Cet article sur Marc 14.17-26 a pour sujet la tristesse d'incompréhension des disciples à l'annonce de la trahison de Judas, et les chants des Psaumes avec Jésus annonçant sa personne et son oeuvre de salut pour nous.

Source: Réflexion sur le chant des Psaumes. 12 pages.

Marc 14 - Tristesse et chants en compagnie de Jésus

« Le soir venu, il arriva avec les douze. Pendant qu’ils étaient à table et qu’ils mangeaient, Jésus dit : En vérité, je vous le dis, l’un de vous qui mange avec moi me livrera. Ils commencèrent à s’attrister et à lui dire l’un après l’autre : Est-ce moi? Il leur répondit : L’un des douze, celui qui met avec moi la main dans le même plat. Le Fils de l’homme s’en va, selon ce qui est écrit de lui. Mais malheur à cet homme-là par qui le Fils de l’homme est livré! Mieux vaudrait pour cet homme ne pas être né. Pendant qu’ils mangeaient, Jésus prit du pain, et après avoir dit la bénédiction, il le rompit et le leur donna en disant : Prenez, ceci est mon corps. Il prit ensuite une coupe, et après avoir rendu grâces, il la leur donna, et ils en burent tous. Et il leur dit : Ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui est répandu pour beaucoup. En vérité, je vous le dis, je ne boirai plus du fruit de la vigne, jusqu’au jour où j’en boirai du nouveau, dans le royaume de Dieu. Après avoir chanté (les psaumes), ils se rendirent au mont des Oliviers. »

Marc 14.17-26

« En lisant le récit du dernier repas de Jésus avec ses disciples, j’ai été très touchée, bouleversée même, de comprendre que les apôtres, malgré leur tristesse, avaient chanté des cantiques. Je me disais : Quel exemple de foi pour moi! Ils devaient être tellement tristes de savoir que Jésus allait les quitter, et ils chantaient! (Mc 14.17-26). Cependant, en partageant cela avec des amis chrétiens, on m’a repris en me disant que les apôtres n’avaient pas compris que Jésus allait mourir et qu’ils n’avaient pas été réellement tristes; c’est plutôt parce qu’ils avaient mangé quelque chose de traditionnel à Pâques qui les avait fait pleurer, et ils ont chanté, car c’était une tradition obligée. J’aimerais comprendre. »

Question d’un correspondant

  1. Un raisonnement arminien ou réformé?
  2. Une tristesse provoquée par de l’incompréhension
  3. Une tristesse contribuant à faire souffrir le Christ davantage
  4. La Pâque célébrée dans la joie pour accentuer les souffrances du Christ
  5. Des chants pour préparer leurs cœurs à accueillir l’œuvre de leur Sauveur
  6. Des chants qui auraient dû être nourris par l’enseignement du Maître
  7. Jésus chante avec ses disciples et c’est significatif!
  8. Jésus utilise les psaumes pour expliquer sa personne et son œuvre
  9. Jésus chante à propos de sa personne et de son œuvre messianique
  10. Jésus est imprégné des psaumes qui éclairent son œuvre sur la croix
  11. Jusqu’à quel point les disciples qui chantent sont-ils un exemple?
  12. Une consolation dans nos larmes et un encouragement pour nos chants

Voici une question fort intéressante et qui nous stimule à sonder les Écritures afin d’en être éclairés. En fait, cette question pourrait s’appliquer à presque l’ensemble de la Bible si on la formulait de manière plus large, par exemple comme suit : Quel est le rapport entre les paroles et actions des hommes rapportées dans la Bible (paroles et actions empreintes de faiblesses, de péchés, d’erreurs, d’ignorance, d’incompréhension, de révoltes, etc.) et les paroles et actions de Dieu également rapportées dans la Bible? En fait, comment toute la Bible peut-elle être la Parole inspirée et infaillible de Dieu si une très grande partie de son contenu est remplie de paroles et d’actions humaines faillibles et erratiques? Ou encore : Comment Dieu s’y est-il pris pour faire avancer son plan rédempteur sage et parfait à travers l’histoire humaine d’un peuple pécheur et corrompu? Voilà des questions profondes!

1. Un raisonnement arminien ou réformé?🔗

L’approche arminienne typique est de répondre : « Ou bien… ou bien… » Autrement dit, on fait le départage entre la souveraineté de Dieu, d’une part, et la responsabilité humaine, d’autre part, comme si les deux étaient en compétition ou en opposition. Le départage peut se faire dans des proportions diverses, par exemple 50 % – 50 %, ou encore 75 % – 25 %, ou même 99 % – 1 %. Peu importe la proportion choisie, la logique demeure la même. L’homme conserve toujours une petite parcelle d’autonomie indépendante de l’action divine (dans le but de tenter de préserver philosophiquement la « liberté » autonome de l’homme).

L’approche réformée typique est plutôt de répondre : « Et… et… » Autrement dit, dans un même événement, nous reconnaissons que Dieu est 100 % souverain, 100 % à l’œuvre, et qu’il accomplit son plan infailliblement à 100 %, et, dans ce même événement, l’homme est 100 % responsable de ses paroles et de ses actes1.

