Cet article a pour sujet la loi selon l'apôtre Paul dans Romains et Galates, incluant Romains 7. Paul explique le rapport entre la loi et la grâce, la condamnation par la loi, la justification par la foi, et la norme de la sanctification.

Source: L'Esprit de la loi - Éléments pour une éthique chrétienne et réformée. 17 pages.

La loi dans le Nouveau Testament - La loi dans les écrits de Paul

  1. La lettre aux Romains
    a. Romains 1 à 7
    b. Romains 7.14-25
    c. Romains 8 à 13
  2. La lettre aux Galates
  3. Les autres écrits de Paul

La ligne de pensée théologique de Paul suit la même direction que celle de l’Ancien Testament et est en tous points identique à celle du Seigneur. Il s’oppose vigoureusement aux juifs qui considéraient la loi comme un moyen autonome de salut, et aux chrétiens qui cherchent à récupérer la loi pour les mêmes fins que leurs contemporains juifs. Certes, dans l’expérience chrétienne, la loi ne se place plus au même niveau que l’Évangile de la grâce, et une lecture attentive du chapitre 7 de l’épître aux Romains, lieu classique du débat, le démontrera avec force.

Toutefois, ceci n’implique pas de sa part une opposition de principe fondamentale contre la loi. Autrement, aurait-il exhorté les fidèles des Églises de Galatie à « porter les fardeaux les uns des autres, et vous accomplirez ainsi la loi du Christ » (Ga 6.2). L’ensemble de la lettre adressée à ces derniers renferme beaucoup de recommandations de ce genre. Bien entendu, il ne se glorifiera en rien d’autre qu’en la croix du Christ (Ga 6.14). Mais dans Romains 3.31, il protestera : « Est-ce que nous annulons ainsi la loi par la foi? Certes non! Au contraire, nous confirmons la loi. » On peut dire au sujet de cette affirmation qu’elle est certainement l’une des plus grandes, la plus grande pour être précis, de toutes les affirmations pauliniennes, et ceci d’autant plus qu’on se souvient avec quelle force l’apôtre venait d’affirmer l’universalité du salut par la foi, sans les œuvres de la loi. S’il a farouchement combattu pour abroger la loi « nomiste », c’est-à-dire la religion légaliste, la nouvelle création qu’il est devenu en Christ est rendue capable d’une nouvelle obéissance et il peut se soumettre à la loi du Christ, libre de toute terreur et de toute tension (1 Co 9.19-21).

Examinons dans l’ordre les deux grandes épîtres de Paul qui traitent de manière extensive de la loi, pour donner ensuite un bref aperçu de quelques autres textes pauliniens.

1. La lettre aux Romains🔗

a. Romains 1 à 7🔗

Dans cette grande épître de saint Paul, la loi est considérée comme une norme… normale de la vie face à Dieu. On peut dire de manière générale que l’apôtre envisage la loi morale. Ainsi, dans cette grande épître adressée à des juifs vivant à Rome, le plus grand centre du plus célèbre système légal qui ait jamais existé, où vit un grand nombre de juifs versés dans la loi mosaïque et des païens familiers avec l’idée de la loi, sa nature, ses intentions, Paul l’envisage en tant que norme de conduite.

La transgression de la loi, l’absence de conformité à celle-ci, entraîne la condamnation. Les païens, qui ne possédaient pas la norme de la loi révélée comme les juifs, avaient pourtant une loi des nations (le « jus gentium »), dont certains principes pouvaient être connus et respectés par ceux qui n’avaient aucune connaissance du code romain. Grâce à cette « loi », les rapports entre Romains et barbares pouvaient se maintenir. La conception paulinienne est quelque chose de similaire, lorsqu’elle est appliquée aux relations « religieuses » entre l’homme païen et Dieu. C’est par la loi naturelle que les païens sont condamnés. Ils n’ont pas pu vivre en accord avec elle; malgré la présence de sa lumière qui éclaire leurs consciences, ils ont violé les ordonnances de leur propre conscience. Quant aux juifs, en dépit de la lumière plus intense et plus complète de la loi révélée, à leur tour ils ont échoué. À cet égard, Paul pose incidemment le grand principe selon lequel il ne suffit pas d’écouter la loi pour être justifié automatiquement, mais uniquement en la mettant en pratique (2.13). Son grand objectif est de montrer que la justification s’obtient par la foi, et que si l’on cherchait à l’obtenir au moyen de la loi, il faudrait alors l’observer dans tous ses détails. La loi déclare juste celui qui l’accomplit, mais la simple écoute ce celle-ci, sans la suite normale qui est la pratique, ne fera qu’accroître le fardeau et condamnera l’homme juif (2.12).

L’apôtre ne se prononce pas de manière explicite sur la question de savoir si les païens peuvent être sauvés en suivant la lumière de la nature, mais il en souligne plutôt le côté négatif en affirmant que celui qui a échoué à la mettre en pratique périra sûrement. Car les païens ont reçu suffisamment de lumière pour être inexcusables de ce point de vue-là. Mais à présent, ils sont tous inexcusables, juifs comme païens, et ils se placent sous le jugement. Paul clôt ce paragraphe par l’affirmation : « Or, nous savons que tout ce que dit la loi, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée, et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu » (3.19). La loi les enferme donc tous sous la condamnation. Aussi il est impossible à un pécheur d’être justifié par la pratique de la loi. C’est la fin irrévocable de toute religion légaliste.

Mais le rôle de la loi ne se limite pas à condamner de manière universelle. Elle sert encore à amener l’homme à la connaissance du péché (3.20), et révèle l’échec des hommes à répondre aux exigences de Dieu. La loi est le miroir dans lequel le pécheur se rend compte de sa corruption, incapable de purifier le pécheur. Le miroir qu’est la loi crie la nécessité d’une purification radicale, purification rendue à présent possible par la mort rédemptrice du Christ. C’est elle qui pourvoit aux exigences de la justice de Dieu, car la loi était incapable de le faire d’elle-même. Mais cette justice est indépendante de toute tentative humaine d’observer la loi, quoiqu’en parfaite harmonie avec les principes qu’exprime cette dernière.

Au verset 19, « la loi » semble indiquer le Pentateuque, bien qu’à cause des citations précédentes des Psaumes, l’on puisse aussi penser qu’elle peut s’appliquer à l’Ancien Testament tout entier.

Puisque la justice assurée par le Christ vient au pécheur au moyen de la foi, les œuvres de la loi ne peuvent manifestement rien faire pour l’obtenir. D’après l’épître aux Romains, cela est absolument clair (3.27-28).

La bénédiction d’Abraham ne fut pas obtenue grâce à la loi. Paul poursuit sa ligne de pensée par un autre développement. Il démontre que son idée de la justification par la foi seule n’est pas une innovation de sa part. Les croyants de l’Ancien Testament l’avaient déjà vécue dans leur expérience, et le cas d’Abraham, avant même sa circoncision, le montre bien, puisqu’il reçoit la bénédiction de Dieu par le moyen de sa foi. La grande promesse qui lui a été faite, ainsi qu’à sa descendance, ne se fonde pas sur la pratique de la loi, mais sur le principe de la foi.

