Cet article a pour sujet la lutte décisive que Jésus a menée contre Satan en remportant la victoire contre lui et en instaurant le royaume de Dieu, dans l'attente du jour où le pouvoir de Satan sera totalement anéanti.

Source: Défi et défaite des démons. 3 pages.

Démonologie du Nouveau Testament - La lutte décisive contre Satan

À un moment très important de son ministère, Jésus envoie en mission les 70 disciples. Nous l’entendons ici, pour la première fois, affirmer la défaite de Satan. À leur retour, les disciples pensent que leur expédition accompagnée de miracles et de guérisons a été décisive pour le compte du Royaume de Dieu. Telle n’est pas l’opinion de Jésus. Aussi déclare-t-il : « J’ai vu Satan tomber du ciel comme un éclair » (Lc 10.18). À quel moment précis la précipitation hors du ciel a-t-elle eu lieu? Faut-il y voir un témoignage rendu au passé, une vision présente ou bien une prédiction eschatologique? Nous y reviendrons dans un autre chapitre1.

L’idée centrale du passage est l’hostilité qui oppose Satan à Dieu. D’autres indices permettent de voir de quelle manière le monde est purifié grâce à la déroute des forces hostiles. Luc 10.19 nous garantit que l’ennemi ne pourra pas causer du mal aux disciples. Il ne faut pas interpréter cette assurance comme une délivrance d’un mal physique, car les garanties de cette nature leur font défaut. Il est même possible que le Malin s’acharne sur leur corps et les élimine physiquement. Jésus dit que les disciples doivent moins se réjouir de l’assujettissement des démons que du fait que les attaques les plus virulentes de l’ennemi ne les atteindront pas, parce que leurs noms sont inscrits dans le livre de la vie. Même si dans la période de la tribulation ils sont mis à mort, la certitude de leur victoire définitive est acquise.

Romains 8.28 fait écho à cette conviction et partage la même certitude. Le règne de Satan sera brisé et les démons sont déjà expulsés comme signe sûr et certain de la proximité du Royaume; la souveraineté absolue de Dieu sera établie visiblement et reconnue universellement. Les démons doivent abandonner les places qu’ils avaient frauduleusement accaparées dans l’esprit des hommes. C’est la raison pour laquelle l’exorcisme occupe une place décisive dans le ministère du Christ. La souveraineté divine y éclate magistralement; partout où les suppôts de Satan sont chassés, l’autorité incontestable de Dieu est proclamée. Si le Royaume est encore futur, son règne, lui, est déjà présent. Il ne s’agit pas simplement d’une expérience religieuse subjective, puisqu’objectivement Jésus démontre que Satan n’a pas de prise sur eux.

Jésus a réduit au silence une tempête formidable et il a agi de la même façon devant une fièvre banale et devant les possédés. Ces textes témoignent à la fois de la présence réelle des démons sur terre et de l’autorité suprême du Christ. Les démons, eux, se défendent avec acharnement, car si le Royaume doit être établi, une période de conflit aigu sera inévitable. Jésus affirme que cela doit arriver, car Satan ayant établi sa forteresse, fixé son quartier général sur cette terre, les conflits qu’il fait naître agitent l’humanité tout entière, depuis les nations jusqu’aux membres d’une même famille. Il se précipite avec une violence particulière sur ceux qui prêchent sa défaite, qui seront ses premières victimes.

Son pouvoir est déjà ébranlé, mais pas totalement anéanti; aussi cherche-t-il à l’étendre sur la nature tout entière afin de la détruire. Il y aura des séismes, des éclipses, etc.; l’ensemble du système solaire sera en proie à des convulsions et un temps de désastre sans pareil s’étendra partout. Mais c’est à ce moment que sonnera, de manière sûre et définitive, la défaite de Satan. Cela ressort notamment dans le discours dit apocalyptique de Marc 13 ou de Matthieu 24. D’après Jésus, le cosmos tout entier deviendra comme fou.

Le Christ est venu pour acculer Satan à la défaite; il n’ignore aucun de ses desseins funestes; ses disciples seront sa cible favorite et c’est pourquoi ils doivent sans cesse prier « délivre-nous du Malin ». Notons aussi que « ce sont les violents » qui s’empareront du Royaume.

Satan avait instauré son royaume ici-bas, mais depuis l’apparition de Jean-Baptiste annonçant « celui qui vient », son empire s’effrite. Cela va de mal en pis pour le prince de ce monde… C’est pourquoi il cherche à dresser contre Jésus toutes les forces politico-religieuses de la nation afin de l’éliminer.

Pendant le temps de la mission parmi les païens, le règne de Dieu se répand; il rappelle la petite pierre détachée par une main invisible qui devient une énorme montagne. Zacharie 13.2 prédit presque le même avenir.

Dans 2 Thessaloniciens 2.1-12, Paul aussi déclare que l’adversaire est lié. Cela suppose et assure que celui-ci ne peut plus se livrer à une activité incontrôlée pour égarer les peuples de la terre.

