Cet article a pour sujet la création de l'homme et son identité créée à l'image de Dieu (Genèse 1), ayant une responsabilité morale, opposée à l'idée de l'évolution et à la psychologie moderne dominée par l'humanisme athée qui croit que l'homme doit se déterminer lui-même.

Source: Évolution ou création?. 4 pages.

Genèse 1 - Psychologie ou création?

Parmi l’abondant courrier que je reçois, il y a des lettres qui présentent un intérêt particulier parce qu’elles posent des questions pouvant intéresser d’autres auditeurs ou téléspectateurs. Parmi celles récemment reçues se trouve la question suivante, que je suis obligé de simplifier et qui fera l’objet de ce dernier exposé : « Quel est le rapport entre la psychologie moderne et la foi chrétienne? »

Je n’aborderai pas ici le rapport entre la psychologie et la foi de manière classique. Je procéderai plutôt en opposant la psychologie humaniste à la révélation biblique de la création de l’homme. La première offre une image de l’homme qui, même considérée superficiellement, s’oppose à celle qu’en dessine la révélation.

Nombre de chrétiens ne s’en rendent pas toujours compte; mais il est devenu presque axiomatique de parler de l’homme et d’expliquer ses comportements à partir des postulats théoriques de la psychologie humaniste. La littérature plus ou moins spécialisée, et surtout la vulgarisation des grandes théories psychologiques a-chrétiennes et même anti-chrétiennes, ont tellement envahi les mœurs et la pensée, parfois même de ses adversaires, qu’un domaine de plus ou de moins sous son hégémonie ne trouble guère la sensibilité de la plupart des chrétiens.

Partons donc de la connaissance que nous avons de la création de l’homme d’après le récit de la Genèse et de l’ensemble de la révélation biblique. Créature de Dieu, créée à partir d’un acte libre de celui-ci, l’identité de l’homme est à l’opposé même de celle qui lui attribue l’hypothèse évolutionniste. L’homme biblique ne surgit pas par hasard d’un chaos primitif et n’a pas pour ancêtre un animal ou un micro-organisme appartenant à une autre espèce. Il est l’œuvre immédiate de Dieu. Cela nous amène aussitôt à reconnaître que son histoire est brève, connue et connaissable.

Pourquoi chercher son origine dans des sources hypothétiques et s’empêtrer dans les mythes modernes d’une science se prétendant objective lorsque l’Écriture et notre propre expérience nous fournissent une ample documentation à ce sujet? Il ne s’agit pas là d’une documentation théorique, mais d’une vérité avec des implications pratiques et morales d’une importance capitale. Du fait même de sa création, l’homme devient une créature et une personne responsable.

La psychologie de l’homme n’est rien de moins qu’un procès-verbal, bien transcrit et retransmis, défiant la concurrence de la psychologie moderne dominée par l’humanisme athée. Du fait de sa création, la psychologie humaine n’est pas un phénomène qui évolue, mais un fait permanent. Fondamentalement, l’homme reste tel qu’il a été créé le premier jour par Dieu, hormis la chute et les conséquences de celle-ci. Il n’est pas un être en « devenir », qui a passé d’un stade inférieur vers la phase plus évoluée et développée de sa situation actuelle.

C’est pourquoi l’homme ne saurait être défini qu’en termes de sa création. C’est Dieu qui lui accorde la pleine définition de son identité. Après l’avoir créé, il « souffle » dans ses narines, s’adresse à lui et, aussitôt, celui-ci devient un être vivant. Il est évident qu’aussi bien la psychologie freudienne que l’anthropologie sartrienne (Sartre n’ayant pourtant aucun goût pour Freud) sont fallacieuses sur ce point comme sur tant d’autres. L’une et l’autre ont l’idée fixe que l’évolution fait de l’homme un être inachevé… et une question ouverte! L’homme est alors pressé de se déterminer lui-même au lieu de se voir et de se reconnaître dans le miroir de Dieu.

