Cet article sur les questions d'introduction au livre d'Amos traite des circonstances (comparables à celles de Joël, du livre, de son plan, de son style et de son message (justice et jugement).

Source: Introduction à l'Ancien Testament. 7 pages.

Introduction au livre d'Amos (2)

  1. Auteur
  2. Circonstances
  3. Le livre
  4. Plan
  5. Style
  6. Message

1. Auteur🔗

Cette section est tirée de la Bible Annotée (Introduction à Amos).

Amos, dont le nom signifie « pesant » et par extension « fardeau » ou « porteur », ne doit pas être confondu avec Amots, père du prophète Ésaïe. Il nous apprend lui-même qu’il venait de Juda et qu’il était originaire de Tékoa, située à deux lieues au sud de Bethléem.

Amos, d’après Amos 1.1, était un « noked », c’est-à-dire un berger paissant son propre troupeau, et non pas un mercenaire. Amos s’appelle lui-même « boker », c’est-à-dire bouvier. On pourrait conclure de là qu’il possédait aussi du gros bétail.

C’est de ce milieu agreste que Dieu le tire pour l’envoyer prophétiser dans le royaume d’Israël, ainsi que le déclare Amatsia, sacrificateur de Béthel. En disant qu’il n’est ni prophète ni fils de prophète, il veut faire entendre qu’il n’a jamais vécu dans une des écoles de prophètes, ni comme chef ni comme disciple; il n’est pas prophète de profession.

Amos prouve la réalité de sa mission par le courage avec lequel il l’entreprend et l’accomplit. Ce n’était pas peu de choses que d’aller prononcer des paroles comme les siennes à Béthel, le principal sanctuaire consacré au culte des veaux d’or, et de s’attaquer à une puissance comme celle d’Israël sous le règne de Jéroboam. Il y allait de sa vie. Il est probable qu’après avoir accompli cette périlleuse tâche, il rentra dans son pays.

2. Circonstances🔗

« On peut fixer l’époque d’Amos d’une manière à peu près certaine, car la suscription indique qu’Amos exerça son ministère sous Ozias de Juda et sous Jéroboam fils de Joas, c’est-à-dire Jéroboam II d’Israël. Ce dernier souverain est nommé dans Amos 7.10. Or, comme il a régné 41 ans, de 824 à 783, et pendant les 27 dernières années simultanément avec Ozias, c’est durant cette dernière partie de son long et glorieux règne que doit se placer l’activité du prophète, dont les discours adressés à Israël supposent, en effet, un peuple qui se complaît dans une prospérité déjà longue » (Bible Annotée, Introduction à Amos).

Israël était alors, avec Hamath et Calné, une puissance dirigeante dans le cadre des nations voisines. Le puissant Jéroboam II avait su tirer le meilleur parti de la situation politique déjà favorable que lui avait léguée son prédécesseur. Les affaires avaient repris et elles étaient pour beaucoup une importante source de bien-être, qui se manifestait extérieurement par d’imposantes constructions. Le palais royal et les résidences estivales se distinguaient par leur faste extraordinaire, notamment par des ornements d’ivoire. La riche bourgeoisie s’efforçait de régler son train de vie sur celui de la cour. Le luxe et l’esprit de jouissance formaient le fond de cette époque florissante.

Naturellement, la religion se mettait, elle aussi, au diapason du temps. Un cléricalisme officiel, confortable et embourgeoisé, régnait à la cour. Simples fonctionnaires, les prêtres étaient chargés d’empêcher toute atteinte à l’ordre établi. Dieu, qui avait si visiblement béni son peuple, était honoré. On se rendait en foule aux cultes somptueux célébrés dans les sanctuaires royaux de Béthel et de Dan. Et l’on attendait davantage encore de ce Dieu si prompt à bénir. On attendait « son jour », qui ne manquerait pas de mettre le comble aux bénédictions reçues.

C’est en plein milieu de cette euphorie que surgit Amos. Sur le mode d’une complainte funèbre, il entonne un chant dont l’accent et le contenu jettent le trouble dans l’assemblée en fête. Cela va si loin que le prêtre attaché au sanctuaire royal dresse un rapport contre cet étranger indésirable et le fait expulser. Dès lors, Amos disparaît de la scène de l’histoire : nous ne savons pas ce qu’il devient, mais ce qui nous reste de lui, plus important que toutes les données biographiques, c’est son message.

Le reste de cette section est tiré de la Bible Annotée (Introduction à Amos et conclusion).

