Cette prédication sur Jean 13.1-5,12-15 a pour sujet le lavement des pieds des disciples qui manifeste l'amour du Christ, annonçant sa mort pour la purification des péchés et nous donnant un exemple de service.

Source: La veille de la crucifixion. 4 pages.

Jean 13 - Jésus lave les pieds de ses disciples

« Avant la fête de Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde au Père, et ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, mit le comble à son amour pour eux. Pendant le souper, lorsque le diable avait déjà inspiré au cœur de judas Iscariot, fils de Simon, le dessein de le livrer, Jésus, qui savait que le Père avait remis toutes choses entre ses mains, qu’il était venu de Dieu, et qu’il s’en allait à Dieu, se leva de table, ôta ses vêtements, et prit un linge dont il se ceignit. Ensuite, il versa de l’eau dans un bassin, et il se mit à laver les pieds des disciples, et à les essuyer avec le linge dont il était ceint. […] Après qu’il leur eut lavé les pieds, et qu’il eut pris ses vêtements, il se remit à table et leur dit : Comprenez-vous ce que je vous ai fait? Vous m’appelez Maître et Seigneur; et vous dites bien, car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi, le Seigneur et le Maître, vous devez aussi vous laver les pieds les uns aux autres; car je vous ai donné un exemple, afin que vous fassiez comme je vous ai fait. »

Jean 13:1-5, 12-15

Le récit de Jésus lavant les pieds de ses disciples introduit la passion de notre Seigneur. L’heure de la mort du Christ approche : Jésus l’a annoncée au chapitre précédent :

« L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié. En vérité, en vérité, je vous le déclare, si le grain de froment ne meurt après être tombé en terre, il demeure seul : mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. […] Maintenant, mon âme est troublée; et que dirai-je?… Père, délivre-moi de cette heure?… Mais c’est précisément pour cette heure que je suis venu! Père, glorifie ton nom! Alors, il vint une voix du ciel qui dit : Je l’ai glorifié, et je le glorifierai encore! » (Jn 12.23-24, 27-28).

Jésus sait que la fête de Pâque commencera par sa mort. Il sait aussi quel doit être le sens, le résultat de cette mort. C’est pourquoi au cours de ce dernier repas, « avant la fête de Pâque », Jésus veut éveiller ses disciples au sens de cette mort et leur expliquer comment il est « l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde » (Jn 1.29).

L’apôtre Jean résume la signification de cette « heure » de la mort de Jésus en quatre petites phrases qui seront expliquées par la suite.

  • Jésus sait que l’heure est venue pour lui de passer de ce monde au Père (Jn 13.1).
  • Il sait que le Père lui a remis toutes choses entre les mains.
  • Il sait qu’il est venu de Dieu.
  • Il sait enfin qu’il s’en va à Dieu (Jn 13.3).

C’est pourquoi « Jésus qui avait aimé les siens, dans le monde, mit le comble à son amour pour eux » (Jn 13.1).

La mort de Jésus est donc le retour de l’envoyé de Dieu à son Père qui est dans les cieux (Jn 3.34-35), mais elle est aussi l’acte final et complet de l’amour du Fils de Dieu pour « les siens ». L’amour de Dieu trouve son achèvement, sa perfection dans la mort de son Fils pour le salut du monde. Elle est une heure de gloire! Jésus met le comble à son amour, au-delà de ce qui est pensable, jusqu’à en mourir : et par là, le nom de Dieu est glorifié.

Toute la vie de l’Église chrétienne dépend, en effet, de la manifestation de l’amour de Dieu dans la mort du Messie. La purification des péchés, l’affection mutuelle qui lie les disciples les uns aux autres, ont leur source dans le fait historique de l’obéissance totale de Jésus à la volonté de son Père, dans son humiliation jusqu’à la mort. L’alliance nouvelle dans le sang du Christ, manifestation de l’amour de Dieu dans une vie humaine, est historiquement conditionnée par l’abaissement de Jésus jusqu’à la mort.

Tel est le sens du lavage des pieds, qui nous donne la clé de tout ce qui suit. Cet événement n’est pas un acte isolé en vue d’une leçon morale d’humilité. Il est fondé sur la mort du Christ et veut nous l’expliquer. Dans I’Évangile de Jean, c’est la première fois que la vie et la mort de Jésus sont placées sous le signe de son amour pour les siens. C’est là, en effet, un « secret » dont la pleine révélation est réservée aux derniers instants et que le lavage des pieds explicite.

