Cet article sur Jean 7.19-32 a pour sujet le conflit qui s'est accentué entre Jésus et les chefs religieux juifs concernant l'obéissance du sabbat et l'origine de Jésus envoyé du Père.

Source: La Parole s'est faite chair - Méditations sur l'Évangile selon Jean. 3 pages.

Jean 7 - Conflit entre Jésus et les Juifs

« Moïse vous a donné la loi, et pourtant, aucun de vous ne fait ce qu’elle ordonne! Pourquoi cherchez-vous à me tuer? Tu as un démon en toi! lui cria la foule. Qui est-ce qui veut te tuer? Jésus reprit la parole et leur dit : Il a suffi que je fasse une œuvre pour que vous soyez tous dans l’étonnement. Réfléchissez : Moïse vous a donné l’ordre de pratiquer la circoncision, rite qui ne vient d’ailleurs pas de Moïse, mais des patriarches. Or, cela ne vous dérange pas de circoncire quelqu’un le jour du sabbat. Eh bien, si on circoncit un garçon le jour du sabbat pour respecter la loi de Moïse, pourquoi donc vous indignez-vous contre moi parce que j’ai entièrement guéri un homme le jour du sabbat? Cessez donc de juger selon les apparences et apprenez à porter des jugements conformes à ce qui est juste. En le voyant, quelques habitants de Jérusalem s’étonnaient : N’est-ce pas celui qu’ils veulent faire mourir? Or, le voilà qui parle librement en public et personne ne lui dit rien! Est-ce que, par hasard, nos autorités auraient reconnu qu’il est vraiment le Christ? Pourtant, lui, nous savons d’où il est; mais le Christ, quand il viendra, personne ne saura d’où il est. Alors Jésus intervint d’une voix forte, et on l’entendit dans toute la cour du Temple : Vraiment! Vous me connaissez et vous savez d’où je suis! Sachez-le, je ne suis pas venu de ma propre initiative. C’est celui qui est véridique qui m’a envoyé. Vous ne le connaissez pas. Moi, je le connais, car je viens d’auprès de lui, et c’est lui qui m’a envoyé. Alors plusieurs essayèrent de l’arrêter, et pourtant personne ne mit la main sur lui, parce que son heure n’était pas encore venue. Cependant, beaucoup de gens du peuple crurent en lui. Quand le Christ viendra, disaient-ils, accomplira-t-il plus de signes miraculeux que n’en a déjà faits cet homme-là? Ce qui se murmurait ainsi dans la foule au sujet de Jésus parvint aux oreilles des pharisiens. Alors les chefs des prêtres et les pharisiens envoyèrent des gardes pour procéder à son arrestation. »

Jean 7.19-32

Lorsque nous lisons le chapitre 7 de l’Évangile selon Jean, dans le Nouveau Testament, nous constatons que la tension monte entre les chefs religieux juifs et Jésus-Christ. La tension monte, car deux conceptions radicalement opposées des œuvres qui plaisent à Dieu entrent en conflit : d’un côté, les chefs juifs insistent sur une obéissance du sabbat qui exclut toute possibilité d’opérer une guérison ce jour-là, puisqu’on ne doit rien faire du tout si l’on veut obéir au quatrième commandement, et de l’autre Jésus amène une vue totalement différente qui fait du sabbat un moment de la présence divine apportant le réconfort et la guérison.

Jésus déclare publiquement à ses interlocuteurs qu’il est au courant des manœuvres dirigées contre lui consistant à vouloir le tuer. En même temps, il dénonce toute tentative pour trouver un prétexte à ce crime dans la loi de Moïse, dans ce sens qu’il se serait rendu coupable de désobéissance vis-à-vis de celle-ci. Jésus rétablit la signification de la loi de Moïse et même, au-delà d’elle, de la circoncision, ce signe donné par Dieu au patriarche Abraham plusieurs siècles avant la venue même de Moïse.

La circoncision, que les Juifs pratiquaient sans problème sur les nouveau-nés mâles pendant le jour du sabbat, dénotait la nécessaire mise à mort de la vieille nature de l’homme, sa nature de péché. Il fallait subir cette blessure dans la chair, car elle symbolisait le fait que devant la sainteté de Dieu notre vie nous est redemandée. Et cela, il faut le reconnaître devant lui, il nous faut confesser notre nature corrompue. La circoncision représentait en même temps la nature viciée par le péché de l’homme et la guérison que Dieu seul peut y apporter. En même temps, cette coupure infligée à cet endroit du corps humain indiquait que, de la lignée d’Abraham, à partir de sa semence et de celle de ses descendants, viendrait celui qui un jour accomplirait parfaitement cette guérison, le Messie attendu.

