Cet article sur Jean 15.7 a pour sujet la prière qui semble parfois une énigme, car elle n'est pas toujours exaucée. La promesse de Jésus concerne en particulier la mission de l'Église et la force qu'il donnera à ses serviteur de l'accomplir.

Source: La prière en Esprit. 4 pages.

Jean 15 - La prière est-elle une énigme?

« Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela vous sera accordé. »

Jean 15.7

La prière serait-elle une énigme? Cette question se pose parfois avec une grande acuité au chrétien, même lecteur de la Bible, autant qu’au profane qui ne sait pas prier et qui ne veut point prier.

Parfois, le chrétien est surpris… de voir sa prière exaucée. Mais le plus souvent, sa surprise vient du fait que Dieu ne répond pas à nombre de ses prières. Que fait donc Dieu de ses ardentes requêtes, de ses supplications passionnées? Son expérience semble par moments contraire à ce que l’Écriture lui enseigne au sujet de la prière. Que sont devenues les promesses qu’il a lues, celles qui ont été faites avec fermeté par Jésus en personne? Le texte de Jean 15.7 est-il réaliste?

Notons d’abord que, dans ce passage biblique, Jésus se comparait à la vigne et ses disciples aux branches. « Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela vous sera accordé » (Jn 15.7). Telle était la promesse faite par le Christ. Mais il y a cette clause : « Si vous demeurez en moi. » Cette promesse extraordinaire est liée à une condition. Sans doute sommes-nous nombreux à avoir mis cette parole du Seigneur à l’épreuve pour découvrir ensuite, avec amertume, qu’elle ne se réalisait pas… Et ceci malgré notre foi, malgré l’ardeur de notre attente. Pourquoi cette déception?, nous demandons-nous. Car nous avions formulé des demandes légitimes et nous n’avions pas douté, même pas un instant, que la parole du Christ était vraie, solide. Quelque chose a dû nous échapper. Ou alors, sceptiques, nous concluons que nous nous sommes lourdement trompés…

Je reconnais volontiers que de telles affirmations, pour un fidèle qui s’en tient strictement à la Parole, créent un embarras. Jésus se serait-il trompé, même s’il n’a pas voulu nous tromper? Comment résoudre une telle énigme?

Je vous invite plutôt à en prendre votre parti, car il ne nous sera jamais possible de résoudre cette énigme. Pourtant, je crois qu’il existe même à cet endroit un élément positif. Il doit exister une saine, voire une sainte perplexité au sujet de la prière chrétienne. C’est le cas pour d’autres points de notre vie dans la foi. Tout n’est pas clair comme l’eau de roche, bien au contraire. Dans la Bible, nous découvrirons des enseignements essentiels qui nous surprendront et qui nous jetteront dans la perplexité. Nous nous poserons à leur sujet un tas de questions qui risquent fort de rester sans réponse.

L’une des questions que nous devons poser est la suivante : de quelle manière la prière, notre prière chrétienne, peut-elle changer le cours des événements? À cet endroit, la prière selon la Bible restera toujours voilée. Un épais mystère planera autour d’elle, car, faut-il le rappeler, il n’y a que les magiciens, les sorciers, les faiseurs de merveilleux et autres falsificateurs qui osent proposer des choses apparemment claires, avantageuses et parfaitement compréhensibles. La vie de la foi, elle, est pour le moment entourée de grands points d’interrogation.

Pourtant, il est possible d’ôter, au moins en partie, un coin du voile. C’est à la condition placée par Jésus que je fais allusion : « Si vous demeurez en moi. » Disons-le tout de suite, la promesse de Jésus ne concerne jamais les mauvaises prières. Or, nous avons déjà signalé que trop de prières, même faites par des chrétiens, sont mauvaises. Elles sont souvent prononcées dans la confusion de nos esprits et sont le fruit de passions qui n’honorent pas Dieu; elles lui sont adressées alors que notre vision des choses spirituelles est rétrécie et que nous sommes au plus bas. Jésus ne promet pas que de telles prières seront entendues et exaucées par Dieu. Une fois que ce type de prière aura été éliminé de notre répertoire, nous pourrons nous occuper de la vraie prière qui, à son tour, n’est pas toujours exaucée…

Examinons à présent les conditions particulières dans lesquelles Jésus s’adressa à ses disciples. Jésus se trouve vers la fin de sa carrière terrestre. Il ne lui reste que quelques heures avant son arrestation et sa crucifixion. Il est encore en compagnie de ses disciples avant d’être jeté dans le tourbillon des événements tragiques qui le conduiront jusqu’au sommet du Calvaire. Ses disciples effrayés seront dispersés, telles des brebis sans berger. En nous rappelant cette chronologie, nous saisirons mieux l’apparente contradiction entre la prière et son exaucement.

