Cet article sur la Confession des Pays-Bas (article 27) a pour sujet les aspects visibles et invisibles de l'Église, sa construction depuis le commencement du monde, aujourd'hui et jusqu'à la fin.

Source: La raison de notre espérance. 5 pages.

Les aspects visibles et invisibles de l’Église

L’Église catholique

« Nous croyons et confessons une seule Église catholique ou universelle. Cette Église est une sainte communauté et assemblée des vrais croyants chrétiens, qui attendent tout leur salut de Jésus‑Christ, sont lavés par son sang et sont sanctifiés et scellés par le Saint‑Esprit.

Cette Église existe depuis le commencement du monde et continuera d’exister jusqu’à la fin, car Christ est un Roi éternel qui ne peut pas être sans sujets. Cette sainte Église est préservée par Dieu contre la rage du monde entier, bien que pour quelque temps elle puisse sembler bien petite et pratiquement éteinte aux yeux des hommes. C’est ainsi qu’à l’époque si dangereuse du règne d’Achab, le Seigneur s’est réservé sept mille hommes qui n’avaient pas plié le genou devant Baal (1 R 19.18).

De plus, cette sainte Église n’est pas restreinte, attachée ou limitée à un certain endroit ou à certaines personnes, mais elle est répandue et dispersée dans le monde entier. Elle est toutefois jointe et unie de cœur et de volonté, en un même Esprit, par la puissance de la foi. »

Confession de foi des Pays-Bas, article 27

  1. Une seule Église avec des aspects visibles et invisibles
  2. L’Église en construction depuis le commencement du monde
  3. L’Église en construction aujourd’hui
  4. L’Église en construction jusqu’au dernier jour

1. Une seule Église avec des aspects visibles et invisibles🔗

Est-il correct de parler d’une Église visible et d’une Église invisible? La Confession de foi des Pays-Bas ne fait pas une telle distinction, pas plus que la Confession de La Rochelle ni le Catéchisme de Heidelberg. Par contre, Calvin, dans son Institution chrétienne, fait mention de l’Église invisible et de l’Église visible (IV.I.2; IV.I.7-8). Il en est également question dans son Catéchisme de Genève (Q&R 99), dans la Confession écossaise (art. 16) et dans la Confession de Westminster (art. 25.1-2).

La notion d’Église invisible est très utile pour souligner le fait que Dieu seul a le privilège de connaître ses élus. D’une part, l’Église instituée peut contenir des hypocrites, d’autre part, elle ne contient pas nécessairement tous les élus.

Cependant, cette distinction entre Église visible et Église invisible — langage qui n’est pas utilisé dans la Bible — a souvent été mal comprise, jusqu’à devenir la cause de beaucoup d’erreurs et de confusions. On s’en sert souvent comme d’un prétexte pour dire que devenir membre de l’Église visible est sans grande importance. Il suffirait d’appartenir à l’Église invisible! On s’en sert également pour justifier l’existence de nombreuses confessions et divisions au sein de l’Église universelle. L’Église invisible serait l’Église idéale et abstraite, située au ciel dans une sorte de repos statique, tandis que les Églises visibles seraient engagées dans la dynamique changeante de l’histoire terrestre et seraient toutes des manifestations approximatives et légitimes de l’Église idéale.

De telles idées sont contraires à la Parole de Dieu qui nous commande de nous joindre à l’assemblée fidèle des croyants et qui ne justifie d’aucune manière la prolifération de ce que plusieurs appellent des « dénominations1 ». Ces distorsions s’éloignent beaucoup de ce que Calvin et les confessions citées plus haut voulaient dire par Église visible et Église invisible.

Bien que cette distinction soit utile, nous devons l’employer avec beaucoup de prudence. Après tout, la Bible nous enseigne que Dieu possède un seul peuple, une seule famille, et que Jésus-Christ est fiancé à une seule Épouse et qu’il est le Chef d’une seule Église. « Il y a un seul corps » (Ép 4.4). Voilà pourquoi l’article 27 de la Confession des Pays-Bas déclare : « Nous croyons et confessons une seule Église catholique ou universelle. » Une seule! Nous le confessons à la suite du Symbole de Nicée-Constantinople : « Je crois en l’Église, une, sainte, catholique et apostolique. » Pour éviter toute confusion, il serait donc préférable de dire que cette Église unique comporte des aspects visibles et des aspects invisibles.

