Cet article a pour sujet la confusion qui existe au sujet de la doctrine du Saint-Esprit à cause du pentecôtisme et du charismatisme. Le rôle de l'Esprit dans l'expérience chrétienne doit être compris à la lumière de notre union au Christ.

Source: Essai sur le Saint-Esprit et l'expérience chrétienne. 12 pages.

Le problème de l'Esprit

Depuis l’apparition des mouvements dits néo-pentecôtistes ou charismatiques, qui suscitent soit l’enthousiasme des uns soit la critique et la réprobation des autres, la « crise » du Saint-Esprit, ou plutôt de sa doctrine (la pneumatologie), s’est propagée dans presque toutes les grandes familles de confessions chrétiennes.

Peut-on parler correctement d’une théologie de l’Esprit et décrire ses modes d’opération? Comment associer sans divorcer l’aspect « théorique » et l’aspect plus pratique de sa plénitude? Par souci de se défaire d’une orthodoxie prétendument sclérosée, faut-il opter pour une expérience spirituelle dépourvue d’ossature biblique? L’émotivité à fleur de peau et le mysticisme irrationnel seraient-ils des expressions authentiques et exclusives de la foi en l’Esprit? Ne faudrait-il pas au contraire rechercher les racines bibliques de la piété que nous qualifierons de prophétique et de personnaliste?

La simple lecture de l’Écriture nous révèle que, pour l’essentiel, l’Esprit nous accorde l’intelligence pour comprendre sa personne comme aussi pour nous rendre les bénéficiaires de son œuvre. Les chrétiens réformés devraient examiner cette question à l’aide de ce petit chef-d’œuvre de théologie, également manuel de piété chrétienne qu’est le Catéchisme de Heidelberg, et qui, à la question 53, répond : « Il me régénère, me conduit dans toute la vérité, me console et m’habite pour toujours ». L’explication est brève, mais combien éloquente! Elle reflète ce que l’Écriture, source de foi et fondement d’expérience, annonce à ce sujet.

L’Esprit est source de vie nouvelle et « grenier » de nourriture pour l’âme. Il est l’agent qui convertit à Jésus-Christ, vers qui il conduit, car il est précisément chargé de cette mission. Il opère de manière efficace, même si son opération reste parfois inaperçue au regard de la foi. Par moments, au gré des uns, il agit trop discrètement. Ailleurs, il déploie un dynamisme tel qu’il déroute celui qui ne s’y attend pas. Cependant, il n’opère jamais de façon isolée, indépendamment de la prédication qu’il inspire et qu’il rend actuelle. Il n’existe donc pas de présence en soi de l’Esprit. Sans cesse, il opère avec la Parole. Il témoigne à nos esprits que nous sommes enfants du Père.

Ceci est clair, même si tel ou tel point nécessite quelque élucidation. Mais ce n’est pas une raison pour proclamer que l’ère de l’Esprit serait enfin arrivée en cette fin de siècle, car nombreuses sont à l’heure actuelle les Églises issues de la Réforme où le type de revivalisme prôné par les adeptes modernes du mouvement pentecôtiste est inconnu, mais qui ne sont pas pour autant des Églises cimetières. La prédication fidèle de la Parole, l’administration correcte des sacrements, l’exercice vigilant de la discipline ecclésiastique demeureront jusqu’à la fin les marques authentiques et suffisantes de l’Église de Jésus-Christ. La formulation correcte de la foi et de la doctrine n’est pas une affaire secondaire, ni pour l’être (« esse ») ni pour le bien-être (« bene esse ») de l’Église.

On notera que les adeptes du mouvement que nous examinons répudient, sinon en théorie du moins en pratique et peut-être à leur insu, l’autorité normative, nécessaire, claire et suffisante des saintes Écritures.

Quant à nous, nous avons choisi, comme source exclusive d’information, la Parole qui fait autorité en cette matière comme pour le reste de la foi et de la vie. La plénitude de l’Esprit nous sera accordée lorsque nous vivrons pleinement l’Évangile en nous engageant pour lui et en servant le Royaume, lorsque le Christ deviendra le Maître incontesté de nos destinées, que sa seigneurie sera proclamée dans tous les départements de notre existence. Ainsi, le fruit de l’Esprit qui est un, contrairement aux œuvres multiples de la chair, mûrira pour la seule gloire du Dieu Esprit.

Par conséquent, il ne nous semble pas qu’il y ait lieu de débattre longuement et théoriquement de la plénitude de l’Esprit. En principe, nous sommes des « chrétiens charismatiques », enfants de Dieu appelés à la liberté de l’Esprit. Que Dieu soit donc honoré, le Christ obéi, et que l’Esprit demeure souverain dans nos existences qu’il régénère et transforme de gloire en gloire.

Où réside alors « le problème » actuel de l’Esprit? La grande confusion qui existe au sujet de la doctrine de la personne et de l’œuvre du Saint-Esprit est universelle et constitue l’une des crises majeures de la foi chrétienne moderne. Tel est le constat fait un peu partout dans l’Église universelle. Aussi paradoxal que cela puisse sembler, ce constat fait actuellement l’unique unanimité dans ce domaine.

