Cet article sur Jacques 1.26-27 a pour sujet la vraie religion qui consiste à exercer un service de miséricorde envers les veuves, les orphelins et les affligés, par reconnaissance pour la miséricorde de Jésus envers nous.

Source: Grandir en maturité - Méditations sur l'épître de Jacques. 3 pages.

Jacques 1 - La vraie religion

« Si quelqu’un pense être religieux, sans tenir sa langue en bride, mais en trompant son cœur, la religion de cet homme est vaine. La religion pure et sans tache, devant Dieu le Père, consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions, et à se garder des souillures du monde. »

Jacques 1.26-27

Qui est religieux de nos jours? La question étonnera, puisque depuis au moins le début du siècle on entend parler de la totale sécularisation de nos sociétés occidentales, quoique, depuis peu, on parle aussi de la résurgence de la religion, du retour du religieux et du spirituel, mais sans rapport avec la religion dont Jacques nous entretient. Je ne m’aventurerai pas à citer des données statistiques ou à faire l’évaluation de la religion chrétienne et des Églises en me basant sur les analyses sociologiques ou des articles journalistiques.

Il est fort possible que ceux qui actuellement refusent de se dire religieux ne soient, au fond, que des grands déçus de la religion. Il se pourrait que certains représentants de la foi chrétienne ne soient pas à la hauteur de la tâche et que les paroles prononcées, les prédications proclamées, ainsi que nombre de discours traitant de la religion chrétienne aient été détournés. Combien, nous autres pasteurs, évangélistes et autres membres du clergé devrions-nous être attentifs à la manière dont nous parlons et surtout, nous comportons!

Mais, cette hypothèse acceptée, il est certain que nos contemporains ne s’intéressent pas vraiment à la religion qui n’entre pas dans leurs préoccupations quotidiennes. Presque tous les jeunes, dit-on, ne pensent qu’à cette vie. Que la religion les ait déçus ou même les ait trompés n’est pas forcément le facteur décisif de leur désaffection.

Est-ce dire que saint Jacques ne nous encourage pas à nous considérer comme religieux? Il n’interdit nullement de parler de notre foi et de témoigner du Dieu qu’on a rencontré et de Jésus-Christ, devenu le Seigneur de nos vies. Il serait grave, voire hypocrite, de croire et de ne jamais faire allusion à ce sujet, d’avoir honte de l’Évangile, de peur de ne pas être parmi ceux qui vont dans le sens de l’histoire, qui se veulent modernes… Au contraire, à chaque occasion nous témoignerons de la lumière d’en haut qui nous a éclairés et qui a transformé notre vision des choses sur nous-mêmes, sur le monde, sur Dieu. Non, je n’ai pas honte de dire aujourd’hui, en pleine sécularisation, indifférence ou infraculture parareligieuse, que je suis un être religieux, chrétien. Non parce que je suis pasteur ou évangéliste, mais simplement parce que je suis devenu enfant de Dieu.

Saint Jacques nous avertit de faire bien attention de ne pas tromper notre cœur lorsque nous faisons notre confession de foi. Car la Parole de Dieu doit s’emparer de tout notre être, ainsi que nous l’avons vu précédemment. L’être tout entier, même le plus intime, doit être atteint et transformé, si vraiment nous écoutons la Parole de Dieu comme telle et non comme parole d’hommes. Cet homme intérieur, ce moi qui forme notre personnalité et dont la Parole de Dieu doit s’emparer pour que tout aille bien, est si souvent réfractaire à cette Parole! Le moi refuse cette prise en charge totale par Dieu. On a beau lire la Bible, fréquenter les cultes, écouter les prédications, on reste intérieurement insensibles, indifférents, fermés à tout ce qu’on entend et lit. Cette insensibilité intérieure, la volonté farouche de rester indépendants, l’opposition à la Parole de Dieu, voilà l’impiété.

Cette impiété se manifeste souvent en nos paroles, lorsque nous ne tenons pas notre langue en bride. Nous donnons si souvent l’évidence que nous n’avons pas renoncé au vieil homme, à sa nature corrompue et rebelle, que nous ne nous sommes pas confiés entre les mains de Dieu… Le Christ n’est pas devenu le maître de toutes les fibres de notre être. Jacques nous exhorte : Prenez garde à ce que vous dites, veillez à votre langue, à vos paroles… Car au moment où nous parlons, nous manifestons aussi notre volonté de nous imposer à autrui. Nous méprisons le frère, nous nous moquons du faible, nous nous exprimons avec dureté envers le prochain.