« Pendant le souper, dit Jean, Jésus se leva, ôta son vêtement, et, ayant pris un linge, il s’en ceignit. […] Puis, après qu’il leur eut lavé les pieds, il reprit son vêtement » (v. 2, 4 et 12). Ces deux verbes : « ôter » et « reprendre » ont ici une signification frappante, car ils sont employés à plusieurs reprises dans le même Évangile pour désigner la mort et la résurrection du Christ, par exemple : « Voici pourquoi le Père m’aime, dit Jésus, c’est parce que j’ôte ma vie [nos traductions rendent le verbe grec ôter par “donner”] afin de la reprendre » (Jn 10.17-18, 11, 15; 1 Jn 3.16).

Ces verbes si simples : « ôter », « reprendre », indiquent la nature mystérieuse de l’acte de Jésus lavant les pieds de ses disciples. Mystérieuse, car aucun esclave juif n’était tenu de laver les pieds de quiconque : pourquoi donc le fait-il? Mystérieuse encore, car ce n’est pas avant le repas, mais pendant, en l’interrompant, que le Christ lave les pieds. Pourquoi donc à ce moment-là? Les disciples, Pierre en particulier, ne peuvent donc pas « comprendre » ce que Jésus fait; ils ne le pourront que « plus tard » (v. 7), à la lumière d’autres événements et selon l’intelligence qu’ils recevront après la résurrection de Jésus par le don du Saint-Esprit.

Pierre est incapable alors de deviner que l’humiliation du Messie est la cause effective de notre purification, de notre salut. Jésus lui dit donc : « Si je ne te lave [toi, tout entier], tu n’auras point de part avec moi » (Jn 13.8). Dans la communauté chrétienne, il n’y a pas de place, en effet, pour ceux qui n’ont pas été purifiés par Jésus lui-même. Le lavage des pieds est un symbole de notre complète purification, fondé sur la mort du Christ : il en illustre l’efficacité. En lavant les pieds de ses disciples, Jésus s’humilie lui-même. Par là, il affirme symboliquement leur totale purification par l’humiliation de sa mort, « car le sang de Jésus nous purifie de tout péché » (1 Jn 1.7).

Ainsi, les disciples sont purs, nous sommes purs, vous êtes purs, comme Jésus l’affirme, si nous sommes soumis à l’action du Christ qui n’est efficace qu’en relation avec sa propre mort. Mais Pierre et ses compagnons ne pouvaient le comprendre que « plus tard ».

Pourtant, Jésus tient à leur indiquer une première application pratique :

« Vous m’appelez Maître et Seigneur, et vous dites bien, car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous devez aussi vous laver les pieds les uns aux autres. Car je vous ai donné un exemple afin que vous fassiez comme je vous ai fait » (Jn 13.13-15).

Les rabbins défendaient qu’on s’adressât aux maîtres en les nommant par leur propre nom; on les appelait donc : « Maître » ou « Seigneur ». Jésus accepte comme légitime cette marque d’honneur et d’autorité; mais ce que les disciples doivent apprendre, c’est la nature de l’autorité chrétienne, car ils auront aussi à exercer l’autorité. C’est en leur lavant les pieds que le Christ exprime l’essence même de l’autorité chrétienne : une autorité qui consiste en humilité réciproque.

De même que le Christ nous a donné l’exemple concret de cette autorité exercée dans l’humilité, de même nous aussi devons nous laver les pieds les uns aux autres. L’autorité des apôtres, notre autorité doit être exercée dans une humilité totale. Le vrai bonheur ne dépend pas de la connaissance de cette vérité, mais de sa pratique : « Si vous savez cela, dit Jésus, vous êtes bienheureux, à condition que vous le mettiez en pratique » (Jn 13.17).

Ainsi, le lavage des pieds introduit le thème de l’amour mutuel qui est le fondement de la vie de l’Église. Jésus développera ce thème dans la suite de l’entretien. Ce thème est lié à l’efficacité de l’amour du Christ jusqu’à la mort et implique — par amour pour lui — un amour qui va aussi jusqu’à la mort, vécu dans un monde hostile : « Nous devons aussi donner notre vie pour nos frères », dit Jean dans son épître (1 Jn 3.16).

Les disciples doivent exercer leur autorité dans le service mutuel.

C’est l’autorité même de Dieu qu’ils expriment dans l’humilité, car Dieu a choisi l’humilité du Christ pour manifester, dans sa grâce, son autorité, sa souveraineté, sa gloire. Disciples, nous sommes les envoyés de Dieu si nous mettons en pratique l’humilité que nous savons et qui est notre plus grande autorité. « Quiconque reçoit celui que j’ai envoyé, me reçoit; et quiconque me reçoit, reçoit celui qui m’a envoyé » (Jn 13.20). « À l’amour que vous aurez les uns pour les autres, tous connaîtront que vous êtes mes disciples » (Jn 13.35).