Cet article a pour sujet la sanctification accomplie par la Parole de Dieu et par son Saint-Esprit, nous amenant à faire des oeuvres bonnes qui ne sont ni parfaites ni méritoires, mais qui sont commandées par sa Parole.

Source: Les vérités de la religion chrétienne, 1711. 10 pages.

La sanctification et les bonnes oeuvres

  1. La justification et la sanctification sont inséparables
  2. Cette sanctification nous est absolument nécessaire pour être sauvé
  3. C’est Dieu qui nous sanctifie, il le fait par la prédication de sa Parole et par son Esprit
  4. Notre sanctification s’avance par l’exercice des bonnes œuvres, que Dieu exige de nous, et qui sont nécessaires pour être sauvé
  5. Nos bonnes œuvres ne méritent pourtant pas la vie éternelle
  6. La règle de nos bonnes œuvres c’est la loi de Dieu
  7. Notre sanctification n’est jamais ici si parfaite, que les fidèles accomplissent parfaitement la loi de Dieu
  8. Comme nous offensons tous les jours Dieu, nous devons en avoir une vraie repentance
  9. Le jeûne est une des choses par lesquelles nous faisons voir quelquefois notre repentance
  10. Le jeûne consiste dans l’abstinence de toute sorte de viandes, et l’Écriture condamne ceux qui prescrivent l’abstinence de certaines viandes
  11. La prière est une des principales parties du culte de Dieu; et un des moyens par lesquels nous avançons notre sanctification
  12. Il ne faut prier que Dieu seul
  13. Il faut prier Dieu dans une langue entendue
  14. Il ne faut point rendre de culte religieux aux anges
  15. Il ne faut point faire d’image de Dieu, et il ne faut se prosterner devant aucune image

1. La justification et la sanctification sont inséparables🔗

« Vous en avez été lavé, vous en avez été sanctifiés, vous en avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus, et par l’Esprit de notre Dieu » (1 Co 6.11).

Vous avez été purifiés de toutes ces souillures, lorsque vous avez été faits chrétiens, et comme tous ces péchés, auxquels vous vous adonniez, attiraient sur vous la condamnation, et souillaient votre âme; vous avez été délivrés de la condamnation, et justifiés par la foi en Jésus-Christ, et le Saint-Esprit que vous avez reçu a effacé ces honteuses taches que le péché avait imprimées dans vos âmes, et vous a rendus saints.

« Je mettrai ma loi en eux, et je l’écrirai dans leur cœur, etc. Je pardonnerai leur iniquité, et je ne me souviendrai plus de leur péché » (Jr 31.33-34).

Dieu promet ici deux choses à son peuple, qui sont inséparables :

  1. Non seulement de leur donner sa loi, et de la leur mettre devant les yeux, en l’écrivant sur des tables de pierre, mais de l’écrire dans leurs cœurs, de leur donner la grâce d’accomplir cette loi.

  2. De leur accorder un entier pardon de tous leurs péchés, et de les oublier entièrement; en considération du grand sacrifice qui devait être offert dans l’accomplissement des temps par Jésus-Christ.

2. Cette sanctification nous est absolument nécessaire pour être sauvé🔗

« Si quelqu’un n’est né d’eau et d’Esprit, il ne peut entrer au Royaume des cieux » (Jn 3.9).

Si quelqu’un n’est régénéré et renouvelé par le Saint-Esprit et par l’eau spirituelle de la grâce, que les anciens prophètes ont prédite et promise, il ne peut point avoir part aux avantages que l’Évangile nous promet, soit dans la grâce, soit dans la gloire; il ne peut être vrai membre, ni de l’Église militante, ni de l’Église triomphante, et il ne peut point espérer d’être fait participant des biens que nous trouvons dans la communion de Jésus-Christ notre Roi. Au reste, Jésus-Christ fait allusion à ce que les Juifs diraient de leurs prosélytes, qu’ils appelaient des nouveau-nés, et au baptême qu’on leur administrait.

« Recherchez la sanctification sans laquelle nul ne verra le Seigneur » (Hé 12.14).

