de Jude et l’Apocalypse.
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Que nous reconnaissons la divinité de ces livres sacrés, non seulement par le témoignage de l’Église, mais principalement par l’éternelle et indubitable vérité de la doctrine qui y est contenue, par l’excellence, la sublimité et la majesté divine qui y paraît, et par l’opération du Saint-Esprit, qui nous fait recevoir avec déférence le témoignage que l’Église nous en rend, qui ouvre nos yeux pour découvrir les rayons de la lumière céleste qui éclatent en l’Écriture, et qui rectifie notre goût pour discerner cette nourriture par la saveur divine qu’elle a.
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Que Dieu a fait toutes choses de rien, par sa volonté toute libre et par la puissance infinie de sa Parole.
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Qu’il les conduit et gouverne toutes par sa providence, ordonnant et adressant tout ce qui arrive dans le monde, sans qu’il soit pour autant ni auteur ni cause du mal que les créatures font, ou que la culpabilité puisse ou doive en aucune façon lui être imputée.
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Que les anges ayant été créés purs et saints, il y en a qui sont tombés dans une corruption et une perdition irréparables, mais que les autres ont persévéré par un effet de la bonté divine, qui les a soutenus et confirmés.
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Que l’homme qui avait été créé pur et saint, à l’image de Dieu, s’est privé par sa faute de cet état bienheureux, donnant son assentiment aux discours trompeurs du diable.
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Que l’homme a perdu par sa transgression la justice et la sainteté qu’il avait reçues, encourant l’indignation de Dieu, la mort et la captivité, sous la puissance de celui qui a l’empire de la mort, à savoir le diable, à ce point que son franc arbitre est devenu servile et esclave du péché, tellement que de nature tous les hommes, juifs et gentils, sont enfants de colère, tous morts en leurs fautes et péchés, et par conséquent incapables d’avoir aucun bon mouvement pour le salut, ni même former aucune bonne pensée sans la grâce; toutes leurs imaginations et pensées n’étant que mal en tout temps.
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Que toute la postérité d’Adam est coupable en lui de sa désobéissance, infectée de sa corruption et tombée dans la même calamité, jusqu’aux petits enfants dès le ventre de leur mère, d’où vient le nom de péché originel.
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Que Dieu retire de cette corruption et de cette condamnation les personnes qu’il a élues par sa miséricorde en son Fils Jésus-Christ, y laissant les autres par un droit irréprochable de sa liberté et de sa justice.
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Que Jésus-Christ ayant été ordonné de Dieu par son décret éternel, pour être le seul Sauveur et l’unique Chef de son corps, qui est l’Église, il l’a rachetée par son propre sang, dans l’accomplissement des temps, et il lui offre et communique tous ses bénéfices par l’Évangile.
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Qu’il y a deux natures en Jésus-Christ, la divine et l’humaine, vraiment en une même personne, sans confusion, sans division, sans séparation, sans changement; chaque nature gardant ses propriétés distinctes, et que Jésus-Christ est vrai Dieu et vrai homme tout ensemble.
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Que Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils pour nous sauver par son obéissance très parfaite, nommément par celle qu’il a montrée en souffrant la mort maudite de la croix, et par les victoires qu’il a remportées sur le diable, le péché et la mort.
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Que Jésus-Christ ayant fait l’entière expiation de nos péchés par son sacrifice très parfait, offert une fois sur la croix, il ne peut ni ne doit être réitéré sous quelque prétexte que ce soit.
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Que le Seigneur Jésus nous ayant pleinement réconciliés avec Dieu par le sang de sa croix, c’est par son seul mérite, et non par nos œuvres, que nous sommes pardonnés et justifiés devant lui.
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Que nous avons union avec Jésus-Christ et communion à ses bénéfices par la foi, qui s’appuie sur les promesses de vie, qui nous sont faites en son Évangile.
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Que cette foi vient de l’opération gracieuse et efficace du Saint-Esprit, qui éclaire nos âmes et les porte à s’appuyer sur la miséricorde de Dieu, pour s’appliquer le mérite de Jésus-Christ.
