Cet article a pour sujet le salut par pure grâce sans les oeuvres, car à cause de nos péchés il nous est impossible de mériter la faveur de Dieu. Une fois délivrés, les bonnes oeuvres sont toutefois un témoignage de la vie nouvelle en Jésus-Christ.

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Sauvés par grâce

Les hommes et femmes qui savent que Dieu n’est pas une simple idée ou une vague notion, mais bel et bien une personne éternelle et toute puissante, se posent de tout temps la question de savoir comment avoir accès à ce Dieu parfait et juste. Comment se justifier devant lui? Est-il pensable, après le seuil de la mort, de se tenir devant le Juge suprême et de lui dire : « Voici, ô Dieu, ce que j’ai fait de ma vie, voici toutes mes œuvres; tu as bien des raisons de m’accepter en ta sainte présence, car j’ai bien mérité une vie de communion éternelle avec toi. » Quel est l’insensé qui oserait parler de la sorte devant Dieu?

Au premier chapitre de la lettre de Paul aux chrétiens de Rome, nous lisons : « Du haut du ciel, Dieu manifeste sa colère contre les hommes qui ne l’honorent pas et ne respectent pas sa volonté. Ils étouffent ainsi la vérité par leur malhonnêteté » (Rm 1.18). Et plus loin, au chapitre 2, Paul s’adresse à ceux qui pensent qu’ils sont meilleurs que les autres, et les condamnent avec une bonne conscience complètement hors de propos :

« Toi donc, qui que tu sois, qui condamnes ces comportements, tu n’as donc aucune excuse, car en jugeant les autres, tu te condamnes toi-même, puisque toi qui les juges, tu te conduis comme eux. Or, nous savons que le jugement de Dieu contre ceux qui agissent ainsi est conforme à la vérité. T’imaginerais-tu, toi qui juges ceux qui commettent de tels actes, et qui te comportes comme eux, que tu vas échapper à la condamnation divine? Ou alors, méprises-tu les trésors de bonté, de patience et de générosité déployés par Dieu, sans te rendre compte que sa bonté veut t’amener à changer de vie? Par ton entêtement et ton refus de changer ta manière de vivre, tu te prépares un châtiment d’autant plus grand pour le jour où se manifesteront la colère et le juste jugement de Dieu. Ce jour-là, il donnera à chacun ce que lui auront valu ses actes. Ceux qui, en pratiquant le bien avec persévérance, cherchent l’approbation de Dieu, l’honneur et l’immortalité, recevront de lui la vie éternelle. Mais, à ceux qui, par esprit de contestation, repoussent la vérité et cèdent à l’injustice, Dieu réserve sa colère et sa fureur. Oui, la souffrance et l’angoisse attendent tout homme qui pratique le mal, d’abord le Juif et aussi le non-juif. Mais l’approbation de Dieu, l’honneur et la paix seront accordés à celui qui pratique le bien, quel qu’il soit, d’abord le Juif et aussi le non-juif, car Dieu ne fait pas de favoritisme » (Rm 2.1-11).

Il est bien vrai que Paul, dans ce passage de la lettre aux Romains, dit que Dieu donnera à chacun ce que lui auront valu ses actes : ceux qui auront pratiqué le bien avec persévérance recevront de lui la vie éternelle. Mais, encore une fois, qui pourrait se targuer devant Dieu d’avoir pratiqué le bien avec persévérance? Un peu plus loin dans la même lettre aux Romains, Paul dit on ne peut plus clairement : « Il n’y a pas de distinction : tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu » (Rm 3.23). Autrement dit, que l’on ait été éduqué dans la connaissance des commandements de Dieu ou non, personne ne peut prétendre y avoir obéi de manière telle que Dieu en soit satisfait. Car la nature humaine est tout simplement entachée de péché, c’est-à-dire séparée de Dieu par une désobéissance volontaire, et incapable en elle-même de lui plaire. En fait, connaître sa loi, dit Paul, revient à connaître notre propre incapacité à lui obéir : la loi de Dieu, si pure et si parfaite, et qui reflète la perfection et la sainteté mêmes de Dieu, nous révèle notre condition misérable devant Dieu. Elle nous accuse devant lui.