Cette observation en appelle une autre : les profondes divergences théologiques existant entre Églises et courants différents semblent être reléguées à l’arrière-plan par des chrétiens « charismatiques ». Ainsi, des membres fidèles et des hommes d’Église, jusque-là séparés par d’infranchissables barrières doctrinales, se trouvent soudain réunis et heureux de se rencontrer dans un climat d’exaltation spirituelle afin de célébrer l’avènement de la « nouvelle Pentecôte ». D’autres, qui ne manquent pas de lucidité et du don de discernement, exprimeront leur crainte légitime et compréhensible que le regain d’actualité dont jouit le Saint-Esprit ne tende à se transformer en un fourre-tout dans lequel on entasse les aspects de la foi plus ou moins explicables que l’on évitait jusque-là de mettre sur le compte de Dieu.

Surgi ex machina, le Saint-Esprit semble venir à la rescousse des déficiences ecclésiastiques. C’est ainsi que, face à la complexité de l’expérience chrétienne, des aphorismes pieux que personne n’ose plus contredire donnent le ton : « laissons donc agir le Saint-Esprit ». Aphorismes qui trahissent le peu de respect pour une réflexion théologique. Comme si jamais auparavant les chrétiens n’avaient eu l’heureuse surprise de découvrir l’Esprit de Dieu et de mesurer l’ampleur et l’étendue de son action!

Observateurs, Bible en mains, des phénomènes « spirituels » modernes, nous avons la conviction que la pneumatologie du mouvement pentecôtiste et charismatique est devenue le lieu des imprécisions théologiques et ecclésiastiques, l’occasion aussi d’introduire quelques fantaisies dans la piété chrétienne et, hélas!, parfois le dépotoir de l’irrationnel qui caractérise dans l’ensemble notre époque et auquel l’Église contemporaine n’échappe pas. Le Saint-Esprit apparaît alors comme la dernière planche de salut pour ceux qui se sont imaginé Dieu le Père mort, Dieu le Fils impotent, mais lui, la troisième personne de la sainte Trinité, débordant d’un dynamisme quasi déroutant. Une telle conception ne fait malheureusement que mutiler les personnes de la Trinité ontologique et semer la confusion dans la conception de la piété chrétienne et de la formulation de l’expérience spirituelle.

Ce néo-mysticisme a pu engendrer un Esprit qui ne possède qu’une expression purement humaine. En dépit de bonnes intentions, ceci revient à pratiquer une autre forme de l’horizontalisme si cher aux tenants de ceux qui répudient l’autorité normative de la « sola Scriptura », la Parole seule. L’expérience chrétienne est confondue avec les états d’âme douteux, trémoussements, frissons et autres tremblements physiques. Dès lors, c’est un mysticisme dépersonnalisé, qualifié de chrétien, qui l’emporte sur l’authentique mystique prophétique et personnaliste. Des spiritualismes de cette nature ne sont en définitive que l’autre face de la médaille, un autre aspect authentique de la nature charnelle de l’homme déchu, le fruit de l’esprit qui ne cherche et ne retient, même de la révélation, que ce qui favorise et développe son autonomie, indifférent au « soli Deo gloria ».

Est-il certain que nous assistions à l’éclosion d’une nouvelle Pentecôte? Une lecture des passages scripturaires, de même qu’un examen historique, révélera que la Pentecôte demeure, au cœur de la révélation chrétienne, un phénomène de même nature et de même signification que tous les autres événements et actes rédempteurs de Dieu, à savoir un événement irremplaçable. L’effusion du Saint-Esprit, produite une fois pour toutes, est un événement révélationnel et rédempteur du même ordre que l’incarnation, la passion, la résurrection et l’ascension du Christ. De même qu’il serait absurde de s’attendre à une nouvelle incarnation, ou bien d’assister à la répétition du sacrifice de la croix, ou encore de voir se reproduire la résurrection corporelle du Seigneur, de même il est inconcevable de s’attendre à une effusion du Saint-Esprit semblable à celle de la première Pentecôte chrétienne. L’Église universelle, appelée à devenir la colonne et l’appui de la vérité, examinera avec une attention et une rigueur extrêmes les données bibliques pour pouvoir formuler les articles essentiels qui constituent sa confession de foi, pour discipliner aussi bien sa doctrine que sa piété afin de les rendre conformes à la Parole normative de son Chef et Sauveur. La description de l’expérience chrétienne ne peut faire exception et se soustraire à l’absolue « règle de la foi » (« canon pisteos »). Autrement, tout illuminisme aurait l’outrecuidance de se réclamer du Saint-Esprit.

