Cet article sur la question 78 du Catéchisme de Heidelberg a pour sujet la sainte Cène qui n'est pas un rituel magique, à l'opposé de la messe avec la transsubstantiation venant du Moyen Âge et qui prétend manipuler Dieu.

Source: Certitude et réconfort. 5 pages.

La sainte cène n’est pas un rituel magique

Le pain et le vin sont-ils « transsubstantiés » au corps et au sang de Jésus-Christ?

Non; mais comme, dans le baptême, l’eau n’est pas changée en sang de Jésus-Christ ou n’est pas la purification même de nos péchés, mais en est seulement signe divin et gage1, de même aussi dans la Cène le pain sacré ne devient pas le corps même de Jésus-Christ2, encore que, suivant la nature et l’usage des sacrements3, il soit appelé le corps du Christ4.

1. Ép 5.26; Tt 3.5.
2. Mt 26.26-29.
3. Gn 17.10-11; Ex 12.11-13,25-27; 1 Co 10.1-4; 1 Pi 3.21.
4. 1 Co 10.16-17; 1 Co 11.26-28.

Catéchisme de Heidelberg, Q&R 78

Quelles sont nos attentes lorsque nous venons participer à la sainte cène? Nous avons tous des attentes. Si nos attentes sont trop élevées, nous risquons d’être déçus. Une personne qui participe à la table du Seigneur pour la première fois pourrait retourner chez elle en se disant : « Ce n’était pas fameux, je n’ai rien ressenti. » Si par contre nos attentes sont trop petites, nous risquons de passer à côté de la richesse que le Seigneur veut nous offrir. Il est donc important de comprendre ce que la cène veut dire.

Les questions et réponses 78 et 79 du Catéchisme nous aident à répondre à cette question. D’une part, la question 78 nous rappelle ce que le pain et le vin ne sont pas. D’autre part, la question 79 nous dit ce que Jésus-Christ veut nous enseigner au moyen du pain et du vin. Il ne faut pas s’attendre à trop : la cène n’est pas un rituel magique. Il faut quand même s’attendre à beaucoup : la cène nous offre un don merveilleux. Nous verrons d’abord le premier volet, ce que la cène n’est pas, ce à quoi il ne faut pas s’attendre lorsque nous y participons. Dans un article suivant, nous verrons le volet positif, ce à quoi nous devrions nous attendre.

1. La cène n’est pas un rituel magique🔗

La question 78 vise à répondre à la doctrine catholique romaine de la transsubstantiation. Qu’est-ce que la transsubstantiation? C’est l’idée selon laquelle le pain serait transformé en corps matériel de Jésus et que le vin serait transformé en vrai sang de Jésus. La véritable substance de ce que nous mangeons ne serait plus du pain ni du vin, mais la chair humaine et le sang humain de Jésus-Christ. Le premier élément ressemble à s’y méprendre à du pain, le second possède toutes les qualités du vin, l’odeur, la texture, la composition chimique; ces éléments goûtent comme le pain et comme le vin, mais en réalité, ils ne seraient plus du pain ni du vin. Ils auraient été transsubstantiés.

Une telle idée est un non-sens. La substance changerait, mais les propriétés, elles, ne changeraient pas. Quand Dieu, en Égypte, a changé l’eau du Nil en sang, cette eau était devenue infecte et imbuvable! Quand Jésus a changé l’eau en vin aux noces de Cana, le vin nouveau ne goûtait certainement pas l’eau! La substance de l’eau avait changé et ses propriétés aussi! La sainte cène ne nous est pas donnée pour tromper nos sens, mais pour fortifier notre foi.

2. Jésus-Christ ne peut pas être manipulé🔗

Cette transformation du pain et du vin se produirait au moment même où le prêtre prononce les paroles de consécration des éléments. C’est triste à dire, mais la messe romaine est ni plus ni moins qu’un rituel magique. On prétend manipuler Dieu.