Travaillez à acquérir la sanctification, soit par des prières continuelles, soit par la méditation de la Parole de Dieu, soit en n’oubliant rien de ce qui peut vous donner de l’horreur pour le péché, et de l’amour pour la vertu; soit en évitant toutes les actions qui peuvent vous engager dans le vice; soit en faisant de continuelles réflexions sur votre mort, sur celle de Jésus-Christ, sur le jugement à venir, sur les promesses qui sont faites à la sainteté, et sur les menaces faites aux pécheurs, sur les exemples de sainteté que l’Écriture nous présente, surtout sur les exemples de Dieu et de Jésus-Christ; car il est impossible sans la sainteté d’être heureux, d’être admis à la communion de Dieu, et de jouir des biens qu’il réserve aux saints. Les souillés sont bannis de la Jérusalem céleste.

3. C’est Dieu qui nous sanctifie, il le fait par la prédication de sa Parole et par son Esprit🔗

« Le Dieu de paix vous veuille sanctifier entièrement, et faire que votre esprit entier, et l’âme et le corps soient trouvés sans reproche pour la venue de notre Seigneur Jésus-Christ » (1 Th 5.23).

Veuille le Dieu de paix, qui seul peut opérer votre sanctification, vous sanctifier tellement qu’il ne manque rien à votre perfection; que votre esprit soit parfaitement éclairé des lumières de son Esprit, que votre âme qui est le siège des passions soit entièrement affranchie de ses mauvaises convoitises, et remplie d’amour pour Dieu, et que votre corps, qui est l’instrument dont l’âme se sert pour l’exécution de ses désirs, ne fasse rien qui ne soit agréable à votre Créateur. Que toutes les facultés de votre âme, et tous les membres de vos corps soient tels qu’ils doivent être pour se présenter devant notre Seigneur Jésus-Christ, lorsqu’il viendra pour rendre heureux et glorieux tous les fidèles.

« Sanctifie-les par ta vérité, ta parole est vérité » (Jn 17.17).

Jésus-Christ demande ici pour ses disciples, et pour tous les croyants, qu’il les sanctifie, afin qu’ils puissent résister à toutes les tentations; et qu’il le fasse par sa vérité, savoir par son Évangile, la seule doctrine, qui contient les vérités importantes, et qu’il faut savoir pour être sauvé, la seule qui nous propose tous les motifs à la sainteté, et les plus parfaits exemples, la seule qui est accompagnée de la vertu du Saint-Esprit qui nous sanctifie, la seule qui est capable de nous rendre irréprochables.

« Car la loi de l’Esprit de vie m’a affranchi de la loi du péché et de la mort » (Rm 8.2).

Car non seulement l’Évangile, qui est la loi de la liberté, mais surtout l’Esprit de lumière, et l’Esprit de sanctification, et de consolation, en quoi consiste la véritable vie, m’a retiré de cette servitude où j’étais, de la tyrannie du péché, qui me tenait captif, et m’a délivré des frayeurs de la mort.

4. Notre sanctification s’avance par l’exercice des bonnes œuvres, que Dieu exige de nous, et qui sont nécessaires pour être sauvé🔗

« Car nous sommes l’ouvrage de Dieu, étant créés en Jésus-Christ pour les bonnes œuvres, que Dieu a préparées afin que nous marchions en elles » (Ép 2.10).

Nous sommes l’ouvrage de Dieu, non seulement en ce qu’il nous a donné l’être, mais en ce qu’il nous a donné une nouvelle vie, et qu’il nous a reformés à son image. Nous avons été faits nouvelles créatures, non en Adam, mais en Christ, qui est le principe de notre être spirituel; non parce que nous avions fait de bonnes œuvres, mais afin que nous fassions ces œuvres, que Dieu nous a proposées dans sa parole pour être le chemin que nous devons suivre, et qu’il nous a préparé par son Esprit.

« Cette parole est certaine, et je veux que tu affirmes ces choses, afin que ceux qui ont cru en Dieu aient soin de s’appliquer principalement aux bonnes œuvres : voilà les choses qui sont bonnes et utiles aux hommes » (Tt 3.8).

