Cet article sur Amos 3.1-8 a pour sujet les questions que Dieu pose à son peuple pour annoncer le châtiment et le malheur qu'il envoie à cause des péchés et pour appeler à la repentance, à la foi et à la marche avec Dieu.

Source: Un prophète pour quoi faire? - Méditations sur le livre d'Amos. 4 pages.

Amos 3 - Les questions de Dieu

« Écoutez cette parole que l’Éternel prononce sur vous Israélites, sur toute la famille que j’ai fait monter du pays d’Égypte! Je vous ai choisis, vous seuls parmi toutes les familles de la terre; c’est pourquoi je vous demanderai compte de tous vos errements. Deux hommes marchent-ils ensemble, sans en avoir convenu? Le lion rugit-il dans la forêt sans avoir une proie? Le lionceau pousse-t-il des cris du fond de sa tanière sans avoir fait une capture? L’oiseau tombe-t-il dans le filet qui est à terre sans qu’il y ait un piège? Le filet s’élève-t-il du sol sans qu’il y ait rien de pris? Sonne-t-on du cor dans une ville sans que le peuple soit en émoi? Arrive-t-il un malheur dans une ville sans que l’Éternel en soit l’auteur? Ainsi le Seigneur, l’Éternel, ne fait rien sans avoir révélé son secret à ses serviteurs, les prophètes. Le lion rugit : Qui ne serait effrayé? Le Seigneur, l’Éternel, parle : Qui ne prophétiserait? »

Amos 3.1-8

Dieu pose des questions. Elles ne sont ni longues ni compliquées comme les nôtres et nous surprennent encore davantage par leur simplicité que par leur insondable profondeur, à tel point que même un enfant serait en mesure de les comprendre et d’y répondre.

Dans un nouveau paragraphe, le prophète Amos pose six questions de la part de Dieu. La première est relative au châtiment. Celui-ci est-il juste et mérité? Sans aucun doute, l’idée que les contemporains d’Amos se faisaient de Dieu n’était pas trop différente de celle que s’en font nos contemporains : un Père aimant et généreux, mais faible, vacillant même, en présence de nos caprices, disposé à tout pour nous accommoder… L’idée qu’il puisse être celui qui envoie le malheur pour châtier nos rébellions nous paraît inadmissible.

Élus de Dieu, partenaires d’une alliance irrévocable, les Israélites ne voulaient entendre que des discours superficiels et plaisants. Pourtant, le discours de Dieu retentit clair et sévère : « Je vous enverrai le châtiment à cause de vos iniquités. »

Pour dissiper l’illusion nonchalante et coupable de ses auditeurs, le prophète commence par poser la première question : « Deux hommes marchent-ils ensemble lorsqu’ils ne sont pas d’accord? » Une alliance a-t-elle des chances de durer si l’une des parties contractantes renonce au pacte? Un mariage subsiste-t-il si l’un des conjoints vient déserter le foyer? Dieu marchera-t-il avec vous si vous refusez de marcher sur ses traces?

Des questions aussi outrageusement simples ne demandent pas une consommation excessive de matière grise, devaient se dire les intellectuels de l’époque. Mais l’Interrogateur divin poursuit sa plainte : « Mon peuple ne me comprend pas. Le lion rugit-il s’il n’y a pas de proie? » L’image ne révèle pas la raison du châtiment, mais plutôt son caractère irrévocable. Les contemporains d’Amos entendaient sa litanie monotone : « Pour trois et même quatre crimes ou transgressions, je punirai… » Mais ils faisaient la sourde oreille. Va, devaient se dire entre eux, ce prophète ne fait que broyer du noir, ne le prenons pas trop au sérieux! Nous ne verrons même pas l’ombre du châtiment dont il nous menace. Rions plutôt de ce pauvre obstiné…

Alors le prophète se servira d’une nouvelle image pour répéter l’annonce du danger imminent : « Le lion rugit-il s’il n’est pas près de sa proie? » Il est évident que, quand il pousse ce rugissement, il est déjà trop tard pour que celle-là puisse échapper à ses griffes. Car le fauve est patient et ne rugit qu’au moment propice, lorsqu’il est prêt à foncer sur elle. Autrement, il la mettrait en fuite. À présent, il fonce sur la capitale du pays : enfin, Dieu s’est levé et nul ne peut échapper à sa colère. Pourtant, il ne cesse de se plaindre : « Mon peuple ne comprend toujours pas! »

La troisième image dont se sert le prophète est celle du lionceau. Celui-ci ne crie que lorsqu’il déchiquette sa proie, et ses puissantes mâchoires brisent les os et dévorent la chair. Dans cette nouvelle image, il n’y a pas simple menace, mais déjà exécution. On peut dire au sujet des habitants de la Samarie et de Jérusalem de cette époque lointaine qu’ils sont déjà morts, spirituellement parlant. Ils ne comprennent plus rien à leur situation religieuse.

