Cet article sur Josué 24.2-3 a pour sujet le fait qu'Abraham était un adorateur d'idoles avant que Dieu l'appelle hors de son pays et le délivre de son idolâtrie par pure grâce.

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Josué 24 - Abraham, un ancien adorateur d'idoles

« Vos pères, Térah, père d’Abraham et père de Nahor, habitaient depuis toujours de l’autre côté du fleuve et ils servaient d’autres dieux. J’ai pris votre père Abraham de l’autre côté du fleuve et je lui ai fait parcourir tout le pays de Canaan. »

Josué 24.2-3

Abraham était-il un adorateur d’idoles avant d’avoir été appelé par Dieu? Josué 24.2-3 dit ceci (cette traduction est fidèle à l’original en hébreu) :

« Vos pères, Térah, père d’Abraham et père de Nahor, habitaient depuis toujours de l’autre côté du fleuve et ils servaient d’autres dieux. J’ai pris votre père Abraham de l’autre côté du fleuve et je lui ai fait parcourir tout le pays de Canaan. »

La première phrase de ce texte contient un sujet (« vos pères »), suivi d’une apposition explicative (« Térah, père d’Abraham et père de Nahor »), suivi de deux verbes (« habitaient » et « servaient »). La question est de savoir si Abraham, mentionné ici, est inclus parmi ceux qui servaient d’autres dieux ou non. Le texte peut donner l’impression que seul Térah servait d’autres dieux. Le problème avec cette interprétation est que le sujet et les deux verbes sont tous au pluriel. Même si Térah semble particulièrement visé, le sujet principal et les deux verbes nous assurent qu’ils étaient plusieurs pères à habiter de l’autre côté du fleuve (c’est-à-dire le fleuve Euphrate) et à adorer d’autres dieux. Qui pouvaient bien être ces « pères » en plus de Térah?

Il peut paraître curieux qu’en Josué 24.2, Dieu, par la bouche de Josué, fasse mention de deux fils de Térah (Abraham et Nahor), mais que son troisième fils (Harân) soit passé sous silence. Dans la Genèse, Moïse avait pris la peine de spécifier que Térah avait engendré Abraham, Nahor et Harân (Gn 11.26). Si Josué avait seulement voulu indiquer l’origine, il aurait pu se contenter de la généalogie et dire « Térah, père d’Abraham ». Pourquoi ajouter Nahor? Si par contre il avait voulu parler de toute la famille de Térah, pourquoi ne pas avoir dit que Térah était père d’Abraham, de Nahor et de Harân? Pourquoi ne pas faire mention de Harân?

L’explication se trouve dans la suite de l’histoire de la Genèse. On apprend que Harân engendra Lot (Gn 11.27) et que Lot suivit Abraham jusqu’en Canaan (Gn 12.4-5), mais que par la suite Abraham et Lot se sont séparés (Gn 13). Les descendants de Lot (Ammonites et Moabites, Gn 19.30-38) ne devaient pas hériter du pays promis à Abraham. Par contre, il nous est dit que Nahor, l’autre frère d’Abraham et de Harân, eut plusieurs fils, dont Bethouel, le père de Rébecca (Gn 22.20-23). Nous savons qu’Isaac s’est marié avec Rébecca (Gn 24.15) et que Jacob s’est marié avec Rachel et Léa, filles de Laban, frère de Rébecca (Gn 25.20; 29.10). Les douze tribus d’Israël avaient donc parmi leurs ancêtres Térah, Abraham et Nahor, mais pas Harân.

Nous comprenons donc pourquoi, en Josué 24.2, Josué n’a pas nommé Harân, mais qu’il a nommé Térah, Abraham et Nahor. Lorsque Dieu s’est adressé à son peuple réuni à Sichem et qu’il a évoqué le souvenir de « vos pères », il devient évident que les trois noms mentionnés (Térah, Abraham et Nahor) font partie de ces « pères » qui habitaient de l’autre côté du fleuve et qui servaient d’autres dieux. Ceci confirme qu’Abraham est inclus dans le sujet de la phrase, c’est-à-dire parmi ceux qui avaient autrefois servi d’autres dieux.