Ceux qui font profession de croire en Dieu doivent être ardents et vigilants à devancer tous les autres hommes dans toute sorte de bonnes œuvres. Ce sont les seules choses bonnes et utiles, pour glorifier Dieu, pour édifier notre prochain, pour nous assurer de notre élection et vocation, pour procurer à notre âme le repos et la tranquillité, pour nous faire aimer de Dieu, des hommes, et pour nous procurer le bonheur éternel.

« Comme le corps sans l’esprit est mort, de même la foi, qui est sans les œuvres est morte » (Jc 2.26).

Comme un corps qui ne respire plus est un corps mort, de même on peut assurer qu’une foi qui ne se montre pas par les œuvres, lorsqu’elle en a le temps, est une foi morte, et qui ne peut sauver.

5. Nos bonnes œuvres ne méritent pourtant pas la vie éternelle🔗

« Quand vous aurez fait toutes les choses qui vous sont commandées, dites : nous sommes des serviteurs inutiles, parce que nous avons fait ce que nous étions obligés de faire » (Lc 17.10).

Il n’y a point d’homme qui fasse tout ce que Dieu a commandé (1 R 8.46; Ec 7.20; Jc 3.2; 1 Jn 1.8), mais quand il s’en trouverait, ils peuvent dire qu’ils sont des serviteurs inutiles, non seulement parce que Dieu ne peut retirer aucune utilité de leurs services, mais aussi parce qu’avec tout leur zèle et toute leur application, ils ne sauraient passer la tâche qui leur est donnée, et ils ne font rien au-delà.

« Les gages du péché, c’est la mort, mais le don de Dieu est la vie éternelle par Jésus-Christ notre Seigneur » (Rm 6.23).

Le salaire du péché c’est la mort temporelle et la mort éternelle. Voilà ce que ce cruel tyran donne à ceux qui en sont esclaves, c’est la solde qu’il donne à ses soldats, mais la vie éternelle est un don que Dieu fait à ceux qui lui obéissent pour l’amour de Jésus-Christ, qui nous l’a acquise par son sang. Le mot de l’original signifie les libéralités que les princes font quelquefois à leurs soldats au-delà de leur paye ordinaire. La paye est due au service, mais les libéralités sont un effet de la bonté de Dieu; ainsi au lieu que le pécheur mérite la mort, le fidèle obtient la vie éternelle par un pur don.

« Car tout bien compté, j’estime que les souffrances du temps présent ne sont point à comparer avec la gloire à venir, qui doit être révélée en nous » (Rm 8.18).

Quand on compare toutes les souffrances auxquelles on est exposé dans cette vie, avec la gloire que Dieu nous réserve, qui est maintenant cachée, mais qui sera un jour révélée, on trouve qu’il n’y a aucune proportion entre elles, soit à les considérer en elles-mêmes, soit à considérer leur durée. L’affliction qui ne fait que passer produit en nous un poids de gloire excellemment excellente (2 Co 4.17). Saint Paul qui avait été exposé à tant de disgrâces, et qui avait été élevé au troisième ciel, pouvait bien faire cette comparaison. Il l’avait faite aussi et ayant mis dans une balance ces deux choses, il avait trouvé que la gloire l’emporte de beaucoup.

« Vous êtes sauvés par grâce par la foi, et cela non point de vous, c’est le don de Dieu; non point par œuvres, afin que nul ne se glorifie » (Ép 2.8-9).

Nous avons déjà expliqué ailleurs le verset 8, en parlant de la foi; saint Paul ajoute ici que nous ne sommes point sauvés par œuvres, afin que nul ne se glorifie. En effet, si l’homme était sauvé par ses œuvres, il pourrait se glorifier d’avoir mérité le salut; mais Dieu veut qu’il lui donne toute la gloire, et il est certain que nos œuvres ne peuvent rien mériter, soit parce qu’elles sont défectueuses, soit parce que nous ne faisons rien que nous ne devions faire, soit parce que nous ne faisons rien de bien, de nous-mêmes, soit parce qu’il n’y a point de proportion entre nos œuvres et la gloire, ou le salut.

