Cette fiche de formation a pour sujet la relation entre la maison, l'Église et la cité. Nous devrions rechercher le bien de la ville, prier pour les dirigeants afin que l'Église vive en paix, et avoir un bon témoignage dans le monde.

Source: Pastorale de la famille. 4 pages.

Pastorale de la famille (10) - L'Église et la cité

  1. L’ordre de la création
  2. Mener une vie paisible
  3. Avoir un bon témoignage

Ce point est en partie en dehors de notre sujet sur la pastorale de la famille et nous ne l’évoquerons que rapidement. Mais si le lien de dépendance que nous avons indiqué (le cœur — le couple — la famille — l’Église — la cité) est réel, nous ne pouvons pas éluder cette dernière dimension, car en aucun cas la maison et l’Église ne se trouvent en dehors de la cité ou indifférente à elle.

Cela est important pour trois raisons au moins :

1. L’ordre de la création🔗

L’ordre de la création demeure et demeure pour l’ensemble des hommes. Les chrétiens ne peuvent pas l’imposer, mais ils doivent le rappeler. Si les recherches scientifiques sont conduites sans présupposés idéologiques, il n’est pas rare de les voir confirmer ce que dit la Bible1.

Quand Jésus dit que la lampe ne doit pas être sous le boisseau, mais qu’elle doit éclairer tous ceux qui sont autour (Mt 5.15-16), il ne parle pas seulement de ce que nous appelons l’évangélisation, mais aussi du témoignage du Royaume de Dieu qui comprend l’ensemble des dispositions conformes à son dessein (Mt 6.10).

Nous savons que le rapport entre les hommes et les femmes, mais aussi la question de l’autorité, de tout temps, ont constitué un sujet sensible, dans le couple, dans la famille et dans la cité. Nous n’ignorons pas que certaines idéologies progressistes combattent les valeurs judéo-chrétiennes avec beaucoup de virulence2. Il importe que les chrétiens aient une compréhension juste et une conduite juste à l’égard de ces choses3 (Ph 2.14-15).

2. Mener une vie paisible🔗

Durant sa déportation au 6e siècle avant Jésus-Christ, le peuple d’Israël a connu la situation que nous pouvons connaître aujourd’hui : vivre au milieu d’une société qui ne connaît pas Dieu. Nous avons le témoignage de Daniel qui résolut de ne pas se souiller avec les mets du roi (Dn 1.8), de ne pas adorer la statue d’or (Dn 3.18) et de continuer à prier son Dieu quand bien même cela fut interdit (Dn 6.10). Le peuple saint ne doit pas se souiller et doit être prêt à s’abstenir (Esd 9.12), quel qu’en soit le prix, de certaines choses pourtant admises autour de lui.

Nous avons aussi cet appel transmis par le prophète Jérémie : « Recherchez le bien de la ville où je vous ai menés en captivité et priez l’Éternel en sa faveur, parce que votre bonheur dépend du sien » (Jr 29.7). Ce verset a pu être utilisé parfois de manière abusive, mais il est là et dit quelque chose d’important. Il dit d’abord le souci de Dieu pour son peuple : « Votre bonheur dépend du sien. » Il dit aussi que le bonheur du peuple de Dieu passe au moins en partie par celui de la cité au milieu de laquelle il vit. Songeons à Lot dans la ville de Sodome (2 Pi 2.8).

Cette question est délicate, car il n’est pas demandé à l’Église de gérer la ville, ni même d’appliquer les règles de la vie fraternelle à tous les hommes, ce qui serait utopique4. Mais il lui est demandé de rechercher le bien de la ville et de prier en sa faveur pour elle. Or, jamais la prière ne dispense d’agir conformément à ce que l’on a demandé.

L’apôtre Paul donne une exhortation semblable dans sa première lettre à Timothée :

« J’exhorte, avant toutes choses, à faire des prières, des supplications, des requêtes et des actions de grâce pour tous les hommes5, pour les rois et pour tous ceux qui sont élevés en dignité, afin que nous menions une vie paisible et tranquille, en toute piété et honnêteté » (1 Tm 2.1-2).

