Cet article a pour sujet le marxisme, sa nature, ses principes, ses buts, ses effets et son influence dans la politique sous la forme de progressisme, de socialisme ou de néo-marxisme.

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Le marxisme est-il si mauvais que ça?

J’ai longtemps fait le vœu de ne pas utiliser de catégories théologiques et spirituelles simplistes dans les débats sur la politique, car il y a de vrais chrétiens dans chaque parti politique. Mais alors que certains hommes politiques se lancent dans des extrêmes, les chrétiens ont besoin de s’arrêter suffisamment longtemps pour comprendre la situation dans son ensemble. En fin de compte, la politique commence par une vision du monde. Avons-nous besoin d’être « éveillés », et si oui, à quoi? La nouvelle vision est-elle valide et valable?

Les chrétiens sont appelés par Dieu à être sensibles à l’injustice, généreux envers ceux qui sont dans le besoin et désireux de voir chaque être humain, fait à l’image de Dieu, recevoir respect et compassion. Dans l’Église primitive, les croyants étaient tellement dévoués à s’aimer les uns les autres qu’ils distribuaient avec empressement leurs biens et leurs fonds à ceux qui étaient dans le besoin. Un tel système n’est-il pas meilleur que le capitalisme cupide, dans lequel les milliardaires trouvent des échappatoires fiscales et les familles riches privent les étudiants méritants d’une place à l’université en payant un entraîneur sportif à la sauvette?

À la lumière de pratiques injustes comme celles-ci, de nombreux citoyens votants envisagent les avantages possibles d’une structure culturelle socialiste ou semi-marxiste. Certains prétendent que Marx, dans son hostilité au christianisme, ne s’en prenait qu’aux chrétiens riches de son époque, sans critiquer la préoccupation du vrai christianisme pour les pauvres. Dans de bonnes circonstances, la religion ne peut-elle pas s’asseoir à la table des négociations avec une sorte de théorie économique socialiste ou marxiste? Ne pouvons-nous pas atténuer les pires aspects du capitalisme tout en évitant les pires effets du marxisme à l’ancienne? Une telle terminologie équitable et modérée est attrayante. Peut-être pourrions-nous créer un néo-marxisme, une variante plus humaine de son ancêtre athée.

Dans une telle discussion, nous devons d’abord comprendre les principes fondamentaux du marxisme « à l’ancienne ». Que croyait Marx? Que préconisait-il? Marx était un matérialiste convaincu qui détestait la religion avec une passion implacable parce qu’il la considérait comme un obstacle énorme à la création d’une société socialiste « juste ». Dans son livre Marxism and Religion [Le marxisme et la religion], le spécialiste marxiste David McLellan déclare que « pour Marx, la religion est métaphysiquement et sociologiquement erronée » et que « sa disparition est la condition préalable nécessaire à toute amélioration radicale des conditions sociales1 ». Pour Marx, Dieu n’existe dans l’imagination de l’homme que comme une projection de lui-même. Si Marx a raison sur ce point, alors nous ne pouvons pas tirer notre dignité du fait d’être fait à l’image de Dieu, car il n’y a pas de Dieu. Si Marx a raison, alors la justice est définie et appliquée par celui qui détient le pouvoir (pécheur) des bureaucrates humains.

Dans l’histoire, le marxisme n’a jamais bien fonctionné. Le marxisme à l’ancienne incluait la destruction de la famille et la pratique de l’avortement, deux idéaux obsédants et familiers qui prévalent dans notre propre culture, laquelle aspire à redéfinir la famille et à rationaliser l’infanticide. Le marxisme est un pur monisme laïque, dans lequel la seule réalité est une humanité égoïste sans aucune loi transcendante pour régner sur le mal. Si l’égoïsme n’est pas freiné, ceux qui sont au pouvoir imposeront librement leur volonté aux autres. Il va sans dire que les néo-marxistes d’aujourd’hui se rendent compte que ce serait un suicide politique de construire une plate-forme sur un programme ouvertement anti-chrétien — même si ceux qui sont en faveur de l’infanticide s’en approchent!

Dans tous les cas où le marxisme a été essayé, le produit culturel qui en est résulté ne ressemblait en rien à la générosité volontaire décrite dans le livre des Actes. Au lieu de cela, sans la protection accordée par les lois divines de Dieu, d’innombrables millions de personnes ont été massacrées au nom de la justice sociale.