Fixer une date plus exacte n’est pas possible. Celle, très précise pour les contemporains, qu’Amos donne dans Amos 1.1 en disant : « deux ans avant le tremblement de la terre », ne peut pas servir à nous éclairer. Ce tremblement de terre n’étant pas mentionné ni dans le livre des Rois ni dans celui des Chroniques, il nous est impossible de tirer de là une date plus positive. Du reste, Amos parle de ce tremblement de terre moins pour fixer une date qu’en vue de la relation intime qui, comme nous le verrons, existe entre sa mission prophétique et ce jugement de Dieu qui suivit de très près. Dieu, en sanctionnant la parole de son serviteur d’une manière toute spéciale, montrait par là qu’il l’accomplirait également sur tous les points (par exemple Am 5.27; 6.14; 9.1).

Extérieurement, rien ne semblait justifier les menaces d’Amos. Ozias et Jéroboam avaient, l’un et l’autre, élevé leurs États à un haut degré de prospérité. Ozias avait abattu définitivement la puissance des Édomites; il avait subjugué les Philistins et rendu tributaires les Ammonites (voir 2 R 14:22; 2 Ch 26.6-8). De son côté, Jéroboam, par une série de victoires, avait secoué le joug des Syriens et rétabli son royaume dans ses limites anciennes.

Mais sous cette prospérité brillante se cachait une grande corruption. Juda était sans doute moins profondément atteint, aussi sa ruine était-elle moins imminente. Mais on sent au langage d’Amos qu’Israël dort sur un volcan et court à sa perte comme en se jouant. À la fois voluptueux et bigot, il se livre à toutes les jouissances sensuelles, sans être moins zélé avec tout cela pour le culte des veaux d’or, comme si c’était là le vrai culte de l’Éternel. Par cette conduite, Israël amasse peu à peu sur sa tête l’orage qui bientôt doit le détruire.

C’est là le message qu’apporte Amos. Il ne nomme pas l’ennemi qui sera la verge dont Dieu frappera son peuple, mais on devine que c’est l’Assyrien.

L’horizon historique d’Amos est à peu près le même que celui de Joël, qui ne vivait qu’une cinquantaine d’années environ avant lui. Pas plus l’un que l’autre ne parle expressément des grands États orientaux : l’Assyrie et Babylone. Ce sont des petits peuples voisins, surtout les Édomites et avec eux les Philistins, qui occupent le devant de la scène (Jl 3.4,19; Am 9.12; comparez 1.6-8,11-12). Cependant, de même que le terme Tséphoni septentrional pourrait renfermer déjà chez Joël une allusion à une grande puissance venant du nord-est, nous trouvons dans la menace d’Amos la captivité du peuple « au-delà de Damas », un indice plus distinct, quoique vague encore, de l’ennemi qui déjà surgit de ce côté.

L’horizon moral diffère davantage, mais sans doute parce que Joël s’adressait à Juda et Amos au royaume du Nord, dont la dégénérescence religieuse et morale était déjà plus avancée. Joël se borne à appeler son peuple à la repentance, en raison du fléau qui le frappe et de celui, plus redoutable, qui le menace. Amos, va plus loin. Le mal est à ses yeux déjà incurable, et la sentence de destruction ne peut plus être révoquée. Israël doit passer par la mort de la captivité. Et cela ne s’applique pas seulement aux dix tribus, mais aussi à Juda. Les deux royaumes sont condamnés à périr (Am 2.5; 3.13; 6.1, etc). Le temple de Béthel sera renversé et le palais des rois de Juda en Sion, qui n’est déjà plus qu’une chaumière, croulera (Am 3.14; 9.1,11).

L’avenir messianique, que contemplent ces deux hommes, présente aussi de grandes analogies, mais non sans quelques différences. Chez tous les deux, le salut du peuple est rattaché à un groupe de rescapés israélites demeurés à Sion et autour desquels se rassembleront ceux des païens qui, à la suite des jugements de Dieu, invoqueront le nom de l’Éternel (Jl 2.32; Am 9.11-12). Chez Joël, ce salut sera amené par un peuple de prophètes que créera l’effusion du Saint-Esprit; chez Amos, par le relèvement du palais royal et de la famille de David. Il est bien évident qu’un rejeton de David présidera à cette glorieuse restauration; mais ce personnage n’est pas spécialement désigné. La promesse messianique conserve encore chez les deux prophètes quelque chose d’impersonnel. Enfin, cette attente revêt chez tous les deux des couleurs en rapport avec celles sous lesquelles était présent le châtiment. La restauration d’un édifice correspond au fléau du tremblement de terre. (Bible Annotée).

