Cette fiche de formation a pour sujet l'éducation chrétienne des enfants par leurs parents qui ont reçu de Dieu une autorité par délégation et qui leur servent de modèle. Les enfants font partie de l'Église et sont appelés à la maturité.

Source: Transmettre la foi à nos enfants. 6 pages.

Transmettre la foi à nos enfants (2) - Des enfants qui grandissent

  1. Le principe de délégation
  2. Nos enfants font partie du peuple de Dieu
  3. La dynamique des modèles
  4. Viser la maturité
  5. Annexe : Distincts sans être distants

Nous avons déjà vu que les enfants ne sont pas oubliés dans la Parole de Dieu.

  • « Allez, servez l’Éternel. […] Et vos enfants pourront aller avec vous » (Ex 10.24).
  • « Ces commandements que je te donne aujourd’hui seront dans ton cœur. Tu les inculqueras à tes enfants, et tu en parleras quand tu seras dans ta maison… » (Dt 6.6-7).
  • « Il faut que l’ancien tienne ses enfants dans la soumission » (1 Tm 3.4).
  • « Enfants, obéissez à vos parents. […] Pères n’irritez pas vos enfants » (Ép 6.1,4).

Nous notons que la lettre aux Éphésiens s’adresse ici directement aux enfants.

Quels enseignements principaux pouvons-nous retirer de ces données?

1. Le principe de délégation🔗

Quel que soit le sujet que nous abordons, il faut toujours partir de Dieu. C’est la meilleure manière de s’orienter et d’offrir en retour à Dieu ce qui lui revient — c’est à dire tout, y compris nos enfants. C’est ce que dit Paul pour conclure la partie doctrinale de sa lettre aux Romains1. C’est aussi ce que nous enseigne le Notre Père. Les réformateurs ont appliqué ce principe.

Au sujet des enfants, Martin Luther a écrit ceci : « C’est Dieu qui lange l’enfant et lui donne la bouillie. Mais il le fait par les mains de la mère. » Cette parole a une portée immense. Elle dit que tout ce qui est juste et bon, sur cette terre, procède de Dieu. C’est le principe de la grâce! De Dieu procède « la vie, le mouvement et l’être » (Ac 17.28), mais Dieu confie aux parents les soins dont l’enfant a besoin, depuis les langes et la bouillie jusqu’à l’éducation avec tout ce que cela comprend. Calvin dira cela aussi, avec d’autres mots : « Dieu met l’enfant dans les bras de la mère et lui dit : Prends soin de lui de ma part, maintenant. »

Nous comprenons sans peine ce que cela implique. En un sens, le rôle des parents est second : ils n’ont pas à prendre la place de Dieu. En même temps, ce rôle revêt une très grande importance… parce qu’il est confié par Dieu2! Voilà qui est susceptible de nous aider à trouver la juste place, ce qui n’est pas si facile… Voilà qui va nourrir l’attitude de serviteurs et de servantes mandatés : humbles, dévoués, désintéressés, ne cherchant pas leur propre intérêt (1 Tm 3.3; 1 Pi 5.2-3), persévérants. Tout ne se passe pas sur le registre de l’affection! Mais cette humilité du service n’amoindrit pas l’autorité légitime, car celui qui est envoyé détient une partie de l’autorité de celui qui l’envoie.

Cette posture distingue l’enfant de ses parents. Mais elle les associe également. Quand le papa ou la maman lisent la Bible aux enfants, le soir, et prient avant d’éteindre la lumière, ils démontrent qu’ils sont en position de responsabilité de la part de Dieu, mais aussi qu’ils sont avec leurs enfants et comme eux dépendants, obéissants et reconnaissants envers Dieu. Ainsi, l’enfant reconnaît que l’autorité des parents n’est pas usurpée : elle est bienveillante et renvoie à une autorité plus grande3.

2. Nos enfants font partie du peuple de Dieu🔗

C’est dans cette perspective que nous entendons : « Enfants, obéissez à vos parents selon le Seigneur, car cela est juste » (Ép 6.1).

Quelle que soit la discipline du baptême que nous reconnaissons comme juste, nous devrions considérer que nos enfants font partie du peuple de Dieu, car c’est là que Dieu a voulu qu’ils naissent. Ces enfants vont grandir comme de petits disciples, apprenant à obéir et à dire merci, apprenant à considérer le monde à partir de la foi4. C’est pourquoi l’enfant dont un des deux parents est chrétien est appelé « saint » par l’apôtre Paul (1 Co 7.14). Sa position devant Dieu n’est pas du tout identique à celle d’un enfant qui est né dans un foyer païen. Nous remarquons par exemple que Paul, en Éphésiens 6.1, s’adresse directement aux enfants des chrétiens.