6. La règle de nos bonnes œuvres c’est la loi de Dieu🔗

Elle est contenue dans le Décalogue ou dans les dix commandements, dont le sommaire est l’amour de Dieu et l’amour du prochain.

7. Notre sanctification n’est jamais ici si parfaite, que les fidèles accomplissent parfaitement la loi de Dieu🔗

« Pour moi, je ne me persuade pas d’avoir atteint le but. Mais je fais une chose, c’est qu’en oubliant les choses qui sont derrière moi, et  m’avançant vers celles qui sont devant moi, je cours vers le but, savoir au prix de la céleste vocation, qui est de Dieu en Jésus-Christ » (Ph 3.13).

Pour moi, je n’estime pas que j’aie encore atteint la perfection où je tends. Je reconnais mes imperfections et mes défauts, mais j’y travaille incessamment; c’est là mon unique affaire à laquelle je m’occupe, je ne me rebute, ni ne me relâche point par les difficultés, qui se trouvent sur mon chemin, et par la longueur de la course, je m’avance autant que je puis, et sans considérer les progrès que j’ai déjà faits dans la sanctification; sans tourner même mes yeux sur les choses que j’ai laissées en embrassant le christianisme, je m’avance vers celles qui sont devant moi, vers le but qui est le glorieux prix que Dieu, qui m’appelle, me promet pour l’amour de son Fils.

« Car la chair convoite contre l’esprit, et l’esprit contre la chair, et ces choses sont opposées les unes aux autres, de sorte que vous ne faites point les choses que vous voudriez » (Ga 5.17).

Il y a deux principes en nous, l’un bon, l’autre mauvais, l’un qui vient de la nature, l’autre qui vient de la grâce, l’un qui s’appelle chair, l’autre qui se nomme Esprit. Ces principes sont opposés; l’un répand les ténèbres dans nos entendements, et l’autre les dissipe; ils sont autant contraires que la justice et l’iniquité. L’Esprit a pour son objet les choses du Royaume des cieux, les choses spirituelles, célestes et éternelles. L’objet de la chair ce sont les choses charnelles, temporelles, et terrestres. Les mouvements de la chair sont pour les plaisirs, les honneurs et les richesses; les mouvements de l’Esprit sont pour la sagesse, la sainteté, la félicité. Nous éprouvons ce combat, et il nous arrive souvent de faire pendant l’émotion des convoitises de la chair, des choses pour lesquelles nous avions de l’aversion, et que nous condamnions nous-mêmes.

« Si nous disons que nous n’avons point de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n’est point en nous » (1 Jn 1.8).

Si nous nous disons à nous-mêmes que nous n’avons point péché, que nous sommes parfaits, ou que nous exténuons1 nos péchés; si nous disons que nous n’avons point besoin d’une infinie miséricorde de Dieu pour nous pardonner, nous nous trompons nous-mêmes; outre que ce jugement n’est point conforme à la vérité; et ne reconnaissant pas nos péchés, nous n’avons point une vraie repentance, et par conséquent nous n’en pouvons pas espérer le pardon.

8. Comme nous offensons tous les jours Dieu, nous devons en avoir une vraie repentance🔗

« Repentez-vous; car le Royaume des cieux est proche » (Mt 3.2).

Nous parlerons dans la Morale chrétienne de la repentance.

Lorsque Jean-Baptiste prêchait ainsi, les Juifs étaient remplis de préjugés directement contraires à ces dispositions qu’ils devaient avoir pour recevoir le Messie, et leurs mœurs étaient très corrompues. Il veut donc qu’ils changent entièrement, qu’ils renoncent à leurs préjugés, et a leur mauvaise conduite. Pour les y engager, il leur dit que le Royaume des cieux est approché, que le Messie allait paraître, et établir l’Église chrétienne; il appelle Royaume des cieux l’état de l’Église sous le Messie, par allusion à Daniel 2.44; 4.3; et 7.14. En effet, c’était là un puissant motif pour les porter à la repentance; la bonté de Dieu qui leur envoyait son Fils, le but de sa venue, savoir pour expier le péché, la sainteté qu’il exigeait des hommes, toutes ces choses les engageaient à se repentir.

