Cet article a pour sujet la pornographie qui est une distorsion de la sexualité telle que voulue par Dieu, la réduisant à la génitalité et causant une dépersonnalisation destructrice qui garde dans l'esclavage.

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Le mensonge de la pornographie

Il est des sujets que j’aimerais bien ne pas avoir à traiter, mais qui contaminent la société à un tel point qu’on ne peut pas les passer sous silence. L’un d’entre eux concerne la pornographie, et c’est la raison pour laquelle je me propose de consacrer cet article à ce thème. Voici comment je qualifierai la pornographie à la lumière de la révélation de Dieu : La pornographie est et fait la promotion d’une distorsion fondamentale de la sexualité telle qu’elle a été établie par Dieu pour le couple homme femme. Elle opère cette distorsion dans la mesure où elle réduit la sexualité au simple acte sexuel et à son aspect génital en particulier, à l’exclusion de tous les autres aspects de la sexualité humaine. Cette concentration sur l’aspect physique et génital s’effectue de manière totalement dépersonnalisée. En exhibant visuellement les gestes les plus intimes inhérents à l’acte sexuel par le biais de média (photos ou films), elle nie la dimension d’intimité établie par Dieu pour la sexualité humaine, et par là elle nie aussi le mystère qui constitue une grande partie de la valeur de la sexualité pour le couple homme femme.

Mais que signifie exactement le mot « pornographie »? Ce mot vient du grec ancien et contient deux racines dans cette langue : pornè (qui signifie « prostituée ») et graphein (qui signifie « écrire »). Il s’agissait donc d’abord d’écrire sur la prostitution. À partir de là, le mot a évolué pour dénoter ce qui concerne le sexe ou l’activité sexuelle, et plus particulièrement ce qui s’attache à l’excitation obsessionnelle vis-à-vis d’actes obscènes. En fait, aujourd’hui on ne distingue pas vraiment entre obscénité et pornographie. Pour beaucoup cependant, pornographie et prostitution ont bien un rapport étroit, car la pornographie vend de l’activité sexuelle : c’est, en quelque sorte, « du plaisir acheté ».

Bien entendu, la pornographie a été dénoncée à juste titre par beaucoup comme un mal moral, culturel et social. On a dit que les besoins émotionnels des enfants seraient niés dans une société obsédée par la pornographie; que l’amour romantique disparaîtrait, que l’activité sexuelle serait dépersonnalisée et réduite à une simple copulation entre créatures de sexe différent ou du même sexe, voire entre humains et animaux. On a justement souligné que l’instinct sexuel, lorsqu’il est sublimé, est une des sources de l’imagination créative, et que si cette sublimation n’a pas lieu, on assiste à une perte d’activité artistique voire à l’arrêt du développement de la civilisation. Pour certains, l’immoralité sexuelle est, plus que tout autre facteur, responsable historiquement de la chute des grandes nations.

Mais, poursuivons notre définition de la pornographie. Il s’agit en fait d’une présentation visuelle publique et commerciale d’images excitantes de gestes ayant une nature sexuelle : images de corps humains entièrement nus dans des positions séduisantes avec une concentration calculée sur leurs parties génitales; images de copulation ou de manipulations sexuelles entre un ou plusieurs individus de sexe différent ou du même sexe, parfois même entre des adultes et des enfants. Cette présentation visuelle est faite avec le maximum de détails. Rien n’est couvert, tout est dévoilé. Le but avoué ou non d’une telle présentation est d’exciter la lascivité du spectateur, de mettre en émoi ses propres instincts sexuels, peut-être même de l’amener à imiter le comportement obscène des actes contemplés, mais pas nécessairement non plus. Car la pornographie est par essence du voyeurisme, c’est-à-dire qu’elle alimente la tendance morbide des individus à vouloir contempler les actes intimes accomplis dans leurs corps par d’autres individus.

J’ai qualifié la pornographie de dépersonnalisante. Qu’est-ce que cela veut dire? Cela signifie que la personnalité d’un être humain donné, qui se manifeste par son caractère propre tel qu’exprimé par ses paroles, ses réactions et choix par rapport à des situations données, son histoire personnelle, en bref par son identité unique, n’apparaît à aucun moment dans les scènes pornographiques. Le matériel pornographique n’a aucun dialogue, aucun sentiment n’est exprimé par les protagonistes, les noms des individus impliqués dans les actes sexuels dépeints n’apparaissent nulle part. Les acteurs demeurent complètement anonymes. Il n’y a pas non plus de conversation entre eux : le langage, caractéristique humaine par excellence, a disparu, à l’exception de toutes sortes de grognements, car tout tourne autour de l’activité génitale.

