Cet article a pour sujet le disciple du Christ. Il reçoit l'enseignement du Maître et y conforme sa vie. Il transmet à son tour la Parole de Dieu, il est engagé dans l'Église et il fait preuve de discipline personnelle.

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Être disciple de Christ, qu'est-ce que cela veut dire?

  1. Introduction
  2. Que disent les Évangiles et les Actes?
  3. Que dit le mot « disciple »?
  4. Quelques implications à explorer

1. Introduction🔗

C’est une question de catéchisme. A priori, nous connaissons tous la réponse depuis longtemps.

En même temps, si chacun devait rédiger une réponse en deux lignes, nous verrions apparaître des différences sans doute importantes.

Je crois que la plupart d’entre nous seraient d’accord pour dire que dans chaque Église locale se trouvent un certain nombre de chrétiens-disciples et de chrétiens qui ne sont pas des disciples.

Mais là, ça se compliquerait sans doute. En fonction des critères retenus, les constats varieraient sans doute beaucoup. La question des critères est donc importante.

Certains pensent probablement que ce n’est pas à nous de chercher à savoir. Sur quelle base pourrions-nous évaluer la vie des autres? Ne sommes-nous pas tous des pécheurs pardonnés? Insensiblement, la notion de disciple est susceptible de devenir floue.

Ainsi, à partir d’un terme a priori simple, pourrions-nous avoir du mal à nous accorder.

2. Que disent les Évangiles et les Actes?🔗

Le mot apparaît dans les Évangiles et le livre des Actes. Il est très souvent associé à la figure du maître.

« Le disciple n’est pas plus que le maître ni le serviteur plus que son seigneur » (Mt 10.24).
« Le disciple n’est pas plus que le maître; mais tout disciple accompli sera comme son maître » (Lc 6.40).
« Quiconque donnera seulement un verre d’eau froide à l’un de ces petits en qualité de disciple… » (Mt 10.42).

Pour suivre le maître, il a dû rompre certains attachements et être prêt à souffrir.

« Si quelqu’un vient à moi, et s’il ne hait pas son père, sa mère [] et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple » (Lc 14.26).
« Quiconque ne porte pas sa croix et ne me suis pas, ne peut être mon disciple » (Lc 14.27).
« Ils l’injurièrent et dirent : C’est toi qui es son disciple » (Jn 9.28)

Le mot disciple implique non seulement un engagement verbal, mais aussi une manière de vivre conforme à cet engagement, conforme à un enseignement, à des prescriptions.

« Ses disciples le suivirent » (Mt 8.23).
« Lorsque Jésus eut achevé de donner ses instructions à ses douze disciples… » (Mt 11.1).
« Faites de toutes les nations des disciples, les enseignant à observer tout ce que… » (Mt 28.20).

Dans le livre des Actes, il apparaît que les chrétiens sont des disciples.

« Il y avait à Damas un disciple nommé Ananias » (Ac 9.10).
« Ce fut à Antioche que, pour la première fois, les disciples furent appelés chrétiens » (Ac 11.26).

Les disciples se reconnaissent à des marques visibles de tous.

« À l’amour que vous aurez les uns pour les autres, tous verront que vous êtes mes disciples » (Jn 13.35).
« Si vous portez beaucoup de fruits, c’est ainsi [] que vous serez mes disciples » (Jn 15.8).

3. Que dit le mot « disciple »?🔗

Le grec « mathêtês » porte dans sa racine la notion d’étude, de connaissance; on pourrait dire d’expertise. Le disciple est instruit sur sa matière et peut instruire quelqu’un d’autre. Y compris s’il est un enfant ou une personne peu instruite (Ac 4.13).

Le disciple est donc un transmetteur par la parole, exactement dans le sens de ce qu’écrit Paul : « Ce que tu as entendu de moi en présence de beaucoup de témoins, confie-le à des hommes fidèles qui soient capables de l’enseigner aussi à d’autres » (2 Tm 2.2).