3. Le livre🔗

Amos est le premier des prophètes-écrivains, c’est-à-dire des prophètes qui ont rédigé leurs oracles. Il est permis de penser que le recueil a tout d’abord été répandu sous la forme d’un tract qu’on se passait de main à main, en sorte que le cri d’alarme du prophète pût atteindre un public plus étendu. Les oracles y sont rendus dans un langage rude, qui n’hésite pas par exemple à comparer les riches et belles dames de Samarie… aux vaches vautrées dans les gras pâturages du Basan! Le « pâtre » Amos garde son franc-parler; il conteste ouvertement les injustices sociales, condamne vigoureusement le formalisme d’un culte solennel qui passe, d’ailleurs, par la vénération idolâtre des veaux d’or et des pratiques religieuses où le cœur n’a pas de part. S’il est brutal dans l’expression de ses malédictions contre les ennemis qui menacent directement sa nation, c’est surtout aux crimes d’Israël qu’il s’en prend et c’est son châtiment qu’il annonce, sans non plus passer sous silence ceux de Juda.

4. Plan🔗

1. Introduction à Amos - 1.1-2
2. Huit jugements - 1.3 à 2.16
    a. Jugement contre Damas - 1.3-5
    b. Jugement contre Gaza - 1.6-8
    c. Jugement contre Tyr - 1.9-10
    d. Jugement contre Édom - 1.11-12
    e. Jugement contre Ammon - 1.13-15
    f. Jugement contre Moab - 2.1-3
    g. Jugement contre Juda - 2.4-5
    h. Jugement contre Israël - 2.6-16
3. Trois sermons sur le jugement - 3.1 à 6.14
    a. Le présent d’Israël - 3.1-15
        1. Jugement mérité - 3.1-10
        2. Jugement décrit - 3.11-15
    b. Le passé d’Israël - 4.1-13
        1. Jugement mérité - 4.1-5
        2. Jugement démontré - 4.6-11
        3. Jugement décrit - 4.12-13
    c. L’avenir d’Israël - 5.1 à 6.14
        1. Jugement mérité - 5.1-15
        2. Jugement décrit - 5.16 à 6.14
            a. Premier malheur - 5.16-27
            b. Second malheur - 6.1-14
4. Cinq visions du jugement - 7.1 à 9.10
    a. Vision des sauterelles - 7.1-3
    b. Vision du feu - 7.4-6
    c. Vision du niveau - 7.7-9
    d. Parenthèse historique :
        l’opposition du prêtre Amatsia - 7.10-17
    e. Vision de la corbeille de fruits - 8.1-14
    f. Vision des chapiteaux écrasés - 9.1-10
5. Cinq promesses de restauration - 9.11-15

5. Style🔗

D’origine campagnarde, Amos n’est pas illettré ou inculte. Il médite sur les événements qui marquent la vie de son propre pays et des peuples voisins. On se tromperait si on voyait en Amos un prédicateur qui néglige les formes du langage : il sait aussi bien user des subtilités de la sagesse que de l’ampleur solennelle de la liturgie, manifester l’élan du lyrisme, jouer avec les mots ou manier l’ironie. Sa langue frappe surtout par sa sobriété; pour proclamer son message, quelques mots suffisent, rapides comme la foudre, destructeurs d’illusions comme le tremblement de terre. Ces dons littéraires se sont manifestés parce qu’ils étaient portés par la puissance et la grandeur d’un sujet. Comme le dit Calvin dans sa lettre à la marquise de Rothelin : « Sa langue est vive et nerveuse. Il s’élève presque à la hauteur des plus grands prophètes. Tout berger qu’il est, il possède la connaissance de la loi de Dieu et l’histoire de son peuple. »

6. Message🔗

Dieu est au gouvernail de l’histoire et tient la balance de la justice entre ses mains. Tel est l’arrière-plan de tout le message d’Amos. Dieu juge toutes les nations avec équité, selon le principe que les privilèges créent une responsabilité correspondante; ce qu’un peuple sème, il le moissonnera… Avant de punir, Dieu ne cesse de réitérer ses appels à la repentance, car ce n’est pas la mort du pécheur qu’il désire, mais sa vie; mais si les appels de la grâce sont perpétuellement refusés, il faut alors se préparer à rencontrer Dieu dans ses jugements, car ils sont alors inévitables. Les nations d’aujourd’hui et l’Église, nouvel Israël, n’échappent pas à cette loi. Le but du jugement divin est toujours positif : celui d’ouvrir le chemin de la restauration, de l’établissement final de l’ordre parfait, créer les conditions telles que le peuple élu et l’humanité entière puissent réaliser leur vraie vie, en jouir pleinement et éternellement.