Nous remarquons que, là aussi, la finalité c’est le bien du peuple de Dieu : « afin que nous menions… » Mais ce bien passe en partie par la vocation des hommes élevés en dignité, décideurs et magistrats (Rm 13.1-7).

Un seul homme qui craint Dieu peut « sauver » une multitude de situations simplement en étant fidèle là où Dieu l’a placé, notamment si Dieu l’a placé dans un endroit stratégique de la ville, de la région ou du pays. Nous remarquons qu’il n’est pas demandé de prier pour la conversion des rois et des gouverneurs : il est demandé de prier pour qu’ils exercent leur mandat de manière juste, dans la crainte de Dieu.

« Vivre une vie paisible », c’est donc la volonté de Dieu pour son peuple. Nul doute que cela concerne la vie de chacun dans son cœur et avec sa conscience, mais aussi la vie des couples et celle des familles avec les enfants. Beaucoup de domaines sont concernés : la corruption, l’éducation, les lois sociales, les questions d’éthique, etc.

3. Avoir un bon témoignage🔗

« Avoir un bon témoignage auprès de ceux du dehors » (Col 4.5; 1 Th 4.12; 1 Tm 3.7), c’est d’abord avoir un témoignage vécu, cela est certain (1 Pi 3.11-13). On se souvient de ce que Pierre recommande aux épouses de maris incrédules : « Qu’ils soient gagnés sans parole par la conduite de leurs épouses, en voyant votre conduite pure et respectueuse » (1 Pi 3.1-2). Ce vécu est celui de chacun, où qu’il soit; c’est aussi celui de chaque couple, de chaque famille, de chaque enfant, à la maison et hors de la maison.

Dans cette même lettre, Pierre recommande à chacun d’être prêt à « donner les raisons de l’espérance qui est la nôtre à quiconque nous le demande » (1 Pi 3.15). Être prêt, cela suppose qu’on le vit, y compris quand on est seul et que personne ne nous voit. Non seulement c’est là une condition pour être prêt, mais c’est aussi une condition pour que nos paroles soient approuvées par Dieu, c’est-à-dire qu’elles aient autorité (Ac 19.13-16; Ph 2.14-15; Jc 2.17-18)6.

Cela est un point important : l’autorité n’est pas liée au nombre de paroles, ni au volume sonore (!), ni même à la force de persuasion que nous pouvons avoir. Elle est liée à l’approbation de Dieu sur ces paroles, quand bien même elles sortiraient de la bouche d’un enfant. Pourquoi Jésus parlait-il avec une autorité supérieure à celle des scribes (Mt 7.28-29), bien que son apparence fut semblable à celle « d’un agneau qu’on mène à la boucherie » (És 53.7)? C’est parce que sa vie était accordée à ses paroles, elles-mêmes accordées à la volonté de son Père (Jn 4.34; 5.19). Voilà une ligne de conduite qui touche le cœur, le couple, la famille, l’Église et la cité, chacun de ces domaines étant particulier et régi par des règles propres, mais tous étant vécus sous le regard de Dieu (Ps 33.13, 18).

Avoir un bon témoignage ne signifie pas être approuvé de tous (Mt 5.11-12). Avoir un bon témoignage expose à la contradiction de ceux que la vérité de Dieu dérange, et certains le feront peut-être savoir rudement. Y compris dans la maison certaines fois (Mt 10.36), y compris dans l’Église peut-être (Mt 5.22-26; Ga 1.7; Ph 3.18; 2 Tm 3.12; 4.14-16). À plus forte raison dans le monde. Dans chacune de ces situations, il importe d’éviter la contamination par le mal, c’est-à-dire de répondre mal à celui qui nous parle mal (2 Tm 2.22-26). Comment y parvenir si ce n’est par la crucifixion de notre chair (Rm 6.6; Ga 2.20; 5.24) et par une dépendance totale vis-à-vis de la grâce qui est en Jésus-Christ (Jn 15.4, 7-8), vis-à-vis de l’Esprit qui seul peut produire en nous de bons fruits (Ga 5.22)? Cette attitude, qui associe la prudence du serpent et la simplicité de la colombe (Mt 10.16), nécessite tout à la fois la douceur de l’agneau et la force du lion. Jamais la Bible ne demande d’être faible : faibles, nous le sommes! Elle demande d’être doux, ce qui suppose une grande force qui ne vient pas de nous. Ainsi, Jésus qui commande de tendre l’autre joue (Mt 5.39) fait face au soldat romain qui lui a donné un soufflet et lui demande : « Pourquoi me frappes-tu? » (Jn 18.23; voir 18.6).