Cela signifie que nos enfants ont beaucoup de privilèges, mais aussi une responsabilité particulière, notamment celle d’obéir à leurs parents, comme à Dieu. Nos enfants, indépendamment de leurs choix (!), appartiennent à la sphère familiale et à la sphère du peuple de Dieu, ce qui implique une double raison d’obéir!

Les parents, comme Dieu le fait avec nous, devraient convaincre leurs enfants que cette obéissance leur est bénéfique, même si elle peut s’avérer coûteuse parfois. Les impératifs seront donc mesurés, justes, jamais excessifs. C’est ce que signifie cette parole de Paul : « Pères, n’irritez pas vos enfants » (Ép 6.4). Paul ne dit pas qu’il faut toujours faire plaisir aux enfants, mais il dit qu’il ne faut pas les décourager par une exigence excessive ou incohérente. Chaque enfant et chaque âge sont particuliers. L’enfant a droit au respect de ses parents. L’absence de correction comme la correction abusive révèlent un manque de respect vis-à-vis de l’enfant.

« Les enfants ont besoin de voir la différence que fait l’Évangile, écrit H. Blocher. Ils souffriront peut-être des sacrifices qu’elle entraînera, mais ils sauront bien, au fond d’eux-mêmes, que les pertes consenties témoignent du prix de la connaissance de Christ. Que feront-ils de l’exemple d’une foi fade? Il ne faut pas avoir peur de leur montrer une piété “mordante”. »

Les parents, comme Dieu le fait avec nous, devraient convaincre leurs enfants que s’ils sont amenés à les corriger ou à exercer une discipline, ce n’est pas par manque d’amour. Il y a des « non » à dire qui sont aussi nécessaires et aidants que des « oui ».

« Élevez vos enfants en les corrigeant », dit Paul (Ép 6.4). Élever, ici, signifie pourvoir aux besoins (protéger du gel, arroser, mettre de l’engrais). Corriger signifie tout à la fois montrer la voie et former le caractère (tailler, mettre un tuteur)5. Le mot « corriger » revêt ici son sens le plus positif. Celui qui ne corrige pas son enfant ne l’aime pas (voir Pr 13.24).

« Instruis l’enfant selon la voie qu’il doit suivre » (Pr 22.6). Cela implique que l’on doit expliquer à l’enfant pourquoi on lui dit ceci ou cela, pourquoi on agit avec lui de telle et telle manière. La Bible parle clairement dans ce sens : « Lorsque vos enfants vous diront : Que signifie pour vous cet usage? Vous répondrez… » (Ex 12.26; Jos 4.21). L’explication devrait être adaptée à chaque enfant : ni bâclée, ni interminable!

Expliquer est important, mais l’obéissance est exigible. L’enfant doit obéir. L’enfant obéissant apprend à ordonner ses désirs sans leur être esclave. Il apprend à renoncer, ce qui constitue une discipline nécessaire. Lui-même, ensuite, saura dire oui et non quand il le faudra. L’enfant obéissant connaît le repos6. Nous savons que Jésus a grandi de cette manière (Lc 2.51-52; 22.42; Hé 5.7-9).

En réalité, l’attitude de l’enfant vis-à-vis de ses parents porte en germe son attitude envers Dieu (Pr 1.7-8; Lc 15.18-19). En 1 Timothée 5.4, Paul utilise le mot « piété » pour définir l’attitude des enfants à l’égard de leurs parents. Si nous avons compris que la crainte de Dieu n’exclut absolument pas l’amour de (pour) Dieu, nous pouvons accepter que les enfants doivent éprouver de la crainte à l’égard de leurs parents. Cette crainte-là sera aussi le commencement de la sagesse.

3. La dynamique des modèles🔗

Pourquoi Jésus parlait-il avec autorité? Parce que ses paroles étaient portées par un vécu. Dans la Bible, il n’y a jamais de différence entre la théorie et la pratique! On lira avec intérêt Deutéronome 4.6 et 9 où la mise en pratique précède et conditionne la transmission.

L’autorité est toujours liée à une position (être autorisé par délégation) et à un vécu (être autorisé par discipline personnelle). Le centenier de Luc 7 le démontre admirablement7. L’apôtre Pierre le rappellera aux anciens : « Non comme dominant sur ceux qui vous sont échus en partage, mais en étant les modèles du troupeau » (1 Pi 5.3; voir 1 Tm 4.12; Tt 2.7)8.

La manière avec laquelle nous nous comportons assoit (ou pas) notre autorité. Elle constitue aussi (ou pas) la première et principale manière d’éduquer et de convaincre9. En réalité, ce qui manque le plus, dans les maisons comme dans les Églises (et ailleurs), ce sont des modèles. C’est-à-dire des personnes qui cessent de trouver des excuses pour justifier leurs faiblesses et qui ouvrent la voie d’une conduite juste. Est-ce revenir à la loi? Non, c’est démontrer les fruits de la grâce.