2. L’Église en construction depuis le commencement du monde🔗

On peut comparer l’Église de Jésus-Christ à un projet en construction. Dieu est le sage Architecte qui a préparé depuis toute éternité des plans et devis. Jésus-Christ est le grand constructeur qui met ces plans à exécution par la puissance de sa Parole et de son Saint-Esprit. « Je bâtirai mon Église » (Mt 16.18). Jésus en parlait au futur parce que le fondement de la construction n’était pas encore posé, à savoir sa mort, sa résurrection, sa montée au ciel dans son règne et l’envoi de son Esprit. Cependant, nous savons qu’il avait déjà commencé à construire son Église dès le commencement du monde. « Cette Église existe depuis le commencement du monde et continuera d’exister jusqu’à la fin » (art. 27). Dans l’Ancien Testament, son Église était construite sur ce fondement à venir promis d’avance. Cette Église qui « est une sainte communauté et assemblée des vrais croyants chrétiens » inclut donc tous les croyants de l’Ancien Testament, Abel, Hénoc, Noé, Abraham, David et les autres. Elle s’est manifestée visiblement par le rassemblement concret que Dieu en faisait.

Cependant, à certaines époques, elle était très difficile à distinguer aux yeux des hommes.

« Cette sainte Église est préservée par Dieu contre la rage du monde entier, bien que pour quelque temps elle puisse sembler bien petite et pratiquement éteinte aux yeux des hommes » (art. 27).

Le prophète Élie lui-même, après avoir déployé son zèle à renverser les autels de Baal et à essayer de ramener le peuple qui avait abandonné l’alliance de Dieu, était découragé de voir qu’il était resté lui seul (1 R 19.10,14). Il a fallu que Dieu lui révèle qu’il s’est gardé un reste fidèle.

« C’est ainsi qu’à l’époque si dangereuse du règne d’Achab, le Seigneur s’est réservé sept mille hommes qui n’avaient pas plié le genou devant Baal (1 R 19.18) » (art. 27).

Dieu s’est toujours gardé un reste fidèle, même durant les périodes les plus sombres de l’histoire où l’Église véritable devenait très difficile à percevoir aux yeux des hommes.

On peut également dire que l’Église de Jésus-Christ ne nous est pas pleinement visible du fait qu’elle réunit tous les croyants du passé qui sont décédés. Nous connaissons plusieurs de ces croyants, mais beaucoup d’autres qui sont maintenant entrés dans la gloire nous sont inconnus.

3. L’Église en construction aujourd’hui🔗

Le Seigneur continue aujourd’hui de rassembler et de construire son Église.

« Cette Église est une sainte communauté et assemblée des vrais croyants chrétiens, qui attendent tout leur salut de Jésus‑Christ, sont lavés par son sang et sont sanctifiés et scellés par le Saint‑Esprit » (art. 27).

Puisque c’est une communauté de vrais croyants, l’Église ne peut pas être totalement invisible. Elle se rassemble pour écouter la prédication de la Parole, recevoir les sacrements, prier ensemble et vivre la communion fraternelle. En même temps, notre place dans l’Église n’est pas déterminée par le « clergé », les prêtres ou l’institution, mais par notre foi en Jésus-Christ. Le Seigneur rassemble dans son Église tous les vrais croyants qui vivent une foi vivante en communion avec lui. La foi est une dimension invisible à l’œil. Le sang du Christ qui nous lave de nos péchés et le Saint-Esprit qui nous sanctifie et par lequel nous avons été scellés (Ép 4.30) sont des réalités que nul ne peut observer aujourd’hui. En même temps, cette œuvre secrète et cachée dans nos cœurs produit des fruits qui se manifestent visiblement dans nos vies personnelles et dans l’œuvre d’édification de l’Église.

L’apôtre Paul nous présente cette double réalité côte à côte :

« La solide base posée par Dieu subsiste, scellée par ces paroles : Le Seigneur connaît ceux qui lui appartiennent; et : Quiconque prononce le nom du Seigneur, qu’il se détourne de l’injustice » (2 Tm 2.19).