Au lieu d’accorder la bénédiction au pécheur, la loi produit la colère (4.15). Non pas celle des hommes à cause des restrictions qu’elle impose, mais la colère sainte de Dieu, très fréquemment mentionnée dans le corps de cette grande épître. La loi renforce la culpabilité du péché, en intensifiant la colère divine. En un sens, c’est elle qui provoque le péché. Notre nature pécheresse se rebelle contre les interdictions de la loi, la chose interdite engendre en nous le désir d’enfreindre l’ordre, le commandement divin. Romains 5.20 semble indiquer nettement cette pensée. La multiplication même des restrictions intensifiait la convoitise et révélait de la sorte le mal qui ronge la nature humaine, la corruption totale du cœur et la nature terrible du péché, montrant de la sorte l’absolue nécessité du salut. Le grand désespoir témoigne du grand besoin de libération. Alors, là où le péché a abondé, la grâce a surabondé. Que la présence de la loi renforce le mal est de nouveau démontré par l’affirmation de 4.15. La transgression, le renversement et le dépassement de la barrière installée sont, dans leur sens strict, possibles sous la loi. Mais il ne pourrait pas y avoir de péché en dehors de la loi révélée, ainsi que le démontre le chapitre deux.

Vient ensuite la discussion de la loi considérée à la lumière du parallèle entre Adam et le Christ. Saint Paul n’affirme pas que tous les hommes ne sont pas responsables de leurs propres péchés, et cette inexcusabilité personnelle a été amplement prouvée au chapitre deux. Mais le fait est que le péché amène le châtiment de la mort, et la souffrance qui en résulte est due au péché d’Adam, « chef ou représentant religieux » de l’humanité en dehors du Christ. Certes, les hommes n’ont pas péché comme Adam en transgressant un ordre positif, mais en violant la loi de leur conscience, ils savent qu’ils sont pécheurs. L’intention de l’apôtre, en établissant un parallèle entre Adam et le Christ, est de montrer que, de même que la transgression d’Adam entraîne la condamnation de toute la race humaine, l’obéissance du Christ, elle, obtient notre justification.

Une fois établi le rapport entre loi et justice, l’apôtre montre que la parfaite justice du Christ, évidente dans son œuvre rédemptrice, suffit à toutes les exigences de la loi. Car la juste condamnation de la loi a été portée sur sa personne, et ses justes exigences ont été accomplies par le Sauveur en satisfaisant à toutes ses demandes. Cette même justice vient à présent à l’homme, non plus dans sa relation avec la loi, mais au moyen de la foi. Le croyant est justifié par le Christ et identifié à sa mort. Le vieil homme et sa nature de péché ont été crucifiés avec le Sauveur. Le pouvoir de condamnation de la loi prend fin avec la mort du Christ, et le croyant, dans son identification avec lui, acquiert la liberté vis-à-vis de la loi qui le condamnait (6.7).

Ainsi, bien qu’en un sens le croyant soit mort, en un autre sens, il est vivant. S’il meurt avec le Christ, il ressuscite aussi spirituellement avec lui et il est à présent spirituellement vivant, afin de présenter à Dieu ses membres, toute sa personne, comme un instrument de justice (6.13). Il est assuré, pour sa consolation, que dans cette nouvelle sphère de vie le péché n’aura pas le pouvoir de le placer à nouveau sous la condamnation de la loi (6.14). Sa relation avec la loi a été changée grâce à son union avec le Christ, et l’apôtre va illustrer ce fait nouveau dans 7.1-6, où il énonce le principe selon lequel la mort dissout toute obligation légale. Le croyant mort spirituellement ne se trouve plus sous la domination de la loi. Cela est illustré par l’image de la veuve libérée des liens conjugaux à la mort de son mari. L’application de cette « parabole » est la suivante :

« De même, mes frères, vous aussi vous avez été, par le corps de Christ, mis à mort en ce qui concerne la loi, pour que vous apparteniez à un autre, à celui qui est ressuscité des morts, afin que nous portions des fruits pour Dieu » (7.4).

Si la loi est représentée dans cette description métaphorique par le mari et l’âme par l’épouse, l’application se fonde sur la pensée générale que la mort dissout ou libère l’individu d’une obligation légale contractée. Ainsi, la mort du mari signifie celle de son épouse en tant qu’épouse. C’est la raison pour laquelle Paul peut parler de la mort du croyant, plutôt que de celle de la loi. Une autre explication de la métaphore veut que l’ancien état de péché soit représenté par le mari, dont la personnalité était liée à la loi, mais cet état ayant été amené par le Christ à la mort, la personnalité est libre d’entrer en union avec le Christ.

Quelle que soit l’opinion que l’on choisisse, la pensée dominante de l’apôtre est claire; par la mort du Christ, le croyant est libéré de la loi (7.6). La pureté et la perfection de la loi, dans son domaine, fait poser la question : la loi serait-elle malgré tout péché? (7.7). Cette pensée est repoussée avec vigueur. L’apôtre poursuit en démontrant, par sa propre expérience, de quelle manière la loi est liée au péché et comment elle le révèle. L’opposition que suscite la nature de la loi met à découvert la tendance des hommes à la mort. La loi n’est absolument pas responsable du péché. Elle ne saurait être accusée, car elle est sainte, juste et bonne (7.12). C’est la raison pour laquelle, à la lumière de la loi, le péché apparaît tel qu’il est, terriblement pervers, tandis que la loi, elle, apparaît toujours comme spirituelle.

b. Romains 7.14-25🔗

Arrêtons-nous plus longuement sur le célèbre passage de Romains 7.14-25, sans doute l’un des points théologiques les plus litigieux des écrits pauliniens. Outre l’éclairage nouveau qu’il jette sur la fonction de la loi, ce passage décrit également l’un des aspects fondamentaux de l’expérience chrétienne. C’est donc à ce double titre que nous lui accordons la place qu’il occupe dans les pages suivantes de notre étude.

La question que traditionnellement on a posée à son sujet est la suivante : Ce passage décrit-il l’expérience de l’homme régénéré ou bien celle de l’homme non régénéré? Il y a eu, d’une manière générale, trois avis, et la réponse qu’on donnera à la question fait apparaître la coloration d’un certain nombre de doctrines parmi les plus fondamentales du Nouveau Testament. Telle réponse peut devenir la négation même de tout ce qu’implique la foi évangélique. Si on opte pour la seconde interprétation, d’après laquelle Paul décrirait l’expérience de l’homme irrégénéré, on aura nécessairement une conception différente de la nature et du degré de la corruption totale de l’homme. Ainsi, l’histoire de l’interprétation n’est pas simplement intéressante à examiner, mais surtout révélatrice des profondes divergences qui existent concernant la compréhension des doctrines-clés de la Bible. À quelques exceptions près, on peut situer les positions en augustinienne ou calviniste, et en pélagienne ou arminienne. Les premières optent pour l’interprétation « chrétienne » du passage, c’est-à-dire que l’apôtre décrit l’expérience de l’homme régénéré. Les seconds adoptent la thèse contraire. Bien entendu, nous ne voulons pas simplifier les « positions » en soutenant que ceux qui optent pour la seconde interprétation soient totalement des pélagiens.