Pour le peuple d’Israël réuni à Sichem, il était bien normal que le premier père qui leur vienne à l’esprit soit Abraham. Dans le contexte immédiat, c’est-à-dire dès la phrase suivante, Abraham est justement désigné comme étant « votre père », en précisant qu’il habitait lui aussi « de l’autre côté du fleuve » avant que Dieu l’appelle et l’amène en Canaan. Je ne vois donc pas comment nous pourrions soutenir qu’Abraham ne faisait pas partie de ceux qui « servaient d’autres dieux ». Que pouvait-il faire d’autre, puisqu’il est né et qu’il a grandi dans un environnement idolâtre païen, aussi bien dans la culture autour de lui que dans sa propre famille?

La culture idolâtre de la famille de Térah était tellement tenace qu’elle s’est encore manifestée chez Laban, fils de Bethouel et petit-fils de Nahor. Laban avait chez lui des téraphim (Gn 31.19). Par nature, les descendants d’Adam sont idolâtres et ne cherchent pas le vrai Dieu. Il a fallu une intervention spéciale de la grâce de Dieu pour sortir Abraham de cette obscurité. La seule intervention spéciale de ce genre que la Bible nous rapporte dans la vie d’Abraham, c’est lorsqu’il a reçu l’appel de quitter son pays avec les promesses mentionnées en Genèse 12.

En regardant au contexte plus large de Josué 24, nous pouvons nous demander pourquoi Dieu a pris soin de rappeler à son peuple que leurs pères adoraient autrefois des idoles. L’assemblée à Sichem a été convoquée par Josué pour que tout le peuple de Dieu soit rassemblé devant Dieu et participe à une cérémonie de renouvellement de l’alliance. Ce jour-là, Israël a reçu cette grande exhortation :

« Craignez l’Éternel et servez-le avec intégrité et fidélité. Ôtez les dieux qu’ont servis vos pères, de l’autre côté du fleuve et en Égypte, et servez l’Éternel. Et si vous ne pensez pas devoir servir l’Éternel, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir : ou les dieux que servaient vos pères au-delà du fleuve, ou les dieux des Amoréens dans le pays desquels vous habitez. Moi et ma maison nous servirons l’Éternel » (Jos 24.14-15).

Il est clair, d’après ce texte, que l’ancienne vie de leurs pères, quand ils étaient « de l’autre côté du fleuve », est associée à l’idolâtrie. Abraham aussi habitait de l’autre côté du fleuve avant que Dieu l’appelle et le retire de cette condition.

La mémoire des pères qui avaient servi d’autres dieux avait pour but de rappeler à Israël d’où ils venaient (pas seulement géographiquement, mais aussi spirituellement) et de les avertir de ne pas y retourner. Dieu les a choisis par pure grâce, même si leurs pères étaient des adorateurs d’idoles. Il les a sortis d’Égypte, les a conduits dans le pays promis et leur a donné ce pays dans sa grande bonté. Maintenant, ils avaient le choix : Voulaient-ils servir les faux dieux qu’avaient servis leurs pères et leurs voisins cananéens, ou voulaient-ils servir le vrai Dieu qui les avait délivrés de leur misère? Le reste de l’histoire d’Israël montre que l’engagement qu’ils ont pris ce jour-là à servir le vrai Dieu plutôt que de faux dieux n’a pas été respecté et que, bien des fois, ils sont tombés dans l’idolâtrie, montrant encore la ténacité de ce péché dans le cœur humain pécheur.

Si Josué avait voulu préserver la réputation d’Abraham, leur père, et s’il avait voulu éviter tout malentendu, en s’assurant que personne n’osera penser que leur père Abraham avait pu être un adorateur d’idoles dans son ancienne vie de l’autre côté du fleuve, Josué n’aurait pas pu plus mal s’y prendre. Le verset 2 lui-même, le contexte immédiat du verset 3, les indications familiales dans la Genèse et le contexte plus large de Josué 24 indiquent bien qu’Abraham faisait partie de ces pères qui servaient autrefois d’autres dieux.

En conclusion, qu’Abraham, dans son ancienne vie, était un adorateur d’idoles comme les autres. Il n’était pas meilleur que les autres fils d’Adam corrompus par leurs péchés et il a été sauvé par Dieu de ses péchés par pure grâce, sans aucune considération de ses œuvres. Aucune qualité qu’il aurait pu avoir, quelle qu’elle soit, n’a incité Dieu à le choisir plutôt que d’autres adorateurs d’idoles de son temps. Dieu l’a choisi par pure grâce, de manière libre et souveraine. Il fait de même de tous ceux qu’il destine à la vie éternelle et qu’il rachète gratuitement en Jésus-Christ par sa grâce libre et souveraine. Cette pure grâce doit nous garder humbles et reconnaissants.