Et c’est là où la pornographie est dans son essence un mensonge. En effet là où elle prétend vous montrer la plus grande intimité possible entre des êtres humains, elle nie en fait tout ce qui fait qu’il peut y avoir une intimité réelle : des paroles, une histoire, des personnes ayant une identité unique, qui se rencontrent de manière unique, qui communiquent de manière unique dans une situation unique. La rencontre sans arrière-plan, sans contexte, voire sans aucun décor, de deux êtres humains qui ne sont là que pour copuler détruit justement ce qui fait qu’un homme et une femme sont des êtres humains ayant chacun une histoire unique. Ici, nous avons davantage affaire à des robots dépersonnalisés, dont on a en quelque sorte remonté la clé de l’instinct sexuel pour donner libre cours à celui-ci jusqu’à ce que la mécanique sexuelle soit épuisée, quitte à donner à nouveau quelques tours de clé ou de manivelle pour une prochaine séance.

Cette dépersonnalisation n’est bien sûr pas innocente. Au contraire, elle a un but bien particulier : le spectateur est appelé d’autant plus facilement à s’identifier avec les individus montrés dans le matériel pornographique que ceux-ci sont tout le monde et personne à la fois. Ils peuvent être vous ou moi ou n’importe qui d’autre, justement parce qu’ils n’ont aucune histoire personnelle qui les différencie de vous ou de moi. En même temps, ce n’est ni vous ni moi qui nous activons sur la photo ou sur l’écran, ce sont d’autres personnes, totalement anonymes. La dépersonnalisation dans la pornographie est apparente aussi dans le narcissisme des individus complètement tournés sur leur propre jouissance sexuelle, et ignorant totalement leur partenaire sur le plan affectif. La jouissance de chacun est son point de départ et son point d’aboutissement. Or, la sexualité, telle que le Créateur l’a planifiée et donnée à l’homme et à la femme, a un caractère totalement différent. L’engagement sexuel n’est pas un point de départ, il est un point d’aboutissement, il est l’expression de l’accomplissement d’une relation émotionnelle et affective unique entre un homme et une femme dans une fidélité affirmée et réaffirmée, dans le don de soi à l’autre.

Mais, me direz-vous, cela signifie-t-il que des scènes très réalistes d’engagement sexuel apparaissant dans un contexte précis, avec des personnages dont on a raconté l’histoire et dont on connaît le caractère, seraient acceptables parce qu’on comprend cette histoire et ce contexte? Beaucoup de gens sont de cet avis. On établit souvent une distinction entre ce qui est de nature érotique et ce qui est de nature pornographique. Loin de moi l’idée qu’il n’y aurait pas de dimension érotique dans la nature humaine, dimension elle aussi créée par Dieu. Un livre entier de la Bible, le Cantique des cantiques, exprime en poésie et dans une sorte de pièce de théâtre cette dimension de l’amour entre un homme et une femme, employant beaucoup d’images et de métaphores pour exprimer le caractère érotique de leur attachement mutuel. Mais il y a une grande différence entre cette forme de poésie sublimée qui renvoie constamment au plan du Dieu Créateur, et les scènes dites érotiques qui parsèment un très grand nombre de films voire de livres, et qui manquent totalement d’exprimer artistiquement cet aspect sublimé tourné vers une réalité supérieure. Le plus souvent, ces scènes ne sont que de la pornographie déguisée, on pourrait dire de la pornographie « douce », car moins explicites que les films pornographiques proprement dits. Elles alimentent elles aussi le voyeurisme des spectateurs tout en prétendant ne pas le faire. Autre mensonge auquel il convient de ne pas se laisser prendre…

Alors que devrait-on montrer ou ne pas montrer? Question certes délicate qui ne peut pas être tranchée de manière simpliste. Qu’on pense par exemple à la danse ou au ballet, qui peuvent exprimer la plus belle forme de l’amour humain de manière sublimée, ou, à l’autre extrême, se réduire à de la lascivité pure et simple.

Résumons ce que nous avons dit jusqu’ici : en réduisant la sexualité humaine au simple moment du contact physique sexuel, la pornographie s’avère être réductionniste, donc déformante. En ignorant volontairement la personnalité, l’histoire et l’individualité des êtres humains impliqués dans une rencontre sexuelle, la pornographie est dépersonnalisante. En mettant l’accent sur la pure jouissance physique de l’individu sans qu’un lien affectif existe entre les partenaires, la pornographie favorise le narcissisme, le culte de soi-même et de son propre plaisir. En exagérant et déformant l’aspect physique dans la présentation visuelle de l’engagement sexuel, en le réduisant à la dimension génitale, la pornographie est une dégradation du corps humain.