« Les enfants paraissent avoir un sixième sens pour toutes les inconséquences de leurs parents », remarque H. Blocher. Il en est de même avec les nouveaux convertis!

L’apôtre Paul utilise les mots irréprochables et irrépréhensibles10. Il les utilise pour les responsables, mais aussi pour tous les chrétiens. Nous devons les prendre au sérieux si nous voulons transmettre quelque chose. Ce n’est pas une question de mérites, mais de condition. Ils nous disent, ces mots, que la vie chrétienne est quelque chose de sérieux, tout sauf un idéal. Ils nous disent que la vie chrétienne est une question de vérité et de lumière; tout sauf une comédie. Alors, peu de mots suffiront pour avoir un impact11.

Le domaine de la parole est particulièrement significatif (Ép 4.29). Nos paroles révèlent ce qui est dans nos cœurs. Celui qui ne bronche pas en paroles est sage dans toute sa conduite (Jc 3.2). Cela nous fait peur et nous montre que ce que nous demandons à nos enfants n’est pas facile. D’autant plus que leurs défauts ressemblent souvent aux nôtres…

Notons que si le papa ou la maman reconnaît qu’il s’est trompé et demande pardon, il est, là encore, un modèle. Il devient, en cela, irréprochable! « Les parents ne doivent pas cacher qu’ils vivent du pardon de Dieu », rappelle H. Blocher. Sachant cela, les enfants devraient pouvoir tout dire à leurs parents, sans craindre d’être rejetés12.

Cela est résumé dans une expression connue des chrétiens : Marcher dans la lumière, ce qui exclut toute forme de mensonge13.

4. Viser la maturité🔗

Nos enfants, c’est bien connu, ne nous appartiennent pas; ils nous sont confiés. Nous ne les aimons pas pour nous-mêmes, mais pour eux. Cela suppose que tout est fait pour les aider à devenir adultes. Il en est de même pour les nouveaux convertis dans l’Église. Quand cela doit-il commencer? Très tôt. En fait, dès la naissance14.

L’apôtre Paul utilise le mot « équiper » pour cela15. Cela signifie donner les moyens d’entrer dans sa propre vie en vue des responsabilités et du service qui devront être honorés. Donner les moyens, c’est tout à la fois donner les outils (la connaissance, le savoir-faire) et forger le caractère (la bonne attitude). Un enfant de 12 ans peut déjà développer une réelle maturité, qui manquera peut-être à quelqu’un de 30 ans…

Le mot discipline sonne étrangement à nos oreilles. Il accompagne pourtant la vie des disciples… L’Écriture demande aux parents de discipliner leurs enfants (Hé 12.7-11)16. « Le maintien de l’autorité parentale est le combat, aujourd’hui, de la foi chrétienne contre l’humanisme », écrit Henri Blocher17.

Grandir sous le regard de Dieu est sans aucun doute un facteur très favorable dans ce sens18. C’est bannir le mensonge, l’hypocrisie. C’est développer une conscience saine dans tous les domaines de la vie. Cela suppose la crainte d’offenser Dieu et la recherche de ce qu’il approuve. Cela implique que peu à peu, l’enfant doit comprendre qu’il n’agit pas ainsi seulement pour faire plaisir à ses parents (en leur présence notamment), mais pour plaire à Dieu, c’est-à-dire en tout temps19.

Par exemple, la maturité d’un enfant, dans la cour de l’école, ce sera de savoir dire oui ou non à ses camarades, selon ce qu’ils proposeront de faire ou de dire. Ni toujours se tenir à l’écart ni être toujours solidaire. Assumer d’être différent pour des motifs nobles.

Par exemple, quand les parents instruisent l’enfant, ils le font en référence à Dieu; mais si un parent dit à son enfant qu’il ignore quelque chose, c’est encore une manière de lui rappeler que Dieu seul sait tout (par exemple ce qui se passera demain).

Enfin, l’apôtre Paul nous livre une clé importante pour favoriser la maturité des enfants des chrétiens : la complémentarité de l’accompagnement maternel et paternel. Dans sa première lettre aux Thessaloniciens, il se compare tour à tour à une mère et à un père (1 Th 2.7-12). En s’exprimant ainsi, Paul tout à la fois distingue ces deux dimensions du « ministère » des parents et les associe. Complémentaires, accordées l’une à l’autre, elles assurent à l’enfant un environnement propice pour grandir, pour devenir responsable dans un esprit de service. Nous y reviendrons.