Il est aussi un transmetteur par la manière de vivre, y compris quand le maître n’est plus là. « Ce que vous avez appris, reçu et entendu de moi, et ce que vous avez vu en moi, pratiquez-le » (Ph 4.9; voir 1.27).

Cela suppose la notion de fidélité : transmettre comme on l’a reçu (1 Co 11.23; 15.1-6; 2 Tm 2.2).

Le disciple a donc une détermination personnelle qui lui permet d’être seul s’il le faut, de souffrir s’il le faut (1 Pi 2.12; 3.17).

Il est aussi intégré dans la communauté des disciples avec des devoirs réciproques précis : amour fraternel, soumission mutuelle, réprimande fraternelle, soutien mutuel, etc.

Le disciple est un serviteur (Mt 20.28). Il ne vit pas pour lui-même, mais pour le Seigneur et pour la communauté des disciples. S’il est béni, c’est pour bénir; s’il est instruit, c’est pour instruire; s’il est consolé, c’est pour consoler, etc.

Le mot disciple implique la notion de discipline personnelle (Mt 6.6) et communautaire.

« Maintenant, ce que je vous ai écrit, c’est de ne pas avoir de relations avec quelqu’un qui, se nommant frère, est impudique, ou cupide, ou idolâtre, ou outrageux, ou ivrogne, ou ravisseur, de ne pas même manger avec un tel homme » (1 Co 5.11).

4. Quelques implications à explorer🔗

Comment expliquer que des chrétiens recevant instruction depuis des années (ou des décennies) ne soient pas en mesure d’instruire quelqu’un d’autre?

La notion de disciple/discipulat est peu compatible avec le modèle multitudiniste, avec la pratique du baptême indiscriminé des petits enfants. Il faut choisir. Une des raisons est que la prédication seule ne suffit pas : elle doit être confirmée par des modèles vécus qui confirment son autorité.

On dit souvent qu’un disciple est en marche, en insinuant que « tout le monde est en marche ». C’est une autre manière de diluer la notion. Le disciple n’est pas quelqu’un qui cherche. C’est quelqu’un qui a trouvé et qui apprend. C’est quelqu’un qui a déjà fait des choix qui permettent la mise en route. Réduire la vie chrétienne au pardon des péchés ne fait pas des disciples.

La notion de discipline est généralement considérée comme étant contraire à l’amour. La Bible ne dit pas cela. Discipliner, c’est aider!

La notion d’Évangile de la prospérité est opposée au modèle du chrétien-disciple.
La notion d’Évangile spectacle aussi.
La notion de la grâce à bon marché également. On ne peut pas tout concilier.

La formation et l’accompagnement de disciples supposent la profession personnelle de la foi. Calvin le dit quand il parle des « personnes qui sont reconnues être de l’Église par profession de foi ». C’est cette profession de foi qui permettra de voir, le moment venu, si elles sont hypocrites ou pas1. La notion d’alliance suppose la profession personnelle de la foi.

La discipline du baptême (union à Christ dans sa mort et sa résurrection, et pas seulement à l’Église protestante du coin) et de la cène doit accompagner la prédication fidèle, publique et privée, de la Parole de Dieu. Nous avons enfermé ces deux sacrements dans le cadre restreint des lieux de culte en oubliant les implications très nombreuses pour la vie de tous les jours. Calvin donne pour marque de l’Église : la prédication fidèle, la droite administration des sacrements et la saine discipline. Les trois sont inséparables.

Seuls les disciples font des disciples. Les protestants font des protestants, les sympathisants des sympathisants, les auditeurs des auditeurs, les paroissiens des paroissiens… La confusion des genres est néfaste. La notion de nouvelle naissance était mentionnée clairement au début de notre union d’Églises. On n’en parle plus guère…

Le fait qu’on retrouve dans les Églises, à peu de chose près, les mêmes dérives que dans le monde doit nous faire réfléchir. En quoi les enfants de chrétiens diffèrent-ils des enfants des non-chrétiens? Normalement, ils doivent grandir eux-mêmes comme de petits disciples.

Note

1. Jean Calvin, Institution chrétienne, IV,I.9; voir aussi IV, XIII,6.