Pourquoi Jésus a-t-il eu recours à un tel langage alors qu’il était sur le point de quitter le groupe de ses disciples? La réponse est évidente. Les apôtres deviendront bientôt les instruments humains de la fondation de l’Église. Jusqu’ici, ils ont été les témoins de nombreux miracles. Ils étaient persuadés que Jésus les accomplissait grâce au pouvoir du Saint-Esprit. Ils s’imaginaient aussi que ces merveilleuses aventures allaient se prolonger indéfiniment, jusqu’à l’instauration du Royaume. Par une raison incompréhensible, ils avaient oublié que Jésus leur avait prédit sa crucifixion. Or, Jésus, quant à lui, savait que l’heure approchait. Ses disciples allaient devenir les témoins du supplice de la croix. Ils risquaient de douter de sa mission divine rédemptrice. Et même après sa résurrection, au moment de son ascension, ils seraient accablés par le sentiment de leur solitude. Où donc retrouver le pouvoir d’exorciser des démons, comme ils avaient pu le faire il y a peu? Comment redonner la vue à des aveugles et faire sauter sur leurs pieds des boiteux et des paralysés? Jésus prévoit clairement l’état d’esprit de ses disciples. Il entend presque leurs interrogations tourmentées. Aussi il tient à les rassurer. Ils ne seront pas abandonnés. Un lien subsistera entre eux et leur Seigneur même si, physiquement, ils seront bientôt séparés de lui. Ainsi, à la fin de cette ère, au seuil de la nouvelle période qui va être sous peu inaugurée, Jésus leur fait cette déclaration : la prière sera le lien qui les rattachera à sa personne, lien entre eux et le Père, lien aussi entre eux et le Saint-Esprit. Ils n’ont donc aucune raison de s’effrayer.

L’époque nouvelle sera celle qui verra la fondation de son Église, ce Temple vivant de Dieu au milieu des hommes. C’est grâce à leur action missionnaire que l’œuvre du Christ sur terre sera poursuivie. À partir de maintenant, les apôtres et l’Église seront le peuple de la prière.

Ici comme ailleurs, les discours de Jésus ne sont pas prononcés dans le vague. Il ne promet pas que n’importe quelle prière, même la plus sincère, sera exaucée. Sa promesse est liée à l’accomplissement de sa mission rédemptrice (voir Jn 15.4-5,12-14). Plus son peuple vivra dans son intimité, plus il portera des fruits. Cette ère nouvelle de l’Église sera caractérisée par la proclamation de l’Évangile. La prière est par conséquent avant tout une requête et même un combat pour la mission chrétienne. Elle n’est pas une « aspirine » ou autre analgésique nous permettant d’être délivrés de nos migraines, quelle qu’en soit la forme. Je ne veux pas dire que Dieu ne se soucie pas de nos angoisses, de nos maux et maladies physiques, de nos problèmes personnels, familiaux ou matériels… Mais la promesse particulière dont nous traitons ici concerne exclusivement la mission chrétienne dans le monde et non pas nos besoins personnels.

C’est pour cette raison encore que dans les chapitres 14 et 16 de l’Évangile selon Jean, Jésus invite les siens à prier pour une cause jamais encore imaginée : pour l’avènement de son règne, pour la défaite des pouvoirs du mal afin que seule la puissance de Dieu soit exaltée, reconnue et crainte. Pendant que Jésus prononce ce discours, il est entouré d’un tout petit groupe de disciples, d’hommes faibles et fragiles, et pourtant chargés d’annoncer son salut et son règne. Certains d’entre eux subiront le martyre, sans doute quelques-uns seront même crucifiés la tête en bas, ainsi que le soutient la tradition en ce qui concerne Pierre. Devant cette perspective, Jésus tient à leur assurer que leur formation et leur force seront infiniment supérieures à tout ce que le monde pouvait imaginer ou leur opposer, que c’est lui en personne, qui les accompagnera et répondra à leur prière si elle est prononcée en faveur de sa cause.

J’espère qu’il nous est tout à fait clair, à présent, que la promesse biblique n’a pas été faite pour nous jeter dans la perplexité ou pour nous confondre, mais pour nous rassurer. Elle nous est offerte pour nous lier intimement au Sauveur. Elle nous accorde la force pour nous engager à sa cause. Aussi je crois pouvoir et devoir dire qu’il s’agit là d’une promesse forte et belle. Sachons que la rébellion de l’apostat sera étouffée; les puissances diaboliques seront totalement déroutées; l’adversaire haineux des origines sera définitivement écrasé; la conversion de ceux pour qui nous prions sera possible.

Le jour viendra aussi où tous les élus de Dieu réunis en un seul et même troupeau se retrouveront sous la vigilance de l’unique Pasteur souverain. Comment douter que Dieu puisse répondre à de telles prières? Le grand message de la Bible annonce que Dieu a remué les cieux et la terre pour y répondre d’avance.

Et pourtant, malgré ces affirmations joyeuses, je maintiens mon idée du début; le caractère énigmatique de la prière reste encore entier. Comment lier nos prières à la providence divine? La réponse est que la providence divine universelle inclut également nos prières. Comment nos prières pourront-elles changer le cours des événements? Nos prières nous lient à la providence sage, parfaite et bonne de Dieu. Comment l’homme pécheur oserait-il s’engager pour Dieu et pour une cause tellement sainte? Rien en effet dans nos existences ne nous qualifie pour une mission aussi extraordinaire et grandiose.

Croire en la promesse du Christ fait partie de notre mission. En dépit de notre indignité, nous pourrons prier le Dieu révélé en Jésus-Christ. Nous le prierons afin qu’il accomplisse ses objectifs et ses desseins. Le jour est proche, je le pense, où la trompette sonnera pour annoncer sa victoire totale et définitive. Alors, nous saurons que toutes les promesses de Dieu ont été « oui » et « amen » en Jésus-Christ, son Fils notre Sauveur.

Amis chrétiens, il nous reste à prier sans cesse, sans douter, en nous soumettant avec foi à sa direction paternelle, sûre et affectueuse.