Il est intéressant toutefois de noter que le théologien Arminius commença sa carrière en se détachant des positions augustiniennes et réformées traditionnelles précisément à la suite de l’étude qu’il a consacrée au chapitre 7 des Romains, et qu’un père (bien pernicieux) du libéralisme protestant, Faustus Socinius, rédigea en Pologne, durant la même période, un livre sur ce même thème, en défendant les mêmes thèses qu’Arminius aux Pays-Bas. Cependant, nombre de théologiens du Moyen Âge, y compris Thomas d’Aquin, souscrivaient à la doctrine augustinienne, sans que cela fasse d’eux des calvinistes avant la lettre!

Nous avons reconnu que ce texte est l’un des plus difficiles du Nouveau Testament et, par conséquent, quelle que soit l’interprétation pour laquelle on optera, nombre de problèmes mineurs demeureront insolubles. Tout ce qu’on peut espérer, c’est de laisser le moins de problèmes possible et de mieux harmoniser le contenu de ce passage avec son contexte et le reste de l’Écriture.

Historiquement parlant, on distinguera donc les trois interprétations que voici : La première considère qu’il s’agit d’un récit autobiographique de Paul concernant sa vie avant sa conversion. La seconde estime qu’il ne s’agit pas d’une autobiographie, mais qu’au contraire Paul traite dans ce texte de l’homme en général, et du juif en particulier, tous les deux se trouvant en dehors du Christ et soumis à la loi. La troisième admet que Paul décrit sa propre expérience de croyant converti à Jésus-Christ.

La première de ces trois interprétations avait cours jusqu’aux débuts de notre siècle, mais elle a été abandonnée au profit des thèses de W.C. Kümmel qui, dans son ouvrage Romains 7 et la conversion de Paul (1929), a soutenu que le texte ne se référait pas tant au conflit de Paul sous la loi qu’à celui de l’homme non régénéré sous la loi, tel qu’il apparaît au regard du croyant. Les pronoms « je » et « moi » ne s’appliqueraient pas à Paul en personne, mais seraient employés comme une formule rhétorique pour servir l’intention de l’auteur, en décrivant de manière intense, voire dramatique l’expérience de l’homme sans le Christ. Des théologiens réformés, parmi lesquels Herman Ridderbos, ont souscrit à la thèse de Kümmel. Ils appuient cette thèse en affirmant que Paul a pu décrire cette terrible expérience sous la loi, étant donné son combat spirituel de jadis. D’après cette école d’interprétation, dont des réformés font partie, ce n’est pas la description de l’homme régénéré que nous aurions sur cette page, mais celle de l’irrégénéré qui cherche à lutter par la loi seule, indépendamment de la force du Saint-Esprit.

Au sujet de la troisième interprétation, notons en passant que Luther avait opté pour la thèse augustinienne et réformée. Paul décrit son expérience de chrétien. Car à la lumière des fréquents emplois des pronoms « je » et « moi » (quelque vingt fois), il faudrait des preuves contraires bien fortes pour soutenir que l’apôtre n’aurait pas eu en vue sa propre expérience personnelle. Le lecteur aurait de la peine à comprendre qu’il ne s’agit pas d’un morceau d’autobiographie. Si le contexte immédiat ne laisse apparemment pas de place à des traits autobiographiques, faut-il en conclure que Paul ne pouvait interrompre son argumentation théologique pour insérer, brièvement, une note autobiographique? Il en fait autant à d’autres occasions (voir 9.1-2 et 10.1). Là même où le contexte est de caractère historico-rédempteur et a donc trait à l’histoire du salut, Paul se réfère à lui-même et à ses sentiments.

De même, le changement du temps du verbe entre les versets 7-13 et 14-25 soutient l’idée que c’est bien la même personne qui parle dans les deux cas. Tandis que dans les versets 7-13 Paul ne parlait qu’au temps passé, à partir du verset 14 il parle au présent, pour bien montrer que ce qu’il va dire concerne son expérience personnelle en tant que chrétien. Le fait que l’apôtre ne se préoccupe pas d’atténuer la transition et que sa pensée se meut du passé au présent de manière quasi inconsciente prouve le degré de continuité qu’il reconnaît entre son expérience préchrétienne et celle actuelle, écrit James Dunn. Par conséquent, affirme-t-on, il semble plutôt arbitraire de ne pas tenir compte de la possibilité du discours de Paul au sujet de son expérience personnelle, que ce soit au passé ou qu’il s’agisse du présent. Rien en soi, dans Romains 7, ne suggère qu’il suit une telle ligne. À moins, bien entendu, qu’on veuille à tout prix soutenir une hypothèse selon laquelle le langage de l’apôtre ne serait pas celui du croyant justifié. Selon les tenants de la thèse de Kümmel, il y aurait un grand contraste entre la condition dépeinte dans Romains 7.14-25 et celle décrite par le même apôtre dans Romains 6 et 8.

L’homme « misérable » de Romains 7.23 se lamente : « Je vois une autre loi dans mes membres qui guerroie contre la loi de mon esprit et qui me porte dans la captivité de la loi du péché, qui est dans mes membres » (notre traduction). Pourtant, il venait tout juste d’écrire plus haut : « Mais à présent en mourant à ce qui jadis nous liait, nous avons été libérés, affranchis de la loi, afin de servir d’une manière nouvelle par l’Esprit et non de la manière ancienne du code écrit » (7.6). Comment cette personne peut-elle être la même? On peut penser que si Paul avait dit quelque chose comme : « Oh, je ne me sens pas tellement déçu avec moi-même, parce qu’à l’occasion je commets des péchés, mais Dieu merci, la plupart du temps je mène une vie victorieuse », personne n’aurait jamais mis en question le caractère autobiographique d’un tel langage, lequel cadrerait parfaitement avec ce qui semble être affirmé dans Romains 6 et 8.

L’apôtre n’use cependant pas, fait-on remarquer, d’un langage aussi optimiste dans le passage qui nous occupe. Cela expliquerait pourquoi certains ont tellement de la peine à caser les versets 14-25 dans leur contexte. « L’humeur de frustration et de défaite qui pénètre tout le passage cadre mal avec les termes de victoire avec lesquels l’apôtre décrit d’ordinaire la vie normale chrétienne », écrit A. Hoekema. La conclusion est alors naturellement que Romains 7.14-25 ne décrirait pas l’expérience d’un homme régénéré, mais celle d’un incroyant et plus particulièrement celle d’un juif.

Quant à nous, bien que ceci n’indique pas notre acceptation de la thèse d’expérience actuelle de Paul, nous ferons observer que, selon la Bible, le non-régénéré ne peut absolument pas discerner le caractère spirituel de la loi (7.14), condamner le mal qu’il fait (7.15), chercher le bien et haïr toute forme de mal (7.15,19), en voulant pratiquer fidèlement la loi et ne prendre plaisir qu’en elle (7.22). Il est exact qu’en dehors de la grâce de Dieu, l’homme est mort dans ses transgressions et dans ses péchés (Éph. 2.1), il se comporte de la manière que l’on vient d’expliquer; aussi ce serait aller à l’encontre de l’esprit, de l’intelligence et de la volonté de l’homme naturel, lesquels, selon l’Écriture, sont totalement étrangers à la Parole et à l’Esprit de Dieu.