L’image suivante évoque la stupidité des oiseaux. L’oiseau ne tombe jamais à terre. Il y plonge pour piquer le grain qui sert d’appât et l’attire vers le piège qui se referme sur lui. Pour quelle raison toutes ces successions d’images qui se ressemblent comme des gouttes d’eau? Si, par exemple, la proie du lion ne peut être tenue pour responsable du malheur qui s’abat sur elle, l’oiseau, quant à lui, succombe à sa propre stupidité.

À cet endroit, on peut percevoir une certaine ironie dans les propos du prophète. Il est en train de comparer sa nation à un oiseau dont Dieu prend soin. L’homme ne le dépasse que par une bêtise encore plus grande. Créé par Dieu à son image, doté d’une intelligence pour le comprendre, il se laisse pourtant, tout bêtement, attraper dans le piège. Il s’éloigne de son Créateur, s’obstine dans sa rébellion et s’entortille dans des pactes mortels.

« Entendez-vous la trompette? », interroge ensuite Amos. Elle ne sonne pas sans alarmer la population. Tout à l’heure, il donnait les raisons du châtiment. Ensuite, il expliquait l’intention poursuivie par Dieu. À présent, il pointe le doigt vers les conséquences.

À cet endroit, il fait entendre la plus profonde et la plus décisive des questions de Dieu. Celui-ci ne prend nullement plaisir à la perdition de l’homme, mais cherche sa conversion et veut le mener à la vie.

La sixième et dernière question devient conditionnelle : que sa Parole proclamée produise de l’effet et que, déclenchant une sainte et salutaire alarme, elle amène l’homme au repentir. Or, malgré la peur de la mort, Israël ne s’alarme pas outre mesure. En dépit de l’ultime dévoreuse, nul en son sein ne semble vaciller ni douter de ses assurances, pourtant si fragiles.

Vous avez des questions à me poser? Sans doute évaluez-vous l’importance de votre existence au poids et au nombre de questions que vous posez ou que vous vous posez, questions d’ordre métaphysique, social, religieux ou personnel… Ces formulations raisonnables, estimez-vous, forceront le respect du théoricien de l’existence. Ou plutôt, les cris irrationnels qui s’échappent de votre gosier forcent une certaine considération ou, à défaut, attirent sur vous la sympathie de certains de ceux que vous côtoyez.

Du seul fait d’avoir posé ces questions, que vous qualifiez d’existentielles, vous vous imaginez investi du pouvoir ultime sur votre destinée ou même posséder le droit de vous ériger en « interrogateurs universels »… La longue liste de vos questions, auxquelles vous êtes incapable de trouver par vous-même une réponse, a dû vous essouffler. Et l’intensité de l’émotion qui brûle et consume votre cœur de mille passions inutiles ne vous a pas rendu davantage service; pas plus que tant de passants dans votre existence, qui vous ont laissé spirituellement et existentiellement seul. Ils n’ont pas jeté devant vous, comme une obole, la petite aumône que vous suppliiez qu’on vous accorde pour survivre. Les passants au regard furtif ont d’autres préoccupations que de prêter l’oreille à vos lamentations existentielles. Et vous gémirez longtemps encore de ce que nul n’a daigné vous entendre…

Laissez-moi aggraver votre cas encore davantage : Il n’y a qu’une seule question légitime, voire possible. Avant même de formuler une syllabe, consentez à tendre l’oreille et à capter la seule interrogation qui compte. Elle est posée par Dieu lui-même. Ce Dieu qui nous dépasse et qui possède tous les droits sur nous, ce Dieu qui nous hante même lorsque nous cherchons à le fuir, qui nous effraye alors même que nous osons le braver avec nos impudences, c’est lui qui pose la question. Il faut l’écouter avant que l’heure ne soit pas si avancée qu’il sera trop tard pour prononcer un seul mot devant lui. Ses questions sont d’une extrême simplicité. Que nous demande-t-il au juste?