Alors, revenons à notre question initiale : Comment nous justifier devant lui au jour du jugement? Paul, l’apôtre du Seigneur, inspiré par l’Esprit même de Dieu, nous donne la réponse dans cette phrase cruciale de sa lettre aux Romains que nous avons citée partiellement :

« Tous ont péché, en effet, et sont privés de la glorieuse présence de Dieu, et ils sont déclarés justes par sa grâce; c’est un don que Dieu leur fait par le moyen de la délivrance apportée par Jésus-Christ » (Rm 3.23-24).

Pour la Bible, nous sommes justifiés devant Dieu, c’est-à-dire déclarés justes et acceptables devant lui, non par ce que nous pourrions faire, mais par un don gratuit que Dieu nous accorde : la délivrance d’une condamnation qui pèse sur nous, délivrance apportée par Jésus-Christ.

À l’angoisse du jugement divin peut donc succéder une joie ineffable, celle de savoir que Dieu est celui qui nous sauve. « Sauveur », c’est d’ailleurs ce que le nom « Jésus » signifie en hébreu. Jésus-Christ, en portant sur lui la condamnation et le châtiment que nous aurions dû porter, nous libère de la colère divine; il nous réconcilie parfaitement avec Dieu, le Père qui l’a envoyé sur terre pour cette mission de salut. Et c’est par une foi sincère que nous pouvons nous approprier tous les bienfaits que cette libération nous procure. Une foi sincère, c’est-à-dire une confiance inébranlable que Dieu a bien accompli cet acte pour notre compte, car c’est ce qu’il avait promis de faire, et il est fidèle.

Mais alors, cela signifie-t-il que ce que nous faisons, la manière dont nous nous comportons dans la vie, n’a strictement aucune importance devant Dieu? Pas du tout. Car lorsque Dieu sauve, il le fait radicalement : il fortifie la foi de ses enfants et leur fait porter des fruits qui lui sont agréables. Nos œuvres bonnes deviennent le signe d’une foi vivante, elles sont accomplies non par nos propres forces, mais parce que le Saint-Esprit de Dieu, qui vit désormais en nous, nous les fait accomplir. Écoutez encore ce que dit Paul aux Éphésiens :

« Ce que nous sommes, nous le devons à Dieu; car par notre union avec le Christ, Dieu nous a créés pour une vie riche d’œuvres bonnes qu’il a préparées à l’avance afin que nous les accomplissions » (Ép 2.10).

Une autre traduction de la Bible en français l’exprime de la manière suivante : « Car nous sommes son ouvrage, nous avons été créés en Christ-Jésus pour des œuvres bonnes que Dieu a préparées d’avance, afin que nous les pratiquions. »

Il nous faut donc bien comprendre la place des œuvres bonnes dans notre vie : témoignage de notre vie nouvelle en Jésus-Christ, elles démontrent qu’une foi vivante nous habite et que notre vie est désormais caractérisée par la reconnaissance et l’obéissance aux commandements de Dieu. Mais nous ne pouvons en aucun cas nous vanter de nos œuvres, comme si elles étaient la cause de notre salut. C’est ce que Paul a dit juste auparavant dans sa lettre aux Éphésiens : « C’est par la grâce en effet que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie » (Ép 2.8-9).