Pour nombre de spécialistes du Nouveau Testament, l’œuvre principale de Jésus, sa mission rédemptrice, a consisté en une action de libération vis-à-vis du joug satanique. Nous n’opterons cependant pas pour des positions radicales qui excluraient un autre aspect de la mission de Jésus, la prédication du pardon des offenses. Cependant, la lecture des Évangiles nous permet de conclure que nombre de miracles de Jésus avaient un motif démonologique.

Nous n’oublierons pas un autre aspect fondamental, celui de l’amour de Dieu le Père qui sacrifie le Fils unique en vue de la rédemption de ses élus. Toutefois, bien qu’ici même il ne nous soit guère possible d’examiner toute la doctrine biblique du salut pour établir si possible un rapport intime, voire organique, entre ces deux aspects, nous estimons que l’un et l’autre doivent, de manière complémentaire, figurer dans notre interprétation. Nous savons que le mal est plus radical dans le monde que le laisse entendre l’action inique de la simple créature humaine. Il existe des forces infernales qui ne tolèrent pas un examen purement moral ou psychologique. Le péché est l’attitude de révolte de l’homme, mais il a également une origine satanique. Selon le Nouveau Testament qui l’atteste avec force, la souffrance est causée par Satan (Lc 13.16), mais le passage d’Hébreux 12.3-11 l’envisage également comme le châtiment que Dieu inflige à ses enfants pour les placer sous discipline spirituelle. Au moins trois quarts du contenu des Évangiles synoptiques, de même que les écrits de saint Paul, font état de ce motif démonologique. Même en acceptant un dualisme relatif, il nous faut reconnaître que, selon le Nouveau Testament, les forces sataniques exercent, ou exerçaient au temps de Jésus, un certain contrôle sur les éléments de la nature autant que sur les destinées individuelles d’hommes et de femmes.

Bien que l’Évangile selon Jean n’examine pas la démonologie de la même manière que les synoptiques, il est évident que l’auteur voit en la mission de Jésus un conflit fondamental avec Satan (Jn 16.11). Jean regarde le monde comme étant pris dans les griffes d’un pouvoir personnifié surnaturel et méchant, appelé le diable (Jn 8.44).

Le discours de Pierre rapporté dans Actes 10.38 laisse entendre qu’un trait saillant de la prédication primitive consistait en la déclaration selon laquelle le Christ était venu libérer les hommes du pouvoir satanique. Paul, en s’en prenant au mage Élymas, le traite de fils du diable (Ac 13.10). Dans Actes 19.13, il est question d’exorcistes juifs très actifs lors de la visite que Paul rend à la ville d’Éphèse. L’évangéliste Philippe, de son côté, pratique l’exorcisme, selon Actes 8.7.

Une affirmation assez vivante de 1 Pierre trace le portrait du diable en le dépeignant sous les traits d’un lion féroce (1 Pi 5.8). 2 Pierre 2.4 fait une autre déclaration fondamentale du Nouveau Testament sur les mauvais anges et les esprits impurs. La lecture de 1 Hénoc peut jeter une lumière sur ce passage et nous aider dans son interprétation. Il existe une classe d’anges ayant péché et ayant été jetés dans le shéol, où ils resteront prisonniers jusqu’au jour du jugement. Jude 6 fait également allusion à des anges qui ont abandonné leur demeure et sont actuellement enchaînés dans les domaines des ténèbres, où ils demeureront jusqu’au jour du jugement. Ce passage est presque une citation verbale du même livre apocryphe d’Hénoc. Précisons toutefois que Jude ne tient pas ce livre pour un écrit canonique, tout en lui attribuant une certaine valeur.

1 Jean 4.1 est vu comme une référence faite au discernement des démons. L’auteur invite ses lecteurs à éprouver les esprits. Il faut se rappeler que la référence première concerne de soi-disant prophètes. Ils doivent être éprouvés par les normes établies de la tradition chrétienne orthodoxe, dont le noyau est constitué par l’incarnation réelle du Christ (1 Jn 4.2-3).

Un passage important de l’Apocalypse de Jean (Ap 12) décrit la vision des puissances qui opèrent dans le monde spirituel derrière les scènes de l’histoire humaine.

De cet aperçu des déclarations bibliques, il apparaît que le satanique et le démoniaque constituent un thème majeur du Nouveau Testament. Cet enseignement présente certaines difficultés au moins en ce qui concerne un dualisme relatif. Il faut se rappeler que la pensée biblique ne s’intéresse pas à résoudre les difficultés philosophiques, mais à décrire d’une manière réaliste l’existence humaine et son asservissement au pouvoir du Malin. Elle n’offre pas une théodicée, une justification théorique complète des voies de Dieu. Elle annonce l’action libératrice de Dieu au cours de l’histoire, laquelle aboutit à l’enchaînement de l’adversaire et à son élimination définitive.

Note

1. Voir notre article intitulé La fin de Satan.