9. Le jeûne est une des choses par lesquelles nous faisons voir quelquefois notre repentance🔗

« Retournez-vous jusqu’à moi, de tout votre cœur, dit l’Éternel, en jeûnes, en pleurs, et avec lamentation » (Jl 2.12).

Le péché éloigne l’homme de Dieu, il faut que par la repentance il retourne à Dieu; et que ce retour soit sincère, de tout son cœur; parce que Dieu sonde les cœurs; le jeûne, les larmes sont des moyens par lesquels nous faisons connaître notre repentance; mais il faut que ce jeûne non seulement soit une abstinence de viandes, mais qu’il soit accompagné d’un renoncement au péché; que nous y rompions nos cœurs, et non nos vêtements, et que nos larmes partent d’un cœur pénétré de douleur d’avoir offensé Dieu.

10. Le jeûne consiste dans l’abstinence de toute sorte de viandes, et l’Écriture condamne ceux qui prescrivent l’abstinence de certaines viandes🔗

« Que personne donc ne vous condamne pour le manger ou pour le boire » (Col 2.16).

Que nul n’entreprenne de vous donner des lois, et de vous condamner, si vous n’observez pas les lois qui ont été autrefois données ou d’autres qu’on pourrait publier. Jésus-Christ a aboli toutes ces abstinences.

« Or l’Esprit dit expressément, qu’aux derniers temps, quelques-uns se révolteront de la foi, s’adonnant aux esprits abuseurs et aux doctrines des démons : Enseignant des mensonges par hypocrisie, étant cautérisés dans leur propre conscience, défendant de se marier, commandant de s’abstenir des viandes, que Dieu a créées pour les fidèles, et pour ceux qui ont connu la vérité, pour en user avec action de grâces. Car toute créature de Dieu est bonne; et rien n’est à rejeter, étant pris avec action de grâces, parce qu’elle est sanctifiée par la prière » (1 Tm 4.1-4).

L’Esprit de Dieu, qui nous inspire, dit en termes clairs et exprès que dans les derniers temps, sous la nouvelle dispensation, quelques-uns abandonneront la saine doctrine, en suivant des docteurs qui les séduiront, et qui leur enseigneront des doctrines diaboliques, comme le culte des esprits; car par les démons, on peut entendre, non seulement les anges apostats, mais en particulier les âmes et les esprits des hommes illustres, à qui les païens donnaient le nom de horos et de domons;

Il ajoute que ces docteurs enseigneront des mensonges sous le masque de l’hypocrisie, qui est commune à tous les faux docteurs; et que leur conscience sera cautérisée. On appelle ainsi ou une conscience, qui sachant le mal qu’il y a en une chose, n’y est pourtant pas sensible, ou une conscience qui tourmente et qui brûle ceux qui sont dans un mauvais état; ce qui marque très bien la conscience de ces faux docteurs, qui sont tourmentés, parce qu’ils combattent leurs lumières, ou qui sont retenus dans l’erreur, et dans un faux culte par des préjugés si puissants qu’ils n’en peuvent revenir, et qu’ils ne connaissent plus la vérité, en ayant étouffé en eux le sentiment.

Il dit encore que ces gens défendent de se marier; et il marque par-là, non seulement ceux qui ont condamné le mariage, mais aussi ceux qui ne le condamnant pas absolument, l’interdisant pourtant à de certaines personnes, croyant que leur vocation et leur charge exigent qu’ils vivent dans le célibat.

Il leur donne un autre caractère, c’est qu’ils commanderont de s’abstenir des viandes que Dieu a créées, et cela encore par hypocrisie, sous le prétexte spécieux de mortifier la chair et les passions, et de tenir l’esprit plus disposé à la méditation et à la prière, ne considérant pas que Dieu a créé toutes les viandes également afin que les fidèles, et ceux qui ont connu la vérité de notre Seigneur, en usent avec actions de grâces, sans aucun scrupule; car toutes les créatures sont bonnes, il n’y a aucune viande qui puisse d’elle-même, et de sa nature, souiller l’âme de celui qui en mange. Ainsi, il n’y en a aucune qu’on doive rejeter, pourvu qu’on la prenne en bénissant le Créateur. Dieu par son Évangile nous en permet l’usage, et a aboli toute distinction de viandes sous la nouvelle économie; ainsi ce qui était défendu sous la loi est permis maintenant, et la prière que nous faisons par laquelle nous implorons la bénédiction de Dieu sur les viandes, les sanctifie et les consacre à l’usage pour lequel elles ont été destinées par la providence.