Car si Jésus-Christ, le Fils de Dieu devenu homme, était venu habiter au milieu de nous pour nous dire que nous devons par nos propres œuvres être aussi parfaits qu’il l’est, lui, alors nous n’aurions que des raisons pour être désespérés. Comment en effet approcher, même de loin, la perfection qu’il a démontrée durant sa vie terrestre? Pourrions-nous accomplir les miracles qu’il a accomplis? Pourrions-nous faire preuve de l’amour envers le prochain dont il a fait preuve? Pourrions-nous parler avec la même sagesse divine que la sienne? Mais Jésus lui-même n’a pas dit que notre salut dépendait de nos propres forces, au contraire, dans ce passage très célèbre de l’Évangile selon Jean, il dit que c’est l’amour de Dieu qui nous sauve, et rien d’autre : « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle » (Jn 3.16).

Écoutons maintenant ensemble ce que dit le Catéchisme de Heidelberg sur les œuvres bonnes que nous devons accomplir. La question et réponse 86 du catéchisme inaugure la troisième partie de cette instruction chrétienne, modelée sur la lettre de Paul aux Romains :

« Puisque nous sommes délivrés de notre misère par la grâce du Christ, sans aucun mérite de notre part, pourquoi devons-nous faire des œuvres bonnes? Parce que le Christ, après nous avoir rachetés par son sang, nous renouvelle aussi par son Saint-Esprit à son image, afin que nous montrions à Dieu, par toute notre vie, notre reconnaissance pour ses bienfaits et qu’ainsi nous le glorifions; ensuite, afin que nous puissions aussi être nous-mêmes assurés de notre foi par les fruits qu’elle porte, et que par la sainteté de notre vie, nos prochains soient gagnés à Jésus-Christ. »

Le catéchisme nous donne donc trois raisons pour lesquelles notre salut par grâce, et non par nos propres œuvres, doit justement nous inciter à accomplir de telles œuvres. D’abord, comme nous l’avons déjà vu, de telles œuvres manifestent clairement notre reconnaissance envers Dieu pour le salut qu’il nous a offert gratuitement. Elles sont aussi le signe de notre renouvellement intérieur à son image, renouvellement effectué par le Saint-Esprit. Dieu est glorifié par nos œuvres. Ensuite, notre foi, qui grandit et se fortifie de jour en jour, toujours par l’action du Saint-Esprit, se trouve confirmée par les œuvres qu’elle suscite : en voyant les fruits qu’elle porte, nous sentons que notre foi est bien réelle et vivante, et nous pouvons nous réjouir de ce que nous voyons l’Esprit de Dieu à l’œuvre en nous. Et enfin, nos œuvres sont un témoignage de l’amour de Dieu vis-à-vis du monde : en voyant nos œuvres bonnes, notre prochain est amené à connaître la puissance et l’amour de Dieu, et il peut être gagné à Jésus-Christ par ce puissant témoignage. Même si nous nous sentons faibles, et voyons bien que nos meilleures œuvres demeurent imparfaites, Dieu, dans sa patience et son amour, s’en sert pour amener les incroyants à la connaissance de son nom glorieux. Nos œuvres deviennent un instrument puissant d’évangélisation.

Terminons cet article en citant quatre passages du Nouveau Testament qui confirment cet enseignement du catéchisme : Dans 1 Corinthiens 6, Paul écrit : « Car vous avez été rachetés à grand prix. Glorifiez donc Dieu dans votre corps et dans votre esprit qui appartiennent à Dieu » (1 Co 6.19-20). Dans le sermon sur la montagne, en Matthieu 5, verset 16, Jésus dit à la foule venue écouter son enseignement sur la montagne : « Que votre lumière brille ainsi devant les hommes, afin qu’ils voient vos œuvres bonnes, et glorifient votre père qui est dans les cieux » (Mt 5.16). Et, plus loin, Jésus ajoute encore : « Tout bon arbre porte de bons fruits, mais le mauvais arbre produit de mauvais fruits » (Mt 7.18). Enfin, dans sa première lettre, l’apôtre Pierre écrit :

« Au milieu des païens, ayez une bonne conduite, afin que là où ils vous calomnient comme faisant le mal, ils voient vos œuvres bonnes, et glorifient Dieu au jour de sa visite » (1 Pi 2.12).