Comme si le Saint-Esprit de Dieu, celui des origines, avait attendu notre époque pour se manifester dans toute sa splendeur et exhiber la totalité de ses forces mystérieuses ou énigmatiques. Comme si, jusque-là timide et timorée colombe, il avait soudain pris l’audacieuse décision de déployer toutes ses ailes et de nous jeter corps et âme, parfois plus corps qu’âme, dans les extases mystiques d’une parfaite dépersonnalisation. On se rappelle la célèbre boutade de Martin Luther à propos des spiritualistes de son temps : « Ils ont avalé l’Esprit, avec plumes et le reste! »

Notre époque est certes aux exaltations et aux fortes sensations dans tous les domaines. Elle voit apparaître et resurgir toutes sortes de cultes dans lesquels l’émotion débridée compte davantage que l’intelligence du contenu de la foi révélée. Force nous est de constater, une fois de plus, que l’esprit du siècle n’est heureusement pas celui du Dieu des origines, révélé par les grands événements de notre salut auxquels l’Écriture sainte rend un témoignage irréfutable à la fois comme document historique qui rapporte ces événements et comme interprète normatif de ceux-ci. C’est en cet Esprit-là qu’avec l’Église universelle nous persistons à croire, en le confessant dans la continuité de la tradition apostolique. C’est lui qui « avec le Père et le Fils est adoré et glorifié, qui est éternellement béni. Amen ». Nous ne croirons pas à une vague émanation spirituelle, à une nébuleuse doctrinale, qu’elle nous vienne du côté libéral moderniste ou qu’elle se réclame d’un revivalisme spirituel. Ces illuminismes sont le plus souvent déviationnistes dans la mesure où les personnes de la Trinité sont dissociées les unes des autres et leurs opérations rendues autonomes les unes par rapport à celles des autres dans l’économie du salut, à laquelle elles ont pourtant « œuvré » depuis toute l’éternité, comme un seul Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit.

Ce qui étonnera particulièrement, au moins du côté protestant, c’est de constater l’irrésistible séduction de l’inflation spirituelle, sans prendre garde à préciser la limite entre Dieu et l’homme. À notre avis, c’est sur ce point que réside le problème majeur. Sans doute est-ce inconsciemment qu’on a omis de le faire, mais c’est de manière non moins regrettable, car ainsi on identifie immanquablement l’homme « spirituel » au Saint-Esprit, dont on affirme qu’il dépend. Les réformés refuseraient avec la dernière énergie une identification de même nature dans le domaine de la christologie. La théologie réformée refuse toute forme qui tolérerait l’identification de l’Église ou du fidèle avec le Christ. Plus loin, nous examinerons la théologie biblique et réformée de l’union mystique1 (ce qui est autre chose que l’identification que nous récusons ici). C’est précisément sur ce point-là que réside la controverse, à notre avis fondamentale et toujours actuelle, entre la théologie romaine et la théologie biblique de la Réforme. Voyons la pensée de Calvin dans le domaine de la christologie. H.M. Matter consacrait trois études à « la notion du corps du Christ » dont nous retiendrons l’essentiel pour notre propos.

« Calvin écrit à propos de 1 Corinthiens 12.12 : “Ce passage est plein d’une consolation suprême en tant qu’elle assigne le nom du Christ à l’Église. L’honneur que le Christ daigne nous accorder consiste, en effet, en ce qu’il ne veut pas être classé et reconnu en lui-même, mais aussi dans ses membres. De la même manière, l’apôtre, dans Éphésiens 5.22ss, dit que l’Église est sa plénitude, comme s’il était de quelque façon mutilé s’il était séparé de ses membres.”
Qu’est-ce que le grand exégète a voulu dire par cela? En quoi consiste, en d’autres termes, la “consolation suprême”? En quoi pourrait-elle consister, si ce n’est en ce que le Christ daigne s’identifier à nous vis-à-vis de Dieu, en sorte que Dieu, dans l’acte de la justification, puisse à notre consolation nous imputer l’œuvre expiatoire de son Fils? Quoi qu’il en soit, il est évident que les rapports entre le Christ et nous sont irréversibles. Si le Christ daigne s’identifier à nous, il ne nous appartient pas de nous identifier à lui sous quelque aspect que ce soit.
Si Calvin a poussé bien loin sa “conclusion”, sans du reste dire un mot de trop, il est bien clair que nous changerions complètement le cours de ses pensées si nous voulions nous glorifier d’être le “complément” du Christ sans lequel il serait “pour ainsi dire mutilé”. Il est contraire aux pensées les plus élémentaires de Calvin, théologien de “l’aseitas Dei”, de lui attribuer l’idée que Dieu ait besoin de nous. Il a toujours affirmé le contraire. Ce qui est clair, c’est que même Calvin, si réaliste au point de vue du sacrement, ne voit aucun rapport entre le “corps du Christ” et notre corporalité. Cette fameuse corporalité […] est pour quelque chose dans la théologie œcuménique qui est en train de se développer. […]
Le Nouveau Testament ne connaît pas de “corpus mysticum Christi”. Il connaît encore moins une Église invisible à laquelle cette définition soit applicable. Il ne connaît pas une Église qui soit le complément du Christ glorifié ou le prolongement de son incarnation. Il connaît uniquement une Église visible qui est tenue et appelée à se solidariser toujours davantage au point d’être comme un corps où toutes les parties collaborent harmonieusement (1 Co 12) et dans laquelle elle opère par son Esprit, comme la tête opère dans tout l’organisme du corps, et qui peut lutter dans la foi que Dieu, par sa grâce, veut identifier sa vie historique lamentable avec la vie historique victorieuse de son Seigneur et Sauveur.2 »

