Cet article a pour sujet le rôle de la révélation générale pour le chrétien, pour sa vie en société et avec les incrédules, pour la science, pour acquérir de la sagesse pour son travail, et des implications pour la mission.

Source: La révélation générale. 4 pages.

La révélation générale - (9) Le rôle de la révélation générale pour le chrétien et pour la mission

  1. Implications pour le chrétien
  2. Implications pour la mission

1. Implications pour le chrétien🔗

a. La révélation générale est très importante pour le chrétien. À cause de la révélation générale, les incrédules reconnaissent souvent des normes qui ressemblent extérieurement aux normes reconnues par le chrétien comme les lois du seul vrai Dieu. Ainsi, le chrétien peut-il avoir une place dans une société commune aux croyants et aux incrédules.

b. Grâce à la révélation générale aussi, les incrédules se servent des termes religieux. Certes, le missionnaire chrétien doit leur dire que le contenu de la notion qu’ils désignent par tel ou tel terme religieux diffère de la notion qu’un chrétien reçoit de ce terme. Le terme Dieu ne veut pas dire la même chose quand il s’applique à telle ou telle idole et quand il sert à désigner le Dieu trinitaire de la Bible. Cependant, le terme des païens peut être employé pour la prédication missionnaire parce que la notion que les païens donnent à ce terme témoigne encore de la vérité, bien que de la vérité retenue captive et changée. Grâce à cette vérité refoulée, les païens ont des termes et des manières pour s’exprimer dont le missionnaire peut se servir pour prêcher l’Évangile comme Paul s’est servi du verset grec « en Dieu nous avons la vie, le mouvement et l’être » (Ac 17.28).

c. Le chrétien a une tout autre idée du monde dans lequel il se trouve que l’incrédule, puisque la relation avec Dieu a une valeur essentielle pour l’idée qu’on se forme du monde. Mais cela ne veut pas dire qu’après avoir trouvé le Christ, le croyant ne s’intéresse plus à la beauté de la nature, aux dons que Dieu a encore laissés à l’homme. Car il sait que le même Dieu qui s’est révélé à lui en Christ lui manifeste aussi sa gloire dans les œuvres de sa création et de sa providence. Il ne se réjouit donc pas moins de ces ouvrages que l’incrédule ne reconnaît pas comme des ouvrages du Dieu véritable.

d. Le chrétien doit se servir, comme Calvin l’exprime, de l’Écriture comme des « lunettes » pour bien lire « le livre de la nature ». Ce n’est que par l’Écriture que le croyant est certain du contenu de la révélation générale. Cela implique qu’il n’y a aucun terrain de la vie sur lequel le chrétien peut impunément travailler sans se servir de la lumière de la Bible. Cela est important pour son activité pratique, mais aussi pour l’activité théorique. La volonté de Dieu est la norme de toute activité humaine. Seule la Bible nous donne la possibilité de bien la connaître.

Ceci nous amène à considérer la question de l’activité scientifique. La science cherche à comprendre la réalité d’après ses différents aspects. Cette réalité, donc aussi chaque aspect de la réalité, ne peut être bien comprise que si elle est conçue comme la réalité créée par Dieu, soumise aux lois divines. Seul celui qui connaît le Christ peut pleinement comprendre la réalité créée. Par la Bible, on connaît celui en qui ont été créées toutes ces choses et en qui toutes choses subsistent (Col 1.16; Jn 1.3). Heureusement, cela n’implique pas qu’un incrédule ne puisse faire de travail scientifique ayant une valeur. Grâce à la révélation générale, il comprend aussi quelque chose des lois auxquelles la réalité est soumise, bien qu’il sépare ces lois de celui qui les a données. Incidemment, il est capable de faire du bon travail et beaucoup de travail dont le chrétien peut se servir avec reconnaissance.

Pourtant, le chrétien doit se demander à la lumière de la Bible jusqu’à quel point le travail d’un savant incrédule a été matériellement influencé par son incrédulité. Car il ne va pas du tout de soi que celui qui ne veut pas reconnaître Dieu comme le Créateur reconnaît quand même dans la lumière de la révélation générale les lois que Dieu a données à sa création. De la même manière, le chrétien doit faire tout son travail. Il ne doit jamais se passer de l’aide de l’Écriture. Certes, il peut reconnaître la valeur artistique, technique, pédagogique, économique, sociale du travail des incrédules. Cependant, ce n’est qu’à travers sa connaissance de l’Écriture sainte qu’il lui est permis de bien juger la valeur d’un tel travail. N’oublions pas que le travail des incrédules n’est pas seulement influencé par la révélation générale, mais aussi dans les pays « chrétiens » par la révélation spéciale. Remarquons encore que la lumière de la Bible n’ouvre pas seulement les yeux du chrétien à la révélation générale de Dieu dans la réalité autour de lui et dans sa propre vie, mais qu’il y remarquera aussi les traces de l’œuvre de la rédemption. La soumission de toutes choses au Christ apparaît du fait que le Père gouverne maintenant tout par le Christ. Bien que le Père règne par le Christ, il y a encore la distinction entre l’œuvre de la providence et l’œuvre de la rédemption, entre le royaume de grâce et le royaume de puissance.

