Cet article a pour sujet des théories attaquant la résurrection du Christ: on aurait volé son corps, on l'aurait placé au mauvais endroit, ou il s'agirait d'une "ressuscitation" ou encore d'un mythe inventé par les premiers chrétiens.

Source: La vie de Jésus. 6 pages.

Des attaques contre la résurrection du Christ

  1. Volé?
  2. Placé au mauvais endroit?
  3. « Ressuscitation »?
  4. Mythe?

Pivot central supportant l’ensemble de l’édifice de la rédemption, la résurrection du Christ a été depuis toujours l’objet des critiques les plus violentes et, le plus souvent, catégoriquement niée. L’ennemi ne se trompe pas de cible! Parfois, sous prétexte d’en actualiser le message, elle fut interprétée dans le souci d’un certain « concordisme » avec les idées de l’heure, sans toutefois qu’elle recèle la moindre parcelle d’historicité matérielle. Quelles sont les critiques qui ont cherché en vain, au cours des siècles, à ébranler la certitude en la résurrection de Jésus?

1. Volé?🔗

À lire les Évangiles, on s’aperçoit très vite que même les adversaires de Jésus étaient conscients de la force explosive que contenait l’argument de la résurrection corporelle de Jésus. Aussi, songèrent-ils à produire des contre-arguments. Ils cherchèrent à faire croire que, durant le sommeil des soldats désignés pour la garde, les disciples seraient venus pour emporter le corps, déposé l’avant-veille dans la tombe empruntée à Joseph d’Arimathée (Mt 28.11-15).

Invraisemblable! Invraisemblable que les disciples tellement écrasés par l’apparente défaite du Maître, dispersés dès son arrestation et la mort de celui-ci, aient pu conserver et déployer une force morale suffisante pour se laisser prendre par les mirages d’une telle aventure. En outre, comment admettre que des soldats chargés précisément de la garde du corps devant le tombeau aient pu sombrer dans un tel sommeil qu’on ait pu rouler un rocher et voler un corps d’adulte, sans qu’ils s’en soient aperçus? Auraient-ils failli aussi lamentablement à leur devoir? Et on peut être sûr que les autorités juives avaient dû conjurer les gardes de surtout bien garder le corps de Jésus. On ne sommeille pas lorsqu’on est un soldat romain! Même en acceptant l’incroyable hypothèse que les soldats en question fussent tombés dans le sommeil, comment ont-ils pu savoir que le corps du Christ avait été « volé » par ses disciples?

Cet argument, légèrement modifié, prétend que les autorités juives et romaines auraient emporté le corps du Christ dans un endroit sûr. Mais on est en droit de se demander quelle en était la raison. Ceci nous paraît tout à fait illogique, si nous nous rappelons que ce fut sur les instances des autorités religieuses juives que le gouverneur accepta de donner des gardes afin que le corps demeurât dans le tombeau (Mt 27.62-66). On peut admettre, à la rigueur, que parfois les pouvoirs publics se livrent à des actes « illogiques ». Mais il est impensable que le Sanhédrin ait été insensé au point de ne pas produire de contre-argument valable, pour réfuter toute prétention de résurrection du corps de Jésus-Christ. Du côté des chrétiens, il aurait été facile d’effectuer des recherches pour suivre les traces d’un corps volé jusqu’à découvrir le lieu où il avait pu être déposé. Ce qui est certain, et les textes évangéliques sont d’une déconcertante franchise, c’est que le corps du Christ ne fut retrouvé nulle part, parce que, tout simplement, il était « vraiment ressuscité ».