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Que Jésus-Christ est notre vrai et unique Médiateur, non seulement de rédemption, mais aussi d’intercession, et que, par ses mérites et sa médiation, nous avons accès au Père, pour l’invoquer avec la sainte confiance d’être exaucés, sans que l’on ait besoin d’avoir recours à quelque autre intercesseur que lui.
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Que comme Dieu nous promet la régénération en Jésus-Christ, ceux qui sont unis à lui par une vive foi doivent s’adonner, et s’adonnent, en effet, à pratiquer de bonnes œuvres.
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Que les bonnes œuvres sont si nécessaires aux fidèles qu’ils ne peuvent parvenir au Royaume des cieux sans les faire, étant vrai que Dieu les a préparées afin que nous y cheminions; qu’ainsi nous devons fuir les vices et nous adonner aux vertus chrétiennes, employant les jeûnes et tous les autres moyens qui peuvent nous servir à une chose aussi sainte.
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Que bien que nos œuvres ne puissent pas mériter quoi que ce soit, notre Seigneur ne manquera pas de les récompenser de la vie éternelle, par une continuation miséricordieuse de sa grâce, et en vertu de la confiance immuable des promesses qu’il nous en fait.
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Que ceux qui possèdent la vie éternelle à la suite de leur foi et de leurs bonnes œuvres doivent être considérés comme saints et glorifiés, loués pour leurs vertus, imités en toutes les belles actions de leur vie, mais non adorés ni invoqués, puisqu’on ne doit prier qu’un seul Dieu par Jésus-Christ.
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Que Dieu s’est choisi une Église dans le monde pour le salut des hommes, et qu’elle n’a qu’un seul Chef et fondement, qui est Jésus-Christ.
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Que cette Église est la compagnie des fidèles, qui ayant été élus de Dieu avant la fondation du monde, et appelés par une sainte vocation, s’unissent pour suivre la Parole de Dieu, croyant ce qu’il nous y enseigne et vivant en sa crainte.
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Que cette Église ne peut défaillir ou être anéantie, mais qu’elle doit être perpétuelle.
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Que tous doivent s’y ranger et se tenir dans sa communion.
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Que Dieu ne nous y instruit pas seulement par sa Parole, mais que, de plus, il a institué des sacrements pour les joindre à cette Parole, comme des moyens pour nous unir à Jésus-Christ et pour nous communiquer ses bénéfices; et qu’il n’y en a que deux communs à tous les membres de l’Église sous le Nouveau Testament, à savoir le baptême et la sainte cène.
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Qu’il a institué celui du baptême pour un témoignage de notre adoption, et que nous y sommes lavés de nos péchés par le sang de Jésus-Christ, et renouvelés en sainteté de vie.
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Qu’il a institué celui de la sainte cène ou eucharistie pour la nourriture de notre âme, afin que, par une vraie et vive foi, par la vertu incompréhensible du Saint-Esprit, mangeant effectivement la chair et buvant son sang, et nous unissant très étroitement et inséparablement à Christ, en lui et par lui, nous ayons la vie spirituelle et éternelle.
Et afin que tout le monde voie clairement notre croyance sur ce point, nous ajoutons ici les mêmes termes qui sont couchés dans notre Prière avant la communion, dans notre Liturgie, ou manière de célébrer la sainte cène, et dans notre Catéchisme public, qui sont des pièces qu’on peut voir à la fin de nos Psaumes, voici les termes de notre Prière : Et comme notre Seigneur a non seulement offert une fois son corps et son sang, pour la rémission de nos péchés, mais veut aussi nous les communiquer comme nourriture pour la vie éternelle, fais-nous cette grâce que, de vraie sincérité de cœur et d’un zèle ardent, nous recevions de lui un si grand bénéfice; c’est-à-dire que, par une foi certaine, nous jouissions de son corps et de son sang, voire de lui entièrement, etc. Les termes de notre Liturgie sont : Premièrement donc, croyons à ces promesses, que Jésus-Christ, qui est la vérité même, a prononcées de sa bouche, à savoir qu’il veut vraiment nous faire participants de son corps et de son sang, afin que nous le possédions entièrement, de telle sorte qu’il vive en nous, et nous en lui. Ceux de notre Catéchisme public sont de même dans la section 53. -
Qu’il est nécessaire que l’Église aie des pasteurs, jugés bien instruits et de bonne vie par ceux qui en ont le droit, tant pour prêcher la Parole de Dieu que pour administrer les sacrements, et pour veiller sur le troupeau de Jésus-Christ, suivant les règles d’une bonne et sainte discipline, conjointement avec les anciens et les diacres, selon la pratique de l’Église ancienne.