D’une part, il faut laisser à Dieu seul le privilège de connaître son Église, dont le fondement est son élection éternelle. D’autre part, par la grâce de Dieu, nous avons la joie et la responsabilité de porter des fruits de justice et de contribuer à construire l’Église du Seigneur sur son solide fondement. De même, Paul dit d’abord qu’il y a un seul corps, un seul Esprit, une seule foi (Ép 4.4-5), puis il ajoute que les apôtres, les pasteurs et les enseignants ont été donnés « pour le perfectionnement des saints, en vue de l’œuvre du service et de l’édification du corps du Christ » (Ép 4.11-13). Nous avons la responsabilité de contribuer à cette construction dans l’amour, la foi et l’espérance.

Aujourd’hui, nous ne pouvons pas voir l’Église dans sa totalité, d’abord parce qu’elle est dispersée sur toute la terre, mais aussi parce c’est encore un projet en construction qui a besoin de grandir jusqu’à sa pleine mesure. Il y a de vraies brebis qui ne sont pas dans l’Église, soit parce qu’elles ont désobéi à la voix du bon Berger et se sont éloignées du troupeau, soit parce qu’elles n’ont pas encore répondu à l’obligation de se joindre à l’Église (art. 28). Il y a aussi des hypocrites dans l’Église qui sont mélangés aux croyants (art. 29). Dieu seul connaît vraiment les siens. L’essentiel consiste toutefois à dire que l’Église est avant tout le rassemblement de ceux qui croient de tout cœur en Jésus-Christ leur Sauveur et qu’ils attendent tout leur salut de lui seul (art. 27).

4. L’Église en construction jusqu’au dernier jour🔗

L’Église est un projet en construction qui va se poursuivre jusqu’au retour de notre Sauveur. Nous ne pourrons pas totalement visualiser la splendeur de cette Église tant que sa construction ne sera pas terminée. En faisant miroiter cet avenir glorieux, Jésus-Christ lui-même établit une distinction entre les élus et le rassemblement de son Église. Il compare l’Église à un troupeau.

« J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là, il faut aussi que je les amène; elles entendront ma voix, et il y aura un seul troupeau, un seul berger » (Jn 10.16).

D’après le Seigneur, il y a donc des élus qui sont encore en dehors de son Église, des personnes qui sont séparées de l’assemblée des vrais croyants pour diverses raisons. L’œuvre de rassemblement accomplie par Jésus-Christ est encore incomplète.

Le Seigneur Jésus continue de jour en jour de faire ce travail pour qu’un jour son Église soit complète. Entre-temps, il y a des éléments appartenant à cette construction qui ne sont pas encore à leur place. Pour reprendre l’analogie de la construction, il y a des briques sur la palette qui ne sont pas posées, des armoires qui ne sont pas fabriquées et même des arbres qui n’ont pas encore poussé pour pouvoir en faire des planches et construire des murs. « Et vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle » (1 Pi 2.5). Le processus de construction se continue progressivement. Voilà pourquoi Jésus parle de son troupeau au futur. « Il y aura un seul troupeau, un seul berger » (Jn 10.16). Quand le Christ reviendra au dernier jour, tous les élus seront rassemblés en un même corps, dans une seule et même Église. Ils seront tous parvenus ensemble à la perfection.

Le Seigneur travaille aujourd’hui à sanctifier son épouse « pour faire paraître devant lui cette Église glorieuse, sans tache, ni ride, ni rien de semblable, mais sainte et sans défaut » (Ép 5.27). Nous ne voyons pas encore le rassemblement complet de l’Église ni sa gloire radieuse. Nous avons toutefois la Parole de Dieu et nous croyons ce qu’elle dit concernant l’Église. « Nous croyons et confessons une seule Église. » Croyons fermement que Dieu continue de rassembler son peuple et travaillons avec joie, zèle et confiance à la construction de son Église et au rassemblement de tous les siens avec les divers moyens qu’il met à notre disposition pour l’édification de son peuple. Au dernier jour, nous serons tous rassemblés en un seul troupeau qui sera rendu complet et parfait, pour la plus grande gloire de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ.

Note

1. Terme emprunté de l’anglais « denomination » improprement utilisé en français (« faux ami ») pour parler d’Églises ou de confessions religieuses, car ce mot en français signifie l’action de nommer, la désignation ou l’appellation.