Devant le texte de Marc 14.8-26, le réflexe que nous, réformés, avons est de dire : « Et… et… » En d’autres mots : Oui, Jésus s’en va à la croix pour notre salut (paroles et œuvres rédemptrices de Dieu prononcées et accomplies par le Sauveur), et oui, aussi, ses disciples l’accompagnent sur cette route, faisant des gaucheries et des bêtises, vivant des incompréhensions et des refus, mais en même temps pouvant dire des paroles et faire des gestes significatifs pour l’accomplissement du plan rédempteur de Dieu.

Il est donc justifié d’être bouleversé par le fait qu’ils chantaient, alors qu’ils étaient en même temps attristés du départ prochain de leur Seigneur. Que ce soit de leur part un mélange d’ignorance, d’actions répréhensibles, de tradition ou d’actes de foi, peu importe, cela ne change rien au fait que le déroulement de leur histoire fait partie de ce plan rédempteur. À travers leurs réactions, Jésus-Christ vivait et faisait de grandes choses pour eux comme pour nous. Autrement dit, Dieu s’est réellement servi des disciples et de leur histoire (comme aussi de Pilate, d’Hérode et de Satan) en vue d’accomplir exactement tout ce qu’il avait éternellement décidé selon son dessein bienveillant pour notre salut (voir par exemple Ac 2.23 et 4.27-28).

Par contre, d’autres peuvent avoir le réflexe de dire : « Ou bien… ou bien. » En d’autres mots : Oui, Jésus est allé à la croix pour notre salut (paroles et œuvres rédemptrices de Dieu prononcées et accomplies par notre Sauveur), mais non, les disciples n’ont pas contribué à faire avancer (bon gré ou mal gré) ce plan rédempteur puisqu’ils n’ont pas compris et qu’ils ont même résisté à l’idée que leur Maître devait aller à la croix, ou bien, parce qu’ils se sont embourbés dans des traditions qui semblaient étrangères à ce que le Seigneur Jésus se préparait à accomplir. Tout est dans la logique : puisque… donc…, alors… par conséquent… Cette logique arminienne fait en sorte que les paroles et les gestes des disciples risquent d’être jugés peu importants ou même inutiles, car d’après ce raisonnement il est impossible que l’ignorance, la résistance et le péché des hommes puissent être mêlés à l’exécution parfaite du plan rédempteur de Dieu.

En gardant ces deux types de raisonnement à l’esprit, nous pouvons commencer à prêter attention à ce texte…

2. Une tristesse provoquée par de l’incompréhension🔗

« Les apôtres n’avaient pas compris que Jésus allait mourir. » Peut-être devrions-nous plus exactement dire qu’ils n’avaient pas compris pourquoi Jésus devait mourir. En cela, nous sommes d’accord. À plusieurs reprises, le Seigneur leur avait d’avance annoncé qu’il devait souffrir, mourir, puis ressusciter des morts (Mc 8.31-33; 9.9,12; 9.31-32; 10.32-34; 12.6-8; 14.8). Cependant, eux ne comprenaient pas et n’acceptaient pas la chose. Pour eux, le Messie Roi qui venait d’entrer triomphalement à Jérusalem devait très bientôt instaurer son Royaume avec puissance et gloire, possiblement les débarrasser de l’occupant romain et leur accorder des places d’honneur dans son Royaume (ils se querellaient pour savoir qui parmi eux serait le plus grand dans ce nouveau gouvernement messianique…, Lc 22.24-30). Il n’était pas question pour eux que le Roi souffre et meure. La trajectoire prévue et espérée par eux était que leur nouveau Roi entre directement dans la gloire de son règne depuis Jérusalem. Il est donc vrai qu’ils ne comprenaient pas pourquoi Jésus devait mourir.

Toutefois, à mesure que la croix approchait, Jésus continuait de tâcher de leur faire comprendre ce qu’ils comprendraient beaucoup mieux seulement plus tard, après sa résurrection, son ascension et la Pentecôte. Dans notre texte, il venait juste d’annoncer à ses disciples que l’un d’eux le livrerait, c’est-à-dire qu’il le livrerait aux autorités pour qu’il soit accusé et mis à mort. Les disciples ont tout de même saisi quelque chose de cette annonce. Du moins, ils ont commencé à saisir : « Ils commencèrent à s’attrister et à lui dire l’un après l’autre : Est-ce moi? » (Mc 14.19).

Qui peut dire exactement quel était le degré de compréhension des disciples? À cause de ce que Jésus venait de leur dire, ils commençaient à comprendre que l’un d’eux livrerait le Maître et, pour cette raison précise, ils ont commencé à s’attrister. Leur tristesse était réelle et, bien qu’empreinte d’incompréhension et de résistance orgueilleuse tout humaine (« et… »), elle faisait également partie des étapes de l’humiliation du Christ pour notre salut (« et… »).

3. Une tristesse contribuant à faire souffrir le Christ davantage🔗

La question ne consiste pas à savoir ce qui s’est passé exactement dans leur cœur et dans leur esprit, au moyen d’une analyse psychologique que la Bible ne fait pas et ne nous révèle pas. La question consiste à savoir en quoi cette action tout humaine a pu contribuer à la progression du plan rédempteur de Dieu (que les disciples en aient été conscients ou pas). Car cette histoire fait bel et bien partie de l’Écriture inspirée par Dieu, pour notre instruction et notre encouragement dans la foi.

