Les dix commandements (3) - Le deuxième commandement
Les dix commandements (3) - Le deuxième commandement
« Tu ne te feras pas de statue quelconque de ce qui est en bas sur la terre, et de ce qui est dans les eaux plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras pas devant elles, et tu ne leur rendras pas de culte; car moi, l’Éternel, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis la faute des pères sur les fils jusqu’à la troisième et à la quatrième génération de ceux qui me haïssent, et qui use de bienveillance jusqu’à mille générations envers ceux qui m’aiment et qui gardent mes commandements. »
Exode 20.4-6
La série sur les dix commandements nous amène cette fois-ci au second commandement. Ce commandement est exprimé dans le passage du livre de l’Exode qui vient d’être cité.
Voyons comment le Catéchisme de Heidelberg nous parle du second commandement aux questions 96 et 97 :
« Que Dieu demande-t-il dans le deuxième commandement? — Que nous ne représentions Dieu en aucune manière et que nous ne lui rendions aucun culte que celui qu’il a commandé dans sa Parole. »
« Ne faut-il donc faire aucune image? — Nous ne pouvons ni ne devons représenter Dieu d’aucune manière. Et, si nous pouvons représenter les créatures, Dieu nous défend cependant de faire ou de posséder aucune image pour l’honorer ou l’employer au culte divin. »
Si le premier commandement affirme qu’il n’y a qu’un seul vrai Dieu, à l’exclusion de toutes les idoles, le second commandement, quant à lui, nous enseigne comment nous devons adorer Dieu, quelle doit être notre religion à son égard. Car il ne suffit pas de reconnaître qu’il n’y a qu’un seul Dieu, voire que ce Dieu unique est celui qui se révèle à Moïse sous le nom de Yahweh (ce qui veut dire : « Je suis celui qui suis »). Yahweh lui-même ordonne comment il veut être adoré, et comment il ne veut pas l’être : en particulier, il interdit de le représenter sous forme d’image ou de statue, comme c’est le cas des idoles païennes. Un passage du livre du Deutéronome, au chapitre 4, nous en donne l’explication :
« Prenez bien garde à vous-mêmes : vous n’avez vu aucune forme le jour où le Seigneur vous a parlé à l’Horeb, du milieu du feu. N’allez pas vous corrompre en vous fabriquant une idole, une forme quelconque de divinité, l’image d’un homme ou d’une femme, l’image de n’importe quelle bête de la terre ou de n’importe quel oiseau qui vole dans le ciel, l’image de n’importe quelle bestiole qui rampe sur le sol, ou de n’importe quel poisson qui vit dans les eaux sous la terre. Ne va pas lever les yeux vers le ciel, regarder le soleil, la lune et les étoiles, toute l’armée des cieux, et te laisser entraîner à te prosterner devant eux et à les servir. Car ils sont la part que le Seigneur ton Dieu a donnée à tous les peuples qui sont partout sous le ciel » (Dt 4.15-19).
En clair, cela veut dire que Dieu interdit qu’on le confonde avec un quelconque élément de sa création. Comme le dira un jour Jésus à ses disciples : « Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité » (Jn 4.24). Peut-être connaissez-vous l’épisode du veau d’or, dans le désert. Au moment où Dieu révèle justement ses commandements à Moïse, sur le mont Horeb, les Israélites, en bas de la montagne, s’impatientent de ne pas voir revenir leur chef. Ils décident alors d’adorer Dieu sous la forme d’un veau d’or, fabriqué à partir du métal fondu de tous leurs bijoux. Ils prétendent adorer le Dieu qui les a délivrés de l’esclavage, celui-là même avec qui Moïse est allé parler, mais en fait ils retombent dans la pratique païenne des nations environnantes, consistant à se fabriquer des images taillées. Par exemple, le dieu cananéen Baal était adoré sous la forme d’un taureau, symbole de puissance et de force. Les Israélites plaçaient donc Yahweh au même rang que les idoles païennes en l’adorant sous la forme d’un veau d’or.
Ce n’était que la première étape les menant à adorer ces autres idoles païennes au même titre que Yahweh. Le chemin avait été préparé par l’image qu’ils s’étaient fabriquée. En effet, si l’on pouvait adorer Yahweh sous forme de veau d’or, pourquoi ne pas adorer d’autres images fabriquées, représentant cette fois d’autres dieux? C’est exactement ce qui s’est passé par la suite, et si vous lisez le récit de l’histoire d’Israël dans l’Ancien Testament, vous serez frappés de voir combien facilement ce glissement s’est opéré.
Pour les païens, adorer une image ne signifie pas nécessairement qu’ils croient que le dieu qu’ils adorent est limité à cette image. On peut par exemple se faire une image du soleil et l’adorer en sachant fort bien que le soleil est dans le ciel. Mais ce que les hommes recherchent, c’est obtenir le pouvoir de l’idole en question, et en fabriquant une image, on pense pouvoir s’approprier ce pouvoir, par toutes sortes d’incantations ou de rites. Aujourd’hui encore on peut observer ce genre de culte en maint endroit de notre planète. Mais le seul vrai Dieu ne se laisse pas contrôler ou manipuler par des humains : il est absolument libre. C’est lui qui contrôle le cours des choses et des événements, d’une manière qui nous demeure incompréhensible.
