Faut-il utiliser du pain sans levain pour la sainte Cène?
Faut-il utiliser du pain sans levain pour la sainte Cène?
- Le pain sans levain symbolisait le départ hâtif d’Égypte
- Jésus et les apôtres n’ont pas prescrit quel pain utiliser lors de la Cène
- Le pain de la Cène représente le corps meurtri de Jésus
- La Cène est un repas joyeux
- Dieu a aussi prescrit l’usage du pain avec levain
- La plénitude se trouve en Jésus-Christ
- Le levain représente parfois le péché
- Tournons notre regard vers Jésus
- Le levain a aussi une signification positive
- Conclusion
Étant donné que le pain pour le repas pascal dans l’Ancien Testament devait être sans levain et que le levain dans la Bible symbolise le péché, certains se demandent si nous ne devrions pas utiliser du pain sans levain pour la sainte Cène. Que faut-il en penser?
Il est vrai que la fête de la Pâque dans l’Ancien Testament devait être célébrée avec du pain sans levain. Toute transgression à cette règle était d’ailleurs passible d’exclusion de la communauté de l’alliance : « Pendant sept jours, il ne se trouvera pas de levain dans vos maisons; car toute personne qui mangera du pain levé sera retranchée de la communauté d’Israël » (Ex 12.19). Il est toutefois important de savoir pourquoi le Seigneur avait ordonné cette prescription en Israël. « Vous observerez la fête des pains sans levain, car c’est en ce jour précis que j’aurai fait sortir vos troupes du pays d’Égypte » (Ex 12.17).
1. Le pain sans levain symbolisait le départ hâtif d’Égypte⤒🔗
Quel est le lien entre la sortie d’Égypte et les pains sans levain? C’est la hâte avec laquelle il fallait quitter le pays d’Égypte. « Voici comment vous le mangerez [l’agneau] : une ceinture à vos reins, vos sandales aux pieds et votre bâton à la main; et vous le mangerez à la hâte » (Ex 12.11).
« Les Égyptiens pressaient le peuple; ils avaient hâte de le laisser partir du pays, car ils disaient : Nous périssons tous. Le peuple emporta sa pâte avant qu’elle soit levée. Leurs pétrins étaient enveloppés dans leurs vêtements, sur leurs épaules. […] Ils firent des gâteaux cuits sans levain avec la pâte qu’ils avaient emportée d’Égypte, et qui n’était pas levée; car ils avaient été chassés d’Égypte, sans pouvoir s’attarder et sans avoir fait de provisions pour eux » (Ex 12.34,39).
Les Israélites n’avaient pas eu le temps de faire lever la pâte de leurs pains avant de les faire cuire. Il fallait se dépêcher de partir et manger en vitesse le repas pascal.
La raison des pains sans levain pendant les sept jours annuels de la célébration de la Pâque est donc claire : Il fallait perpétuer de génération en génération le souvenir de la hâte avec laquelle le Seigneur avait fait sortir son peuple d’Égypte.
« Pendant la fête, tu ne mangeras pas de pain levé, mais tu mangeras sept jours des pains sans levain, du pain d’affliction, car c’est avec précipitation que tu es sorti du pays d’Égypte : tu te souviendras ainsi toute ta vie du jour où tu es sorti du pays d’Égypte » (Dt 16.3).
Rien ne semble indiquer que les pains sans levain mangés lors de cette fête représentaient la purification des péchés. Pendant 51 semaines, ils étaient libres de manger du pain levé, et pendant une semaine, ils commémoraient plutôt la hâte avec laquelle Israël a dû quitter l’Égypte, poussés par les Égyptiens et délivrés par le bras du Seigneur.
2. Jésus et les apôtres n’ont pas prescrit quel pain utiliser lors de la Cène←⤒🔗
C’est « le premier jour des pains sans levain » (Mc 14.12) que Jésus s’est réuni avec ses disciples pour célébrer la Pâque avec eux et ensuite instituer la sainte Cène. On peut donc très bien concevoir que le pain utilisé par Jésus pour la sainte Cène était sans levain. Il est toutefois remarquable que, dans les Évangiles comme dans 1 Corinthiens 11, le pain utilisé pour la sainte Cène n’est jamais désigné par le mot « azumos » (« sans levain »), mais toujours par le mot « artos », qui signifie simplement « pain ». Si Jésus, les évangélistes ou Paul avaient voulu nous préciser qu’il fallait célébrer la Cène avec du pain sans levain, il leur aurait été facile d’utiliser le mot technique servant à désigner ce type de pain, mais ils ne l’ont pas fait. Ils ont simplement utilisé le mot servant à désigner du pain ordinaire.
Il est également important de se rappeler que la fête de la Pâque et la sainte Cène sont deux célébrations différentes. Bien entendu, les deux sont reliées, mais ce n’est plus la fête de la Pâque que nous célébrons. C’est la sainte Cène que nous célébrons. La fête de la Pâque était célébrée une fois par année au moyen d’un repas avec un agneau, du pain sans levain, des herbes amères, des vêtements de voyage, etc. Même le mode de cuisson de la viande était prescrit (Ex 12.8-11). Cette fête commémorait la sortie d’Égypte et la délivrance de l’esclavage égyptien. La sainte Cène peut être célébrée plus souvent, bien que le Nouveau Testament n’en précise pas la fréquence. Les éléments employés sont le pain et le vin seulement, et Jésus ne nous a prescrit rien d’autre que de manger le pain et boire le vin et de commémorer sa mort pour nos péchés.