Une identification, voire la prolongation du Christ dans l’Église, est concevable uniquement sur terrain romain. Il s’opère alors un syncrétisme d’un type nouveau dont le noyau serait la doctrine commune du Saint-Esprit. Nous avons quelques raisons de déplorer que la « nouvelle Pentecôte » soit devenue un mouvement de diversion, dissimulant mal le refus d’opérer une réforme théologique et pratique radicale, masquant la paresse d’écouter exclusivement ce que dit la Parole au sujet du Saint-Esprit et de la nature de l’expérience chrétienne. Mais il est également déplorable que des chrétiens se soient imaginé qu’il leur était plus facile de discourir sur la personne et sur l’œuvre du Christ que sur celle du Saint-Esprit. C’est à tort que l’Église a prêté moins d’attention à cette dimension de sa foi. Il ne faut pas s’étonner qu’une telle carence ait abouti à une sorte de mise au rancart du Saint-Esprit et qu’elle ait produit les distorsions doctrinales auxquelles nous assistons de nos jours, avec l’inévitable appauvrissement de la piété chrétienne qu’elles impliquent.

James Dunn, dont les diverses études consacrées au Saint-Esprit peuvent être tenues comme d’importantes contributions aux débats actuels, écrivait :

« La théologie officielle a tellement négligé de prendre au sérieux la personne et l’œuvre du Saint-Esprit qu’il en est résulté les carences que nous déplorons et les malentendus qu’il y a lieu de dissiper d’urgence. Si les théologiens officiels ont leur part de responsabilité dans l’état actuel des choses, les partisans d’une pneumatologie moderne, qui placent l’Esprit au centre de toute préoccupation chrétienne, ne sont pas moins coupables. »

Les premiers ont réduit l’Esprit à une note dogmatique presque marginale, sans être en mesure de lier la doctrine classique à la réalité vécue. Pour illustrer son propos, l’auteur cite l’article consacré au Saint-Esprit dans l’Encyclopedia Britannica, où, quoiqu’il soit question de la divinité, de la procession et de la personnalité de l’Esprit, on ne rencontre pourtant aucune trace de son activité dans la nouvelle économie du salut.

Quant aux seconds, les partisans d’une pneumatologie moderne, ils ont beaucoup trop identifié l’Esprit avec l’effervescence de leur expérience indisciplinée pour que nous puissions les prendre au sérieux, avertit-il. À leur tour, ils sont incapables d’intégrer leur interprétation du ministère de l’Esprit à une solide théologie biblique.

Dunn rappelle ensuite que, dans la triple conclusion à laquelle il parvenait dans son premier ouvrage, il annonçait la primauté du don de l’Esprit pour l’ère nouvelle. Ce don ou charisme caractérise l’âge nouveau et la rédemption eschatologique. La métaphore du baptême annonce le jugement imminent. À présent, le don de l’Esprit se trouve au cœur des écrits des trois grands écrivains de l’histoire du salut du Nouveau Testament, à savoir Luc, Paul et Jean. D’après le premier, le Saint-Esprit fait une très grande différence entre croyants et non-croyants d’origine non-juive. En se faisant baptiser, l’on devient membre de l’Esprit. Celui-ci est les prémices du salut. Il n’est nullement étonnant de lire sous la plume de Paul un texte comme celui de Romains 8.9 et 14. Quant à Jean, l’évangéliste, il faut garder à l’esprit la manière dont il insiste dans les premiers chapitres, notamment dans l’entretien de Jésus avec Nicodème, sur le fait que la nouvelle naissance (« anôthen », Jn 3.3) est la condition d’entrée dans le Royaume. L’Évangile atteindra son point culminant quand Jésus soufflera l’Esprit sur les disciples (Jn 20.22).

Quelle est la manière dont il convient de traiter la doctrine du Saint-Esprit pour rendre à la fois fidèlement compte des données bibliques et enrichir l’expérience chrétienne? Si notre réflexion s’isolait de l’expérience concrète, le champ resterait ouvert pour accueillir tous les mysticismes, étrangers à la révélation. Une exégèse sérieuse s’efforcera de lier théologie et expérience vécue.