Et voici qu’un jour de sabbat, justement le jour durant lequel Dieu offre son repos, sa paix, sa réconciliation, Jésus a complètement guéri un malade qui, à vue humaine, n’avait aucune chance de se rétablir après tant d’années passées dans cette condition physique et morale misérable. Pouvait-on rêver d’un accomplissement plus parfait et de la circoncision et du sabbat? Eh bien non, pour les chefs religieux, Jésus transgresse la loi et il mérite d’être mis à mort.

Notons d’abord que certains habitants de Jérusalem sont bien au courant du projet de faire mettre à mort Jésus. Ce n’est donc pas qu’il souffre d’un complexe de persécution en le disant lui-même, ou, pire encore, qu’il a un démon en lui, comme l’affirmait un peu plus tôt une autre partie de la foule. Ce qui trouble beaucoup de gens, c’est que d’après ce qu’ils comprenaient des écrits des prophètes, le Messie aurait une origine inconnue. Or, voilà que ce Jésus qui s’adressait à eux avait une histoire qui leur était connue, ou du moins c’est ce qu’ils pensaient : il était là en chair devant eux, on savait où il avait été élevé, à Nazareth, ville de Galilée, une région qui d’ailleurs n’inspirait pas au peuple le plus grand respect. Vous vous souvenez sans doute de la remarque de Nathanaël au premier chapitre de l’Évangile de Jean : « Peut-il venir de Nazareth quelque chose de bon? » (Jn 1.46). Mais ces gens ignoraient (ou probablement cherchaient délibérément à ignorer) ce que dit l’Écriture à maintes reprises sur le Messie à venir : qu’il serait un descendant de David, et même qu’il naîtrait à Bethléem. Rappelez-vous de la prophétie de Michée, au chapitre 5 :

« Et toi, Bethléem Ephrata, toi qui es petite parmi les milliers de Juda, de toi sortira pour moi celui qui dominera sur Israël et dont l’origine remonte au lointain passé, aux jours d’éternité » (Mi 5.1).

Alors Jésus leur réplique d’une voix forte qu’ils le connaissent bien : « Vraiment! Vous me connaissez et vous savez d’où je suis! » Comment comprendre cette réponse? D’un côté, chacun sait que Jésus est un descendant de David, et à ce titre il répond à au moins un critère concernant le Messie. Mais d’un autre côté, la foule refuse de croire en celui qui l’a envoyé, le Père céleste. Alors qu’elle pense savoir d’où Jésus vient, elle n’en a en fait aucune idée, ou plutôt, elle ne veut rien savoir à ce sujet et fait semblant de ne pas comprendre, par dureté de cœur plus que par réelle ignorance. Les signes qu’il a accomplis ne parlent-ils pas d’eux-mêmes?

« Sachez-le, je ne suis pas venu de ma propre initiative. C’est celui qui est véridique qui m’a envoyé. Vous ne le connaissez pas. Moi, je le connais, car je viens d’auprès de lui, et c’est lui qui m’a envoyé. »

Au-delà de Nazareth, de Bethléem, du roi David, l’origine de Jésus-Christ est en Dieu lui-même. Au fond, le rejet de Jésus comme Messie, c’est le rejet du médiateur, celui qui devait adopter une chair semblable à la nôtre, hormis le péché. Si l’on méprise ou rejette Jésus à cause de son apparence humaine sans éclat, à cause du fait qu’il est bien né et a grandi quelque part, on rejette le Sauveur qui a revêtu notre condition misérable justement pour nous en délivrer. C’est ce que fait ici la foule.

Et pourtant, le fait qu’on cherche à mettre la main sur lui à ce moment-là indique bien que personne n’était dupe. Jésus faisait bien appel à sa filiation divine unique. Pourtant, nous dit l’évangéliste, personne ne mit la main sur lui, parce que son heure n’était pas encore venue. Le Père céleste est en contrôle de toutes choses, il ne permettra pas que son Fils soit arrêté avant que l’heure soit venue. La puissance du témoignage de Jésus est cependant telle que plusieurs se mettent à croire qu’il est bien le Messie promis. Ce qui ne fait qu’attiser davantage la fureur des chefs religieux du peuple. Sans doute, le fait que plusieurs aient cru, sur la base des signes miraculeux qu’il avait opérés, suffisait à rendre inexcusable le reste de la foule. Mais disons aussi que cette foi d’un grand nombre était encore bien vacillante et mal établie : car elle ne reposait encore que sur la base des signes miraculeux, et non sur l’enseignement de Jésus.

Je poursuivrai dans un prochain article cette méditation sur le chapitre 7 de l’Évangile selon Jean.