3. Le pain de la Cène représente le corps meurtri de Jésus←⤒🔗
L’élément de hâte ne se retrouve pas dans la nouvelle délivrance que l’on commémore à la Cène. Ce qui est commémoré, c’est la mort de Jésus pour nous. Le symbole se trouve dans le pain rompu, qui représente son corps brisé, et dans le vin de la coupe qui représente son sang versé.
« Le Seigneur Jésus […] prit du pain et, après avoir rendu grâce, le rompit et dit : Ceci est mon corps, qui est pour vous; faites ceci en mémoire de moi » (1 Co 11.24).
Du pain avec ou sans levain peut tout aussi bien être rompu et peut tout autant représenter son corps meurtri pour nous. Il serait donc difficile de justifier l’obligation de prendre du pain sans levain puisque le symbole qui s’y rattachait dans la fête de Pâque ne s’y trouve plus à la Table du Seigneur et qu’il est remplacé par l’autre symbole du corps livré et meurtri pour nous.
4. La Cène est un repas joyeux←⤒🔗
Lors de la Pâque, il fallait manger du « pain d’affliction » (du pain de misère, Dt 16.3) pour se rappeler les circonstances particulières du départ d’Égypte. Lors de la Cène, nous nous affligeons bien sûr de nos péchés pour lesquels Jésus est mort dans la plus grande misère, mais c’est un repas de fête que nous célébrons où la joie du salut l’emporte sur la misère. Puisque notre rédemption est pleinement accomplie à la croix, les sacrements du Nouveau Testament n’ont plus l’aspect « pénible » des sacrements de l’Ancien Testament (circoncision, sang et sacrifice d’un agneau, herbes amères, etc.). De plus, le repas de la Cène anticipe la joie du banquet final aux noces de l’Agneau (Mt 26.29; 1 Co 11.26). Je ne vois donc pas pourquoi nous devrions manger du « pain de misère » pour célébrer la joie de notre réconciliation avec Dieu. Cela ne semble pas très bien s’accorder, d’ailleurs, avec la présence du vin qui symbolise la joie. Si je puis le dire ainsi : Nous pouvons manger du pain avec levain, car nous prenons le pain avec le vin…
5. Dieu a aussi prescrit l’usage du pain avec levain←⤒🔗
Si nous revenons un instant à l’Ancien Testament, nous lisons la prescription suivante :
« Aucune des offrandes que vous présenterez à l’Éternel ne sera faite avec du levain; car vous ne brûlerez rien qui contienne du levain ou du miel parmi les offrandes consumées par le feu devant l’Éternel » (Lv 2.11; voir Lv 6.7-10).
De même, si quelqu’un offrait un sacrifice de communion, il devait offrir « avec le sacrifice de reconnaissance des gâteaux sans levain pétris à l’huile… » Par contre, « il offrira son oblation avec des gâteaux de pain levé » (Lv 7.11-13). Le levain était interdit seulement pour certaines offrandes, celles qui devaient être consumées sur l’autel; le levain était requis pour d’autres, celles que l’on mangeait. Par ailleurs, si la fête de la Pâque devait être célébrée avec des pains sans levain, la fête des semaines ou de la Pentecôte devait l’être au contraire avec du levain :
« Vous apporterez de vos demeures deux pains pour les dédier; ils seront faits avec deux dixièmes de fleur de farine et cuits avec du levain; ce sont les prémices pour l’Éternel » (Lv 23.17).
Cette fête des récoltes s’accompagnait d’une offrande de deux pains levés et symbolisait la consécration des moissons à l’Éternel. Le don de l’Esprit le jour de la Pentecôte, arrhes et prémices de la récolte finale, est venu accomplir pleinement la signification de cette fête.
Nous voyons donc que l’interdiction du levain n’est pas absolue. Le Seigneur avait même commandé, pour certaines oblations et certaines fêtes en son honneur, d’avoir des pains avec levain. Il n’est donc pas possible de conclure de ces textes que le pain avec levain symbolisait toujours le péché, et le pain sans levain, la purification des péchés.
6. La plénitude se trouve en Jésus-Christ←⤒🔗
Lorsque nous faisons la transition au Nouveau Testament, il n’est pas évident de déterminer quelle ancienne prescription sur les pains devrait ou non s’appliquer directement au pain de la sainte Cène, puisque le Nouveau Testament n’en dit rien. Le pain de la Cène rappelle bien sûr le sacrifice de Jésus, mais le pain que nous mangeons n’est pas lui-même consumé ni offert en sacrifice et ne peut pas par conséquent être strictement associé au pain sans levain qui devait être offert avec l’holocauste. Nous pourrions tout autant faire valoir que le pain que nous mangeons symbolise et atteste la nourriture spirituelle par laquelle le Saint-Esprit fortifie en nous la vie nouvelle, prémices de la moisson finale. Rappelons-nous simplement que tous ces rituels de l’Ancien Testament, avec ou sans levain, étaient des ombres de la réalité à venir. Aujourd’hui, nous avons cette réalité en plénitude en Jésus-Christ.