Dans le plan rédempteur de Dieu, cette tristesse et cette résistance des disciples ont contribué à humilier et à faire souffrir le Christ encore davantage. Ils ne se sont pas seulement attristés, ils se sont attristés devant lui, en sa présence, alors que lui se préparait à affronter seul la colère de Dieu déversée sur lui à la croix à cause de nous. Cette tristesse des disciples n’a certes pas aidé Jésus à mieux supporter le poids de ses souffrances; elle a dû au contraire ajouter à son humiliation et à ses souffrances, humiliation et souffrances qui faisaient partie de ce que notre Sauveur devait porter pour expier nos propres péchés d’incompréhension et de résistance, et nous en délivrer!

4. La Pâque célébrée dans la joie pour accentuer les souffrances du Christ🔗

Ensuite : « Ils avaient mangé quelque chose de traditionnel à Pâques qui les avait fait pleurer, et ils ont chanté, car c’était une tradition obligée. » Vraiment? Il faut bien relire le texte! Marc nous dit : « Ils commencèrent à s’attrister et à lui dire l’un après l’autre : Est-ce moi? » (Mc 14.19). Cette remarque suit immédiatement la déclaration de Jésus leur annonçant qu’il allait très bientôt être livré par l’un d’eux. Leur tristesse a été provoquée par l’annonce de Jésus leur révélant qu’il y avait un traître parmi eux, et que lui, le Maître, allait être livré aux bourreaux! Il est difficile d’être plus clair!

D’ailleurs, que pouvait-il bien y avoir dans la fête de la Pâque juive qui aurait pu les faire pleurer? Oui, bien sûr, pour les Israélites, il y avait quelque chose de souffrant et de pénible au souvenir des événements entourant la Pâque : l’esclavage de leurs ancêtres en Égypte, la dureté du pharaon du temps de Moïse, les plaies d’Égypte qui n’ont fait qu’endurcir le cœur du pharaon et appesantir sa main de fer contre le peuple d’Israël en grande souffrance. Des pleurs, oui, à cause de l’ancienne misère en Égypte. Cependant, la fête de la Pâque en elle-même était là pour commémorer un événement très joyeux : la libération miraculeuse de cette impitoyable oppression. Des pleurs transformés en joie! La fête de la Pâque était une fête! Une fête commémorant et célébrant la puissance de Dieu, la victoire de Dieu, la délivrance de son peuple enfin libéré de ce terrible esclavage.

Cependant, pour Jésus, à ce moment précis de son ministère, l’agneau pascal qu’il mangeait avec ses disciples pendant la fête revêtait une signification profonde et accentuait la douleur qui se préparait pour lui. Cet agneau pascal était une préfiguration de ce qu’il allait parfaitement accomplir à la croix le lendemain. Pour le Christ, cette fête n’était pas qu’une « tradition » folklorique, loin de là! Elle signifiait sa propre mise à mort longtemps prophétisée à Israël à travers, entre autres, cette fête pascale. Jean-Baptiste l’avait bien compris dès sa première rencontre avec le Sauveur : « Voici l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde » (Jn 1.29).

Puisque la signification de cette fête allait bientôt s’accomplir, le Seigneur Jésus l’a remplacée en instituant la sainte Cène. La Cène allait désormais servir pour les générations à venir à commémorer sa mort pour le pardon de nos péchés. Puisque le sang de l’Agneau de Dieu allait être versé à la croix, il ne serait plus nécessaire de verser le sang de l’agneau pascal. Désormais, le pain et le vin de la Cène serviraient à commémorer notre délivrance complète de l’esclavage du péché. Voilà une fête encore plus grande et réconfortante pour l’Église!

Au cœur de tout cela, pendant le repas pascal, avant l’institution de la Cène, les disciples entendent Jésus annoncer qu’il serait livré par l’un d’eux, provoquant leur tristesse, une tristesse réelle vivement ressentie à cause de la trahison de l’un des leurs, et qui sera suivie de l’arrestation et de la mise à mort prochaines de leur Sauveur.

Cette tristesse était-elle justifiée ou non justifiée? Elle était en partie justifiée, puisque la trahison par un ami proche et collègue était dramatique et puisque leur Seigneur allait réellement mourir, de la façon la plus injuste et criminelle qui soit. Même les larmes de Jésus devant le tombeau de Lazare, quelque temps auparavant, étaient pleinement justifiées, car sa peine était réelle, même si le Seigneur savait parfaitement qu’il allait ressusciter son ami Lazare. Toutefois, contrairement aux larmes du Seigneur, cette tristesse des disciples était aussi en partie non justifiée, puisqu’elle provenait de leur incompréhension. Judas devait trahir Jésus afin que les Écritures soient accomplies et Jésus devait aller à la croix pour notre salut. Leur tristesse était pourtant une tristesse réelle qui accentuait les souffrances du Christ pour notre salut et qui, malgré eux, était réellement et intimement rattachée au plan rédempteur de Dieu.

5. Des chants pour préparer leurs cœurs à accueillir l’œuvre de leur Sauveur🔗

Alors, qu’en est-il de leurs chants de cantiques? « Ils ont chanté, car c’était une tradition obligée. » Vraiment? Comme si tradition ne pouvait pas rimer avec participation réelle du cœur. Encore un faux dilemme et une fausse opposition! Si c’était la tradition de chanter des psaumes2 à la fête de la Pâque (tout comme lors des autres grandes fêtes célébrées à Jérusalem par les pèlerins venant de partout3), c’était justement pour amener le cœur des Israélites, de génération en génération, à réellement s’approprier le contenu et la signification des psaumes qu’ils chantaient.