2. Placé au mauvais endroit?🔗

Un autre argument a prétendu que les femmes, venues au tombeau pour embaumer le corps de Jésus, s’étaient trompées d’adresse. Or nous savons que ce tombeau appartenait à un riche propriétaire, Joseph d’Arimathée, qui, on s’en souviendra, faisait partie en secret du cercle des disciples. Le tombeau qu’il prêta pour ensevelir le corps de Jésus était neuf. Les femmes y avaient vu déposer le corps du Christ, après la descente de la croix (Mt 27.57-61; Mc 15.42-47; Lc 23.50-56; Jn 19.38-42). Selon la critique, dans la pénombre et surtout dans l’état psychique et moral dans lequel elles se trouvaient, elles auraient, dit-on, perdu leur chemin. N’étaient-elles pas galiléennes, donc étrangères à la capitale? Elles auraient demandé la route à un jeune homme, lequel aurait répondu : « Vous cherchez Jésus de Nazareth, qui a été crucifié. Il n’est pas ici. » Et pointant le doigt vers une autre tombe : « Allez voir là où il a été crucifié. »

Modèle d’ingéniosité, cette théorie souffre d’une fatale faiblesse. Elle est en total désaccord avec le reste du texte qu’on invoque pour la soutenir et qui dit tout simplement que le jeune homme en question était « un ange du Seigneur » (Mt 28.2). De même, elle supprime sans la moindre hésitation ni scrupule la phrase cruciale de cet entretien, « il est ressuscité », rapportée tant par Matthieu que par Marc et Luc. En outre, c’est faire preuve d’une singulière légèreté que de prétendre que les femmes se seraient trompées en se rendant à la tombe, car l’évangéliste Marc précise qu’elles ont longuement regardé l’endroit où on déposait le corps descendu de la croix (Mc 15.47). Enfin, il nous paraît impensable qu’elles se trompent en cet endroit; car, ainsi que nous le rappelions, le tombeau appartenait à un homme riche, l’un des notables de la ville, et il était neuf. Mais la question la plus importante que nous poserons est la suivante : Si une telle hypothèse était vraie, pourquoi les prêtres n’ont-ils pas cherché et présenté le jeune homme en question pour qu’il contredise les disciples et les premiers témoins de la résurrection? Ils auraient pu aisément mettre fin aux étranges rumeurs circulant au sujet de cette résurrection.

3. « Ressuscitation »?🔗

Une autre critique prétend que la résurrection à laquelle les disciples ont accordé foi n’était rien d’autre qu’une « ressuscitation ». Jésus ne serait pas mort sur la croix. Le procès-verbal de sa mort, survenue plus tôt qu’on ne s’y attendait (Mc 15.44), aurait été inexact. Jésus aurait tout simplement perdu connaissance. Il se serait mis à marcher à l’air libre pour se montrer à ses disciples, lesquels, dans leur ignorance, l’auraient pris pour un homme vraiment ressuscité d’entre les morts.

Cette théorie ne cadre pas davantage avec les faits que la précédente. D’abord, elle soutient l’invraisemblable : Comment un homme qui venait de subir le plus cruel des supplices, tels que flagellation, crucifixion, blessures, côtes percées par une lance, ait pu se libérer des « draps » qui l’entouraient, rouler la lourde pierre fermant l’ouverture du tombeau et ensuite terrifier les soldats et marcher sans encombre, durant des kilomètres et des kilomètres, pendant une longue journée? Tout ceci relève de l’absurdité pure et simple. Il est également impensable que les soldats qui l’avaient percé sur la croix se soient trompés quant à sa mort. Sans aucun doute, au moins l’un d’entre eux avait déjà pratiqué le même geste lors d’autres crucifixions, car la crucifixion était un supplice fort répandu chez les Romains…

Cette anti-preuve de la résurrection semble totalement ignorer les constatations médicales de la mort, qui sont faites sous la forme d’un rapport par le quatrième Évangile (Jn 19.34). Après avoir enfoncé la lance dans les côtes du crucifié, le soldat de faction constata qu’il en jaillit aussitôt du sang et de l’eau. Or, d’un corps encore vivant, ce n’est qu’un flot de sang qui aurait jailli, à chacune des pulsations du cœur. Dans le cas du Christ blessé et mort, la « saignée » se fait sous une autre forme. Un liquide visqueux, de teinte rouge foncé, distinct et séparé de l’eau, jaillit en même temps. Ce phénomène est médicalement considéré comme la preuve du décès.