L’homme naturel est incapable d’accomplir le bien et il n’est même pas capable de le vouloir, puisqu’il est asservi au péché. On se place sur un terrain dangereux en prétendant qu’il puisse exister en dehors du Christ un certain zèle à l’égard de la loi. En termes du Nouveau Testament, les juifs qui ont cherché à pratiquer la loi, même au mieux de leurs possibilités, n’ont réussi qu’à souscrire à ses exigences extérieures, sans se laisser saisir par la nature spirituelle de la loi.

Aussi longtemps que Paul n’avait connu que le caractère extérieur de la loi, il ne lui vint pas à l’idée qu’il fut si difficile d’observer et de pratiquer ses préceptes ni de comprendre simultanément toute la corruption et toute la perversion de sa propre nature déchue. À une époque antérieure, il se considéra comme moralement irréprochable, en règle. « Mais, poursuit-il, lorsque le commandement vint, le péché se raviva et alors je mourus » (7.9-10). À la lecture du dixième commandement qui contrôle non seulement les actes extérieurs, mais jusqu’aux pensées les plus intimes et les désirs les plus cachés, il se rendit compte qu’il était irrémédiablement perdu au regard même de la loi. Ainsi, plus il prenait connaissance de l’interdiction, plus il convoitait ce qui était interdit. Ce pharisien si strict était alors tellement loin de prendre plaisir à la loi qu’il se mit à la détester à cause de ses exigences impossibles.

L’effet de la loi sur nos cœurs corrompus est semblable à celui que produit le soleil sur un organisme putride; il provoque la haine contre l’autorité de Dieu. Il crée une peur servile vis-à-vis du châtiment, qui est incompatible avec l’amour, c’est-à-dire l’essence même de l’obéissance. Le chrétien seul est en mesure de reconnaître cela et le verset 14 en est une nette indication. Il est évident que l’irrégénéré n’emploiera point un tel langage. Ses yeux sont fermés à la nature réelle de la loi jusqu’à ce que l’Esprit vienne le régénérer.

Selon Paul, la fonction de la loi, avant et après sa conversion, consistait à identifier le péché et à le condamner, en indiquant la direction de la volonté parfaite de Dieu, mais en aucun cas la loi n’avait donné à Paul la force de surmonter le pécher. La conséquence en fut le redoutable conflit dans lequel son âme se mit à se débattre. Tout en cherchant désespérément à observer la loi, il se rendait compte qu’il tombait toujours à nouveau en deçà de cette loi, sans parvenir à l’obéissance parfaite qu’elle exigeait. Ce conflit ne peut pas se comparer à celui que connaît le non-croyant, même si ce dernier éprouve, lui aussi, l’expérience d’angoisse lorsqu’il s’aperçoit combien sa conduite est en conflit avec son idéal. On n’identifiera pas ce conflit avec celui décrit dans le texte de Romains 7. Chez un non-croyant, le conflit se déroule entre la chair et la conscience. Chez le chrétien, il se situe entre la chair et l’Esprit.

Un tel conflit, selon Calvin, ne peut se dérouler qu’en celui qui a reçu l’Esprit de Dieu, car selon le réformateur, l’homme naturel ne connaît pas ce qu’est la haine du péché. En revanche, le chrétien, lui, condamne le péché, parce qu’il est animé d’un Esprit qui lui fait abhorrer authentiquement et du fond de son cœur le mal et le péché.

Une autre question se pose dans ce cas : Pourquoi Paul se décrit-il comme charnel, puisqu’il est habité par l’Esprit? Or, dans Romains 8.8, le terme charnel désigne le non-régénéré. Mais d’autres références bibliques indiquent que le terme charnel peut s’employer comme adjectif pour décrire certains chrétiens. Par exemple, il accuse les Corinthiens d’être charnels à cause de leur conduite, qu’il blâme avec vigueur. Il semble pourtant qu’il y ait une différence entre « être charnels » et être « en chair ». La première expression désigne l’enfant de Dieu régénéré, considéré du point de vue de sa vieille nature et du péché qui l’habite toujours, tandis que la seconde expression s’applique exclusivement à l’homme non régénéré. L’apôtre déclare qu’il reste toujours charnel, parce qu’il est conscient de la présence du péché en lui (7.14,17,20). Par conséquent, il est normal que, si la chair demeure encore en lui, il soit considéré à cet égard comme charnel, ce qui ne contredit pas le fait de sa régénération.

Quant à l’expression « vendu au péché », ce sont des termes qui sont souvent comparés au texte de 1 Rois 21.20,25, où le prophète Élie dit au roi Achab « qu’il s’est vendu au péché ». Mais la différence saute aussitôt aux yeux. Dans Romains 7, Paul « est vendu » au péché, tandis que dans celui de 1 Rois, c’est Achab qui se vend au péché. Selon le professeur Berkouwer, dans le cas du roi Achab, nous avons affaire à la totale hostilité envers Dieu et à l’abandon inconditionnel au pouvoir du Malin. Dans le cas de Paul, il est question du péché qui le surpasse et l’écrase avec sa force irrésistible pour le rendre malheureux, au point de lui arracher le célèbre cri d’aveux. Pourtant, Paul n’est pas asservi au péché, car l’esclave du péché qu’était le croyant jadis est devenu à présent serviteur de la justice.

Berkouwer accorde une très grande attention à toutes les tentatives qui cherchent à expliquer la contradiction intolérable dans la vie du chrétien, mais il estime qu’elles sont vouées à l’échec et il conclut que le sujet de Romains 7 n’est pas l’homme naturel vu par les yeux du croyant, mais l’enfant de Dieu dont la grâce lui permet de se voir tel qu’il est, sans aucun maquillage.

Les tenants de l’interprétation que nous examinons se demandent quelle est la raison pour laquelle l’apôtre a eu recours à un langage si fort. N’exagère-t-il pas en se considérant comme esclave du péché et homme misérable? Ils rappellent alors Job (Jb 42.6), David (Ps 65.4), Ésaïe (És 64.4-6). Les saints de l’Ancien et du Nouveau Testament ont en commun la profonde conscience de Dieu et de sa loi sainte en face de leur propre péché. Mais qu’on ne prenne surtout pas leurs aveux comme une preuve de peur servile, car il s’agit, bien au contraire, de la crainte de l’enfant de Dieu dans l’attitude du respect et de l’adoration. Il constate qu’il ne parvient pas à se conformer à la loi sainte, bonne et juste de Dieu. Pour quelle raison? Le Saint-Esprit n’avait-il pas créé en lui une nature par laquelle il était capable d’observer la loi? Oui certes, dit-on, d’après Romains 8.2-4, mais il existe une lutte pressante contre le péché.