Faut-il rappeler que ces psaumes, qui étaient des prières humaines — exprimant les détresses des psalmistes, leur confession des péchés, leurs délivrances, leurs louanges de reconnaissance — étaient en même temps la Parole inspirée de Dieu? Ces prières humaines qui étaient en même temps la Parole de Dieu avaient pour but de pénétrer dans le cœur des croyants qui chantaient de génération en génération. C’est précisément pour cela que Dieu nous a donné ce recueil des psaumes dans la Bible. Le chant des psaumes par coutume ou tradition peut devenir, par la grâce de Dieu, un puissant instrument employé par le Saint-Esprit pour enflammer nos cœurs pour Dieu!

Tradition obligée? Il faudrait plutôt dire tradition magnifique! Rappelons-nous que l’essentiel du message des psaumes est Jésus-Christ, sa personne, sa venue, sa naissance, ses souffrances, sa mort, sa résurrection, son ascension, son règne présent et à venir, son futur retour en gloire, son œuvre rédemptrice pour notre salut. Rien de moins! C’est cela que les disciples, en compagnie de leur Sauveur, étaient « obligés » de chanter juste quelques instants avant l’arrestation du Seigneur, qui mènerait à son procès, à sa crucifixion, à sa mort, à sa résurrection… Pourquoi donc? Pour préparer leurs cœurs, sans peut-être qu’ils le comprennent encore, à accueillir l’œuvre rédemptrice que leur Sauveur s’apprêtait à accomplir par amour pour eux et pour toute son Église.

6. Des chants qui auraient dû être nourris par l’enseignement du Maître🔗

À noter que, si dans Marc 14, le moment où ils ont chanté (Mc 14.26) semble suivre d’assez près la mention de leur tristesse (Mc 14.19), nous comprenons, à la lumière de l’Évangile de Jean, que ces deux instants sont séparés dans le temps par des événements importants. La tristesse des disciples commence au moment où Jésus leur annonce que l’un d’eux le livrera (Mc 14.19), c’est-à-dire vers le début de l’entretien dans la chambre haute (ce qui correspond au récit dans Jn 13.21), tandis que c’est à la toute fin de l’entretien, juste avant de quitter la chambre haute, qu’ils entonnent leurs chants. « Après avoir chanté (les psaumes), ils se rendirent au mont des Oliviers » (Mc 14.26), ce qui correspond au récit qui s’enchaîne dans Jean 18 (Jn 18.1). Entre le début de la tristesse des apôtres et leurs chants, il y a donc le long et magnifique discours que le Seigneur Jésus leur adresse (Jn 14 à 16), suivi de sa très profonde prière sacerdotale en tant que notre Grand-Prêtre (Jn 17). La qualité de leurs chants a pu, ou du moins aurait certainement dû, être immensément enrichie par cet enseignement magistral qu’ils ont entendu de la bouche du Maître et par sa prière d’intercession en leur faveur. Il est donc effectivement très beau de les voir chanter à ce moment précis.

D’ailleurs, vers la fin de ce discours, les disciples semblent en effet avoir fait des progrès dans leur compréhension, du moins c’est ce qu’ils affirment : « Maintenant, nous savons que tu sais toutes choses et que tu n’as pas besoin que personne t’interroge; c’est pourquoi nous croyons que tu es sorti de Dieu » (Jn 16.30). Cependant, Jésus les reprend immédiatement : « Vous croyez maintenant? Voici que l’heure vient, et même elle est venue, où vous serez dispersés chacun de son côté, et où vous me laisserez seul » (Jn 16.31-32). Il n’est donc pas évident de savoir quel progrès réel tout ce discours du Seigneur a produit en eux au moment où ils l’ont entendu, puisque pour eux, tout s’est écroulé à peine quelques instants plus tard. Nous demeurons donc perplexes quant aux sentiments véritables qui les animaient pendant qu’ils chantaient juste avant de se rendre au mont des Oliviers.

Cependant, du point de vue de Jésus et de sa progression vers l’étape ultime de la croix en compagnie de ses disciples, le chant des psaumes avec eux devait revêtir un sens bien particulier, notamment après tout son enseignement et sa magnifique prière. Il venait de leur annoncer son départ prochain vers la gloire du Père, l’envoi de l’Esprit consolateur, leur envoi en mission et, plus tard, son retour en gloire pour les prendre avec lui. Il venait de les encourager à ne pas se laisser troubler, mais à croire en lui, à recevoir ses consolations et sa paix et à porter beaucoup de fruit pour sa gloire. Il venait de prier pour eux afin que le Père les garde au milieu du monde, qu’ils soient sanctifiés par la Parole de Dieu et gardés dans l’unité de l’amour de Dieu et de sa vérité.

Ces chapitres (Jn 14 à 17) contiennent des paroles si riches et si profondes. Le chant des psaumes en compagnie de Jésus en conclusion de ces instants sublimes aurait dû les pousser à louer Dieu de tout cœur et aurait dû sceller en eux la paix que leur Sauveur venait de leur annoncer. Peut-être cela s’est-il d’ailleurs réellement produit, du moins momentanément. Pourtant, je ne suis pas entièrement convaincu de leur bel exemple de chanteurs, car dans les instants qui ont suivi, dès que Jésus a été arrêté, tout s’est écroulé pour eux…

7. Jésus chante avec ses disciples et c’est significatif!🔗

Ici, je ferai une légère bifurcation des disciples vers Jésus. Après tout, c’est vers lui qu’il faut regarder en premier. Pour comprendre la place des chants du Seigneur et ses disciples à ce moment précis de l’histoire du salut, il faut comprendre la place de Jésus au milieu de ces chants. Après tout, le Christ aussi a chanté avec eux! Jésus étant sans péché, tout ce qu’il a fait – incluant chanter – était entièrement parfait!