Comme pour les théories précédentes, plus nous examinons celle-ci de près, et moins elle nous impressionne. Le fait est que personne, en vingt siècles, n’a présenté une explication crédible du tombeau vide d’où Jésus est sorti vivant, selon l’affirmation biblique. Selon J.N.D. Anderson, de l’Université de Londres, ce tombeau vide est le rocher solide sur lequel toutes les théories rationalistes contre la résurrection viennent s’écraser définitivement. L’historien objectif et impartial ne peut qu’accepter cette preuve-là, à moins que sa recherche ne lui fournisse une preuve contradictoire véritablement irréfutable. Or, une telle preuve n’a pas existé durant les vingt siècles d’histoire qui se sont écoulés. Il y a des théories, des hypothèses, des opinions, mais point de preuve contraire sérieuse. Il n’y a que la résurrection surnaturelle de Jésus qui explique le fait que le Nouveau Testament soutient dans chacune de ses pages.

4. Mythe?🔗

La critique moderne a réservé à la résurrection une explication purement « théologique », afin de mieux reléguer à l’arrière-plan toute préoccupation historique et pour pouvoir taxer de mythe ou de projection existentielle des premiers chrétiens un événement qui se serait produit a posteriori par l’imagination des disciples.

Nous ne reviendrons pas sur les thèses de l’école bultmannienne et de la démythologisation1. Selon cette école, il n’y a pas de résurrection physique ni de tombeau vide dans la proclamation de l’Église primitive. L’esprit du Christ avait survécu, non pas son corps, et la résurrection corporelle n’apparaîtrait que dans 1 Corinthiens 15. Ainsi qu’on se le rappellera, cette lettre fut rédigée aux environs de l’an 55 après J.-C. Mais la prédication aux Corinthiens avait eu lieu vers l’an 50. L’apôtre, quant à lui, l’avait reçue aux environs de l’an 40. La critique soutient qu’aux yeux de Paul, l’apparition du Ressuscité sur la route de Damas a été essentiellement de même nature que les précédentes à Pierre, à Jacques, aux douze, aux cinq cents. Pourtant, selon Actes 9.7 et 22.9, les compagnons de Paul n’ont pas fait la même expérience que le futur apôtre; par conséquent, celle de Paul a été une expérience de nature subjective, une vision spirituelle plutôt qu’un phénomène physique objectif. On cherche donc à prouver que les premières apparitions, elles aussi, étaient de nature psychologique, mais que les termes tenant à rendre objectif le phénomène, tel que le tombeau vide par exemple, viennent s’ajouter plus tard dans la prédication chrétienne afin de rendre l’expérience subjective des apôtres plus crédible et acceptable par les communautés naissantes. Même à l’aide d’un examen superficiel, il devient évident que cette thèse rencontre nombre de difficultés insurmontables. Elle ne jouira donc d’aucun crédit.

La différence entre la première épître aux Corinthiens et les Évangiles est grandement exagérée. L’absence d’une référence explicite au tombeau vide, dans le texte paulinien et dans la prédication primitive du livre des Actes, peut être aisément expliquée si nous gardons à l’esprit que la résurrection de Jésus était bien connue à Jérusalem, là où le kérygme primitif (ou prédication) se faisait entendre. Mais les Évangiles furent écrits pour l’instruction des nouveaux convertis, dont la majorité était d’origine païenne et n’avait jamais connu la Palestine. Il est donc naturel qu’ils aient été mis spécialement au courant de la résurrection de Jésus, autant que de sa vie et de sa mort, dans tous les détails. Il n’est pas exact que les premiers comptes rendus ne contenaient pas de référence au tombeau vide. La mention que Jésus est ressuscité (1 Co 15; Ac 10.40) est certainement une allusion très claire. Paul reconnaît volontiers qu’à certains égards son expérience a été différente de celle du reste du collège apostolique; il se dit être même un « avorton » (1 Co 15.8).

L’évidence intrinsèque des récits, qui n’ont absolument pas le caractère d’une légende ou d’un mythe, ne permet pas de soutenir cette théorie. S’ils n’avaient été que des morceaux de propagande, on aurait pu prétendre que quelques-unes des apparitions auraient des adversaires tels que Caïphe ou Pilate. De même, l’histoire du tombeau vide aurait pu devenir un meilleur morceau de propagande si les gardes étaient présents, éveillés, plutôt que terrassés par la frayeur.