« Voulez-vous marcher avec moi? »

Prétendriez-vous que la religion, celle de la Bible chrétienne, est tellement compliquée que vous n’avez pas le temps d’y penser maintenant, que vous y réfléchirez plus tard? Imitons l’exemple du prophète Amos. Donnons une réponse personnelle à l’Interrogateur divin. « Dieu a parlé », écrivait Amos, « qui ne prophétiserait? »

Ce prophète si rude au regard de nos goûts ramollis, cette figure que nous nous représentons sans doute dénuée de charme et de sensibilité, est pourtant l’homme des fardeaux. Amos est investi d’une mission bien lourde pour les épaules d’un pâtre. Ce n’est jamais de gaieté de cœur qu’on se livre à un ministère aussi impopulaire. Il aurait pu au moins être pince-sans-rire, cachant un humour froid derrière un visage impassible. Mais il n’est rien de tout cela.

Si cela n’avait dépendu que de lui, il y a belle lurette qu’il se serait débarrassé de son fardeau… Mais le Dieu de l’alliance avait parlé. Il devait par conséquent prophétiser. C’est pourquoi il compare la voix de Dieu au rugissement du lion. Comparaison irrévérencieuse, estimez-vous? Dieu ne dit-il pas que sa voix est comme celle d’une mère qui réconforte son enfant? Qui nous caresse lorsque nous ne sommes encore qu’enveloppés de langes? Cette voix, pourtant douce et apaisante, se transforme à l’occasion en rugissement du fauve!

Car sa colère devient plus sévère contre ceux qu’il s’est donné comme possession, mais qui méprisent son amour. Il est toujours plus pénible d’être abandonné par un proche, trahi par un ami, renvoyé par les parents ou déserté par le conjoint… C’est pourquoi Amos utilise le nom du Dieu de l’alliance, celui de Yahvé et non d’Adonaï, du Seigneur en sa qualité de Maître souverain. Dieu ne nous parle plus directement comme au temps du prophète Amos, mais à travers les pages du livre saint, la Bible, transmise par les prophètes et les apôtres; il s’adresse aussi à nous par les grands événements de l’histoire, et encore à travers les détails ou épisodes, même mineurs, de notre vie quotidienne.

Oui, il persiste à s’adresser à nous, qui nous voulons autonomes, qui refusons ses interventions, qui ourdissons des révoltes contre lui. Mais il déjoue toujours et à nouveau les plans ourdis par la mégalomanie humaine, qui s’acharne à bâtir un empire mondial, comme ce fut déjà le cas à Babel. Il fait même venir le chômage, ce fléau terrible des temps modernes. Que nos politiciens et économistes n’y discernent pas le doigt de Dieu, je le comprends. Mais tout lecteur de la Bible devrait comprendre la cause de nos malheurs.

La situation du monde ira de mal en pis; Dieu fait trembler jusqu’aux fondements de toutes choses; pourvu que ce tremblement nous amène à la crainte et à la foi. Il rugit à notre endroit, mais il reste le Père qui attend notre retour… Il blesse, mais médecin unique, il panse et guérit.

Si nous autres chrétiens, tous les chrétiens et non seulement les membres du clergé, nous avions la crainte de Dieu, nous nous mettrions à prophétiser comme Amos, c’est-à-dire à proclamer la Parole de l’Éternel. Alors, nous pourrions donner la réponse à la question de tout à l’heure. Dieu nous la demande : Voulez-vous marcher avec moi?

Chrétiens, mes amis, cessons de nous lamenter sur l’adversité des circonstances, sur l’hostilité de l’entourage, sur les temps mauvais… Pendant qu’il fait encore jour, annonçons les oracles de Dieu. Si nous avons saisi son interrogation, si nous comprenons à la fois la sévérité du jugement et l’efficacité de la libération, une certitude devrait nous soutenir : chaque fois que sa Parole est proclamée avec fidélité, le Christ en personne devient sensible à tout auditeur. Sa Parole est transmise même à celui qui la refuse ou feint de n’y rien comprendre. Pour parler au nom de Dieu, nous dirons comme Pierre, l’un des disciples de Jésus : « Seigneur, à qui irions-nous, tu as les paroles de vie éternelle » (Jn 6.68).