Paul avait une conscience aiguë d’être loin d’avoir atteint la perfection. Il était conscient de la présence du péché ainsi que de l’ancienne nature, toujours vivace, bien que morte en principe et s’opposant encore, durant le temps « présent », à la loi de Dieu. Partout où il veut montrer son obéissance à la loi, l’autre loi du péché dépasse ses forces l’empêchant d’accomplir ce qu’il souhaite si ardemment. N’aurait-il pas obéi à la loi? Loin de là. Peu de chrétiens ont pu vivre comme il a vécu. Pourtant, ce ne fut pas une vie parfaite. Car, plus le croyant s’approche du Christ, plus il découvre la corruption de sa vieille nature et plus ardemment il languira pour en être délivré. Ce n’est que lorsque les rayons du soleil inondent une pièce sale qu’on peut entièrement apercevoir la crasse et la poussière qui la recouvrent. Ce n’est que lorsque nous nous plaçons réellement en présence de celui qui est lumière que nous devenons conscients du mal et de la corruption qui nous habitent et qui profanent toutes les parties de notre être. Une telle découverte fera alors crier : « Misérable que je suis… »

Poursuivons l’exposé de la pensée traditionnelle, généralement admise par les réformés, avant de présenter une autre approche et lecture du célèbre passage.

Aussi longtemps que le croyant vit la vie présente, il se verra entouré et parfois débordé par le péché. Il est également conscient que le salut promis est futur, ce qui ressort de 7.25 et de la deuxième partie de ce texte. Ainsi, même après le cri de jubilation, le « moi » continuera la bataille contre le péché et il sera divisé. La lutte entre l’esprit renouvelé et la vieille chair ne prendra jamais fin tant que celle-ci ne sera pas totalement anéantie par et lors de la mort physique. Cela ne nie ni ne sous-estime le fait que le croyant a déjà été libéré du pouvoir du péché et de la mort (8.2). Mais ceci ne doit pas se comprendre comme une libération complète dans le présent, puisque le fidèle connaîtra la mort physique (1 Th 4.13-18; 1 Co 15.20-26).

Dans Romains 8.10, nous nous trouvons devant le même paradoxe entre la chair et l’Esprit, rencontré déjà dans le chapitre 7. « Si le Christ est en vous, dit Paul, le corps est mort à cause du péché, mais l’Esprit est vie à cause de la justice. » Bien qu’il se réfère probablement au corps physique qui, comme tel, n’est pas le mal en soi, le corps sert néanmoins, avec ses membres et ses organes, à véhiculer le péché. Ce corps dit mort à cause du péché porte en lui la semence du péché et de la décomposition. En d’autres mots, on ne peut pas s’attendre à mieux tant qu’on vit dans le monde présent. Il est mort parce que le chrétien est encore dans la chair et qu’il est membre du premier Adam, en même temps qu’avec l’Esprit vivifiant il vit pour Dieu et il est mort quant au péché. Mais aussi longtemps que le chrétien est dans la vie présente, il portera son corps de péché avec lui-même.

La délivrance du corps de péché, en tant qu’événement futur, apparaît clairement dans toute l’épître, notamment dans le chapitre 8, même si, dès à présent, il ne se trouve plus sous le pouvoir de condamnation que possède le péché. Mais le fait que le péché l’accompagne et le fait soupirer ne devrait décourager personne. Le meilleur est à venir.

Après avoir distingué avec soin entre ce qui déjà est sauvé et ce qui ne l’est pas encore totalement, il poursuit par l’exhortation de mortifier la chair, afin de montrer que notre régénération en principe est en cours et que l’obéissance est désormais possible. Il annonce que l’assurance du salut est acquise et il termine par l’annonce de la glorieuse libération fixée pour le dernier jour, quand le corps actuel sera ressuscité des morts. C’est vers ce jour-là que sont fixés les regards, non seulement du croyant, mais encore de la création tout entière. Alors, le peuple fidèle recevra l’adoption. Cette rédemption totale et définitive apparaît aussi comme future en 8.23-25. En attendant, les croyants continuent à gémir en eux-mêmes à cause du péché, toujours présent, ainsi qu’à cause des tribulations et des afflictions (2 Co 6.10). D’une part, ils gémissent « misérable que je suis… », d’autre part, ils jubilent « grâces soient rendues à Dieu… »

Le chrétien vit dans la tension des temps, entre le paradoxe du déjà accompli et du pas encore. En d’autres termes, il est placé entre l’accomplissement commencé et l’achèvement total qu’il attend, en principe déjà inauguré et en cours. Son existence dans la chair n’a pas pris fin, bien que l’œuvre de Dieu ait été en principe achevée en lui (voir Ph 1.6).

Selon James Dunn, ce n’est que lorsque nous aurons apprécié la manière dont le chrétien, dans la pensée de Paul, reste en rapport avec la chair et la mort que nous parviendrons à bien saisir le sens du passage que nous étudions, ainsi que la façon d’incorporer ce passage dans l’ensemble de la sotériologie (doctrine du salut).

Le chrétien appartient donc à deux âges : l’âge présent et celui à venir. Le Christ a été mis à mort, il a été enseveli, il est ressuscité et monté au ciel, il est assis, il est installé dans les lieux célestes (Rm 6.2-7; Col 3.1-3).

Le chrétien est une nouvelle créature, car les choses anciennes sont passées et tout est devenu nouveau (2 Cor 5.17). Mais il est également en rapport avec le monde décadent du péché et il doit y vivre, comme tout un chacun. Il envisage même la mort. Pourtant, il est différent parce qu’il comprend que le monde présent est voué à la destruction et que la figure de ce monde passe (1 Cor 7.31). Il vit dans l’attente de l’âge nouveau et aspire à sa manifestation. Jusqu’à ce jour heureux, il aura à lutter contre Satan, le monde, le péché et sa propre chair. En principe, la guerre a été gagnée et il sait qu’il ne peut plus jamais la perdre. S’il lui advient de crier sa déception, il ne sombrera pas dans le désespoir, car des cris de jubilation suivront les cris de détresse (Rm 8.37).

Une approche fort intéressante et une interprétation originale de Romains 7 a été celle proposée par Krister Stendhal1. Elle déplace le problème de l’expérience subjective de Paul, de son « introspection » couramment confondue avec une considération « objective » de la loi, consécutive à sa conversion, afin de souligner précisément, sinon exclusivement, la fonction de la loi dans l’ensemble de l’économie du salut. Ainsi, elle évite de tomber dans les débats séculaires enlisés dans l’impasse de l’expérience introspective du grand apôtre et, par voie de conséquence, de tout chrétien. Sans forcément renier ce qui dans la précédente interprétation avait de positif à cet égard, à savoir relatif à l’expérience subjective de Paul, à son « combat » intérieur, nous estimons qu’elle n’a pas rendu totalement justice au passage ici examiné. Nous résumerons les points principaux de cette importante étude.

Pour son auteur, l’histoire du christianisme occidental a salué l’apôtre Paul comme le héros (et ajoutons nous-mêmes le héraut) de la conscience introspective. Ici se trouve l’homme en prise avec le problème suivant : « Je ne fais pas le bien que je veux, mais le mal que je ne veux pas » (7.19). Le problème devient aigu lorsqu’on essaie de se représenter l’image de la fonction et de la manifestation de l’introspection dans la vie et les écrits de Paul. Et cela devient d’autant plus aigu que des interprètes occidentaux ont trouvé le dénominateur commun entre Paul et l’expérience des hommes, puisque l’affirmation paulinienne de la justification par la foi a été accueillie comme la réponse au problème auquel l’homme honnête fait face dans sa pratique introspective. Nous observons cela notamment dans le protestantisme, qui sur ce point a ses racines dans la pensée augustinienne et la piété du Moyen Âge. La conscience du péché chez Paul a été interprétée à la lumière du combat de Luther dans sa conscience torturée. Or, c’est exactement sur ce point que nous constatons la différence la plus drastique entre le réformateur et l’apôtre, entre le 16e et le 1er siècle.