On comprendra alors aisément l’importance capitale de notre assertion : dès sa création, l’homme est un être achevé, accompli. Le premier homme a été créé adulte et non enfant. Il est donc inutile de chercher à le comprendre à l’aide de la psychologie infantile. Il n’est ni l’animal qui « s’hominise », ni le sauvage qui petit à petit se socialise et se politise, ni même un enfant immature qui atteindrait peu à peu tous les niveaux de la maturité.

C’est pourquoi la psychologie humaniste ne reconnaît pas toujours à l’homme une responsabilité morale. Ses défaillances, ses manquements, ses erreurs et même ses crimes ne sont expliqués qu’en fonction de son enfance, de ses origines ou de son environnement, et jamais comme une rébellion délibérée contre l’ordre moral établi et révélé par Dieu. Une telle conception de l’être humain, promue au rang d’idéologie, justifie et encourage tous les actes d’immaturité et même de barbarie perpétrés par l’homme moderne. Nous assistons, sur ce terrain-là, à la manifestation la plus flagrante d’une imposture parmi les plus subtiles et les plus destructrices. Le mal dont l’homme est atteint n’est jugé et discuté qu’en termes d’environnement socioculturel, familial, etc., mais jamais en termes de morale religieuse. Par conséquent jamais comme la faute d’un être responsable de ses actes. (Le lecteur aura compris qu’il s’agit, bien entendu, des personnes saines d’esprit). Le péché est présenté plutôt comme un échec que comme une révolte et une transgression morale.

Créé adulte, le sens de l’homme transcende l’homme, et c’est en vain qu’il chercherait en lui-même la réponse à sa question essentielle : Qui suis-je? Refuser la transcendance, ou plus simplement le dessein créateur et rédempteur de Dieu, c’est carrément refuser de le comprendre. La révélation biblique déclare que, créé défini et placé dans son environnement, l’homme a reçu une autre responsabilité vis-à-vis de lui-même, d’autrui et de l’univers.

Or non seulement son existence a été créée et définie, mais créées et définies aussi les conditions dans lesquelles il est appelé à vivre. À aucun moment de son existence, il ne peut briser ces barrières ni échapper à cette condition originelle sans courir le risque de s’anéantir. Même « les cheveux de sa tête sont comptés » par son Créateur. Son imagination et sa créativité les plus brillantes, ses dons les plus nobles, ses aspirations les plus élevées, chacune des fibres de sa sensibilité, chaque détail de son existence et de ses expériences, sont des aspects de la création divine. Sa liberté, y compris celle de se comporter de manière contraire à la volonté de son Créateur, lui a été octroyée par lui.

Image de Dieu, il est appelé à la refléter en tout ce qu’il accomplit. C’est là sa vocation. Et c’est ce reflet du Créateur qui fait de lui une personnalité (image de Dieu au sens étroit). Jésus-Christ, le Fils de Dieu incarné, déclare qu’il est venu restaurer l’homme dans ses vertus originelles. (Qu’il me soit permis d’ouvrir une courte parenthèse pour dire que la différence entre vertus dites cardinales et théologales, dont parle la théologie romaine, ne se justifie pas sur le terrain biblique). La personnalité de l’homme fait de lui la première image de Dieu au sens large, et la responsabilité morale est la seconde image de Dieu au sens étroit. Il n’y a pas de dissociation possible entre ces deux représentations de l’image de Dieu. Aussi, tout acte de l’homme est, au départ, un acte moral.

En aucune manière l’homme ne peut sortir de sa condition de créature. S’il est l’image de Dieu par création et par vocation, il ne sera jamais une personne autonome comme Dieu, immuable, infinie et unique dans sa Trinité. La foi chrétienne proclame l’incompréhensibilité de Dieu en même temps que la révélation de sa personne. Nous avons ici une connaissance merveilleuse et toute suffisante pour notre foi. Pourtant, elle n’est pas exhaustive; nous ne pouvons pas connaître Dieu totalement; autrement, nous cesserions d’être des créatures. C’est pour cette raison que l’Écriture affirme que la connaissance, la justice et la sainteté de Dieu sont normatives pour notre existence et pour notre action, et que nous devons nous y conformer.