Les Évangiles furent rédigés assez tôt afin qu’on ne pût pas les soupçonner d’être mythologiques. Marc et Luc furent sans doute écrits avant l’an 60 ou 65, c’est-à-dire dix ans seulement après la première épître aux Corinthiens. Les mythes exigent une période beaucoup plus longue avant d’être forgés et prendre racine. En effet, un tel développement aurait été virtuellement impossible à cause de la présence d’un grand nombre de témoins oculaires. L’autre difficulté qui surgit, sur le chemin de cette hypothèse, est celle qui fait un non-sens du terme même de résurrection. Tant l’Ancien Testament que la littérature juive rendent clair le fait qu’en parlant de la résurrection, les auteurs entendent bien la résurrection corporelle. Le rejet méprisant de l’Évangile par les païens (Ac 17.32; 1 Co 1.18) laisse entendre qu’ils avaient parfaitement compris ce mot dans son sens ordinaire de résurrection d’entre les morts.

On sait que les Grecs tenaient le corps pour la partie méprisable de la personne humaine et le considéraient comme mauvais. Si Paul avait annoncé que ce n’était que l’esprit de Jésus qui avait survécu à la mort, il aurait remporté un réel succès sur la colline de Mars, à Athènes.

Une autre faiblesse fondamentale de cette interprétation réside dans les problèmes moraux qu’elle soulève. Elle laisse entendre que les premiers témoins ont délibérément falsifié un fait pour rendre plus crédible leur message. Si les apôtres ont vraiment fait cela, quel crédit accorder alors à leurs autres discours? Mais le caractère et l’intégrité des apôtres nous inspirent la plus grande confiance.

Si nous mettons de côté nos a priori et considérons le Nouveau Testament tel qu’il est, en cherchant à l’interpréter de la manière la plus naturelle et la plus évidente, la résurrection nous orientera vers la conclusion suivante, exprimée par J.N.D. Anderson :

« Les récits sont unanimes pour dire que son esprit fut rendu à un corps meurtri et sans vie, et qui fut instantanément, miraculeusement transformé en un corps nouveau, spirituel, différent de sa chair mortelle, pourtant bien reconnaissable. En le ressuscitant, Dieu fit de Jésus le Seigneur et le Christ. »

La critique libérale a répudié la réalité historique, pour la remplacer par des hypothèses, en essayant de reconstituer artificiellement une autre histoire qui n’en est pas une.

Selon un autre argument, les premiers disciples s’attendaient tellement à la résurrection de Jésus qu’ils auraient fini par croire, tout bonnement, qu’il avait ressuscité! Ainsi, leur rêve devenait réalité. Une lecture sérieuse des Évangiles prouvera que ce fut plutôt le contraire qui se produisit. Les disciples ne s’attendaient pas à ce que le Christ ressuscite. Tous les récits de l’Évangile laissent comprendre qu’ils pensèrent à une fin tragique. Même placés devant l’évidence de la résurrection, ce fut après un long délai qu’ils se laissèrent convaincre par la matérialité de celle-ci.

Pourtant, la critique présente les choses tout autrement. Elle prétend que les premiers disciples, défaits dans leurs espoirs et terriblement découragés, n’auraient repris courage qu’en s’imaginant le Christ ressuscité d’entre les morts. Peu leur importait la réalité de l’événement comme tel. L’idéal qu’il leur avait inspiré n’était pas mort ou anéanti à jamais. Au fur et à mesure que la nouvelle attitude se substituait au sentiment de la tragédie qui avait anéanti leurs espoirs, ils se convainquirent de la résurrection; ils commencèrent donc à parler du Christ comme s’il fut réellement présent. Peu à peu, ils ajoutèrent des détails à cette illusion pour la rendre crédible. On a cherché ainsi à expliquer de différentes manières la foi en la résurrection, tout en réfutant l’événement propre.

Note

1. Voir mon article intitulé Rudolf Bultmann et la démythologisation,