Nous avons besoin d’un petit aperçu historique. Dans les années 1960, d’éminents théoriciens américains du socialisme et de l’organisation communautaire ont « conçu un plan pour provoquer le chaos en écrasant délibérément les systèmes gouvernementaux [] au point de les faire s’effondrer, ouvrant la voie à l’intervention de l’État » en faveur d’un « système collectiviste2 ». Frances Fox Piven, avec son collègue Andrew Cloward, étaient membres du Nouveau parti « socialiste » de Chicago, qui suivait de près les règles du jeu du néo-marxiste Saul Alinsky, qui évitait délibérément le terme de marxisme et qui était un expert en tromperie linguistique3. David Horowitz, lui-même marxiste révolutionnaire, observe que la Nouvelle Gauche a appris la « technique de la furtivité », suivant les enseignements influents d’Alinsky. Mais s’il marche comme un canard et s’il crie comme un canard, c’est un canard. Alors, en quoi ce canard est-il fondamentalement et théologiquement antichrétien?

Le terme préféré de nos jours est celui de néo-marxisme, et bien que même ce terme ne soit pas utilisé dans les milieux politiques, il définit maintenant une variante plus humaine de son ancêtre athée. En fait, cette version du marxisme, parfois appelée « marxisme culturel », est encore plus radicale que l’ancien marxisme. Elle doit aller au-delà de la libération anticapitaliste du travailleur parce que le marché libre a fini par prendre en charge les besoins économiques du travailleur. Le néo-marxisme propose une cosmologie marxiste complète — une vision du monde complète qui cherche à libérer de toute norme créationnelle non seulement la situation économique du travailleur, mais aussi sa psyché et ses fantasmes sexuels. Le système est apparu comme un programme global de « politique identitaire » subjective générée par l’homme4, s’opposant drastiquement aux oppresseurs dominants. La vision est large :

« Notre conception du socialisme ne se limite pas à la restructuration du travail et de l’activité économique. Elle englobe la modification de toute la gamme des structures sociales, culturelles, politiques et familiales et des relations de pouvoir. […] Le socialisme que nous construisons doit s’attaquer à tous les aspects du pouvoir, à toutes les forces institutionnelles qui affectent notre vie.5 »

Le nouveau marxisme cherche à transformer plus que les conditions de travail des personnes économiquement défavorisées; plus que les besoins des pauvres. Son but est de libérer l’être humain des chaînes des structures cosmiques créées par Dieu. Les socialistes américains progressistes contemporains et les marxistes clandestins ont le vent politique et culturel dans les voiles. « Nous sommes les Démolisseurs, et c’est notre temps6 », déclarent les radicaux qui travaillent à refaire les États-Unis en une nouvelle société. Voici la définition importante de leurs objectifs immédiats : Ils ne veulent pas améliorer la culture occidentale. Au contraire, ils veulent la défaire, car, comme ils le disent, « miner quelque chose, c’est affaiblir ses fondations mêmes pour en provoquer l’effondrement7 ». Il n’y a guère de meilleure façon d’expliquer la confrontation violente entre la gauche et la droite.

Dans quelle mesure les socialistes néomarxistes sont-ils proches du pouvoir réel? Le livre programmatique sur ce nouveau mouvement est Imagine Living in a Socialist USA [Imaginez vivre dans les États-Unis socialistes]8 salué à juste titre par l’auteur de Marxism in the United States [Le marxisme aux États-Unis], Paul Buhle9, comme étant « le meilleur, le plus perspicace et le plus vivant ouvrage sur le socialisme paru depuis longtemps10 ». Le livre Imagine Living affirme clairement que le « socialisme » est un programme social d’égalitarisme radical ou de similitude pour créer le nouveau monde de fantaisie rédemptrice marxiste11. En d’autres termes, s’occuper des plus démunis est un prétexte. Le véritable objectif est le programme religieux radical du mensonge moniste qui cherche à effacer Dieu de la mémoire culturelle.

Dans les années 1920, un groupe d’intellectuels marxistes en Allemagne, affilié à l’Université de Francfort, a créé l’« École de Francfort », ou Institut de recherche sociale. Lorsque Hitler est arrivé au pouvoir, il a cherché à détruire le communisme et l’Institut a été fermé. La plupart de ses participants se sont regroupés à New York, dans un nouvel Institut affilié à l’Université de Columbia. Le plus notable était Herbert Marcuse [que j’ai entendu donner une conférence à Princeton], qui a fait le tour des campus universitaires américains dans les années 1960 avec son message néomarxiste tel qu’il s’exprime dans son Eros and Civilization [Éros et civilisation]. C’est un fait maintenant bien documenté que les idées marxistes dominent l’enseignement sur les campus universitaires actuels12, où le discours conservateur est souvent interdit, comme c’est le cas sur de nombreux sites d’information, magazines et sites Internet. Le président Barack Obama a commencé sa présidence en déclarant que « nous sommes à cinq jours de transformer fondamentalement les États-Unis ».