Quelle est la signification de ces chants dans la bouche du Sauveur? Il n’a pas pu chanter seulement « par tradition obligée », pas plus que ce n’était « par tradition obligée » qu’il a célébré la Pâque juive et qu’il a choisi d’aller mourir sur la croix précisément à ce moment de l’année où tout Israël était rassemblé à Jérusalem pour commémorer la grande délivrance de l’Égypte. Une délivrance plus grande s’annonçait, modelée sur les délivrances passées, mais les transcendant infiniment. Ce n’était pas non plus seulement pour nous donner un exemple qu’il a chanté. Toutes les paroles et toutes les actions de Jésus-Christ ont une signification profonde pour notre salut, incluant le repas pascal qu’il a mangé avec ses disciples, incluant les psaumes qu’il a chantés avec eux juste avant son arrestation.

8. Jésus utilise les psaumes pour expliquer sa personne et son œuvre🔗

Pour mieux comprendre ce qui s’est passé quand le Seigneur a chanté avec ses disciples, il faut bien garder à l’esprit le contenu prophétique, messianique et préfiguratif des psaumes. Tout d’abord, bien avant ce moment, le Seigneur Jésus s’était déjà depuis longtemps imprégné du contenu des psaumes.

Par exemple, lors de son entrée triomphale à Jérusalem, la foule scande avec enthousiasme un extrait du Psaume 118.25-26 : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur! Hosanna dans les lieux très hauts! » (Mt 21.9; Mc 11.9-10; Jn 12.13). Les gens crient des louanges à Dieu à cause de l’arrivée dans la capitale du grand Roi d’Israël, le fils de David. Ils ont raison de l’acclamer! Toutefois, Jésus connaissait parfaitement bien tout le Psaume 118. Il juge alors nécessaire de bien faire comprendre au peuple que, malgré ces acclamations de triomphe, le grand Roi doit passer par la souffrance, le rejet et la mort, avant de ressusciter et d’entrer dans la gloire de son règne. Pour cela, il leur raconte la parabole des vignerons (annonçant la mort du fils héritier), à laquelle il ajoute une citation du même Psaume 118.22 : « N’avez-vous pas lu cette parole de l’Écriture : La pierre qu’ont rejetée ceux qui bâtissaient est devenue la principale, celle de l’angle » (Mt 21.42; Mc 12.10-11; Lc 20.17). Pour que le Christ devienne le fondement inébranlable de son Église, il fallait d’abord qu’il soit rejeté par les bâtisseurs, en l’occurrence les chefs religieux juifs.

Quelques instants plus tard, au milieu de grands débats théologiques avec les pharisiens, sadducéens, scribes et autres dirigeants juifs, Jésus se met à enseigner dans le temple. Il soulève la question suivante : « Comment les scribes peuvent-ils dire que le Christ [le Messie à venir] est fils de David? » Jésus ne nie pas cette affirmation des scribes, mais il reprend leur affirmation dans le but de pousser plus loin l’argument et la réflexion : « David lui-même, animé par l’Esprit Saint, a dit… » Alors Jésus cite un autre psaume, le Psaume 110.1 (psaume le plus cité de tout le Nouveau Testament) : « Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis ton marchepied. » Puis Jésus, qui avait bien réfléchi au sens et à la portée de ce psaume, leur fait sa petite exégèse : « David lui-même l’appelle Seigneur; comment donc est-il son fils? Et une grande foule l’écoutait avec plaisir » (Mt 22.42-45; Mc 12.35-37; Lc 20.41-44).

Par cette petite question incisive, Jésus voulait les amener à réfléchir sur les deux natures que le Messie devait posséder, selon leurs propres Écrits sacrés. Eux se scandalisaient que Jésus se prétende Dieu (c’était un blasphème!), mais d’après un psaume de la plume même de David, le Roi Messie promis devait être homme — fils de David, descendant humain du roi David — et en même temps Dieu — démontré par le fait que David avait honoré son futur descendant en l’appelant Seigneur, « Adonaï » en hébreu, qui désigne Dieu. Jésus savait parfaitement que le Psaume 110 parle de sa personne (Dieu et homme) et de son œuvre (Roi, Messie, Sacrificateur). Matthieu ajoute que cette petite exégèse du Psaume 110.1 par Jésus a complètement fermé la bouche aux dirigeants juifs : « Nul ne put lui répondre un mot. Et, depuis ce jour, personne n’osa plus lui poser de questions » (Mt 22.46).

Jésus cite donc des psaumes (Ps 118 et Ps 110) pour éclairer le peuple d’Israël et ses disciples sur sa personne et sur la grande œuvre libératrice qu’il est venu accomplir à Jérusalem. Peu après, il citera encore aux dirigeants juifs le Psaume 118.26 pour leur annoncer sa venue prochaine dans la gloire de son règne, qui viendra après que Jérusalem l’aura rejeté (Mt 23.39).