5. Annexe : Distincts sans être distants🔗

Cette expression est utilisée pour trouver ce qu’on appelle parfois « la juste distance » (on pourrait dire aussi la juste présence). Nous l’utilisons souvent en aumônerie hospitalière. Mais elle est utile tout le temps. Également pour le couple, et encore avec les enfants.

Une image illustre cela d’une manière très simple, celle du triangle. La pointe supérieure représente Dieu. La pointe inférieure gauche me représente. La pointe inférieure droite représente mon vis-à-vis.

Cette image nous rappelle plusieurs principes importants :

  • Je ne suis pas à la place de Dieu ni à la place de l’autre (conjoint ou enfant).
  • Je ne suis pas non plus entre Dieu et l’autre.
  • Je suis seulement en relation avec Dieu, témoin, écoutant, parlant, et en relation avec mon vis-à-vis, témoin, écoutant, parlant.
  • J’ai deux relations à vivre : avec Dieu et avec l’autre.
  • La relation entre Dieu et l’autre ne m’appartient pas.
  • La qualité de ma relation avec Dieu se reflétera dans ma relation avec l’autre, sans que j’aie forcément le besoin d’en parler…

Notes

1« Tout est de lui, par lui et pour lui. À lui la gloire dans tous les siècles! Amen! » (Rm 11.36). Cette vision diffère de celle de l’humanisme pour lequel tout est « de l’homme et pour l’homme ».

2. Les parents sont en quelque sorte les lieutenants de Dieu. De ce fait, ils ne devraient pas trop facilement déléguer à d’autres ce que Dieu leur confie… Pensons à l’exemple de l’Association Vaudoise de Parents chrétiens.

3. Ce principe est « créationnel » et s’applique même en dehors du peuple de Dieu. Je recommande la lecture avec les enfants de La Bible racontée aux enfants, d’Anne de Vries, dont le texte est d’une très grande qualité. La lecture du livre des Proverbes est également très riche pour la lecture en famille. Le culte de famille a forgé des générations de chrétiens.

4. Dire cela ne nie absolument pas la nécessité de la régénération par le Saint-Esprit.

5. Un enfant de chrétien doit apprendre lui-même à dire oui ou non quand c’est nécessaire, à être différent des autres.

6. Jr 3.1-6; 6.20-23. Obéir, c’est apprendre à renoncer à sa propre volonté. Voir Lc 22.42; Hé 8.5.

7« Moi qui suis soumis à des supérieurs, je dis à un [de mes soldats] : Va! et il va » (Lc 7.8).

8. Cela signifie qu’il ne suffit pas de « dire ce qu’il faut faire ». Le plus important est de le faire soi- même, en premier lieu. Si l’institutrice parle à voix basse aux enfants, ceux-ci cesseront de crier!

9. On peut lire à ce sujet le premier chapitre de la première lettre aux Thessaloniciens.

10. Ép 1.4; Ph 2.15; 1 Th 3.13; 5.23; 1 Tm 5.7; 2 Pi 3.14, Jude 1.24.

11. Voir mon article intitulé Le perfectionnisme.

12. Notons ici que le mot « juger » dans la Bible a un sens négatif (mépriser, condamner; voir Lc 6.37-44; Rm 14.3, 10) et un sens positif (exercer un discernement, distinguer le bien du mal; voir 1 Co 6.2; 14.20).

13. Le perfectionnisme n’est pas mieux que le laxisme. Aucune de ces deux dérives ne corrige l’autre. Mon sentiment est que la dérive laxiste est la plus fréquente aujourd’hui. Elle se nourrit du relativisme qui nous entoure et se justifie avec des excuses…

14. Il est probable que nous ayons bien souvent une attitude sentimentale que nous confondons avec l’amour. Les sentiments ne sont pas exclus de l’amour, mais ils n’en constituent pas l’essentiel. Un médecin engagé dans la promotion de l’allaitement maternel avait expliqué qu’un tout jeune enfant ne doit pas être le centre du foyer, qu’il doit apprendre à s’occuper tout seul pendant que ses parents parlent ensemble, par exemple.

15. Ép 4.12. Ce mot est malheureusement traduit par perfectionner par L. Segond.

16. Enseigner (par l’exemple d’abord) que l’argent est à gérer, pas seulement à dépenser...

17Moi? Oui, vous! (Ouvrage collectif), LLB, 1973.

18. Il est notoire que la Réforme du 16siècle a favorisé la maturité d’une population qui avait pris conscience que toute l’existence se déroulait sous le regard de Dieu.

19. Cette unification du temps est particulièrement importante dans une culture où la laïcité a cloisonné les domaines, favorisant ainsi des comportements disparates, parfois incohérents. Nous ne serons jamais assez conscients de l’impact sur nos enfants (et sur nous) d’une société qui exclut Dieu, notamment par l’éducation nationale, les médias, etc.