Que voulait-il dire? Bien que personne ne l’ait pressé de s’expliquer sur la transformation qu’il espérait apporter, nous sommes justifiés de considérer les influences qui l’ont marqué à l’époque pré-présidentielle. Dans sa jeunesse, Obama a été profondément influencé par un marxiste engagé, Frank Marshall Davis. C’est le « Frank » du livre d’Obama, Dreams from My Father [Les Rêves de mon père], qui était membre du parti communiste de Chicago et qui n’a jamais dévié de la ligne du parti. L’historien Paul Kengor déclare : « Personne d’autre ne peut prétendre au titre de mentor d’Obama. […] Frank est une influence durable et permanente, une partie intégrante du séjour d’Obama.13 » Un autre marxiste, Bill Ayers, ancien membre des Weathermen, était un ami d’Obama à Chicago lorsqu’il a été proposé comme candidat à la présidence.

Faire de telles suggestions peut sembler exagéré. Après tout, nous devrions tous avoir des amis qui ne sont pas complètement d’accord avec nous, n’est-ce pas? Cependant, Obama, une fois élu, a nommé dans son équipe un certain nombre de marxistes profondément engagés. Plusieurs d’entre eux continuent à influencer le monde politique.

John Brennen, qui a été nommé par Obama à la tête de la CIA, était autrefois membre du parti communiste. Valerie Jarrett, la puissante superviseure de la Maison Blanche d’Obama, est issue d’une famille associée au Parti communiste de Chicago14. Elle a, à son tour, assuré un poste au révolutionnaire communiste autoproclamé Van Jones en tant que tsar des emplois verts de l’administration Obama en mars 200915. David Axelrod, qui a joué un rôle important dans l’ascension de Barack Obama, était un « bébé en couches rouges16 », élevé par un communiste pour atteindre les objectifs du parti communiste17. Nellie Ohr a écrit un doctorat excusant les excès de Staline et a toujours gardé un esprit ouvert au système de gouvernement marxiste18.

Les dirigeants tels que ceux que je mentionne ici, en plus de nombreux jeunes dirigeants actuels, ne s’identifient pas publiquement comme marxistes. Toutefois, leur histoire et les liens qu’ils entretiennent sont de fortes indications de leur allégeance. On peut se demander dans quelle mesure l’option politique qu’ils appellent « progressisme » est en fait un rejet du Dieu en qui la nation avait autrefois confiance. Vont-ils un jour, comme leurs héros marxistes du passé, chercher à éliminer la foi chrétienne de la culture?

Que doivent faire les chrétiens? Le but de mon argument n’est pas de provoquer un conflit politique brutal ou une haine viscérale. Sur le plan culturel, nous pouvons chercher à maintenir, pour le bien de la culture, les structures juridiques et les libertés constitutionnelles de religion et de parole que nous avons la chance d’avoir aux États-Unis. L’apôtre Paul n’a pas hésité à utiliser sa citoyenneté romaine pour éviter de mauvais traitements injustes de la part des autorités. Aujourd’hui, nos libertés commencent à être bafouées, alors que l’on définit le discours chrétien comme étant un « discours haineux ». Nous devons reconnaître que nous sommes aujourd’hui confrontés à une résistance idéologique et spirituelle massive qui va bien au-delà de la politique. Les chrétiens doivent se rappeler que le marxisme doit être une occasion d’évangélisation, car ce système politique et idéologique moniste est un exemple manifeste de pauvreté spirituelle et idéologique. Les individualistes, qui n’ont aucun sens réel de l’idée binaire19 de « l’autre », ne peuvent jamais savoir ce qu’est le véritable amour. C’est l’idée erronée selon laquelle l’humanité peut, à elle seule, être une explication satisfaisante de la beauté, de l’intelligence et du sens personnel de la vie sur cette planète. Le marxisme ne peut pas expliquer le mal humain ni proposer une solution divine, comme celle que nous, chrétiens, connaissons dans la mort du Christ pour les pécheurs. Les marxistes, qui nient le Dieu à l’image duquel ils sont faits, ont besoin d’entendre l’Évangile de l’amour de Dieu pour les pécheurs.

Ainsi, selon les mots des premiers disciples adressés aux autorités qui souhaitaient les faire taire, notre message d’espoir doit encore l’être :

« Sachez-le bien […]. C’est lui [Jésus-Christ de Nazareth] : La pierre rejetée par vous, les bâtisseurs, et devenue la principale, celle de l’angle. Le salut ne se trouve en aucun autre; car il n’y a sous le ciel aucun autre nom donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés » (Ac 4.10-12).
« C’est pourquoi aussi Dieu l’a souverainement élevé et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père » (Ph 2.9-11).