Puis, avant son arrestation, il entre dans la chambre haute, seul avec ses apôtres, et là, il n’oublie toujours pas les psaumes. Il en citera trois. Il cite d’abord le Psaume 41.9 pour annoncer aux autres apôtres que l’un d’eux le livrera : « Mais il faut que l’Écriture s’accomplisse : Celui qui mange avec moi le pain, a levé son talon contre moi » (Jn 13.18). Même la trahison par Judas, dont l’annonce attriste les disciples, a été prophétisée et doit s’accomplir selon les Écritures. Quelques instants plus tard, Jésus prépare ses apôtres pour la mission qu’ils devront accomplir par la suite. Il leur annonce alors que le monde aura de la haine pour eux, mais qu’ils ne devront pas s’en surprendre puisque le Seigneur et Sauveur lui-même doit subir avant eux cette même haine. Il leur explique en détail cette haine qu’on aurait pour lui. À l’appui, il cite une parole qui se retrouve dans deux psaumes différents, le Psaume 35.19 et le Psaume 69.4 : « Mais que cette parole, écrite dans leur loi, soit accomplie : Ils m’ont haï sans cause » (Jn 15.25).

Oui, Jésus s’est grandement nourri du contenu des psaumes et il s’en est abondamment servi pour jeter de la lumière sur sa personne et sur son œuvre, afin que les autres voient qu’il était véritablement venu de Dieu, comme Dieu l’avait annoncé longtemps auparavant dans l’Ancien Testament.

9. Jésus chante à propos de sa personne et de son œuvre messianique🔗

C’est alors, quelques instants après, juste avant de sortir de la chambre haute pour être arrêté et amené en procès, qu’il chante des psaumes en compagnie de ses disciples… Nous ne savons pas exactement quels psaumes ils ont chantés, mais nous comprenons bien maintenant que ces psaumes chantés avaient certainement une signification profonde dans le cœur du Seigneur Jésus. Le choix des psaumes chantés devait avoir un lien avec tout ce qui se vivait et se préparait durant ces moments ultimes de la carrière de Jésus : avec la fête de Pâque annonciatrice de son sacrifice expiatoire, avec les grandes vérités qu’il venait d’exposer et de débattre au moyen de citations de psaumes, avec le riche enseignement qu’il venait de donner aux siens dans la chambre haute, avec la croix qui approchait.

Sans doute a-t-il chanté à propos de sa propre personne, à propos de son œuvre messianique, de sa mort sur la croix, de sa résurrection, de son règne et du salut qu’il était venu accomplir en faveur de ceux qui chantaient avec lui. Eux n’ont peut-être pas trop compris toute la richesse et toute la profondeur de ce qu’ils chantaient en compagnie de leur Sauveur. Cependant, ce que lui a fait avec eux, incluant chanter ces vérités messianiques et ces louanges, devait les préparer pour leur ministère à venir et devait contribuer à poser le fondement de l’Église pour les générations à venir…

Ajoutons encore que ces chants (conçus pour éveiller et animer aussi bien l’intelligence que les émotions et la volonté) ont très certainement enflammé Jésus d’un zèle redoublé pour qu’il aille accomplir promptement et avec une obéissance parfaite la mission dont il venait de chanter la signification et dont son Père céleste l’avait investi. En effet! Jésus n’avait pas fini de citer les psaumes. Il le fera encore à trois reprises : une fois pendant son procès et deux fois sur la croix.

10. Jésus est imprégné des psaumes qui éclairent son œuvre sur la croix🔗

Pendant son procès, devant les dirigeants juifs, voilà que le souverain sacrificateur lui pose la question décisive suivante pour l’acculer au pied du mur : « Es-tu le Christ, le Fils du Dieu béni? » (Mc 14.61). Questionné sur sa messianité et sur sa divinité (ce n’est pas banal comme question!), Jésus répond en citant deux textes de l’Ancien Testament, le Psaume 110.1 (encore!) et Daniel 7.13 qu’il fusionne : « Jésus répondit : Je le suis. Et vous verrez le Fils de l’homme assis à la droite du Tout-Puissant et venant avec les nuées du ciel » (Mt 26.64; Mc 14.62; Lc 22.69). Jésus déclare être le Messie annoncé, le Fils de Dieu et le Fils de l’homme — Dieu et homme — et il déclare qu’il viendra dans la gloire de son règne, comme annoncé par les prophètes de l’Ancien Testament. Il n’en faut pas plus pour que le souverain sacrificateur déchire ses vêtements d’indignation (c’est un blasphème!) et que Jésus soit condamné à mort pour crime de blasphème.

Ce n’est pas tout. Alors même qu’il est suspendu sur la croix, souffrant le martyre et agonisant par amour pour nous, Jésus n’oublie pas le contenu des psaumes pour autant. Deux des sept paroles qu’il prononcera sur la croix sont des citations textuelles de deux psaumes différents. Vers la fin des six heures de sa crucifixion, après les trois heures d’obscurité, alors que la colère du Père tombe sur lui de la façon la plus terrible et qu’il ressent de la façon la plus déchirante la coupure de communion d’avec son Père, il cite le fameux Psaume 22.1 : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné? » (Mt 27.46; Mc 15.34). Puis, une fois tout son sacrifice expiatoire accompli, pour exprimer la communion enfin reprise avec son Père et la paix parfaite dans laquelle il s’apprête à entrer au ciel, il cite le Psaume 31.5 : « Père, je remets mon esprit entre tes mains » (Lc 23.46). On peut aussi mentionner le commentaire de l’évangéliste Jean qui cite le même Psaume 22.19 pour expliquer que le refus par les soldats de déchirer ses vêtements accomplissait les Écritures : « Ils se sont partagé mes vêtements et ils ont tiré au sort ma robe » (Jn 19.24).