Wesley Carr a raison d’affirmer que l’étude de la théologie biblique est simultanément contextuelle et historique. Au lieu de nous lamenter sur l’absence moderne de clarté dans ce domaine, nous devrions nous employer à rechercher les causes qui l’ont engendrée. Que la pneumatologie ait été le parent pauvre de la théologie dogmatique, nous n’avons qu’à le reconnaître et à nous en humilier. Cependant, il est urgent d’abandonner les excuses et les alibis faciles pour remédier aux carences constatées. Les causes de celle-ci pourraient se résumer de la manière suivante :

1. Une forte insistance sur la pneumatologie risquerait de s’en tenir aux questions théoriques et même de faire disparaître du champ de vision chrétien une véritable spiritualité. En effet, il ne faut pas minimiser un tel danger : partout où certaines idées relatives au Saint-Esprit surgissent sans l’appui d’une réflexion biblique, la foi s’amenuise et, faute de pesanteur, disparaît dans une parfaite nébuleuse spirituelle.

2. On a trop souligné l’aspect positif du zèle qui caractérise les partisans de la pneumatologie que nous analysons ici. Cependant, si les célébrations cultuelles chez ces derniers ne manquent pas de chaleur, il n’est pas exact qu’elles s’inspirent et se laissent guider forcément par les seules données bibliques, sur lesquelles se fondera et se consolidera exclusivement toute expérience chrétienne. Nous devrions prendre garde à la séduction que présentent l’exubérance et les explosions émotionnelles qui ne sont pas plus proches de la réalité biblique que ne l’est l’absence de ferveur chez ceux de l’autre camp.

3. Une autre raison qui expliquerait l’hésitation à parler de la pneumatologie réside dans la difficulté de rendre exactement compte de la nature de l’expérience chrétienne. La majorité des chrétiens trouvent presque impossible de distinguer entre l’œuvre de l’Esprit et celle du Christ. En faveur de cette idée, on avance l’argument selon lequel on a déjà suffisamment de peine à expliquer la transcendance de Dieu et son immanence en Jésus-Christ pour ne pas s’encombrer de nouvelles difficultés théoriques; à leurs yeux, la doctrine du Saint-Esprit est effectivement devenue un véritable nœud gordien.

On court le risque, affirme-t-on, d’accorder de la sorte plus d’importance au Saint-Esprit qu’au Fils incarné, le Christ des Évangiles. Or, si la foi est essentiellement christocentrique, et elle l’est assurément, discourir au sujet de l’Esprit qui s’empare de l’homme pour faire de lui une nouvelle création reviendrait, si on n’y prenait garde, à amoindrir, sinon à renier, l’œuvre parfaite du Rédempteur.

S’il convient de tenir compte de ces remarques, il est toutefois prudent de rappeler que l’œuvre essentielle de l’Esprit dans sa relation avec l’homme de foi consiste précisément à le conduire au Sauveur. Oublier la nature de cette mission équivaudrait soit à exalter l’Esprit au détriment du Christ, soit à conserver une foi émasculée en l’identifiant ni plus ni moins à une opinion sans force. L’Esprit Saint finira par se confondre avec un vague idéalisme, à moins qu’il ne soit expliqué en termes rationalistes. Sans la connaissance que l’Église peut posséder de l’Esprit, elle s’encombrera d’un grand nombre de règles et d’aspirations en se privant de toute possibilité de mûrir spirituellement pour devenir le corps du Christ, habité et animé par l’Esprit.

La médiocrité et le caractère trop souvent ennuyeux de nos cultes sont sans doute dus à ce que l’Église ne prête pas suffisamment attention à la présence et à l’opération de l’Esprit. L’Esprit quitte celui qui ne lui reconnaît aucune place dans sa prédication. Mais le remède aux maux qui affligent l’Église viendra d’une exposition fidèle de l’ensemble de l’enseignement biblique et de tout le conseil de Dieu.

À notre avis, cette objection, l’éventuelle prééminence de l’Esprit sur le Christ, ne tient pas suffisamment compte de l’histoire du Saint-Esprit dans l’Ancien Testament ainsi qu’elle semble le faire pour le Nouveau Testament. Un examen attentif, nous y reviendrons plus loin, démontrera que jamais dans l’Ancien Testament l’Esprit n’apparaît comme une notion vague et imprécise. Nous pensons pouvoir être en mesure de soutenir que son action est tellement précise qu’il en résulte une limitation nécessaire et légitime. Certes, l’Esprit n’est pas encore révélé dans toute sa plénitude. Rien ne laisse toutefois supposer qu’il s’agirait d’une entité impersonnelle et insaisissable, peu susceptible d’être expliquée. Nous le voyons intervenir dans des situations particulières, choisir des personnes pour leur confier certaines tâches, etc. Le véritable inconvénient de la pneumatologie de l’Ancien Testament, ce n’est point le caractère vague que l’Esprit y revêt, mais, au contraire, son activité encore restreinte et, de ce fait, d’une extrême précision.

Quant au Nouveau Testament, le caractère chrétien du don de l’Esprit est précisément la réponse à l’objection faite plus haut selon laquelle l’Esprit relèverait d’une notion vague et imprécise.