La pornographie crée et développe une obsession vis-à-vis d’une sphère limitée de la sexualité. Elle ignore volontairement le langage véritable et sincère de l’amour et par là incite les spectateurs à ignorer et étouffer un tel langage. Elle entraîne aussi le spectateur à rechercher toujours plus d’excitation, car les sens de celui-ci sont vite émoussés. Pour employer une image très simple, elle provoque une démangeaison malsaine qu’on cherche à satisfaire en se grattant toujours davantage, abîmant ainsi de plus en plus sa propre chair sans jamais faire cesser la démangeaison, qui elle ne cesse de croître. Elle a donc un caractère destructeur qui se voit dans toutes les sociétés qui la tolèrent et lui laissent libre cours sous prétexte de liberté d’expression. Les personnes adonnées à la pornographie sont comme des drogués ou des alcooliques. Il existe même dans certains pays des centres de désintoxication pour de telles personnes, dont la vie entière est devenue prisonnière de cette drogue visuelle. On peut dire à juste titre qu’on a alors affaire à une idole qui oppresse ceux qui la servent et en sont devenus les esclaves. Très nombreux sont les exemples de personnes adonnées à cet esclavage qui se rendent coupables d’abus sexuel vis-à-vis d’autres personnes, notamment d’enfants. Les journaux rapportent quotidiennement de tels exemples et il faut être tout à fait aveugle pour ne pas y voir un lien de cause à effet.

Nous avons dit que la pornographie est réductionniste, au sens où elle réduit la sexualité humaine à sa dimension génitale et en exclut tous les autres aspects que le Créateur a voulu y intégrer. Voici une illustration qui aidera mieux à comprendre ce que signifie ce réductionnisme : imaginez qu’un ensemble de musiciens, disons un orchestre, veuille jouer la partition d’un compositeur. Le compositeur a écrit ce morceau pour toutes sortes d’instruments de musique : violons, violoncelles, flûtes, hautbois, trombones, guitare, percussions, harpe, etc. La musique qu’il a écrite, il l’a conçue pour cet ensemble d’instruments et l’a notée comme telle dans la partition qu’il a écrite. C’est comme cela qu’elle devrait être jouée, l’orchestration devrait en être respectée lors de l’exécution, chaque instrument ou groupe d’instruments jouant sa partie au moment où il doit intervenir. Mais voici que le chef d’orchestre décide arbitrairement, et sans consulter le compositeur, de ne faire jouer aucun de tous ces instruments, à l’exception des parties de percussion. Tout ce qu’on entendra de l’œuvre du compositeur durant le concert ce sera les instruments à percussion. Et là où le compositeur n’a rien écrit pour les percussions, le chef d’orchestre leur enjoint de remplir les silences pour qu’on entende constamment les sons des tambours, gongs, tam-tam, timbales, xylophones, etc. Pensez-vous que les auditeurs pourront dire avoir entendu l’œuvre du compositeur telle qu’il l’a conçue? Non, bien sûr, car le chef d’orchestre l’a complètement déformée en réduisant toute la musique aux percussions. Et bien, c’est, par analogie, ce qui se passe avec la pornographie. Par son réductionnisme, elle offre une caricature de la sexualité humaine.

Mais alors, me demanderez-vous, qu’est-ce au juste qu’une sexualité saine? Comment la vivre au quotidien? Voilà une question très délicate, car avec la sexualité nous avons affaire à un domaine de l’expérience humaine à la fois très sensible, très fragile et particulièrement exposé à toutes sortes de déformations. Qui peut se targuer de maîtriser sa sexualité de manière parfaitement harmonieuse? Les circonstances de la vie humaine sont telles, chacun est exposé à de telles pressions, que l’instinct sexuel est bien souvent le premier à en pâtir. Car il s’agit bien d’un instinct, créé par Dieu comme tel et placé dans chacune de ses créatures. Mais cet instinct, Dieu l’a mis en nous dans le but d’une réalisation, d’un accomplissement. Très souvent, nous manquons cette réalisation, cet accomplissement, ou plutôt nous pensons l’atteindre là où il n’est justement pas, ce qui ne fait qu’engendrer insatisfaction, incompréhension et frustrations. Nos relations humaines en pâtissent de près ou de loin.

Pourtant, au commencement, Dieu a établi le cadre dans lequel l’instinct sexuel doit rechercher et trouver son accomplissement : c’est celui du couple homme femme, dans une relation de fidélité, d’amour, de complémentarité mutuelle et de don de soi. J’insiste sur le mot de « relation ». Dans l’être de Dieu, il existe une relation parfaite d’amour entre les trois personnes de la Trinité. Dieu a créé le couple homme femme pour être en quelque sorte le miroir, dans sa création, de cette relation parfaite : une dualité reflétant sa propre Trinité. Dieu est Esprit et veut être adoré en esprit et en vérité, a dit Jésus-Christ (Jn 4.24). Cela rend clair le fait que Dieu n’est pas une créature matérielle, comme nous le sommes, et qu’il n’est pas doué d’instincts tels que nous le sommes. Nous qui avons été doués d’un instinct sexuel par le Créateur, nous reflétons quelque chose de son être qui ne peut cependant jamais être mis sur le même plan.