Il est donc évident que le contenu des psaumes brûlait dans le cœur de notre Sauveur! Les grandes étapes de son œuvre rédemptrice en notre faveur étaient rythmées par divers psaumes. À n’en pas douter, ces chants devaient revêtir pour lui une signification très profonde quand il les a chantés en compagnie de ses disciples. Ces vieux psaumes n’avaient encore jamais été chantés de cette façon! Dans la bouche du Seigneur Jésus, ils sont devenus un chant nouveau. Est-il acceptable alors de dire : « Ils ont chanté, car c’était une tradition obligée »? Je pense que nous pouvons maintenant nous faire notre opinion…

11. Jusqu’à quel point les disciples qui chantent sont-ils un exemple?🔗

J’apporterais encore un petit bémol (puisqu’il s’agit de chants!) à l’idée selon laquelle les disciples qui ont chanté après avoir pleuré de tristesse seraient un si grand exemple de foi pour nous. Oui, dans une certaine mesure, c’est vrai, car ils ont bel et bien chanté des paroles très significatives, pour Jésus comme pour eux. Cependant, il est très difficile de connaître l’intensité et l’authenticité de leurs sentiments! Leurs bouches prononçaient certes des paroles sublimes, mais nous sommes incapables de savoir ce qui animait réellement leurs cœurs.

Notez que j’ai attiré l’attention sur Jésus et sur la signification que la tristesse des disciples et les chants des psaumes chantés par lui-même et ses disciples avaient pour lui. Je n’ai pas tant souligné la signification que la tristesse des disciples et leurs chants avaient pour eux, car ce n’est pas très évident à savoir. Avaient-ils beaucoup de foi, une foi exemplaire, alors qu’ils chantaient les psaumes? Ou bien était-ce simplement par tradition folklorique, comme les gens qui vont au culte d’adoration par habitude et qui redisent ou rechantent les mêmes paroles, sans trop y penser, sans en être vraiment saisis, même si les paroles peuvent être magnifiques et avoir un sens profond? Il suffit parfois d’une petite distraction pour nous faire totalement oublier le sens des paroles si belles que nous chantons. Les motivations intimes et les pensées intérieures des disciples, alors qu’ils pleuraient et qu’ils chantaient en présence du Messie annoncé, sont difficiles à connaître. La Bible n’en parle pas…

Oui, certainement, il y a un exemple à suivre. Chanter de magnifiques louanges à Dieu au milieu de nos pleurs. Chanter à l’écoute de l’immense richesse de l’œuvre de Jésus-Christ que le Maître venait d’expliquer en profondeur à ses disciples dans la chambre haute (Jn 14 à 16). Cependant, il faut comprendre que c’est Jésus qui a entraîné ses disciples à chanter. Laissés à eux-mêmes, l’auraient-ils fait? Au moment précis où ces événements se produisaient, les disciples du Seigneur n’étaient pas tellement de grands exemples à suivre. Ils ne comprenaient pas ce que Jésus s’apprêtait à faire pour eux, ou alors si peu. Ils s’opposaient même à sa crucifixion. Pierre allait par la suite le renier. Les autres allaient l’abandonner. Peu après avoir chanté ensemble, ils l’ont déserté, sont devenus désemparés, désespérés. Ils ont rapidement tout oublié ce que Jésus venait de leur enseigner et le contenu des chants qu’ils venaient de chanter avec lui… Misérables disciples! Jusqu’au jour de la résurrection victorieuse où leurs yeux se sont ouverts! Et jusqu’au jour de la Pentecôte où ils ont été remplis du Saint-Esprit!

À partir de ce moment, les événements passés ont pris toute leur signification à leurs yeux. Ils ont alors pu citer les psaumes dans leurs prédications, comme l’a fait Pierre le jour de la Pentecôte, pour expliquer la résurrection de Jésus (Ps 16.8-11; Ac 2.25-28). Ils ont alors proclamé l’entrée dans son règne à son ascension (encore le Ps 110.1; Ac 2.34). Ils ont pu chanter les psaumes en étant animés d’un zèle nouveau et en se réjouissant pleinement de leur signification profonde! Ils ont alors pleinement compris pourquoi le Seigneur les avait entraînés à chanter avec lui, tandis que leurs yeux baignaient encore dans les larmes devant l’infâme croix se dessinant devant eux.

12. Une consolation dans nos larmes et un encouragement pour nos chants🔗

Il reste à suggérer quelques pistes d’application pratique. Un peu comme les apôtres, mais pour des raisons différentes, nous ne comprenons pas toujours les voies de Dieu et nous sommes parfois attristés par ses façons de faire dans nos vies qui nous sont incompréhensibles. Il y a parfois dans nos yeux des larmes qui sont le reflet de péchés d’incompréhension ou d’endurcissement de nos cœurs, et qui ne sont pas à la gloire de Dieu. Il y a aussi parfois dans nos yeux des larmes différentes, qui ne sont pas des péchés, mais qui sont causées par les peines et les souffrances du temps présent. Ces larmes peuvent être à sa gloire, lorsque versées dans l’espérance du monde à venir. Les unes comme les autres, Jésus les voit, les comprend, les essuie.

