Cet article sur le Psaume 107.8 a pour sujet la reconnaissance qui vient de la connaissance de Dieu et de son salut. Elle guérit des inquiétudes et de la tristesse et produit l'adoration, la joie et le courage.

Source: Récits d'hier pour la foi d'aujourd'hui. 4 pages.

Psaume 107 - Les bienfaits de la gratitude

« Qu’ils célèbrent l’Éternel pour sa bienveillance et pour ses merveilles en faveur des humains! »

Psaume 107.8

Connaissez-vous l’histoire de Matthieu Henry, le célèbre prédicateur britannique? Un soir où il avait été victime d’un vol, il se mit à prier :

« Je te remercie, Seigneur, parce que jamais auparavant je n’avais été volé. Je te remercie parce que les voleurs ont pris ma bourse, mais m’ont laissé la vie sauve. Je te rends grâces aussi de ce que s’ils ont emporté tout mon argent, ce n’était pas beaucoup. Enfin, je te remercie, Seigneur, de ce que ce n’est pas moi qui ai volé! »

Il n’y a pas que l’humour britannique à admirer dans cette anecdote; elle indique surtout le type d’homme que l’on est et le caractère chrétien qu’on a forgé. Tandis que la plupart des gens se seraient plaints amèrement en maudissant les voleurs, le ministre de la Parole de Dieu, lui, découvre toutes les raisons du monde pour rendre à Dieu une prière de reconnaissance et d’action de grâces.

Qui que soit l’auteur du Psaume 107, il devait ressembler à Henry. Le psalmiste brûlait, semble-t-il, d’impatience pour louer Dieu en sa qualité de témoin des bienfaits dont il comble les hommes, mais aussi en se rendant compte combien ces derniers sont avares et mesquins dans leurs sentiments de gratitude. Le psalmiste semble être fin observateur, et les cinq premiers versets ne sont qu’une complète révision de l’histoire de son peuple.

Plus loin, devenant un peu philosophe, il analyse la relation de cause à effet de la détresse humaine pour souligner plutôt la libération que Dieu accorde. Nous le voyons encore sous les traits du théologien; il observe les hommes pris au piège de la folie du péché. Là aussi, ils se trouvent débiteurs de Dieu, qui intervient pour les arracher à leur misère. Dans les versets suivants, comme s’il s’était placé au bord de la mer, il observe le mouvement des navires qui entrent au port; les mâts sont brisés, les marins sont encore malades de la mer, certains titubent et vacillent, mais le psalmiste sait qui les a arrachés à la tempête et leur a permis d’arriver à bon port.

Le reste de ce long Psaume nous rappelle le fin observateur en géologie : Dieu transforme le désert en jardin. Il devient aussi économiste en rappelant que c’est Dieu qui accorde les ressources. Il est presque urbaniste et relève que c’est Dieu qui construit les cités. Il semble jouer le rôle de l’anthropologue en rappelant que c’est Dieu qui fonde les foyers. Et ainsi, tout ce beau poème est dominé par les notes de la reconnaissance. Qu’on loue le Seigneur pour ses bontés et faveurs des hommes!

Si on lisait ce Psaume au hasard, on pourrait croire, bien à tort, que l’auteur plaint Dieu et se lamente sur son sort. C’est vrai qu’on y trouve exprimés quelques sentiments de tristesse. Qui peut nier que Dieu éprouve des émotions et se réjouit de notre louange? Imaginez un instant l’émotion de Jésus lorsque neuf des dix lépreux guéris par lui continuèrent leur chemin sans lui témoigner la moindre reconnaissance. « Et les neuf autres, où sont-ils? », demanda Jésus (Lc 17.17). Pourtant, quoique le Seigneur ait ressenti une peine bien légitime, nous croyons qu’il l’a ressentie davantage pour les hommes ingrats que pour lui-même. Lorsqu’il y a ingratitude, celui qui est perdant est surtout l’ingrat. Jamais Dieu. L’homme a besoin de dire sa reconnaissance bien plus que Dieu n’a besoin de la recevoir. N’accorde-t-il pas ses bienfaits autant aux justes qu’aux impies? Les méchants possèdent parfois d’énormes fortunes, tandis que les fidèles connaissent parfois la disette. Mais ce n’est pas le problème de Dieu; c’est le problème de l’homme.

Notre gratitude envers Dieu résulte de la connaissance exacte que nous avons de lui; elle est la mesure de la connaissance que nous avons de lui. « Comme ton nom, ô Dieu, ta louange retentit jusqu’aux extrémités de la terre », écrit un autre auteur des Psaumes (Ps 48.11). Si le nom de notre Dieu était « pygmée », notre reconnaissance envers lui serait infime, à peine un soupir imperceptible. Mais si, comme l’auteur du Psaume 107, nous devenons les témoins de la grâce de Dieu qui pénètre partout, nous commencerons chacune de nos journées par un culte de reconnaissance. Chaque jour sera une fête; chaque célébration de culte une cérémonie solennelle et joyeuse. D’abord, nous dirons : « Dieu est grand »; ensuite « qu’il soit grandement béni ».

