Cet article sur le Psaume 73 a pour sujet la prospérité des méchants qui provoque la jalousie quand la richesse est vue comme une bénédiction de Dieu et la pauvreté une malédiction, mais le croyant comprend que s'approcher de Dieu est le plus grand bien.

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Psaume 73 - Le mystère de la prospérité des méchants

« Oui, Dieu est bon pour Israël, pour ceux qui ont le cœur pur. Quant à moi, pour un peu mes pieds allaient fléchir, il s’en est fallu d’un rien que mes pas ne glissent, car je jalousais les insensés, en voyant la prospérité des méchants. Rien ne les tourmente jusqu’à leur mort, et leur corps est replet; ils n’ont aucune part à la peine des hommes, ils ne sont pas frappés avec les humains. Aussi, l’orgueil leur sert de collier, la violence est le vêtement qui les enveloppe; leur figure est débordante de graisse, les imaginations de leur cœur dépassent la mesure. Ils raillent et parlent méchamment d’opprimer; ils parlent haut, ila élèvent leur bouche jusqu’aux cieux, et leur langue se promène sur la terre. Voilà pourquoi son peuple en arrive là, on avale l’eau abondamment et l’on dit : Comment Dieu le connaîtrait-il? Y a-t-il même de la connaissance chez le Très-Haut? Ainsi sont les méchants : Toujours tranquilles, ils accroissent leur richesse. »

Psaume 73.1-12

  1. La prospérité des méchants : un problème spirituel difficile
  2. L’expérience des hommes de l’Ancien Testament

1. La prospérité des méchants : un problème spirituel difficile🔗

Le cri du psalmiste dans le passage ci-dessus rend compte d’une expérience profondément humaine. La sensibilité humaine nous enseigne en effet que personne au monde n’accepte d’être traité injustement, bien que l’injustice soit une pratique assez courante et assez ancienne dans toutes les sociétés humaines.

Les hommes et les femmes qui nous ont précédés dans la foi, malgré la confiance qu’ils plaçaient en Dieu, et malgré tous les signes d’amour et de grâce dont Dieu entourait leur vie, ne pouvaient s’empêcher, face à des événements tels que le malheur frappant les innocents ou la mort de personnes connues pour leur probité morale et leur sens de l’équité, d’être choqués et même scandalisés en voyant que, dans le même temps, des gens réputés pour leur immoralité, leurs excès ou leurs abus, jouissaient parfois d’une santé de fer, d’une longue vie ou de biens matériels exorbitants.

Cette situation est d’autant plus paradoxale que tout se passe comme si plus on servait Dieu, plus on se montrait honnête et bon dans la vie, plus on était en butte à la souffrance, à la pauvreté et aux tribulations diverses. Ceux qui doutent de l’amour de notre Dieu ou qui nient simplement son existence ont toujours eu là des motifs tout indiqués pour couvrir de raillerie ceux qui mettent leur confiance et leur espérance en Dieu, le Maître de leur vie et le Sauveur de leurs âmes. Une question se pose alors : Quel est le message de la Bible pour ceux qui ne gagnent pas grand-chose dans la vie en vivant comme Dieu veut?

2. L’expérience des hommes de l’Ancien Testament🔗

Essayons de répondre à cette question à la lumière de notre texte, le Psaume 73.1-12. Nous allons maintenant cheminer avec les croyants de l’Ancien Testament. L’auteur du Psaume 73 s’appelle Asaph. L’orthographe de son nom, écrit différemment suivant les versions, importe peu. On sait surtout qu’il était attaché au service du temple, comme chef des chantres, au temps du grand roi David. Le Psaume 73 est appelé « Psaume d’instruction », c’est-à-dire qu’il a été inspiré de Dieu pour faire comprendre son message et sa volonté sur cette question des gens méchants qui ont tout et à qui tout réussit. Par ce psaume nous voyons que, aussi bien autrefois qu’aujourd’hui, la prospérité des méchants n’a cessé de défier la foi et l’intelligence des générations de croyants. On peut donc parler de « mystère », d’une chose difficile à comprendre, mais qui a son sens caché dans la volonté de Dieu, et qui s’inscrit dans son plan d’amour à travers la personne et l’œuvre de Jésus-Christ.

Le verset 3 est traduit différemment selon les versions utilisées. La version Louis Segond révisée, qui est la nôtre ici, parle de « la prospérité des méchants ». « Car je jalousais les insensés, en voyant la prospérité des méchants. » Dans la Traduction Œucuménique de la Bible (TOB), ce même verset est rendu de la manière suivante : « Car j’étais jaloux des parvenus, je voyais la chance des impies. » La traduction de la Bible en français courant semble plus explicite : « J’ai vu en effet ceux qui ont renié Dieu, j’ai vu que tout leur réussit, et j’ai envié ces insolents. »

Pour les hommes et les femmes de l’Ancien Testament, la prospérité des méchants posait une question spirituelle grave. Cette question était liée à l’idée que l’on se faisait de la nature de la richesse et de la pauvreté. D’après cette idée qui était très répandue, plus on était riche, plus on était comblé matériellement, plus on était aimé et béni de Dieu. En revanche, la misère et la pauvreté, comme la maladie ou l’infirmité, étaient regardées comme des signes de malédiction divine. Cette pensée a continué à prévaloir même tardivement. On pensait en général que c’est dans ce monde-ci que l’homme est puni ou récompensé, ce qui faisait du malheur ou de la souffrance la conséquence immédiate du péché. Cette façon de voir était fondée sur l’erreur, car dans sa prescience et sa mansuétude, Dieu agit avec plus de circonspection, et certainement plus de hauteur et de profondeur. C’est ce que le livre de Job va se charger de démontrer.

Job est un homme bon et intègre, mais qui est frappé par le malheur. Tout le monde, sa femme, ses amis, lui demandent d’avouer son péché, qu’il cache, selon eux, et qui aurait attiré sur lui la colère de l’Éternel. Toutefois, Job jure qu’il n’a pas péché, qu’il n’a pas offensé le Très-Haut. Ses amis le trouvent soit ridicule, soit orgueilleux, parce qu’il est impensable pour eux que l’homme juste connaisse le malheur. On connaît la conclusion du livre qui montre que Dieu nous parle aussi à travers la souffrance et les épreuves de la vie (Job 33).

Du point de vue du psalmiste, les méchants, les insolents et les impies sont connus comme tels. On les voit à l’œuvre. Ils ont accumulé des biens mal acquis. Ils ont pris la part de tous. Ils oppriment et tuent. Ils inquiètent par leur arrogance, leurs ambitions folles et leur cupidité sans limites. Ils provoquent la jalousie des plus démunis, favorisent les frustrations et font mal supporter leur sort aux malheureux de la terre. Ils étalent une richesse collective. C’est ce que dit le psalmiste. Il voyait les riches avec leurs biens et leur fausse assurance, et il avait tendance à les envier.

Mais la grâce de Dieu intervient pour lui faire comprendre le fond de la question. Le fond de la question que Dieu fait comprendre au psalmiste, c’est le néant des richesses, lorsqu’elles ne sont pas fondées sur la crainte de Dieu. Comme le psalmiste, nous avons également besoin de cette compréhension particulière.

Comprendre ce que Dieu veut et vivre comme Dieu veut, n’est-ce pas la plus belle et la plus grande des richesses? Le psalmiste nous communique sa propre expérience. Il a compris que s’approcher de Dieu, c’est le plus grand bien (v. 28). Nous aussi, notre plus grand bien n’est-il pas de nous approcher de notre Dieu et d’être appelés ses enfants? (Ép 1.4).