En traitant des aspects bibliques de l’œuvre de l’Esprit, nous examinerons la nature des rapports existant entre lui et le Christ. En anticipant notre conclusion à ce sujet, nous dirons que, selon le Nouveau Testament autant que l’Ancien Testament, le Saint-Esprit n’est pas un symbole représentant des théories générales relatives à des valeurs spirituelles ni une conception naturaliste de l’immanence divine. Sa conception est biblique et chrétienne, au même titre que la christologie qui lui est intimement associée. Sans une correcte pneumatologie, la doctrine du Christ sera incomplète, si ce n’est tout à fait erronée. La pneumatologie biblique et l’expérience chrétienne qui se fondent sur l’action de l’Esprit ne sont pas des idées vagues ni des notions panthéistes et mystiques, mais des données sûres que nous tenons de la révélation.

On a prétendu, et nous y avons déjà fait allusion, qu’en soulignant le rôle de l’Esprit, on contribuerait à la création d’un désordre. Nous ferons remarquer à cet égard qu’insister sur sa personne et sur l’expérience de sa présence n’est pas premièrement une question d’ordre ou de désordre ecclésiastique, mais de loyauté envers la Parole écrite.

Que dit l’Écriture? Voilà la question essentielle et la préoccupation majeure d’une Église qui vit par l’Esprit et est conduite par lui. L’effusion de l’Esprit le jour de la Pentecôte a donné une forme nouvelle à la constitution du peuple de Dieu en élargissant ses limites et en rassemblant les élus d’origine juive et païenne.

D’après l’école pentecôtiste, et nous donnons à cette désignation une acception large, non confessionnelle, la Pentecôte devrait se produire continuellement. La vitalité d’une Église se mesurerait à la cadence des événements extraordinaires surgissant en son sein. Or, nous ne répéterons pas suffisamment que la Pentecôte est de l’ordre de ce qui ne peut se reproduire (« ef hapax » en grec), comme la crucifixion par exemple. Dans aucune des Églises apostoliques nous n’entendrons parler de sa répétition. Quant aux effets produits par sa présence, ils sont de nature parfaitement ordinaire. Plus loin, nous ferons l’historique des origines du mouvement pentecôtiste et néo-pentecôtiste. Ici même, occupons-nous plus spécialement des Églises qui, quoique restées dans la tradition réformée, ont été fortement touchées par l’expérience charismatique.

L’essentiel du mouvement pentecôtiste, quelles que soient les diverses branches et tendances qui le représentent, consiste en la conviction d’une expérience spéciale du Saint-Esprit, différente de celle de la conversion.

L’examen du chapitre deux du livre des Actes répondra à cette assertion en soutenant qu’effectivement les disciples ont été remplis du Saint-Esprit. Ils le furent tous. Ce « tous » représente l’ensemble du collège apostolique et des disciples réunis autour d’eux; tous ceux qui continuaient d’un commun accord dans la prière et les intercessions (Ac 1.14). Ils choisirent Matthias pour prendre la place laissée vacante par Judas. L’effusion de l’Esprit ne laisse aucun membre de l’Église sans être touché par lui. L’essentiel de la Pentecôte et de la dispensation qu’elle inaugura fut l’accomplissement de la prophétie de Joël 3.1-5.

Lorsque Pierre se leva pour prononcer son discours, il était effectivement rempli de l’Esprit comme tous les autres disciples autour de lui. La réponse qu’il donnera à la question de la foule : « Hommes, frères, que ferons-nous? », est claire : « Repentez-vous et soyez baptisés […] et vous recevrez le Saint-Esprit » (Ac 2.37-38). Ainsi, du moment que l’on croit et que l’on devient disciple, on bénéficie de l’effusion du Saint-Esprit.

D’autres passages du Nouveau Testament confirment aussi cette règle et cette pratique dans l’Église apostolique. Selon Romains 8.9, si quelqu’un n’a pas l’Esprit du Christ, il ne lui appartient pas. Nous retrouvons la même idée dans 1 Corinthiens 12.13. Plus frappant encore est Galates 3.1 et 14 où l’apôtre affirme que la mort du Christ consiste en ce que les païens peuvent bénéficier de la bénédiction d’Abraham.

La même conclusion s’impose du fait de notre union avec le Christ. Rien n’est plus fondamental au chrétien que d’être en Christ (Ép 1.3-14). Mais combien nous sommes aveugles à toutes les implications de cette union! Nous ne pourrions être dans le Fils sans être aussi et simultanément dans l’Esprit et dans le Père. Rien ne nous autorise à conjecturer que, n’étant qu’en Christ, nous bénéficierions seulement de quelques bribes des bénédictions offertes par le Dieu trinitaire. Au contraire, « être en lui » signifie pleinement bénéficier des bénédictions spirituelles que sont la rédemption, le pardon, l’héritage, le sceau, etc. D’après Colossiens 2.10, notre plénitude est totale en Christ. Le Consolateur vient habiter en nous de telle sorte que les membres fidèles sont équipés pour répondre à toutes les exigences de la vie nouvelle. L’Esprit de notre Père devra nous servir de manière complète afin que nous ne soyons pas tentés au-delà de nos forces.