11. La prière est une des principales parties du culte de Dieu; et un des moyens par lesquels nous avançons notre sanctification🔗

Nous en parlerons dans la Morale chrétienne.

12. Il ne faut prier que Dieu seul🔗

« Invoque-moi au jour de ta détresse, je t’en délivrerai » (Ps 50.15).

La prière est le sacrifice que Dieu agrée le plus, pourvu qu’elle soit faite avec les conditions qu’il exige.

Elle doit être faite en tout temps, et c’est là le grand remède à tous nos maux; ainsi, dès que nous sommes affligés, nous devons prier; et Dieu ne manquera point de nous exaucer, s’il le juge à propos pour sa gloire et pour notre salut. Mais il ne nous est jamais prescrit de prier aucun autre que Dieu.

« Tu adoreras le Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul » (Mt 4.10).

L’adoration et le culte religieux sont dus uniquement à Dieu (Dt 6.13; 10.20 et 1 S 7.3-4), nous verrons, ailleurs ce qu’emporte l’adoration.

13. Il faut prier Dieu dans une langue entendue🔗

« Si je prie en un langage inconnu, mon esprit prie, mais mon intelligence est sans fruit. Quoi donc! je prierai d’esprit, mais je plierai aussi d’une manière à être entendu; je chanterai d’esprit, mais aussi d’une manière à être entendu. Autrement, si tu bénis d’esprit, comment celui, qui est du simple peuple, dira-t-il Amen à ton action de grâces, puisqu’il ne sait ce que tu dis. Il est bien vrai que tu rends grâces, mais un autre n’en est pas édifié. J’aime mieux prononcer dans l’Église cinq paroles d’une manière à être entendu, afin que j’instruise aussi les autres, que dix mille paroles en une langue inconnue » (1 Co 14.14-19).

Saint Paul fait comprendre par toutes ces paroles qu’il ne suffit pas que celui qui prie en public sache ce qu’il dit, mais qu’il faut que ceux qui sont présents puissent entendre ce qu’on dit; autrement, ils ne sauraient dire Amen à une chose qu’ils n’entendent pas; comme c’était la coutume des chrétiens de dire Amen à la fin des hymnes et des bénédictions. Les Juifs le faisaient dans leurs synagogues.

14. Il ne faut point rendre de culte religieux aux anges🔗

« Que nul ne vous maîtrise à son plaisir, par humilité d’Esprit, et service des anges, s’ingérant dans les choses qu’il n’a point vues, étant témérairement enflé du sens de sa chair. Et ne retenant point le Chef, duquel tout le corps étant fourni et ajusté ensemble par les jointures et les liaisons, croît d’un accroissement de Dieu » (Col 2.18-19).

L’apôtre ne veut pas que personne entreprenne de tyranniser les consciences. Le mot grec signifie empêcher par adresse et par artifice qu’un homme, qui court dans la carrière, ne la fournisse jusqu’au bout, ou du moins qu’il ne continue sa course avec l’ardeur et la vigilance nécessaires pour pouvoir remporter le prix. Or c’est là le caractère des faux docteurs, dont il parle, qui voulaient introduire le culte des anges.

Il décrit ensuite leur artifice; ils prenaient prétexte que c’était par humilité qu’ils prescrivaient le culte des anges; en disant qu’il ne fallait pas s’adresser directement à Dieu, mais aux esprits, qui tenaient le milieu entre la majesté infinie de Dieu et la bassesse de notre nature.

