Cet article a pour sujet les mandats divins confiés aux chrétiens touchant le travail, le mariage, le gouvernement civil et l'Église, sous l'autorité du Christ sur nous et sur le monde dans lequel nous vivons.

Source: La vocation du chrétien. 3 pages.

Les mandats divins

  1. Le travail
  2. Le mariage
  3. L’État
  4. L’Église

Nous parlerons maintenant du mandat divin ou, pour être plus précis, des quatre mandats divins qui constituent la mission que le chrétien est appelé à assumer dans son existence ici-bas, afin de donner la preuve de sa foi et de témoigner de la suprême autorité du Christ sur sa personne et sur son monde. Il faudra les évaluer correctement, si on ne veut pas se tromper de mission ni donner une fausse impression au monde extérieur. Car bien souvent l’impression produite par les chrétiens est celle d’une mystique dépersonnalisée et dépersonnalisante au lieu d’une foi active et obéissante. Et hélas!, nombre de chrétiens n’ont pas manqué de confondre la vie spirituelle avec une spiritualité désincarnée, désintéressée du monde réel, laissant la gestion des affaires dites « mondaines » entre des mains non chrétiennes. En parlant des quatre mandats, nous voulons rétablir la vérité et inviter les chrétiens à vivre dans la réalité créée et établie par le Dieu souverain, Libérateur de nos existences.

La création tout entière est l’œuvre du Christ; elle est aussi par le Christ et pour le Christ, subsistant en lui seul (Jn 1.10; Col 1.16). C’est donc une abstraction que de parler du monde sans parler du Christ. Notre univers subsiste en fonction du Christ, qu’il le sache ou non. Les rapports entre le Christ et le monde se concrétisent dans les mandats divins qui sont, selon l’Écriture, le travail, le mariage, les autorités civiles et l’Église. Dieu veut qu’il y ait dans le monde le travail, le mariage, les autorités et l’Église. Il veut tout cela par le Christ, pour le Christ et en Christ. Dieu a placé les hommes sous ces mandats. Il n’y a donc pas d’évasion possible hors de ce monde vers un espace spirituel, mais uniquement un apprentissage de la vie chrétienne sous ces quatre mandats.

Nous ne dévaloriserons donc pas les trois premiers — travail, mariage et État — sous prétexte qu’ils sont de ce monde, car ce sont les mandats divins au sein du monde, qu’il s’agisse du travail, du mariage, de l’État, ou de l’Église. Ils sont divins en vertu de leur relation précise avec le Christ. Détachés de cette relation, ils ne sont pas plus divins que le monde n’est divin en soi. Le travail l’est à cause de Jésus-Christ, de sa mission et de son but. Le caractère divin du travail n’a donc sa source ni dans son utilité universelle ni dans ses valeurs, mais uniquement dans son origine, son existence et son but en Christ.

1. Le travail🔗

Selon l’Écriture, nous rencontrons le mandat du travail chez le premier homme déjà. Adam avait à cultiver et à garder le jardin d’Eden. Après la chute, le travail reste un mandat non seulement de la discipline divine, mais aussi de la grâce divine. C’est « à la sueur de son front » que l’homme arrache sa nourriture à la terre, et le domaine du travail humain embrasse tous les domaines, depuis l’agriculture, en passant par l’économie, jusqu’à la science et l’art. Le travail, qui a son origine et son fondement déjà dans le paradis, est l’acte par lequel l’homme participe à la création. À travers lui, l’homme crée un monde d’objets et de valeurs destiné à la gloire et au service de Jésus-Christ. Ce que l’homme produit ici sur l’ordre de Dieu donne naissance à un reflet du monde céleste que discerne celui qui connaît le Christ. La première création de Caïn fut la ville, copie terrestre de la cité éternelle de Dieu. Suivit l’invention des violes et des flûtes, qui donnent déjà sur terre un avant-goût de la musique céleste (Gn 4.21). Puis ce fut l’extraction et le façonnement des métaux, arrachés à la terre (Gn 4.22), dont une part sert à la parure des maisons à la manière de la ville céleste qui brille d’or et de pierres précieuses. Le mandat du travail fera naître un monde qui, le sachant ou non, attend le Christ et le sert et le glorifie même malgré lui.