Bien entendu, il y a différentes sortes de chrétiens, mais non deux catégories distinctes, l’une spirituelle, l’autre qui n’aurait pas reçu l’Esprit. Il n’existe pas de différence constitutionnelle entre eux. C’est une réalité magnifique que tout chrétien, même le plus misérable, soit une personne extraordinaire du fait de l’habitation en lui de l’Esprit.

Quelles que soient les interprétations qu’on en donne, l’essentiel tient en ce que l’événement spécial de la Pentecôte peut et doit absolument se reproduire pour authentifier l’expérience de la foi du fidèle, expérience qui serait différente de la conversion. À la question « que s’est-il passé le jour de la Pentecôte? », la réponse évidente est que les disciples du Christ furent remplis du Saint-Esprit, comme le Seigneur avait promis peu avant son ascension.

Nous contestons cependant l’idée selon laquelle cette expérience-là puisse se démarquer d’une autre, appelée la plénitude de l’Esprit. Anticipons brièvement notre examen d’Actes 2; divers termes y décrivent le phénomène. Dans Actes 1.5, le Seigneur promet le baptême de l’Esprit. Dans Actes 10.47, Pierre parle d’une expérience de Corneille et de sa maisonnée, identique à celle de la Pentecôte. La terminologie est cependant différente. « Peut-on refuser l’eau du baptême à ceux qui ont reçu le Saint-Esprit aussi bien que nous? » Dans Actes 10.44, c’est une autre expression : « Le Saint-Esprit descendit sur tous ceux qui écoutaient la Parole. » Il est évident que dans le livre des Actes une seule et même expérience est décrite comme étant la réception de l’Esprit, le baptême de l’Esprit et la plénitude de l’Esprit. Il n’est pas permis de distinguer de manière tranchée entre ces termes comme s’ils représentaient des expériences différentes. Il est plus important de se rappeler qu’être rempli de l’Esprit n’est pas un privilège limité à quelques croyants de choix. Dans Actes 2.4, tous sont remplis de l’Esprit.

Il nous reste à examiner l’objection selon laquelle l’Esprit compliquerait la description de l’expérience chrétienne. L’apôtre ne définit pas avec une précision rigoureuse la nature de la relation du fidèle avec le Christ et l’Esprit. Dans Romains 8.9-10, il parle de la même relation en énonçant indifféremment le « en Esprit » et le « en Christ ». Diverses tentatives ont été faites pour expliquer ces passages. Les explications ne semblent pas toutes très heureuses. En forçant quelque peu le schéma, on pourrait dire que le Christ est le contenu de la vie nouvelle et que le Saint-Esprit en est le pouvoir qui l’anime.

Ainsi, nous nous garderons d’établir une distinction trop tranchante entre la présence du Christ et celle de l’Esprit. Sans entrer pour autant dans un débat sur la Trinité, nous maintiendrons la formule classique qui rend suffisamment compte de la nature des personnes qui la constituent, du lien qui les associe et des tâches spécifiques à chacune d’elles. Il n’existe pas de vie chrétienne en dehors du Christ. Si une préoccupation excessive de l’Esprit nous éloignait de lui, la cause en serait une pneumatologie hypertrophiée. Mais parce que notre foi se fonde en la Trinité ontologique, nous pourrons croire correctement en l’Esprit. Alors, nous nous placerons au bénéfice de son œuvre.

En dépit des exagérations des uns et des carences coupables des autres, nous restons persuadés que l’Esprit de Dieu et l’expérience chrétienne demeurent indissolublement unis. Il nous sera donné d’examiner la nature de leur relation et de désigner les limites de la seconde.

En consultant aussi bien l’Ancien Testament que le Nouveau Testament, nous nous rendons compte de la nature identique de la présence et des opérations de l’Esprit. Il agit depuis l’aube de la création. Il préserve la fidélité dans l’Alliance de grâce. En ce sens-là, la Pentecôte ne peut être qualifiée de nouveauté. Il serait souhaitable de commencer l’examen de la doctrine du Saint-Esprit dès la première page de l’Écriture au lieu de se cantonner au chapitre 2 du livre des Actes.

Plutôt que d’offrir une doctrine systématique du Saint-Esprit, nous tâcherons désormais de rendre compte de la nature de l’expérience chrétienne à l’aide de la théologie réformée et dans l’esprit de sa piété, dans la ligne d’une fidélité que tout disciple et ministre du Seigneur doit à sa Parole. Nous ne chercherons pas à réduire la riche doctrine biblique du Saint-Esprit en une formule réductionniste empirique, utilitaires à la manière dont elle est traitée dans les mouvements qui s’en réclament. L’Esprit nous parle du Christ et de son Royaume. Car si les formules théologiques peuvent être suspectées de subtilité et d’intelligence, parfois avec raison, souvent à tort, le même danger est également présent là où les expériences et les émotions religieuses spirituelles peuvent devenir des fins en soi et sombrer dans ce cas dans une forme spirituelle d’idolâtrie! Dans sa belle étude consacrée au Saint-Esprit, l’Écossais Thomas F. Torrance conclut par la page que nous reproduisons ici en conclusion :

