Cet article sur Genèse 6.3 a pour sujet la durée de 120 ans annoncée par Dieu au temps de Noé, qui n'indique pas une longévité plus courte de l'homme, mais un sursis de 120 ans donné à l'humanité avant le jugement par le déluge.

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Genèse 6 - Ses jours seront de 120 ans

« Alors l’Éternel dit : Mon Esprit ne restera pas toujours dans l’homme, car celui-ci n’est que chair, et ses jours seront de 120 ans. »

Genèse 6.3

Quelle est la signification de Genèse 6.3 et des 120 ans annoncés dans ce texte? Plusieurs pensent que ce texte est à propos de la longévité humaine. Au temps de Noé, Dieu aurait annoncé qu’à partir de ce moment de l’histoire la durée de vie de l’homme allait être diminuée à 120 ans. D’autres comprennent ce texte dans un autre sens. Ils pensent plutôt que Dieu a décrété, non pas de réduire la longévité de chaque homme à 120 ans, mais plutôt d’accorder un sursis de 120 ans à toute l’humanité qui vivait à cette époque, avant que le jugement divin ne vienne s’abattre sur la terre au moyen du déluge. C’est cette deuxième option qui semble exact. En voici les trois raisons principales.

1. Une longévité de 120 ans ne correspond pas aux données bibliques🔗

La décision de réduire la longévité humaine à 120 ans aurait pu être appliquée de manière progressive, d’environ 900 ans avant le déluge, puis en la diminuant petit à petit jusqu’à 120 ans. Toutefois, le texte ne dit pas cela comme tel, il ne parle que de 120 ans. « Ses jours seront de 120 ans » (et non « ses jours iront progressivement en diminuant jusqu’à 120 ans »). Quand nous examinons la liste des patriarches présentée en Genèse 11 et dans le reste de la Genèse, nous nous apercevons que tous ont vécu plus vieux que cela (438, 433, 464, 239, 230, 148, 205, 175, 180 et 147 ans), excepté le dernier personnage de la Genèse, Joseph, qui s’est rendu à « seulement » 110 ans.

Évidemment, nous voyons une diminution à peu près constante de la longévité, mais il aura tout de même fallu plus de 500 ans après le déluge pour parvenir à un âge d’environ 120 ans. On pourrait s’attendre, après cette longue pente descendante, à ce que le plateau des 120 ans dure au moins quelques centaines d’années… Dans la généalogie de Moïse et d’Aaron, nous avons Lévi, fils de Jacob, 137 ans, Qehat, fils de Lévi, 133 ans, et Amram, fils de Qehat, 137 ans (Ex 6.16-20). Cette durée de vie se maintient donc encore à une quinzaine d’années au-dessus de 120 ans pendant quelques générations. Puis Moïse (qui a écrit la Genèse) est le seul dans la Bible, semble-t-il, qui soit mort précisément à 120 ans (Dt 34.7). Josué maintient à peu près le cap avec ses 110 ans (Jos 24.29). Il est toutefois intéressant de noter que même Moïse a estimé qu’en son temps l’espérance de vie des plus robustes s’élevait au maximum à 70 ou 80 ans, comme il le dit lui-même au Psaume 90.10 : « Le nombre de nos années s’élève à 70 ans et, si nous sommes vigoureux, à 80 ans. »

De la période des Juges, nous en savons peu. Puis, Éli le prêtre, « les yeux fixes et ne pouvant plus voir », meurt à 98 ans (1 S 4.15). David, le roi selon le cœur de Dieu, a vécu seulement 70 ans (2 S 5.4). Il est dit de lui qu’il était « vieux, avancé en âge » (1 R 1.1). À la même époque, il est dit de Barzillaï qu’il « était très vieux, âgé de 80 ans » (2 S 19.33). Par la suite, les choses ne s’arrangent pas puisque les rois règnent au maximum pendant 30 à 40 ans, ce qui situe leur durée de vie pas plus longue que leur ancêtre David. C’est donc dire qu’après la période patriarcale, l’espérance de vie a continué de baisser en dessous de la barre des 120 ans de façon significative. Il est bien difficile de déterminer une période dans l’histoire biblique où l’espérance de vie se serait stabilisée autour d’un plateau de 120 ans. Nous ne trouvons pas non plus dans la Bible un deuxième décret divin qui aurait modifié celui de Genèse 6 pour déterminer une nouvelle longévité autour de 70 ans. Cela soulève inévitablement la question de savoir si Dieu était vraiment sérieux lorsqu’il a avancé le chiffre de 120 ans… À moins que le texte de Genèse 6.3 ait une autre signification!

2. Dans le contexte immédiat, le déluge est annoncé🔗

Le contexte immédiat de Genèse 6.3, en Genèse 6.5-7, contient l’annonce, non pas d’une diminution d’espérance de vie individuelle, mais d’un jugement universel où Dieu avertit qu’il effacera de la surface du sol tout être vivant au moyen du déluge. Il est bien sûr possible que Dieu ait décrété deux jugements distincts, mais il ne faut pas non plus exclure la possibilité d’un seul et même jugement exprimé de deux façons différentes, surtout lorsque ceux visés par ce jugement sont désignés par le même mot. Nous avons d’une part cette annonce : « Mon Esprit ne restera pas toujours dans l’homme [adam]… » (Gn 6.3). Nous avons d’autre part cette constatation :

« L’Éternel vit que la méchanceté de l’homme [adam] était grande sur terre. […] L’Éternel regretta d’avoir fait l’homme [adam] sur la terre. […] L’Éternel dit : J’effacerai de la surface du sol l’homme [adam] que j’ai créé… » (Gn 6.5-7).