e. La révélation générale ne doit jamais être considérée par le chrétien comme un moyen de connaissance de Dieu indépendamment de la Bible. Cela n’implique pas que le croyant ne reçoive pas de connaissance par la révélation générale. Nous avons vu que les hommes ne peuvent pas travailler sans obéir à toutes sortes de règles, règles morales, logiques, historiques. Ces règles ont été posées par Dieu. Elles sont une expression de sa sagesse. Il est clair que l’Écriture ne nous donne que peu de connaissance matérielle au sujet de certaines de ces règles, par exemple des règles pour mesurer, peser, etc. Par contre, la Bible nous donne d’amples renseignements en ce qui concerne le contenu matériel des règles auxquelles notre œuvre doit répondre pour être une bonne œuvre du point de vue moral.

Cela s’explique par le fait que, quant à la reconnaissance des normes pour ces aspects de l’activité humaine, Dieu empêche que le péché ait une influence aussi grande qu’au sujet de la reconnaissance des normes se rapportant à ce qui, dans l’action humaine, découle plus directement du « cœur ».

Cependant, il est évident que l’homme ne peut servir Dieu et son prochain sans que son action ait aussi ces aspects dont l’Écriture nous enseigne peu ou rien quant au contenu des règles auxquelles ils doivent répondre. Cela prouve qu’il y a des lois divines dont l’Écriture ne nous enseigne presque pas le contenu et qui doivent pourtant être des règles dont nous devons tenir compte. Nous devons donc dire, justement à la lumière de la Bible, qu’il y a ici des règles, notamment pour l’aspect purement technique du travail, dont le contenu n’est connu que par la révélation générale. L’étude de la Bible doit nous guider à ne pas penser trop facilement qu’elle ne donne pas de connaissance quant au contenu de telle ou telle règle donnée par Dieu.

Notre conclusion est donc que nous ne devons pas comprendre la révélation générale, une source de notre connaissance de Dieu, indépendamment de la Bible. Cependant, cela n’implique pas que tout ce que Dieu nous enseigne par la révélation générale soit entièrement répété par la Bible.

2. Implications pour la mission🔗

Ces pensées sont importantes pour la méthode de la mission. Le prédicateur ne doit jamais penser qu’il n’a qu’à prêcher une vérité dont les incrédules connaissent déjà certains éléments, par exemple que Dieu existe, que Dieu a créé le monde, ou bien la vérité de la providence. Certes, le chrétien dit aussi toutes ces choses. Mais cela n’implique pas que le Dieu dont il reconnaît l’existence, à qui il attribue la création et la providence, peut être identifié avec ce que les incrédules se représentent quand ils parlent d’une cause primaire du monde, d’une providence surnaturelle. Ces idées des incrédules sont leurs idées à eux dans lesquelles la vérité est injustement retenue captive. Car si le Dieu dont ils parlent avait été le Dieu véritable, ils n’auraient pas pu concilier leurs idées concernant son existence, sa puissance et sa providence avec une vie montrant qu’ils se sont formé l’idée d’un dieu d’après l’image de la créature.

Le fait que les incrédules parlent souvent de l’existence d’un dieu, d’une providence, témoigne du fait que Dieu n’a pas cessé de se manifester à ceux qui ne le « connaissent » pas. Dans la prédication missionnaire, il faut tenir compte de ce fait, comme Paul en tient compte dans son discours à l’Aréopage.

Les témoignages de la vérité refoulée ne se trouvent pas seulement dans les religions des hommes, mais aussi dans leurs idées concernant les vérités dernières, dans leurs philosophies, leurs idées métaphysiques. La philosophie moderne, même quand elle se prétend athée, peut nous ramener au fait que Dieu n’a pas cessé de rendre témoignage de ce qu’il est. Pensons par exemple à la place de la notion de transcendance dans la philosophie de l’existence.

Insistons encore une fois sur le fait que cela n’implique pas qu’une telle notion puisse simplement être considérée comme un élément de vérité dans une telle philosophie. Car cette notion a une fonction dans la totalité d’un système.

Les idées religieuses non chrétiennes, les pensées de l’homme sur les vérités dernières peuvent non seulement être influencées par la révélation générale refoulée, mais aussi par la révélation spéciale. Dans des pays dits chrétiens, le christianisme a beaucoup influencé aussi les idées et la conduite de ceux qui ne veulent pas être chrétiens.

Pensons à l’Islam; dans cette religion, ce n’est pas seulement la vérité manifestée par la révélation générale qui est refoulée et changée. Il y a aussi l’influence de la religion juive et du christianisme. Cela ne se remarque pas seulement dans les idées directement religieuses, mais aussi dans les idées morales.