2. Le mariage🔗

Nous avons aussi le mandat du mariage, par lequel les hommes seront unis devant Dieu comme le Christ est uni à son Église. « Ce mystère est grand », écrivait saint Paul (Ép 5.31). Dieu donne à cette union la bénédiction de la fécondité, de l’engendrement de vies nouvelles. En procréant, l’homme entre dans la volonté du Créateur. Par le mariage, des hommes sont créés pour glorifier et servir le Seigneur Jésus-Christ et pour l’accroissement de son règne. Cela signifie que le mariage n’est pas seulement le lieu de la procréation, mais aussi celui de l’éducation des enfants dans l’obéissance à Dieu. Les parents, en tant que procréateurs, sont pour l’enfant les représentants de Dieu et ses éducateurs selon l’ordre divin. Comme dans le travail on crée des valeurs nouvelles, ainsi on crée dans le mariage des hommes nouveaux pour le service de Jésus-Christ.

3. L’État🔗

Ce mandat suppose ceux du travail et du mariage. Les autorités civiles trouvent dans le monde qu’elles gouvernent ces deux mandats par lesquels Dieu exerce son pouvoir de Créateur et qui leur sont nécessaires. Les autorités ne peuvent par elles-mêmes engendrer la vie ou créer des valeurs, car elles ne sont pas créatrices. Elles sont là pour maintenir l’ordre dévolu par le mandat de Dieu et le protéger en exerçant leur juridiction dans la reconnaissance de ces mandats et en faisant valoir le droit par la force de l’épée si nécessaire. C’est ainsi que le mariage n’est pas conclu par les autorités, mais devant elles. Ce ne sont pas les autorités qui administrent elles-mêmes les secteurs du travail, mais ceux-ci sont soumis à leur surveillance et à leur gouvernement, à l’intérieur de certaines limites. Les autorités civiles ne seront jamais les maîtresses de ce secteur sans mettre gravement en danger le mandat du travail et celui qui leur est propre. Par la juridiction et par la force du glaive, l’État maintient le monde pour la réalité de Jésus-Christ.

4. L’Église🔗

En opposition aux trois mandats précédents, la mission de l’Église est de concrétiser par la prédication l’ordre ecclésiastique, la vie chrétienne et la réalité de Jésus-Christ, son salut et sa seigneurie. Il s’agit donc de proclamer le salut éternel au monde tout entier. Le mandat de l’Église s’étend à tous les hommes, à l’intérieur des trois autres. Tout démembrement, toute séparation de ces différentes sphères sont interdits. L’homme se trouve là devant la réalité terrestre et éternelle telle que Dieu l’a préparée pour lui en Jésus-Christ. Ce n’est qu’en répondant à la totalité de cette offre et de cette exigence que l’homme pourra se conformer à cette réalité. Il incombe à l’Église d’attester précisément ceci : dans tous les autres mandats, il ne s’agit pas d’un déchirement de l’homme, mais de l’homme entier devant Dieu le Créateur, le Réconciliateur et le Rédempteur. La réalité dans toute sa diversité est en définitive une en Dieu. Ainsi la doctrine des mandats divins sert à situer l’homme devant l’ensemble de la réalité telle qu’elle nous est révélée en Jésus-Christ.

La volonté de Dieu ne désire autre chose que de voir vivre, en nous et dans notre monde, la réalité du Christ. Elle n’est pas une idée qu’il faudrait réaliser; elle est déjà réalité parce que Dieu s’est révélé lui-même en Jésus-Christ, une réalité qui veut devenir réelle toujours à nouveau. La volonté de Dieu a déjà été accomplie par Dieu lui-même.

La volonté de Dieu, révélée et accomplie en Jésus-Christ, comprend l’ensemble de la réalité qui nous entoure et dont nous faisons partie. On peut accéder à ce tout, à cette réalité totale sans être déchiré par la diversité, à condition d’avoir la foi en Christ et nulle part ailleurs, « car en lui habite corporellement toute la plénitude de la divinité » (Col 2.9), « car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude et de tout réconcilier avec lui-même, aussi bien ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux » (Col 1.19-20); « il a tout mis sous ses pieds, et l’a donné pour chef suprême à l’Église, qui est son corps, la plénitude de celui qui remplit tout en tous » (Ép 1.22-23). La foi en ce Christ est l’unique source de tout bien.