Quand notre Sauveur a été humilié et qu’il a souffert à cause de la tristesse de ses disciples, il a lui-même porté la punition que méritaient leurs « mauvaises larmes ». Il a souffert à cause de ces pleurs afin de les expier! Nos « mauvaises larmes » peuvent donc trouver un riche pardon auprès de lui si nous les lui confessons, tout comme nos « bonnes larmes » peuvent trouver une riche consolation auprès de lui si nous trouvons refuge en lui.

Il en est de même de nos chants. Les chants entonnés par les disciples, alors qu’ils chantaient avec Jésus, avaient quelque chose de très beau, de touchant et peut-être même d’exemplaire, mais cette richesse était uniquement due au Christ qui était au milieu d’eux et qui unissait ses disciples à sa propre voix! Ces voix et ces cœurs chantants des disciples mal affermis pâlissent à côté de la voix et du cœur de Jésus entonnant avec une pure conviction et un élan sublime ces magnifiques chants messianiques. Son cœur brûlait à chanter ces psaumes, comme jamais un cœur humain n’a brûlé à chanter! Tout son être et tout son ministère étaient rythmés au rythme de ces psaumes, à diverses étapes de son ministère, notamment les plus cruciales.

Voilà ce qui devrait nous éblouir! Il a daigné, dans sa grâce, chanter en chœur avec ses disciples pécheurs. Il a daigné les accepter dans sa chorale, même s’ils étaient bien moins animés de zèle à accomplir promptement et dans l’obéissance les paroles de ces psaumes. Leurs chants étaient beaux à cause des paroles inspirées par le Saint-Esprit qu’ils chantaient et parce qu’ils chantaient à l’unisson avec leur Sauveur, mais pour ce qui est des chanteurs eux-mêmes, nous pourrions trouver mieux… Quel était leur zèle? Où était leur cœur? De quoi était animée leur intelligence à chanter les louanges de Dieu à l’approche de l’accomplissement des paroles mêmes qu’ils chantaient? Et qu’en était-il de leurs mains, de leurs pieds et de leur volonté à avancer au service de Dieu grâce au contenu profond et inspirant de ces psaumes? Le moins que l’on puisse dire est que tout cela laissait à désirer.

Le Seigneur Jésus-Christ, lui, a chanté les psaumes pour notre salut, incluant le pardon que nous avons besoin de recevoir lorsque nous chantons nos psaumes et cantiques avec moins de zèle, moins d’enthousiasme, en étant distraits, absorbés ou préoccupés par autre chose. Nous avons donc la liberté de pleurer devant lui des larmes de toutes sortes, et nous avons la liberté de chanter en sa présence, même quand nos cœurs, nos émotions, notre intelligence et notre volonté ne sont pas imprégnés comme ils le devraient du contenu de ces chants magnifiques.

Cette liberté nous est donnée par celui qui nous unit à lui et à son chant, non pour excuser notre manque de zèle à chanter ses louanges, mais c’est parce que Sauveur est bon, patient et plein de grâce envers nous, comme il l’a été envers ses disciples. Par son Esprit et par sa Parole — incluant le contenu des psaumes, et incluant également l’enseignement encore plus riche et plus complet de Jésus et de ses apôtres —, il nous animera et nous remplira encore de sa présence et de son feu pour que nous trouvions en lui la consolation dont nous avons besoin dans nos pleurs, et pour que nous trouvions en lui la joie renouvelée de chanter de tout cœur ses louanges à sa gloire.

« Célébrez l’Éternel, car il est bon, car sa bienveillance dure à toujours! » (Ps 118.1).

Notes

1. L’on comprendra que toute la question de l’élection et de la prédestination est incluse dans ce grand sujet, mais qui devrait faire l’objet d’une étude séparée.

2. Matthieu 26.30 et Marc 14.26 ne disent pas explicitement que c’étaient des psaumes que Jésus et les apôtres ont chantés, mais c’est habituellement de cette façon que nous le comprenons. C’est la raison pour laquelle notre traduction de la Bible (à la Colombe) met « les psaumes » entre parenthèses. En Israël, c’était la coutume (la « tradition ») de chanter les psaumes lors des grandes fêtes annuelles juives célébrées à Jérusalem. Le verbe grec « humnéô » signifie « chanter des hymnes » ou « chanter des louanges ». Dans la traduction grecque de l’Ancien Testament en circulation au temps de Jésus et des apôtres (la Septante), le mot « humnos » était utilisé comme en-tête de certains psaumes, tout comme les mots « psalmos » et « ôdè ». Paul reprend ces trois termes en Éphésiens 5.19 et Colossiens 3.16. Voir mon article intitulé Psaumes, hymnes et cantiques spirituels. Aujourd’hui, lorsque nous parlons des psaumes et des hymnes, nous comprenons habituellement deux choses différentes, ce qui n’était pas le cas au temps de Jésus et des apôtres. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut chanter uniquement les psaumes, c’est là une autre question…

3. Voir ma série de prédications sur les Psaumes des montées (Ps 121 à 134) intitulée Sur la route du pèlerin.