Le test des éloges pastorales
Le test des éloges pastorales
Recevoir un ou deux compliments semble être le moindre de mes soucis en tant que pasteur.
Si la critique est l’une des douleurs pernicieuses du ministère1, c’est un soulagement de recevoir occasionnellement un peu de reconnaissance. Pourtant, l’estime de l’Église peut ébranler la confiance d’un pasteur faible en un Christ fort.
1. Le problème de l’estime⤒🔗
Quelle est cette menace associée aux compliments? Au cours de mes années de ministère, j’ai appris que l’orgueil est toujours à l’affût. Tout compliment pour mes efforts, pour mes capacités ou pour mes réalisations provoque une réelle tentation de me glorifier. Le lundi, un pasteur peut avoir imploré Dieu de lui donner de la sagesse, de l’endurance ou de l’audace. Pourtant, quelques jours plus tard, il s’applaudit lui-même : « D’après ce que tout le monde a dit, ce fut un sermon réussi grâce à mon exégèse perspicace et à mon discours percutant. » Ou encore : « Les anciens ont été très satisfaits de la façon dont j’ai dirigé cette réunion difficile. » Dieu est mentionné en note de bas de page, alors que l’acteur principal est le pasteur.
Parce que les éloges des autres nourrissent notre orgueil, les compliments peuvent créer une dépendance. Félicité une fois pour un culte puissant, célébré deux fois pour son accessibilité, un pasteur peut se retrouver à avoir toujours besoin d’en entendre plus. Le désir de recevoir des éloges n’est jamais satisfait, et c’est une faim des plus désagréables.
Ce problème est aggravé par le caractère changeant de nos humeurs. Le sentiment d’être apprécié est désespérément subjectif. Un pasteur peut se sentir aimé et choyé pendant quelques semaines, mais il ne se fonde que sur une poignée de commentaires positifs. Deux mois plus tard, il peut conclure avec amertume qu’il est considéré comme acquis. Le fait est que, si un pasteur est à l’écoute de compliments, il les entendra probablement. Si ses oreilles sont ouvertes à la critique, il la détectera probablement, intentionnellement ou non. Encore une fois, l’approbation des autres peut devenir une idole désespérée, nous rendant toujours avides de plus d’éloges, de compliments et de reconnaissance.
2. Le modèle d’humilité de Paul←⤒🔗
Dans 2 Corinthiens, Paul nous enseigne, ici aussi, de nombreuses leçons précieuses pour le ministère. En tant que pasteur adjoint de l’Église de Corinthe, il avait été fortement critiqué. Les compliments étaient rares. Pourtant, sa réaction à la critique peut nous apprendre à gérer les éloges. Lorsque Paul a été critiqué pour son attitude faible et sa prédication peu inspirante, une simple réponse s’imposait d’elle-même : il lui suffisait d’envoyer aux Corinthiens son curriculum vitae. Après tout, Paul avait des références impeccables en tant qu’érudit juif. Il avait fondé des Églises et accompli des miracles. Il avait même vu le Sauveur ressuscité et avait eu des visions de choses inexprimables. Pourtant, il ne s’est glorifié de rien de tout cela. Au contraire, il a dit : « De moi-même je ne me glorifierai pas, sinon de mes faiblesses » (2 Co 12.5).
Pourquoi Paul s’est-il glorifié de ses souffrances et de ses défauts? Pour que l’attention ne se porte pas sur lui, mais sur le Seigneur : sur sa grâce, sur sa force et sur ses grandes œuvres. Paul était très réticent à se glorifier des réalisations humaines : « Je m’en abstiens, de peur que quelqu’un ne m’estime au-dessus de ce qu’il voit ou entend de moi » (2 Co 12.6).
Cette déclaration est tellement contre-culturelle que l’on pourrait penser que Paul n’était pas sincère : il ne voulait pas que les gens le considèrent avec trop d’estime! C’est précisément le contraire de ce que nous craignons si souvent. Mais la principale préoccupation de Paul était que les pécheurs ne regardent que vers le Christ et non vers lui. C’est là une leçon difficile pour le pasteur complimenté et critiqué : la gloire du Christ est toujours plus importante que notre prestige. L’honneur du Christ est toujours plus important que notre propre réputation.
Une vérité clé qui ressort de la réponse de Paul à ses critiques est qu’il exerçait son ministère sous le regard de Dieu. Il se plaçait délibérément, lui et son travail, devant l’évaluation de Dieu : « C’est devant Dieu, en Christ, que nous parlons, et tout cela, bien-aimés, pour votre édification » (2 Co 12.19). Cette conscience d’exercer son ministère sous le regard de Dieu signifie qu’il ne se préoccupait pas outre mesure des jugements d’autrui. Comme Paul l’avait déjà écrit aux Corinthiens : « Celui qui me juge, c’est le Seigneur » (1 Co 4.4).
L’évaluation de Dieu pèse infiniment plus lourd que toute opinion humaine, qu’elle soit positive ou négative. Ai-je été fidèle dans le ministère de l’Évangile qu’il m’a confié?
3. Se glorifier dans le Seigneur←⤒🔗
Le fait de se concentrer sur le désir de plaire au Seigneur libère les pasteurs de la faim lancinante de recevoir des éloges. Certes, il est bon que Dieu utilise des personnes pour encourager le pasteur dans sa tâche. Il peut être utile de savoir que les sermons du dimanche communiquent efficacement une grâce. Il convient toutefois de se souvenir de la sagesse de Proverbes 27.21 : « Le creuset est pour l’argent et le four est pour l’or, mais un homme est jugé d’après sa renommée. »
Les pasteurs — comme tout un chacun — sont mis à l’épreuve par les éloges qu’ils reçoivent. Qu’est-ce que l’estime des autres révèle de mon cœur? Ces compliments mettront-ils à jour mon orgueil? Ou bien suis-je poussé à l’humilité produite par l’Esprit Saint et à la gratitude envers le Dieu qui me donne la force de servir?
Paul enseigne que les pasteurs doivent se glorifier uniquement en Jésus-Christ et dans son Évangile. Jérémie enseigne la même chose lorsqu’il dit qu’Israël devait se glorifier non des choses extérieures, mais de Dieu lui-même.
« Ainsi parle l'Éternel : Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, que le fort ne se glorifie pas de sa force, que le riche ne se glorifie pas de sa richesse, mais que celui qui veut se glorifier se glorifie d'avoir de l'intelligence et de me connaître, de savoir que je suis l'Éternel, qui exerce la bienveillance, le droit et la justice sur la terre; car c'est à cela que je prends plaisir, oracle de l'Éternel » (Jr 9.22-23).
Au lieu d’assimiler les compliments à la réussite ministérielle, voici la seule chose dont nous devrions nous glorifier : connaître la graudeur du Seigneur. Alors que nous exerçons notre ministère dans toute notre fragilité, nous sommes reconnaissants au Christ de nous utiliser pour bénir son peuple. Les paroles de Paul dans 1 Corinthiens 3.7 sont une source d’humilité pour tout pasteur : « Ainsi, ce n’est pas celui qui plante qui est quelque chose ni celui qui arrose, mais Dieu qui fait croître. »
1. Voir mon article La critique qui démolit ou qui bénit.