Rappelez-vous l’épisode de l’arche de l’alliance que les Israélites avaient fait venir dans leur camp au moment de l’affrontement avec les Philistins, leurs ennemis. Ils pensaient pouvoir manipuler Yahweh et s’assurer de la victoire simplement en faisant entrer ce coffre, symbole de l’alliance avec Dieu, au milieu d’eux (1 S 4). Mais comme Yahweh ne voulait pas être associé à son peuple qui se moquait en fait de lui, il a déserté leur camp. Le coffre n’était plus qu’un morceau de bois taillé qui ne pouvait être d’aucun secours aux Israélites. Ceux-ci ont alors perdu la bataille contre leurs ennemis.
S’abstenir de faire des représentations taillées de Dieu ne garantit cependant pas l’obéissance au second commandement. Car on peut très bien se faire des images mentales de Dieu qui le réduisent à nos proportions. Un dieu créé à notre image, en quelque sorte, au lieu de comprendre que c’est lui qui nous a créés à son image. Un dieu Père Noël, un dieu bon enfant, un dieu aussi impersonnel que possible pour qu’il ne nous dérange pas trop dans nos activités et notre conduite, un dieu sourd et aveugle…
Comment éviter de tomber dans ce piège? Il n’y a qu’une manière, c’est de chercher à connaître Dieu dans sa Parole révélée, la Bible, et nulle part ailleurs. Car on peut bien se rendre compte de la grandeur et de la puissance de Dieu en observant la nature autour de soi, mais si l’on veut entrer en relation avec Dieu pour connaître sa volonté et son plan de salut pour le monde, il faut lire sa Parole, inspirée par son Esprit. Les idées que nous nous faisons de lui en dehors de sa Parole ne sont que des chimères pour nous bercer d’illusions. Elles n’ont aucune garantie de solidité ou de vérité. Ce ne sont que des images forgées et taillées par notre imagination, pour notre propre convenance.
Aujourd’hui, il est courant d’entendre tout un chacun déclarer qu’il croit bien en Dieu, mais c’est son dieu personnel à lui, le dieu qu’il a conçu en son for intérieur. Ce dieu privé ressemble fort aux petites statues qu’on trouve dans bien des demeures païennes de par le monde : quelque part, dans un coin de la maison, se trouve un autel avec une statue ou une image censée protéger le propriétaire et sa maisonnée. Il n’est pas sûr que la statue en question a un pouvoir sur la maison d’à côté, mais au moins, croit-on, elle protège le périmètre de la maison dans laquelle elle se trouve.
Dieu n’a-t-il donc laissé aucune image de lui sur terre? Disons plutôt que sa création reflète sa gloire, sa puissance, sa splendeur. Elle témoigne de la présence de Dieu. C’est ce que dit le début du Psaume 19 :
« Les cieux racontent la gloire de Dieu, et l’étendue céleste annonce l’œuvre de ses mains. Le jour en prodigue au jour le récit, la nuit en donne connaissance à la nuit. Ce n’est pas un récit, il n’y a pas de mots, leur voix ne s’entend pas. Leur harmonie éclate sur toute la terre et leur langage jusqu’au bout du monde » (Ps 19.2-5).
L’homme, au centre de la création, reflète quelque chose de Dieu, puisqu’il est porteur de son image. Mais cette image s’est détériorée, elle est devenue floue. La plupart des hommes ne reconnaissent même pas qu’ils portent cette image, ils préfèrent se prendre pour Dieu et agir à leur guise, créant leur propre malheur et celui des autres.
L’image la plus claire de Dieu qui nous ait été donnée de voir, c’est Jésus-Christ, dont l’apôtre Paul dit, dans sa lettre aux Colossiens :
« Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création. Car en lui tout a été créé dans les cieux et sur la terre, ce qui est visible et ce qui est invisible, trônes, souverainetés, principautés, pouvoirs. Tout a été créé par lui et pour lui. Il est avant toutes choses, et tout subsiste en lui. Il est la tête du corps, de l’Église. Il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin d’être en tout le premier. Car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude et de tout réconcilier avec lui-même, aussi bien ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix » (Col 1.15-20).
À ce texte répond, comme en écho, le passage suivant du début de la lettre aux Hébreux : « Ce Fils, qui est le rayonnement de sa gloire et l’expression de son être, soutient toutes choses par sa parole puissante » (Hé 1.3).
À ses disciples qui l’interrogeaient peu avant son arrestation, Jésus dit : « Celui qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14.9) Cela doit nous suffire pour nous assurer que l’image parfaite de Dieu qui nous a été donnée à contempler, c’est Jésus-Christ, auquel nous sommes appelés à ressembler. Lui ressembler, c’est recouvrer pleinement l’image de Dieu dont nous sommes les porteurs, mais qui a été abîmée en nous. Puissiez-vous chercher l’image de Dieu en Jésus-Christ et nulle part ailleurs. Car ce faisant vous trouverez le chemin de la vraie connaissance de Dieu, qui s’est pleinement révélé aux hommes en son Fils unique.