Un regard neuf sur les écrits du dernier montre que l’apôtre avait été équipé par ce qui à nos yeux peut être tenu pour une conscience bien robuste. Dans Philippiens 3, Paul parle clairement de sa vie antérieure à son appel chrétien et on n’y trouverait pas d’indication qu’il avait une quelconque difficulté à accomplir la loi. Au contraire, il avoue qu’il était sans reproche. Sa rencontre avec Jésus-Christ sur le chemin de Damas, selon Actes 9.1-9, n’a pas changé le fait. Il n’eut pas besoin de la restauration d’une conscience abîmée; il ne fait aucune mention d’une transgression de la loi, au contraire, il rappelle ses « performances » de bon juif.

Dans Romains 2.17 à 3.30, Paul a démontré l’impossibilité d’observer toute la loi. Nous passerons outre l’accusation dont l’apôtre fut l’objet de n’avoir nullement compris le sens et la fonction de la loi par les juifs. Toutefois, cette impossibilité est parallèle à son affirmation d’avoir été sans faute vis-à-vis d’elle. Or, Romains 2 et 3 traite de toute autre chose, ce qu’il conviendrait d’examiner à part. L’essentiel en étant, ainsi que nous l’avons démontré plus haut, que les juifs ne sont pas plus « capables » d’observer la loi que les païens. La loi ne les a pas secourus!

Or, écrit K. Stendhal, si tel est le cas pour Paul le pharisien, cela l’est a fortiori aussi pour Paul le chrétien. Il n’a pas souffert sous le poids de la conscience s’accusant de ses manquements vis-à-vis de la loi. La célèbre formule « simul justus ac peccator », c’est-à-dire à la fois juste et pécheur, peut avoir une certaine base dans les écrits de Paul, mais la formule ne pourrait pas passer pour être le centre de son attitude consciente par rapport à ses péchés personnels. De toute évidence, Paul n’était pas accablé, dirons-nous, d’une conscience introspective, tel que le laisse supposer la célèbre formule protestante.

Il est utile de comparer ces observations avec l’expérience de Martin Luther, considéré comme représentant le christianisme paulinien. Chez ce dernier, nous trouvons le problème de la piété et de la théologie médiévale. Ses 95 thèses le signalent. Un examen scrupuleux et pénétrant a atteint chez lui un degré d’intensité exceptionnel. Luther fut un disciple fidèle d’Augustin. Car le grand docteur de l’Église peut être tenu pour être le premier à avoir exprimé le dilemme d’une conscience introspective. Il est pour le moins étonnant que l’apôtre ait compté relativement peu pour la pensée de l’Église, durant les 350 premières années de son histoire. Certes, il est cité et même honoré, mais il semble que son grand principe de la justification par la foi a été oublié. C’est avec Augustin que l’on trouvera l’interprétation de Paul se servant de ce qui est la couche plus profonde de la pensée de l’apôtre. L’explication pourrait s’en trouver dans le fait que, jusqu’à Augustin, l’Église a eu l’impression que Paul traita ces sujets que lui-même aussi traite. Ce ne fut donc pas avant Augustin que la pensée sur la loi et la justification a été appliquée de manière consistante comme un problème humain plus vaste et intemporel. Rappelons que les Confessions d’Augustin sont le premier grand document de l’histoire de la conscience introspective. Cette ligne augustinienne aboutit à son point culminant dans le combat pénitentiel de Luther, moine augustinien, et dans son interprétation de la pensée de Paul.

On peut résumer la situation en disant que l’interprétation que Luther donne de Paul se fonde sur une analogie des déclarations au sujet de la foi et des œuvres, de la loi et de la grâce, des juifs et des gentils, en les lisant à la lumière de la piété médiévale. Pour Paul, la question débattue est la suivante : Qu’advient-il à la loi, non au principe légaliste, lorsque vient le Messie? Quelles sont les ramifications de l’arrivée du Messie pour la relation entre les juifs et les païens? Car Paul n’était pas parvenu à sa vue de la loi en méditant sur son effet sur sa conscience, mais plutôt en comprenant la place des gentils dans l’Église. Alors que Paul s’intéresse à l’inclusion des païens dans la communauté messianique, ses déclarations sont maintenant lues comme étant des réponses à la quête d’assurance du salut. Ce changement du cadre de référence affecte l’interprétation sur plusieurs points.

Selon l’interprétation courante du christianisme occidental, on pourrait supposer que l’argument de Paul a été renversé à son opposé; à présent, la loi est le pédagogue pointant vers le Christ. Nul ne peut atteindre la foi véritable en Christ à moins que sa propre justice soit anéantie par la loi. La fonction du second usage de la loi consiste à faire voir à l’homme son besoin urgent d’un Sauveur. Dans cette interprétation, la distinction de Paul entre juifs et païens a été évacuée. Le pédagogue devient une affirmation qui concerne à présent l’humanité tout entière, et non plus « moi » ou « nous », à savoir Paul et ses compagnons. En outre, la loi n’est plus celle de Moïse qui exige la circoncision et qui devint caduque pour laisser place à la foi au Messie, elle est plutôt l’impératif moral comme tel, exprimant la volonté de Dieu pour l’humanité. Et finalement, l’argument de Paul selon lequel les païens ne doivent pas venir au Christ au moyen de la loi, c’est-à-dire, pour être plus précis, par la circoncision, a été changée en une affirmation selon laquelle tous les hommes doivent venir au Christ avec des consciences convaincues adéquatement par la loi et par son insatiable exigence de justice. La réinterprétation est tellement radicale que toute la question des rapports entre juifs et païens a été escamotée.

K. Stendhal soutient que la différence sur ce point entre Paul et Luther est radicale. Mais elle eut des ramifications importantes aussi bien chez les disciples de Luther que chez des agnostiques occidentaux (faut-il penser à Albert Camus par exemple?). On est même allé plus loin que la réinterprétation du réformateur, notamment dans celle existentialiste de Rudolf Bultmann, du fait que l’homme serait le même à tous les époques, identique à l’homme décrit par Paul.

Assurément, on ne peut nier que le péché chez Paul est un terme crucial de son vocabulaire, notamment dans Romains. Mais il est plus difficile d’évaluer la puissance du péché dans sa vie et de quelle manière il fut conscient de ses péchés actuels. Il est clair que son péché fut d’avoir persécuté jadis l’Église de Dieu. Ailleurs, il reconnaît qu’il est le premier des pécheurs que le Christ est venu sauver (1 Tm 1.15). Pourtant, la grâce du Christ ne fut pas en vain chez lui, puisqu’il a travaillé plus que les autres. Le Christ est mort pour nous tous, pécheurs. Mais quelle est la conscience de Paul de son état de pécheur après sa conversion? Certains troubleraient-ils sa conscience? (voir Ac 23.1 et 24.16). Il se trouve aux antipodes des Confessions d’Augustin. S’il se rend compte de son combat dans son corps, nous remarquons qu’il le fait dans un ton d’assurance, il n’est pas désespéré. Dans Romains 9.1 et 2 Corinthiens 1.12, il témoigne de sa bonne conscience, avec comme point culminant 2 Corinthiens 5.8-10, où il est certain d’être approuvé par le Seigneur qui sera son juge. Nous y voyons là le signe d’une conscience robuste. Nous aurons de la peine à trouver des passages où Paul parlerait de lui-même comme d’un pécheur actuel. La grâce de Dieu lui est suffisante et cette grâce se manifeste non dans une faiblesse « spirituelle », mais dans l’infirmité du corps.