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Que Dieu a établi les rois et les magistrats pour la conduite des peuples, et que les peuples doivent leur être soumis et obéissants en vertu de cet ordre, non seulement par crainte, mais pour la conscience, en toutes les choses qui sont conformes à la Parole de Dieu, qui est le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs.
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Enfin, qu’il faut recevoir le Symbole des apôtres, l’Oraison dominicale et le Décalogue, comme pièces fondamentales de notre foi et de nos dévotions.
Et pour plus ample déclaration de notre foi, nous réitérons ici la protestation que nous fîmes imprimer en l’an 1603, à savoir que nous consentons à la saine doctrine, avec toutes les Églises réformées de France, d’Angleterre, des Pays-Bas, d’Allemagne, de Suisse, de Bohème, de Pologne, de Hongrie, et autres, ainsi qu’elle est exprimée en leur Confession d’Augsbourg, selon la déclaration qu’en a donné l’auteur. Nous promettons d’y persévérer, Dieu aidant, inviolablement en la vie et en la mort, étant prêts à signer cette vérité éternelle de Dieu de notre propre sang, comme l’ont fait nos prédécesseurs depuis le temps des apôtres, particulièrement en ces derniers siècles. Et pourtant, nous prions bien humblement toutes les Églises évangéliques et protestantes de nous tenir, malgré notre pauvreté et petitesse, pour vrais membres du corps mystique de Jésus-Christ, souffrant pour son saint nom; et de continuer de nous accorder l’assistance de leurs prières envers Dieu, et tous les autres bons services de leur charité, comme nous les avons déjà abondamment expérimentés, dont nous les remercions avec toute l’humilité qui nous est possible, et nous supplions de tout notre cœur le Seigneur qu’il en soit lui-même le rémunérateur, versant sur elles les plus précieuses bénédictions de sa grâce et de sa gloire, et en cette vie et en celle qui est à venir. Amen.
Additions à cette confession
Brève justification touchant les points, ou articles de foi, que nous imputent les docteurs de Rome, en commun avec toutes les Églises réformées. Ils nous accusent de croire :
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Que Dieu soit l’auteur du péché.
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Que Dieu n’est pas tout-puissant.
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Que Jésus-Christ a désespéré sur la croix.
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Que dans les œuvres du salut, où l’homme est mû par l’Esprit de Dieu, il n’y coopère pas plus qu’une pièce de bois ou une pierre.
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Qu’en vertu de la prédestination, il n’importe aucunement que l’on fasse bien ou mal.
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Que les bonnes œuvres ne sont pas nécessaires au salut.
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Que nous rejetons absolument la confession des péchés et la repentance.
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Qu’il faut rejeter les jeûnes et autres mortifications de la chair, pour vivre dans la dissolution.
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Que chacun peut expliquer l’Écriture sainte comme il lui plaît et selon les inspirations de son esprit particulier.
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Que l’Église peut entièrement défaillir et être anéantie.
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Que le baptême n’est d’aucune nécessité.
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Que dans le sacrement de l’eucharistie, nous n’avons aucune réelle communion avec Jésus-Christ, mais seulement une figure.
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Qu’on n’est pas obligé d’obéir aux magistrats, aux rois, aux princes, etc.
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Parce que nous n’invoquons pas la sainte Vierge et les hommes déjà glorifiés, on nous accuse de les mépriser, alors qu’en fait nous les déclarons bienheureux, dignes de louange et d’imitation, surtout la sainte Vierge bienheureuse entre toutes les femmes.
Or tous ces chefs qui nous sont ainsi malicieusement imputés, bien loin de les croire ou de les enseigner parmi nous, nous les tenons pour hérétiques et damnables, et nous dénonçons de tout notre cœur comme anathèmes quiconque voudrait les soutenir.