Pour combattre leur sentiment, il dit que ceux qui prescrivaient un tel culte, n’en ayant aucun commandement de Dieu, s’ingéraient témérairement dans des choses qu’ils n’avaient point vues, et faisaient voir qu’ils n’étaient portés à publier de telles doctrines que par leur orgueil et leur vanité, qui est la cause ordinaire des innovations que les faux docteurs introduisent dans la religion, et qu’ils étaient enflés de cette fausse science qui flatte la chair, que saint Jacques appelle une sagesse terrestre, sensuelle (Jc 3.15). Ensuite, il montre que ceux qui en usent ainsi tombent dans un grand égarement, car sous prétexte d’acquérir la faveur de quelqu’une de ces intelligences célestes, il abandonne Jésus-Christ le Chef de l’Église, et se prive par conséquent des grâces qui découlent de sa communion. Ainsi saint Paul fait voir que c’est ne point retenir Jésus-Christ comme Chef, Sauveur et Médiateur de l’Église que de chercher dans le ciel d’autres intercesseurs que lui, encore qu’on ne les adore pas comme Dieu, et qu’on ne cesse pas d’invoquer Jésus-Christ lui-même comme le Rédempteur de l’Église.

« Alors je me jetai à ses pieds [c’est-à-dire aux pieds de l’ange] pour l’adorer, et il me dit : Garde toi de le faire, je suis ton compagnon de service, et de tes frères, qui ont le témoignage de Jésus, adore Dieu » (Ap 19.10; 22.9).

Il paraît deux choses par cette histoire :

  1. Que saint Jean ébloui par l’ange qui parlait avec lui, et étonne des grandes choses qu’il disait, se prosterna aux pieds de cet esprit céleste, peut-être en prenant cet ange pour Jésus-Christ lui-même.

  2. Que l’ange rejette tout culte religieux, et qu’ainsi il ne faut en rendre aucun à ces esprits bienheureux.

L’ange même en apporte deux raisons : l’une, qu’il était son compagnon de service; et l’autre, qu’il devait adorer Dieu et n’adorer que Dieu seul.

15. Il ne faut point faire d’image de Dieu, et il ne faut se prosterner devant aucune image🔗

« Tu ne te feras aucune image taillée ni aucune ressemblance des choses qui sont là-haut aux cieux, ni ici-bas sur la terre, ni dans les eaux sous la terre. Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point » (Ex 20.4-5).

Dieu défend ici toute sorte de représentation, et d’image des choses célestes et terrestres que l’on emploie dans la religion, pour leur rendre quelque service, comme si c’étaient des moyens par lesquels la divinité reçut les hommages des hommes, ou par lesquels elle leur communique ses grâces; surtout toutes sortes de représentations de la divinité. Il ne veut point qu’on leur rende aucun des actes de la religion, que les hommes rendent à ce qu’ils considèrent comme les objets de leur culte, comme le sacrifice, la prière, l’encensement, l’offrande de quelque chose, la dédicace d’un autel, la visitation dévote du lieu qui lui est consacré, la salutation, la génuflexion; de faire brûler des lampes ou des luminaires devant des images, de les couronner de festons de fleurs, de les porter en procession, de les baiser, et autres choses de cette nature.

« Vous prendrez garde à vos âmes, car vous n’avez vu aucune ressemblance au jour que l’Éternel votre Dieu vous a parlé en Horeb, du milieu du feu, de peur que vous ne vous corrompiez, et que vous ne vous fassiez quelque image taillée et quelque représentation, etc » (Dt 4.15-17).

Dieu fait voir par là qu’il ne s’était fait voir sous aucune forme particulière, afin d’éloigner de l’esprit des Juifs toute pensée de le représenter sous une forme visible. Ensuite, il montre que l’idolâtrie corrompt l’âme, et est cause de la perdition.

« À qui ferez-vous ressembler le Dieu fort? » (És 40.18).

Dieu fait voir par ces paroles qu’étant un Esprit, on ne saurait entreprendre de le représenter, sans lui faire injure, ni le servir devant des simulacres, sans l’offenser.

Note

1. Exténuer : Atténuer, Affaiblir, diminuer. [Dictionnaire de L’Académie française. 1694, 1762].