« Or, la venue de l’Esprit Créateur, telle qu’elle a eu lieu à la Pentecôte, est le lieu où la volonté créatrice de l’homme pécheur doit être brisée, où l’homme, dans son existence adamique, tel qu’il s’est créé lui-même, doit être dépouillé de sa propre image et doit périr, car, par la venue de l’Esprit, l’homme déchu se heurte à la puissance suprême du Créateur lui-même. Alors, ou bien il est recréé, libéré de lui-même pour avoir une foi authentique en Dieu, ou bien il entre en conflit avec l’Esprit dans l’existence qu’il a voulu se donner à lui-même et il est de plus en plus prisonnier de ses propres inventions. Et la lumière dont il s’éclaire est vraiment ténèbres.
N’est-ce pas là l’histoire des Juifs rebelles dans leur rencontre avec Jésus?… Ne convient-il pas de se demander si ce n’est pas également l’histoire de l’Église chrétienne, même dans les temps modernes? N’avons-nous pas, nous aussi, forgé notre propre image de Dieu en parlant de notre prétentieuse connaissance “a priori” ou de la profondeur de notre propre être, de nos décisions existentielles ou de notre spiritualité créatrice? N’avons-nous pas fabriqué nos propres conceptions du Christ pour les accommoder à notre attitude d’indépendance face à l’existence telle qu’elle est dans ce vingtième siècle? Et n’avons-nous pas tenté de nous justifier nous-mêmes en projetant cette manière de penser sur l’Église apostolique, en prétendant que son image du Christ n’est rien de plus que le produit de sa spiritualité créatrice ou l’expression de son attitude existentielle? N’avons-nous pas aussi crucifié le Christ du témoignage apostolique et résisté à l’Esprit de la Pentecôte en remplaçant la sainteté créatrice de Dieu par la volonté créatrice de l’homme?… Croyons-nous réellement au Saint-Esprit? Croyons-nous qu’à la Pentecôte il est descendu sur les témoins apostoliques…, qu’il a transformé leur mentalité pour qu’ils puissent recevoir le témoignage authentique de Dieu sur lui-même en Jésus-Christ et qu’il les a rendus capables de devenir de fidèles témoins du Christ? […]
Certes le Nouveau Testament montre clairement que le Saint-Esprit est donné à ceux qui croient en Jésus et que nous croissons en grâce et en connaissance du Christ lorsque nous nous remettons à la puissance créatrice du Saint-Esprit sur nous, mais cette incrédulité fait obstacle à la présence de l’Esprit et paralyse sa puissance sur nous. Qu’est-ce que l’incrédulité, sinon la résistance au Saint-Esprit, et qu’y a-t-il qui puisse faire obstacle au renouveau de l’Église et détruire son témoignage sinon précisément l’incrédulité? Il faut dire brutalement que ce dont nous avons le plus besoin, c’est d’un renouveau de la foi : de la foi en Jésus-Christ comme Dieu lui-même, réellement incarné parmi les hommes, de la foi en la croix comme intervention objective de Dieu dans l’existence humaine pour le salut de l’humanité, de la foi dans la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts, en son corps, comme prémices de la nouvelle création. Le renouveau de notre témoignage n’aura lieu que si nous nous abandonnons nous-mêmes à la puissance miraculeuse de Dieu, à l’Esprit créateur, que si nous nous engageons nous-mêmes dans la foi en Jésus-Christ, Dieu et Sauveur.
Et si nous voulons que notre foi soit forte et notre témoignage clair, il faudra nous garder contre les impuretés qui apparaissent lorsque nous cherchons à compléter l’œuvre de l’Esprit par nos propres œuvres et à nous mettre en avant dans le message évangélique. C’est là qu’intervient la transparence de l’Esprit, car, pour être authentique, notre témoignage doit être percé de part en part par la lumière incréée de la révélation de Dieu. Ce n’est qu’à ce moment qu’il pourra servir d’instrument au témoignage de Dieu parmi les hommes… Cela ne peut avoir lieu que par la puissance du Saint-Esprit qui rend lui-même témoignage à Dieu par elles, parce que lui seul peut donner aux formes de la foi et du témoignage une transparence en faisant luire à travers ces formes la réalité de Dieu. Ce n’est qu’à travers la présence sanctifiante du Saint-Esprit qui nous libère de nous-mêmes que Jésus-Christ, Parole incarnée, retentit à travers nous et dirige notre témoignage, rencontrant ainsi les hommes directement et personnellement par ce témoignage.3 »

​Notes

2. H. M. Matter, Études évangéliques, n3, 1953.

3. Thomas F. Torrance, « Veni Spiritus Creator », in Theology in Reconstruction, S.C.M. Press, London.