La gratitude véritable est la bonne réponse à tout ce qui sape et ruine notre santé spirituelle. Il existe des sentiments, telles la tristesse ou l’amertume, la rancune ou la jalousie, qui nous abattent et nous dévorent. Nous ne devrions pas nous laisser gagner par des sentiments faisant obstacle à la louange.

La tristesse, elle, n’est pas l’ennemie de la grâce de Dieu. Jésus nous a montré par son exemple que verser des larmes n’est pas un mal. Parfois, la reconnaissance que nous faisons monter vers Dieu peut être inondée de nos larmes de croyants. Mais le reste, telles l’amertume ou la rancune, ne peut que nuire et même détruire. L’amertume ôte de nos lèvres un chant joyeux; la jalousie enlève toute possibilité de reconnaissance et elle mine notre santé morale et spirituelle. La colère nous dérobe toute vigueur, la cupidité est cause de perdition.

À moins que la reconnaissance ne marque notre existence, la louange ne transformera pas notre peine en chant d’allégresse. La gratitude apporte joie, mais aussi noblesse; elle enrichit notre personnalité. Ce n’est pas le noble qui est reconnaissant; c’est la reconnaissance qui forge un caractère noble. Ce ne sont pas nécessairement les gens heureux qui chantent des louanges; ce sont les cantiques de louange qui nous rendent heureux. L’adoration est génératrice de joie. Ce n’est pas tellement l’homme qui fait le chant; c’est le cantique qui fait l’homme. Pour nous libérer de la jalousie, de l’avidité ou de la cupidité, il suffit de commencer la journée par un hymne de reconnaissance. C’est encore la gratitude qui donne du courage pour l’avenir. Celui qui ne rumine que sur son passé se prépare des lendemains moroses. Notre idée du lendemain surgit de l’attitude que nous avons envers le passé. Israël aurait pu ruminer sur un désastre national, mais Myriam, la sœur de Moïse, prit le tambourin et se mit à danser pour l’exploit dont elle et son peuple avaient été à la fois les témoins et les bénéficiaires.

Ils savaient à présent que le Dieu qui les avait arrachés aux flots de la mer ne permettrait pas qu’ils soient ensevelis dans les sables du désert. Il y avait encore le passage du Jourdain à effectuer. Mais qu’est-ce que la traversée d’une rivière étroite quand ils avaient franchi l’étendue d’une mer redoutable? Les Philistins et autres ennemis les guettaient. Mais Dieu ne les avait-il pas défendus contre les Amalécites? Ainsi, quiconque loue Dieu pour le passé n’a aucune raison d’inquiétude et de crainte pour son avenir.

De même, rien ne peut nous inspirer une plus grande consécration à Dieu que notre dette de reconnaissance envers lui. L’engagement pour Dieu ne vient pas automatiquement parce que l’on a reçu un don de sa part. Un cadeau en soi ne procure pas nécessairement des amis. Combien de cadeaux ne sont que des échanges entre ennemis et adversaires! Il ne suffit pas de dire à l’athée : Voyez ce que Dieu a fait pour vous, convertissez-vous donc à lui! Il risque de vous répondre : Oui, je vis, mais uniquement pour maudire Dieu! Ce n’est pas le don, mais la gratitude pour le don qui inspire foi et obéissance.

Enfin, ne saurions-nous jamais sous-estimer la croix de Jésus-Christ comme facteur et source de reconnaissance? Un regard dans les profondeurs du péché dont le Christ nous a libérés, un regard sur la croix où le Sauveur a payé notre dette, devrait nous jeter à genoux avec un cœur débordant de reconnaissance. Tandis que le péché nous laisse dans le désespoir, Dieu, lui, envoie son Fils pour nous sauver. Le matin de Pâques, des hommes ont soudain vu, dans la joie et la reconnaissance, le chemin nouveau que le Christ a frayé pour eux par sa glorieuse résurrection.

Nous avons de multiples raisons d’être reconnaissants. Notre existence en est déjà une. Mais la source principale en restera le salut que le Fils de Dieu nous a acquis par sa mort et sa résurrection. Ce n’est qu’aux pieds de la croix que nous pourrons prier : « Mon âme, bénis l’Éternel, que tout en moi bénisse son saint nom » (Ps 103.1).

Il se pourrait que très peu de raisons apparentes nous incitent à exprimer des sentiments de reconnaissance. La gratitude ne vient pas aisément. Elle n’est pas l’apanage des gens prospères. Lorsqu’on se souvient d’un cher disparu, d’une âme qui souffre clouée sur un lit de maladie, d’un avenir incertain, du travail instable et de tant d’autres soucis, il n’existe pas de terrain naturel pour exprimer à Dieu toute notre joie et notre reconnaissance.

Mais le psalmiste nous invite et nous presse à la reconnaissance. Que les hommes louent Dieu, écrit-il. Pensons à Dieu et à son action merveilleuse en océanographie, en géologie, en anthropologie, en philosophie, en théologie… Nous trouverons assez de raisons pour le louer. Et puis, n’avons-nous pas une raison toute suffisante dans le pardon de nos offenses? Nous écouterons encore le psalmiste dans sa conclusion : « Que celui qui est sage prenne garde à ces choses et comprenne les actes bienveillants de l’Éternel » (Ps 107.43).