Notes

1. David McLellan, Marxism and Religion: A Description and Assessment of the Marxist Critique of Christianity [Marxisme et religion : Description et évaluation de la critique marxiste du christianisme], Macmillan, 1987, cité par Kenneth R. Craycraft, « Why Marx Hated Christianity: A Reply to Leonardo Boff » [Pourquoi Marx détestait le christianisme : Une réponse à Leonardo Boff], Crisis Magazine, 1er mars 1989.

2. Jerome R. Corsi, « Congressmen: Obama using “Cloward-Piven maneuver” » [Les membres du Congrès : Obama utilise la « manoeuvre Cloward-Piven »], World Net Daily, 11 juin 2014.

3. David Horowitz, Barack Obama’s Rules for Revolution: The Alinsky Model [Les règles de Barack Obama pour la révolution : Le modèle Alinsky], Sherman Oaks, CA.: David Horowitz Freedom Center, 2009, 26. « Horowitz at Heritage Foundation: The Communist Party Is the Democratic Party » [Horowitz à la Fondation Héritage : Le parti communiste est le parti démocratique], Breibart News, 12 novembre 2013.

4. Leslie Cagan et Melanie Kaye/Kantrowitz, « How Queer Life Might Be Different in a Socialist USA » [Comment la vie des homosexuels pourrait être différente dans un pays socialiste], chapitre 11 dans Imagine Living in a Socialist USA, éd. Frances Goldin, Debby Smith et Michael Steven Smith, NY: Harper Perennial, 2014, 100. 

5. Ibid.

6. Keith Farnish, Underminers: A Guide to Subverting The Machine [Les démolisseurs : Un guide pour subvertir la machine], Gabriola Island, BC, Canada: New Society Publishers, 2013; Keith Farnish, Underminers: A Practical Guide for Radical Change [Les démolisseurs : Un guide pratique pour un changement radical].

7. Keith Farnish, Underminers: A Guide to Subverting The Machine [Les démolisseurs : Un guide pour subvertir la machine], Gabriola Island, BC, Canada: New Society Publishers, 2013, introduction.

8. Frances Goldin, Debbie Smith et Michael Steven Smith, Imagine Living in a Socialist USA [Imaginez vivre dans les États-Unis socialistes], HarperCollins, 2014.

9. Paul Buhle, Marxism in the United States: A History of the American Left [Le marxisme aux États-Unis : Une histoire de la gauche américaine], University of Michigan: Verso, 1991.

10. Buhle, cité sur la couverture de Imagine Living in a Socialist USA [Imaginez vivre dans les États-Unis socialistes], HarperCollins, 2014.

11. Paul Buhle, « Marxism, the United States, and the Twentieth-Century » [Le marxisme, les États-Unis et le 20siècle], Monthly Review, 61, 1er mai 2009; il déclare avec optimisme : « Les réalités d’un écosystème qui s’effondre sont aussi effrayantes que les menaces de guerre nucléaire dans la première décennie d’existence de Monthly Review. Pourtant, il y a beaucoup de perspectives devant nous et au coin de la rue. Le marxisme, toujours inachevé, va nous aider à comprendre ce qu’elles sont et ce qu’il faut en faire. »

12. Toby Young, « The Neo-Marxist Takeover of our Universities » [La prise de contrôle de nos universités par les néo-marxistes], The Spectator, 8 septembre 2018.

13. Paul Kengor, The Communist: Frank Marshall Davis, The Untold Story of Barack Obama’s Mentor [Le communiste : Frank Marshall Davis, l’histoire inédite du mentor de Barack Obama], Simon & Schuster Audio/Mercury Ink, 2012.

14. « Valerie Jarrett », Discover the Networks.

15. « Valerie Jarrett », Discover the Networks.

16. N.D.T. : L’expression « red diaper baby » en anglais désigne un enfant de parents qui étaient membres du Parti communiste américain ou qui étaient proches du parti ou sympathisants pour ses objectifs.

17. Thomas Lifson, « David Axelrod busted on lie about his father’s Communist Party membership » [David Axelrod arrêté pour avoir menti sur l’appartenance de son père au parti communiste], American Thinker, 22 février 2015.

18. Diana West, « Nellie Ohr : Woman in the Middle » [Nellie Ohr : La femme du milieu], The American Spectator, 22 février 2018.

19. N.D.T. : L’auteur utilise les termes « Twoist » et « Oneist », traduits par « binaire » et « moniste ». Ce sont des concepts qu’il a beaucoup développés dans ses écrits et qui décrivent d’une part la foi chrétienne faisant la distinction entre le Créateur et la créature, et d’autre part la croyance païenne abolissant cette distinction et élevant la créature au niveau de divinité (voir Rm 1.18-25).