Mais alors, comment interpréter la célèbre phrase de Romains 7.19 : « Je ne fais pas le bien que je veux, je fais le mal que je ne veux pas »? Ne témoigne-t-elle pas d’une conscience introspective profondément sensible? Bien que l’on ait discuté si cette expérience était celle de l’homme irrégénéré ou converti, comme nous l’avions exposé plus haut, très peu d’attention a été accordée au fait que Paul ici s’occupe principalement de la loi. Il ne s’intéresse pas, en premier lieu et explicitement, de sa situation propre ou de celle de l’homme en général. Le style de la diatribe nous aide à voir ce qu’il fait. La loi est-elle péché? La réponse est non, elle est sainte. Est-ce alors cette bonne loi qui a provoqué ma mort? La réponse est résumée dans le verset 13. Elle agit à la manière du bon médicament en soi-même qui peut provoquer la mort, du fait que l’organisme malade ne peut le tolérer.

Paul s’occupe donc de l’interprétation de la loi, de sa défense de sa sainteté et de sa bonté. Il est frappant de voir que le moi, l’ego, n’est pas identifié avec le péché ni avec la chair. La phrase « je ne fais pas le bien que je veux, mais le mal que je ne veux pas » ne conduit pas directement à l’exclamation « misérable que je suis ». Le point est celui de l’acquittement, non de la contrition. Or ceci aurait été impossible si Paul ne pensait qu’à la condition de l’homme en général. La possibilité de la distinction entre la bonne loi et le mauvais péché est fondée sur l’observation triviale que tout homme sait qu’il existe une différence entre ce qu’il doit faire et ne pas faire. Malheureusement, ou heureusement, écrit K. Stendhal, Paul a exprimé son argument second de telle manière que, ce qui pour lui-même et ses contemporains était une observation de bon sens, est apparu à des interprètes ultérieurs comme une vue pénétrante de la nature de l’homme et celle du péché. Ceci put devenir cela une fois que la loi de Dieu n’a plus occupé la place centrale, comme elle le fait dans la pensée de Paul. La question relative à la loi devint une question incidente. On s’est approché de l’écrit avec des yeux d’Occidentaux. L’interprétation occidentale atteint son point culminant lorsque la volonté de l’homme devient le centre de la perversion. Pourtant, Paul affirme que la volonté est bien là! (7.18).

Si notre analyse est correcte, conclut l’auteur, elle indique la direction d’un problème majeur dans l’histoire de l’humanité. Durant des siècles, l’Occident a par erreur supposé que les auteurs bibliques s’occupaient et traitaient des problèmes qui sont leurs problèmes d’Occidentaux. Le théologien serait disposé à admettre et à apprécier l’approfondissement de la connaissance de la nature humaine telle qu’elle eut lieu en Occident, qui atteignit son apogée avec Luther et son point culminant dans la pensée humaniste de Freud. Il pourrait soutenir que cette interprétation occidentale de la pensée est un développement théologique valable, que même de tels développements ont été soutenus par des éléments implicites au Nouveau Testament.

Mais le cadre de l’histoire du salut tel que nous l’avons exposé ouvre une nouvelle perspective pour la théologie systématique et la pratique pastorale. Le « éphapax » paulinien (« une fois pour toutes ») dans Romains 6.10 ne peut être transposé pleinement et seulement en quelque chose répété dans la vie individuelle de tout croyant. Pour les païens, la loi n’est pas le pédagogue qui conduit au Christ, ou bien qui se comprend seulement de manière analogique et secondaire. Car nous sommes dans une situation nouvelle où la foi au Messie Jésus nous accorde le droit d’être appelés des enfants de Dieu. L’Église devrait présenter d’autres aspects de la pensée de Paul que seulement les éléments touchant à l’introspection. L’Église n’invite pas le pécheur à ses portiques par voie d’introspection analytique du péché et de la faute. Paul fut un bon chrétien, mais il ne donne pas de signes qu’il eut une telle conscience. Peu de choses sont aussi libératrices et créatrices que la distinction claire entre ce qui est la pensée originale de l’apôtre et sa traduction adaptée à l’une ou l’autre époque, y compris la nôtre.

c. Romains 8 à 13🔗

Après la place exceptionnelle que nous avons accordée à l’examen du passage de Romains 7.14-25, nous poursuivons par un examen plus rapide de la suite de l’épître et de la place que l’apôtre y accorde à la loi.

La description de la loi comme sainte, juste et bonne, objet de plaisir pour le cœur fidèle, suffit à démontrer que la délivrance dont jouit à présent le chrétien est la liberté par rapport aux exigences pénales et au pouvoir de condamnation détenus par la loi. Ceci est rappelé dans ce cri de joie, en 8.1-4. Le terme loi est employé ici en un sens général, comme principe ou pouvoir qui produit l’action ordonnée, et « la loi de l’Esprit de vie » peut se lire au sens de méthode, d’opération de l’Esprit qui, en d’autres termes, peut signifier toute l’action de l’Évangile dans la vie du chrétien. Il s’agit bien d’une nouvelle loi au moyen de laquelle opère l’Esprit. L’autre expression, « loi de péché et de mort », ne doit pas se comprendre comme s’il faisait allusion à la loi mosaïque, mais au principe de péché, qui produit la mort mentionnée dans le chapitre précédent; à moins de penser à la loi comme apportant la connaissance du péché et amenant alors la condamnation et la mort. L’échec de la loi, qui n’a pu produire des résultats satisfaisants, est définitivement attribué aux faiblesses de la chair, ce que confirme le grand exposé du premier paragraphe.

Mais tout ce que la loi ne pouvait pas accomplir l’a été par le Christ, sur la croix. Le péché de ceux qui sont unis à lui par la foi est condamné en lui sur la croix. Cette loi n’est par conséquent pas abrogée. Elle demeure la norme de toute justice et la règle de vie des croyants. La sainteté, qu’ils ne peuvent pas atteindre, demeure une sainteté exigée par la justice de la loi. L’enseignement paulinien est loin d’être antinomien, c’est-à-dire opposé à la loi, non seulement par le développement « théorique » que nous avons exposé, mais également par sa grande déclaration dans le passage de Romains 13.8-10 où il prescrit une éthique nouvelle, une règle de vie fondée sur le commandement connu de Dieu. (Dans Éphésiens 6.2, il soulignera plus particulièrement le deuxième commandement). Après avoir spécifié certains commandements, il déclare en résumé : l’homme en Christ a découvert le véritable principe de l’obéissance. Il entre dans un nouvel esprit de fidélité envers la sainte loi. Ceci se résume dans l’amour reçu par le Christ et vécu par et grâce à lui. Il considère la loi non plus comme un sévère pédagogue, mais, dans une vision plus claire, il voit la loi incorporée au Christ, si on ose cette expression. Aussi l’imitation du Christ implique-t-elle l’obéissance à sa loi.