Dieu est pour Amos l’inéluctable. Il se tient à la porte de son peuple. Cette certitude, chez le prophète, est devenue une connaissance certaine; elle inspire le contenu de ses visions. Elle implique en même temps l’assurance d’un jugement imminent. Ce jugement prendra la forme d’une catastrophe soudaine qui déterminera une véritable faim de la Parole de Dieu. Il faut que le peuple de Dieu apprenne à son tour à connaître la réalité du Seigneur auquel personne n’échappe. S’il reste une espérance dans le cadre de ce message, elle est uniquement fondée sur le fait de l’alliance. Mais la foi en cette alliance signifie, pour le peuple élu, qu’il lui faut renoncer à tirer quelque gloire pour lui-même. Elle n’apporte aucune sécurité humaine. Si le peuple croit pouvoir tirer de l’alliance des raisons pour s’endormir dans une fausse sécurité, il en a déjà faussé le sens et son culte tombe dans le vide.

L’alliance est menacée lorsque le peuple de Dieu ne songe qu’à satisfaire sa frénésie de jouissances et regorge de biens matériels. Pour le prophète, c’est un symptôme infaillible de la catastrophe qui s’approche. Car cette course au bien-être engloutit les forces vives de la nation. La vie fastueuse et dissolue des riches, outre qu’elle les sépare de Dieu, crée une tension sociale qui affaiblit le peuple de Dieu. Dans le cadre de l’alliance, l’oppression exercée par les riches est plus qu’un mal économique : elle est littéralement une négation du droit de Dieu. Quant à l’arbitraire qui règne en maître au tribunal, il montre avant tout que la vraie foi a disparu et que le Seigneur de l’alliance a été oublié. Amos a été lui-même saisi par l’irrésistible violence de ce Dieu auquel nul n’échappe.

Héraut de cette présence bouleversante, il atteste que l’élection divine est la seule réalité qui fonde l’existence du peuple de Dieu. Dès le début, il a été tourmenté par la pensée de l’alliance. Conscient de la délivrance intervenue et les yeux fixés sur la délivrance à venir, il proclame par son message et par sa vie qu’aucun succès, aucun bien-être, aucune cérémonie religieuse, si grandiose soit-elle, ne peuvent soustraire l’homme à la souveraineté de Dieu. Bien plus, il affirme que l’existence dans le cadre de l’alliance est directement menacée par toute cette prospérité tranquille et satisfaite. C’est là un témoignage d’une actualité permanente même si, dans leur détail, les avertissements d’Amos restent conditionnés par les circonstances de son époque.

Enfin, dans sa souveraineté absolue, Dieu exerce son pouvoir également sur les peuples placés en dehors de l’alliance et il punit leurs crimes. Mais c’est surtout les forfaits de son peuple qui font l’objet de son châtiment.

Le message d’Amos a pour objet la grandeur de Dieu, son pouvoir et sa justice, qui s’étendent à toutes les nations, mais aussi sa prédilection sans retour pour le peuple d’Israël. Il rappelle les exigences de la loi, en particulier celle qui règle le culte et celle qui définit les droits des pauvres et des indigents. Le Dieu d’Amos est un Dieu jaloux à l’amour inflexible, qui sait que le poids du monde mauvais peut tirer les hommes loin de lui — et il le fait quelquefois —, mais qui peut aussi — et il le fait pour Israël et pour tous ceux qui sont spirituellement Israël — ne pas les laisser vaincre par le poids du péché et les exigences folles de pécheurs qui vivent sans Dieu ou en dehors de ses lois. Il peut déclarer que le péché et l’orgueil attireront sur le pécheur tous les châtiments, mais il peut faire surabonder le pardon et la grâce là où le péché et l’insolence ont abondé. Amos nous apprend encore que la prière de l’homme peut avoir une si grande efficacité qu’elle en arrive à émouvoir Dieu et à le faire revenir sur certaines de ses décisions. Cette intercession du prophète pour le peuple de Dieu trouvera son achèvement dans la prière de Jésus pour les siens (Jn 17).

Le Dieu d’Amos n’a pas un double visage, celui d’un Dieu qui punirait et celui d’un Dieu qui sauverait. C’est le même Dieu et Seigneur qui punit, mais qui veut aussi sauver. La punition elle-même dépasse l’ordre rigoureux et froid de la justice sans pardon, car elle est l’expression d’un amour blessé ou trahi qui, dans un dernier cri, par delà le châtiment, appelle encore à la conversion. Ainsi le message d’Amos comporte : (1) une révélation lourde de menaces; il en est qui mourront de faim et de soif, parce qu’ils auront cherché trop tard la Parole de Dieu et qu’ils ne l’auront plus trouvée; (2) une révélation qui s’ouvre à l’espérance et que reprendront d’autres prophètes.

Lorsque tout est perdu, Dieu peut encore faire grâce.