Le Christ est monté corporellement au ciel le jour de l’ascension, visiblement, devant ses disciples. L’ange a dit aux disciples : « Ce Jésus, qui a été enlevé au ciel du milieu de vous, reviendra de la même manière dont vous l’avez vu aller au ciel » (Ac 1.11). « De la même manière », c’est-à-dire dans son corps glorieux que tous reconnaîtront de leurs yeux. D’ici là, bien sûr, il se fait présent parmi nous par sa divinité et par son Esprit, mais dans son humanité il demeure au ciel jusqu’à son retour glorieux.

Les prêtres prétendent cependant pouvoir le faire descendre du ciel chaque fois qu’ils célèbrent la messe. Ils n’ont qu’à prononcer une formule magique et, hop!, il serait là, physiquement, avec nous, devant nos yeux, même s’il n’a pas du tout la même apparence que le jour de son ascension! Les prêtres auraient prétendument reçu le pouvoir de faire venir le Saint-Esprit pour manipuler Dieu et transformer de la matière inanimée, du pain et du vin, en un Jésus-Christ, Dieu et homme, prétendument vivant.

« Le pain et le vin sont-ils “transsubstantiés” au corps et au sang de Jésus-Christ? Non; mais comme, dans le baptême, l’eau n’est pas changée en sang de Jésus-Christ ou n’est pas la purification même de nos péchés, mais en est seulement signe divin et gage, de même aussi dans la Cène le pain sacré ne devient pas le corps même de Jésus-Christ… » (Q&R 78).

Cette réponse fait partie intégrante de ce que nous confessons. Nous aimerions mieux être gentils avec tout le monde et seulement dire des choses positives. Nous préférerions peut-être que notre confession de foi ne fasse que déclarer positivement la vérité. L’esprit de ce monde moderne voudrait que nous soyons tolérants envers tous. Cependant, l’Église du Seigneur est appelée à réfuter les erreurs. Cette tâche fait partie de notre vocation. L’Église du Seigneur a la responsabilité de conserver intact le témoignage des Écritures en proclamant la vérité et en réfutant l’erreur.

3. Comment une telle idée s’est-elle développée?🔗

La doctrine de la transsubstantiation n’est pas apparue du jour au lendemain. Elle s’est développée au Moyen Âge pour devenir doctrine officielle vers le 11siècle. Mais dès l’époque des Pères de l’Église, l’on a commencé à dire que la cène était une « pharmakos », un produit « pharmaceutique », un médicament en quelque sorte. Quand nous prenons un médicament, tel que Tylenol ou Ritalin, nous nous attendons à un effet dans notre corps. Le comprimé contient des ingrédients chimiques qui produisent un effet. De la même façon, l’on a commencé à croire que le pain et le vin produiraient automatiquement un effet quand on les ingère. Comme par magie, l’on obtiendrait la guérison de ses péchés. Un remède efficace contre la puissance du péché! Nous savons pourtant que c’est Jésus-Christ seul qui a ce pouvoir de pardonner et de nous restaurer. La théorie du médicament a inévitablement conduit à la théorie de la transsubstantiation. C’est logique. Puisque le pain et le vin contiendraient une substance médicamenteuse efficace, ils auraient un pouvoir divin en eux-mêmes. Il ne restait qu’un pas à faire pour croire que le pain et le vin étaient changés en corps et en sang matériels de Jésus.

Le cœur humain est tortueux par-dessus tout, rempli de superstition et de pensée magique. L’Ancien Testament nous donne plusieurs exemples. Pensons au veau d’or que le peuple d’Israël s’est mis à adorer (Ex 32). Dieu était loin dans le ciel, Moïse était dans sa présence en haut sur la montagne. Pendant ce temps parmi le peuple, les Israélites voulaient un dieu proche. Alors, ils se sont dit que le veau d’or était ce dieu qui les avait fait sortir d’Égypte. Ils ont attribué à un objet un pouvoir surnaturel. L’histoire du serpent d’airain illustre également cette tendance du cœur humain. Le Seigneur avait demandé à Moïse de fabriquer un serpent en airain. Tous les Israélites qui avaient été mordus par des serpents et qui regardaient ce serpent d’airain étaient guéris (Nb 21.9). Est-ce l’objet de métal qui avait un pouvoir en lui-même? Pas du tout! C’est Dieu seul qui guérissait ceux qui avaient foi dans sa promesse. Cependant, plus tard, Ézéchias a dû détruire le serpent d’airain, parce que l’objet était devenu une idole (2 R 18.4). Le peuple d’Israël s’était mis à croire que l’objet avait des pouvoirs en lui-même.