7. Le levain représente parfois le péché←⤒🔗
Cela dit, il est vrai que le levain symbolise parfois le péché et ses effets sournois et corrupteurs. Jésus a mis en garde ses disciples contre le « levain des pharisiens et des sadducéens » (Mt 16.6). Le levain représentait leur hypocrisie (Lc 12.1) et leur enseignement corrompu (Mt 16.2). Jésus n’a toutefois pas interdit par là de manger du pain levé. Ses disciples l’ont bien compris : « Alors ils comprirent qu’il avait dit de se garder non pas du levain du pain, mais de l’enseignement des pharisiens et des sadducéens » (Mt 16.12). Jésus s’est simplement servi d’une réalité culinaire de la vie courante pour enseigner une vérité spirituelle.
Paul utilise aussi l’image du levain comme symbole du péché et de l’impureté :
« Ne savez-vous pas qu’un peu de levain fait lever toute la pâte? Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous soyez une pâte nouvelle, puisque vous êtes sans levain, car Christ, notre Pâque, a été immolé. Célébrons donc la fête, non avec du vieux levain, ni avec un levain de perfidie et de méchanceté, mais avec les pains sans levain de la sincérité et de la vérité » (1 Co 5.6-8).
Dans ce passage, Paul rattache ce symbole à l’ancienne fête de la Pâque dont le sens profond est accompli en Jésus-Christ. Ce n’est plus l’élément de la hâte qui est retenu, mais le symbole du péché qui est décrit en termes de « vieux levain », et de la vie nouvelle qui est décrite comme étant « des pains sans levain de la sincérité et de la vérité ».
Paul n’applique toutefois pas cette vérité à la sainte Cène, mais à « la fête » d’appartenir à Jésus-Christ, notre Pâque ou notre Agneau immolé. Il ne tire pas la conclusion selon laquelle nous devrions utiliser du pain sans levain pour la sainte Cène. Il exhorte simplement les chrétiens à vivre leur sanctification comme fruit spirituel du salut en Jésus-Christ. Nous sommes exhortés à nous purifier de nos péchés et à vivre la vie nouvelle dans la sincérité et la vérité, et non à littéralement manger du pain sans levain.
8. Tournons notre regard vers Jésus←⤒🔗
Quelques chapitres plus loin, Paul nous rappelle comment le Seigneur a institué la sainte Cène et explique aux Corinthiens comment ce repas devrait être célébré. Il n’établit aucun lien, cette fois-là, avec le pain sans levain de l’ancienne Pâque et ne précise pas quelle sorte de pain ou de vin nous devrions utiliser. Il aurait pourtant eu l’occasion de le faire après sa métaphore avec la Pâque de l’Ancien Testament (1 Co 5). L’important ne semble donc pas là.
C’est plutôt vers Jésus-Christ qu’il faut tourner les regards. Il est mort et ressuscité, il est aujourd’hui vivant au ciel et il vient bientôt (1 Co 11.24-26). C’est aussi vers nos frères et sœurs qu’il faut porter notre attention, car nous faisons partie d’un même corps, tout comme il y a un même pain (1 Co 10.17). Pourvu que le pain et le vin utilisés servent à signifier et à attester ces grandes vérités de l’Évangile, le symbole semble tout à fait préservé, de sorte que nous demeurons fidèles à l’ordre de commémorer sa mort jusqu’à ce qu’il vienne.
9. Le levain a aussi une signification positive←⤒🔗
J’ajouterai une dernière remarque sur la crainte d’utiliser du pain avec levain qui pourrait symboliser le péché. Il est utile de se rappeler que, dans la Bible, le levain n’a pas seulement cette signification négative. Nous l’avons déjà vu pour certaines fêtes ou prescriptions de l’Ancien Testament. Jésus lui-même s’est servi de l’image du levain d’une manière très positive : « Le royaume des cieux est semblable à du levain qu’une femme a pris et introduit dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que la pâte soit toute levée » (Mt 13.33). Le levain fait partie de la création bonne de Dieu et, comme tout autre aliment comestible, il peut être pris sans crainte avec action de grâce (1 Tm 4.4). Son effet chimique sur la pâte est tout à fait remarquable et témoigne d’une autre merveille du Dieu Créateur. De plus, Jésus s’est même servi de ce symbole pour faire comprendre à son peuple que son Royaume vient avec la même puissance tranquille et englobante que celle du levain qui fait lever toute la pâte. Le levain n’est donc pas toujours associé au péché, il peut représenter le Royaume de Dieu qui vient!
10. Conclusion←⤒🔗
En conclusion, étant donné que la Bible ne prescrit pas quelle sorte de pain nous devons utiliser pour la sainte Cène et que du pain avec ou sans levain ne change en rien la véritable signification de ce repas, j’en conclus que le Seigneur nous laisse toute liberté à ce sujet.