Le péché, rupture morale fondamentale et radicalement meurtrière, est un phénomène antinaturel, une déformation, un cancer qui ronge la personne humaine et finit par la désagréger. Nous avons été créés avec une parfaite conscience morale. Nous aurions dû vivre par la révélation, faite dès l’origine, du bien et du mal.

Une certaine psychologie moderne affirme péremptoirement qu’il n’existe pas de personnalité morale absolue. Inutile donc de se référer à un être suprême. Personne ne serait responsable devant une autre instance que celle de sa propre existence ou celle de ses semblables ou éventuellement celle de l’histoire, avec un h minuscule. Nulle part des notions de bien et de mal. Psychologie ici, sociologie là, et partout l’omniprésente politique, ainsi que toutes sortes de logies irrationnelles et contradictoires dicteront alors la conduite à tenir.

Mais l’homme doit se référer à Dieu, personne morale infinie; autrement, il mourra d’une mort éternelle. Il a reçu encore une autre vocation : celle d’œuvrer en vue de l’avènement du Royaume de Dieu. Son obéissance ou ses transgressions conditionneront son existence par rapport à cette vocation. On ne saurait le comprendre à moins de cultiver le monde. Mais pour l’homme déchu, l’exercice de cette vocation a dégénéré en hostilité ouverte contre le Créateur. Il est évident que la psychologie humaniste, ne reconnaissant pas la maturité originelle, récusera bon gré mal gré cette vocation ou cet ordre culturel.

Autre point fondamental que je ne devrais pas passer sous silence est la nature sexuelle de l’homme. « Homme et femme il les créa » (Gn 1.27). Le caractère sexuel de l’homme n’est pas un fait fortuit, à mettre sur le compte de la fameuse « évolution », mais fait partie du dessein spécifique de Dieu. Ici se trouvent dénoncées et condamnées toutes les déviations sexuelles. Personne n’a le droit de les justifier et encore moins de les encourager. Dans nombre de cas, elles sont un effort démoniaque pour briser l’ordre établi par Dieu qui doit régir toute la création. La masculinité et la féminité sont constitutives du dessein initial de Dieu et ne peuvent s’exercer que dans leur complémentarité réciproque.

Avec l’ordre culturel, l’homme reçoit une vocation supplémentaire : celle de procréer. Sans qu’il y ait besoin de tomber dans un fatalisme irresponsable, on ne peut ignorer celle-ci (même si le célibat se justifie pour différentes raisons) sans attenter à l’existence humaine. Le refus de procréer ouvrirait la route, large et spacieuse, conduisant l’humanité vers la tombe creusée par ses propres mains. Les enfants sont « l’héritage de Dieu », proclame l’auteur du Psaume 127. Héritage de Dieu, ils deviennent la condition heureuse pour vivre dans l’Alliance de grâce.

Ces traits de l’homme, soulignés par la psychologie biblique, se prolongent encore dans d’autres directions. Ce règne de l’homme s’étend aussi sur l’animal. Soulignons qu’il s’agit du règne et non de la guerre, de l’effort acharné et insensé pour l’exterminer, comme si ce dernier était son pire ennemi. Sa sage domestication et son utilisation, sa protection aussi lorsque cela s’avère nécessaire et en tout cas une relation harmonieuse avec lui font partie de nos privilèges et de nos responsabilités envers la création. Le fait que tant d’hommes traitent le règne animal uniquement comme une source de profit à court terme, sans se soucier s’ils le détruisent, n’a pas effacé le besoin normatif des êtres humains de le dominer au sens noble et original du terme conforme à l’ordre de Dieu. Là où il réussit à domestiquer l’animal, il pourra s’en servir, même pour libérer son comportement psychique.

Tiré de la terre pour devenir une « âme vivante », l’homme est physiquement et psychiquement lié à celle-ci; elle reste le lieu de sa productivité et la source de sa richesse. Mais Dieu a assigné des limites à ses activités et à ses conquêtes, afin que celles-ci ne deviennent pas folles. Voici donc sommairement la différence fondamentale entre la conception humaniste et l’idée biblique de l’homme.