La pensée magique, c’est très pratique! On aime avoir Dieu à sa disposition. On peut le manipuler avec ses mains. On peut le transporter où l’on veut. On peut s’assurer de sa présence efficace dans nos vies. Jésus-Christ est monté au ciel, mais nous en avons besoin ici, maintenant. Mais à quoi cela pourrait bien nous servir de croquer les os du Christ avec nos dents, de mâcher ses muscles et d’ingurgiter son sang dans notre estomac? À rien du tout! C’est spirituellement que le corps et le sang de Jésus-Christ nous sont utiles. La doctrine de la transsubstantiation, quant à elle, veut nous convaincre que nous pouvons le toucher, le manipuler, l’utiliser selon nos besoins. N’est-ce pas le cœur même du paganisme? La pensée magique prétend pouvoir manipuler Dieu, car elle veut mettre Dieu à notre service, alors qu’en réalité c’est nous qui devrions être à son service.

Nous connaissons des exemples de pensée magique dans notre société moderne. Pensons aux objets vendus dans les boutiques « nouvel âge », aux amulettes, aux objets porte-bonheur, etc. Pensons également à ces nombreux athlètes qui, avant la compétition, font des gestes superstitieux pour demander l’aide de Dieu ou d’un bien-aimé décédé. La pensée magique est très populaire encore aujourd’hui. Quelle influence la pensée magique peut-elle avoir dans nos propres vies? Si, par exemple, je fais une prière et qu’elle est exaucée, je risque, la prochaine fois, de vouloir prier de la même façon, avec les mêmes mots ou la même posture, pensant que « ça va marcher ». Il est facile de vouloir manipuler Dieu pour arriver à nos fins.

4. Quelles sont les conséquences de la doctrine de la transsubstantiation?🔗

Les conséquences de la doctrine de la transsubstantiation sont graves et profondes. D’abord, l’honneur de Dieu est terni et la place d’honneur de Jésus-Christ au ciel, là où il règne souverainement, est rabaissée. Le prêtre aurait un pouvoir sur le Seigneur pour le faire descendre sur terre! Le Christ serait réduit à un état d’humiliation, alors qu’en réalité il est exalté dans la gloire depuis le jour de son ascension.

« Après avoir accompli la purification des péchés, il s’est assis à la droite de la majesté divine dans les lieux très hauts » (Hé 1.3).
« Le Christ-Jésus est celui qui est mort; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, et il intercède pour nous! » (Rm 8.34).

Ensuite, la prétendue puissance de l’Église est exaltée par cette fausse doctrine. L’Église et les prêtres exerceraient un contrôle sur Jésus-Christ et sur la « distribution de la grâce ». Les pouvoirs magiques et mystiques de l’Église de Rome la rendent attrayante. Elle serait capable de diviniser des objets physiques! N’est-ce pas le rêve de l’homme enfin réalisé?

Finalement, cette fausse doctrine n’est pas un appel à la foi. Le sacrement serait tellement puissant en lui-même qu’il « marcherait » à tout coup, même si le participant n’est pas croyant. Le médecin peut nous prescrire un médicament qui nous laisse sceptique, mais si nous décidons quand même de prendre le médicament… ça marche! Nous n’avons pas besoin de croire pour que la substance produise son effet. Il en est de même de la transsubstantiation.

Nous n’avons pas besoin de rituel magique pour faire descendre Jésus-Christ du ciel. Il vient à nous par sa Parole et par son Esprit Saint. C’est spirituellement que nous communions à son corps et à son sang. La cène est une affaire spirituelle qui exige la foi. Il ne faut pas s’attendre à ce que la sainte cène produise un effet soudain ou à ce qu’elle nous donne une solution instantanée à nos problèmes. Gardons-nous des fausses attentes! Dieu est Esprit et c’est par son Esprit qu’il nous nourrit, nous guérit et nous fortifie.