Ce lien entre le verset 3 et les versets 5 à 7 semble confirmé par l’expression « surface du sol » qui se retrouve au verset 1 et au verset 7 : « Lorsque les hommes eurent commencé à se multiplier à la surface du sol… » (Gn 6.1) est répondu par « L’Éternel dit : J’effacerai de la surface du sol l’homme que j’ai créé… » (Gn 6.7).

3. Dieu annonce un jugement nouveau, il décide d’ôter la vie aux hommes🔗

Le verset 3 de Genèse 6 semble difficile à expliquer si l’on soutient l’idée d’une longévité individuelle réduite à 120 ans. Le sens du verbe dans ce verset n’est pas certain. Il peut se traduire par « rester » ou « demeurer » (l’Esprit de Dieu ne va pas toujours rester dans l’homme pour lui donner la vie), ou encore par « contester » ou « argumenter » (l’Esprit de Dieu ne va pas toujours argumenter avec l’homme pour que celui-ci ait l’occasion de parvenir à la repentance). Quoi qu’il en soit, dans un cas comme dans l’autre, Dieu a résolu de faire mourir « l’homme », mais avec un délai, un sursis (ou une longévité plus courte?) de 120 ans.

Le problème est de comprendre le sens de « toujours ». L’Esprit de Dieu ne va pas toujours rester dans l’homme ou ne va pas toujours argumenter avec lui pour le garder en vie. Cette parole de Dieu annonce qu’il y aura une différence entre avant et après la mise en application de cette décision. Si la différence est uniquement dans l’espérance de vie individuelle de l’homme, comment comprendre ce « pas toujours »? Avant ce décret, même Mathusalem, le plus vieux des patriarches, a fini par perdre la vie (Gn 5.26-27). C’était seulement une question de temps. Dieu a pourtant fini par lui ôter la vie. Il en est de même de tous les patriarches. En Genèse 5, Moïse a pris la peine de nous répéter pour chacun des patriarches : « puis il mourut » (à l’exception d’Hénoc qui fut enlevé). La décision divine d’ôter la vie (« pas toujours ») avait déjà été annoncée à Adam et Ève : « … et tu retourneras à la poussière » (Gn 3.19). Caïn est mort il y a bien longtemps. Adam est mort 726 ans avant le déluge; Seth est mort 614 ans avant le déluge, Énoch est décédé 516 ans avant le déluge, etc. Bien des gens sont morts avant que Dieu prononce cette parole en Genèse 6:3. Il est bien difficile de comprendre, pour des gens qui mouraient, même à 950 ans, que l’on puisse dire que l’Esprit de Dieu demeurait (ou argumentait) toujours en eux.

Le « pas toujours » se comprend mieux si Dieu annonce ici un jugement réellement nouveau dans l’histoire, c’est-à-dire un jugement universel où Dieu allait frapper toute l’humanité en même temps, lors du déluge (avec l’exception de Noé et de sa famille). Depuis le début de l’histoire, Dieu n’avait pas encore ôté la vie de cette manière. Dieu avait toujours préservé la vie de la race humaine prise globalement et les avait laissés « se multiplier à la surface du sol » (Gn 6.1). Cependant, étant donné l’aggravation du péché, la situation n’allait « pas toujours » durer ainsi. Un nettoyage universel se préparait, il ne restait plus qu’un sursis de 120 ans à l’humanité, après quoi Dieu allait ôter son Esprit dans l’homme, ou encore après quoi Dieu allait cesser de contester avec l’homme. D’où l’annonce prévoyant qu’il allait « effacer de la surface du sol » (Gn 6:7, même expression qu’au verset 1) l’homme qu’il avait créé (à l’exception bien sûr de Noé et de ses descendants avec qui l’histoire continuera).

Pour conclure, il devient clair que la génération du temps de Noé a obtenu un sursis de 120 ans pour se préparer au déluge. Cependant, cette génération n’en a pas profité pour se repentir. Nous pouvons alors comprendre que, pour le retour du Seigneur et le jugement final qui vient bientôt, Dieu n’a pas pris la peine de nous révéler la durée précise qui reste avant ce grand jour. D’autant plus que nous n’avons pas besoin, comme Noé, d’un certain nombre d’années pour construire notre arche salutaire. Cette Arche du salut c’est Jésus-Christ et son œuvre de salut. Elle est déjà toute prête, pourvu que nous y entrions avant la catastrophe. Tout ce que la génération actuelle connaît de cet avenir, c’est l’avertissement solennel que nous leur proclamons. Ne soyons pas surpris de ce que les gens n’y prêtent pas plus attention qu’au temps de Noé. Heureux sommes-nous d’avoir la promesse, non pas d’une longue vie sur terre, mais de la vie éternelle!