En Romains 13.1-7, où le terme n’apparaît pas, la loi indique néanmoins la relation du chrétien avec la loi romaine et la souveraineté de l’Empire. Les pouvoirs existants ont été établis par Dieu et, idéalement, ils doivent refléter l’autorité divine. Aussi il faut se soumettre au magistrat et le craindre. Nous ne chercherons pas à développer ce point de vue qui ressort de l’usage appelé « politique » ou « civil » de la loi.

Parcourons rapidement à présent l’autre grande épître qui traite de la loi de manière extensive.

2. La lettre aux Galates🔗

Une grande partie du contenu de cette épître est consacrée à la loi, envisagée ici dans son rapport avec la grâce et la liberté. On peut dire en général que la loi, en rapport avec la justice, est une figure prédominante dans la lettre aux Romains. L’apôtre l’envisage ici en tant que loi mosaïque, dans sa totalité, mais avec une certaine insistance sur son aspect cérémoniel. Le sujet est introduit par le rappel de l’épisode d’Antioche (Ga 2.11-14).

Il commence alors à montrer l’inconsistance du comportement de ceux qui se savent justifiés par la foi en Christ et non par les œuvres de la loi (Ga 2.16), mais qui obligent les chrétiens nouvellement convertis du paganisme à observer les prescriptions de la loi. Il résume ensuite sa thèse par la déclaration étonnante : « car c’est par la loi que je suis mort à la loi, afin de vivre pour Dieu » (Ga 2.19).

La loi, ayant révélé le péché et prononcé la condamnation, conduit le croyant vers le Christ en vue de sa justification. Crucifié avec le Christ, le croyant entre dans une union tellement vitale avec lui que toute sa vie est dominée par celle du Christ (2.20). Ici apparaît la même ligne de pensée que dans l’épître aux Romains. Ensuite, il démontrera toutes les bénédictions de la grâce dont bénéficient les croyants et qui sont accordées non par le moyen de la loi, mais à cause de leur foi en Christ (3.2-5). Citant l’exemple d’Abraham, il montre comment la loi est foncièrement opposée à la grâce qui, seule, opère le salut (3.6-12). Il établit alors un contraste montrant que le Christ a porté la malédiction de la loi, ayant obtenu et étendu ainsi sur nous la bénédiction d’Abraham (3.13-14). Le grand argument de Paul est que la fonction, le rôle de la loi, ne consiste pas à nous accorder la vie, mais à nous conduire vers le Christ. Comme dans sa lettre aux Romains, il montre que la promesse de l’héritage était accordée en dehors de la loi et faite même quelque 430 ans avant la promulgation de celle-ci. Par sa nature, la loi ne s’oppose donc pas à la promesse.

Mais l’intention de la loi n’est jamais d’accorder la vie à ceux qui ne la possèdent pas (3.12). L’accomplir suppose par conséquent posséder la vie, et la loi ne peut assurer la continuation de la vie qu’à condition d’être parfaitement obéie. La loi ne peut conférer la vie, mais seulement la contrôler. Si elle exige la justice, elle ne peut la procurer.

Elle est notre pédagogue (3.24). Le jeune Grec de l’antiquité était placé pendant sa minorité sous la tutelle d’un serviteur, parfois un esclave, dont une partie du devoir consistait à conduire l’enfant, parfois récalcitrant, à l’école. Dans ce sens, déjà explicitée dans l’épître aux Romains, la loi morale montre le péché et nous conduit vers le Christ. Ce passage insiste plutôt sur les aspects cérémoniels et typologiques qui avaient comme but de conduire les gens au Christ. Mais la servitude de cette situation était insupportable, et malgré le privilège de la naissance sous la dispensation de la loi de Moïse, il y avait un caractère de contrainte dans l’observance de tous ces préceptes. Plus loin, l’apôtre parlera de l’enfant qui, héritier d’une grande propriété, reste sous la garde de serviteurs jusqu’au jour fixé par le père, ce qui revient à évoquer la période passée sous la tutelle du pédagogue et appelée état d’esclavage (4.3). La loi a restreint la liberté, et les observances typologiques, bien que montrant d’avance la grâce de l’Évangile, étaient, avec leurs nombreux détails, de lourds fardeaux pour les croyants de l’Ancienne Alliance. Peu de choses étaient laissées à l’action spontanée de l’esprit, et toute la vie du juif, depuis le berceau jusqu’à la tombe, était soigneusement réglée. La nouvelle filiation du chrétien signifie sa liberté par rapport aux restrictions de la loi.

Mais dans la plénitude des temps, « Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme et né sous la loi » (4.4). Le caractère de l’Évangile ressort du fait que le Fils accomplit la loi et abroge pour nous l’observation typologique des lois cérémonielles.

Dans ce nouvel état, le croyant peut agir spontanément et se conformer aux grands principes de la loi morale, tandis que les règles mineures, nécessaires pour un temps, durant l’enfance spirituelle des hommes, ne sont plus nécessaires pour les enfants de Dieu (3.25-26). C’est pourquoi il avertit les chrétiens de se détourner des rudiments inutiles, voire oppressants, parmi lesquels on trouve l’observation des mois, des jours, des saisons et des années (4.9-10).

3. Les autres écrits de Paul🔗

Peu d’autres passages traitent de la loi, mais partout où il en est question, il s’agit d’abord du Pentateuque (1 Co 9.8-9 et 14.21), ou l’Écriture dans son ensemble. Dans 1 Corinthiens 9.20, il se réfère à la pratique qui cherche à gagner des hommes au Christ, en s’accommodant à leur point de vue, et dans 15.56, on trouve un écho de la lettre aux Romains. Dans 1 Corinthiens 7.39, nous lisons une référence à la femme liée par la loi, quoique dans certains manuscrits le terme est omis.

Dans 2 Corinthiens, le mot n’apparaît pas, quoique le système légal soit mentionné comme étant l’administration de la mort, en contraste avec l’Évangile qui, lui, administre l’Esprit (2 Co 3).

Le terme apparaît dans Éphésiens 2.15, par rapport à l’œuvre du Christ. Philippiens 3.5,6,9 constitue une notice autobiographique décrivant un orgueilleux pharisien, se considérant sans faute aux yeux de la loi, jusqu’à ce qu’il soit convaincu de son péché et conduit à trouver son salut en Christ. Bien que sans contenir le mot, la pensée se trouve aussi dans l’épître aux Colossiens, où il établit un vif contraste entre la circoncision spirituelle et la circoncision physique.

Dans 1 Timothée 1.5-11, nous avons deux importantes déclarations affirmant que la loi est bonne, si l’homme n’en abuse pas légalement, et qu’elle n’est pas faite pour le juste, mais pour les iniques!

Note

1. Krister Stendhal, “The Apostle Paul and the Introspective Conscience of the West” (1963), in: The Writings of Saint Paul, Ed. Wayne A. Meeks, p. 422.