Dans chacune des situations difficiles auxquelles nous pouvons être exposés, le pardon — le pardon demandé, le pardon reçu et le pardon accordé — demeure une des premières manifestations de la grâce (Mt 6.14-15), la porte qui ouvre sur « les sentiers de la justice » (Ps 23.3).

Notes

1. Par exemple, un syndicat communiste redit actuellement en France la nécessité de se reposer un jour par semaine. Dans les années 70, le professeur Courthial a fait observer qu’il y avait eu progrès quand la législation a confié aux deux parents la responsabilité éducative des enfants, tandis que précédemment cette autorité était conférée aux pères seulement. Au même moment, le pasteur Roger Bariller de Lausanne demandait : « Si la législation en venait, comme elle y a tendance actuellement, à supprimer toute espèce de différence entre le mari et la femme, à vouloir qu’ils soient je ne dis pas égaux (ce qu’ils sont, bien sûr, fondamentalement), mais interchangeables, et que la femme puisse aussi bien être le chef de l’union conjugale que le mari, est-ce que ce ne serait pas une nouvelle forme d’anarchie? » Aujourd’hui, bien des psychologues rappellent que la présence du père et de la mère est hautement souhaitable pour que la personnalité de l’enfant se structure correctement.

2. En France, le gouvernement a adopté le principe du mariage entre personnes homosexuelles le 17 mai 2013. Le 17 mai 2015, une Église protestante (l’Église protestante unie de France) autorisait ses pasteurs à bénir de telles unions. On peut lire à ce sujet le livre : Bénir les couples homosexuels? L’enjeu du débat entre protestants. Débat contradictoire entre Elian Cuvillier et Charles Nicolas (Olivétan, oct. 2015).

3. Remarquons que, malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. Certains chrétiens conservent des notions erronées, soit traditionnelles, soit progressistes. D’autres chrétiens ont de bons principes, mais ne les traduisent pas dans leur vie. Il n’est pas exclu — on le voit aussi dans l’Écriture — que certains païens aient, dans tel ou tel domaine, un comportement plus juste que celui de certains chrétiens (Jon 1.10; 3.5-10; Rm 2.14; 1 Co 5.1; 9.8).

4. Le social comme la politique ou le programme de préservation de l’environnement ne me semblent pas faire partie du mandat que Dieu confie à son Église. Dire cela ne signifie pas qu’elles doivent s’en désintéresser ni que certains chrétiens aient à cœur de s’y impliquer, en tant que citoyens chrétiens. Voir mon article Action sociale et amour fraternel — Qui est mon prochain?

5Pour tous les hommes : Plusieurs commentateurs (Blocher, après Augustin et Calvin) proposent de comprendre : Pour des hommes de toutes catégories, pour toutes sortes d’hommes. Le tous indiquerait une ouverture vers la diversité d’origine et de qualité plutôt que vers la quantité (la totalité des hommes). Même application au verset 3.

6. Il est important de noter qu’une parole qui a autorité est une parole qui est approuvée de Dieu. Cela ne signifie pas qu’elle sera approuvée par tous! L’apôtre Pierre mentionne plusieurs fois le risque de violente opposition qui peut s’exercer à l’encontre des chrétiens (1 Pi 2.12; 3.14-17; 4.12-16).