Or si nous prenons garde à nous et à de telles paroles, nous comprendrons ce que Jacques dit au sujet de « la religion pure et sans tache qui consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions et à se garder des souillures du monde ». Jacques nous présente tout un programme religieux! Après avoir dénoncé la fausse religion, il nous décrit la vraie.

Mais que signifie en fait le mot « religion »? Pour le comprendre, il faut faire abstraction de nous-mêmes et ne penser qu’à ce que Dieu lui-même a accompli pour nous : Tout d’abord et essentiellement, ce grand élan de Dieu le Père jusqu’à nous, le fait qu’il nous ait envoyé son Fils et qu’il l’ait placé au milieu de nous pour devenir, en lui, notre Père. Ce n’est pas nous qui servons Dieu, c’est lui qui nous sert. En prenant la peine de se pencher sur nous, Dieu attend qu’à notre tour nous tournions nos regards vers lui. Et lorsque nous ne le faisons pas, notre piété ne se réalise pas. Mais Jacques nous dit que parfois, même en étant pieux, c’est nous-mêmes que nous servons, c’est à notre propre moi que nous confions la direction de notre vie, au lieu de nous en remettre à Dieu et de lui être soumis.

Or ce que nous n’arrivons pas à accomplir, Jésus l’a fait une fois pour toutes en notre faveur en offrant sa vie au Père en sacrifice pour nous. Il n’a pas recherché son propre intérêt ni sa propre gloire, comme nous le faisons si souvent, mais s’est offert comme victime expiatoire. Notre religion consiste donc à nous laisser entraîner par Jésus-Christ, à participer, reconnaissants et confus, au service que Dieu daigne accomplir pour nous. Nous devons donc laisser la Parole de Dieu nous annoncer ce service, accepter que Jésus-Christ nous serve à travers sa vie, mort, résurrection et intercession, et marcher sur ce nouveau chemin que Dieu met devant nous. Nous devons accepter que Dieu nous libère de « notre vaine manière de vivre » et accepter d’appartenir à Dieu qui nous a rachetés à un grand prix. C’est en cela que consiste notre religion « pure et sans tache ».

Une telle religion produit nécessairement des fruits dans notre vie. Et ces fruits sont notre décision de vivre de la miséricorde de Dieu, notre détermination de nous laisser servir par Dieu, notre volonté de nous répéter du matin au soir : « Je vis de la certitude que Dieu le Père a étendu sur moi sa main en Christ ». Ce premier pas m’oblige à devenir, à mon tour, miséricordieux, et à retrouver les orphelins et les veuves, les affligés, les éprouvés, les isolés, les méprisés et les abattus, qu’à notre tour nous devons entourer de notre miséricorde pour l’amour du Christ, qui s’est tourné vers nous. Je m’approcherai de ces hommes et de ces femmes en signe de reconnaissance pour la miséricorde dont j’ai été l’objet de la part de Dieu.

Enfin un dernier mot : Jacques ajoute que « nous devons nous garder des souillures du monde ». Or, il est tout à fait possible d’exercer la miséricorde, aider et donner, sans pour autant être en Christ, de le faire pour nous plaire à nous-mêmes, pour nous donner simplement bonne conscience… Parfois, cette « bonté sociale » n’est pas autre chose que le masque que met le vieil homme pour pouvoir se vanter. Pour parvenir « à la religion sans souillure », il faut renoncer à nous-mêmes.

On entend souvent dire qu’il est difficile aujourd’hui d’être un vrai chrétien. Je dirai qu’aujourd’hui Dieu nous donne de multiples occasions d’être des vrais chrétiens et d’exercer sa miséricorde; nous avons sous nos yeux tant de misère, tant de détresse! Or, Jésus-Christ nous attend dans la personne de tous ceux qui sont éprouvés. Les occasions de servir ne manquent pas… Il faut que, de nos jours, la tyrannie et la terreur ne soient pas les seules à se manifester. Il faut que se manifeste aussi la grande miséricorde du Christ qui a dit : « J’étais nu et vous m’avez vêtu; j’étais malade et vous m’avez visité; j’étais en prison et vous êtes venus vers moi » (Mt 25.36). Jésus nous appelle à la merveilleuse lumière de son Royaume. Il fait de nous les enfants du Père céleste, tout en faisant de nous, misérables, ses propres frères et sœurs.