Cet article a pour sujet les atrocités vécues dans les mines artisanales du Congo en lien avec la demande astronomique mondiale de cobalt requis pour les batteries de portables, de cellulaires et de véhicules électriques.

Source: Cornwall Alliance. 5 pages. Traduit par Paulin Bédard

Carnage au cobalt, travail des enfants et destruction écologique

Note de la rédaction

Ressources chrétiennes a le privilège d’avoir des correspondants en provenance d’Afrique, en particulier de la République démocratique du Congo, qui connaissent de près les conditions horribles décrites dans cet article, et d’autres conditions atroces causées par les guerres entourant les « minerais de conflit ». Nous publions cet article en pensant à nos collègues pasteurs congolais qui ont la lourde responsabilité d’aider les personnes et les familles qui souffrent atrocement dans ces conditions inhumaines, et qui le font en leur présentant les consolations de l’Évangile et avec le peu de soutien matériel dont ils disposent. Nous gardons dans nos prières ces collègues et les Églises qu’ils servent.

Nous encourageons également nos frères occidentaux à mieux connaître et faire connaître autour d’eux cette tragédie humaine actuelle, dans l’espoir que suffisamment de gens deviennent sensibilisés à cette effroyable réalité et que l’on puisse contribuer à y mettre fin.

Pour plus de détails, nous vous suggérons de lire le livre de Siddharth Kara Cobalt Red cité plus loin ou d’écouter sur YouTube les entrevues et les conférences qu’il a données à ce sujet. Nous ne savons pas si cet auteur est chrétien, mais il est remarquable qu’après avoir visité une Église congolaise où l’on chantait passionnément à la gloire de Dieu, il ait noté : « J’ai enfin compris comment les habitants du Congo survivaient à leur tourment quotidien : ils aimaient Dieu d’un cœur entier et ardent et trouvaient du réconfort dans la promesse du salut » (p. 132).

La demande mondiale de cobalt a grimpé avec l’arrivée des téléphones intelligents et des ordinateurs portables. Elle a explosé avec l’arrivée des véhicules électriques et monte aujourd’hui en flèche en même temps que les exigences et les subventions des gouvernements pour les véhicules électriques. Le cobalt améliore les performances des batteries1, prolonge l’autonomie et réduit les risques d’incendie.

La demande atteindra des sommets stratosphériques si les gouvernements restent obsédés par le changement climatique et le « zéro émission nette » (neutralité carbone). Les États et les nations devront passer aux voitures, camions, bus et tracteurs électriques, mettre fin à la production d’électricité à partir de charbon et de gaz, convertir à l’électricité les chaudières, chauffe-eau et poêles à gaz, et fournir une énergie alternative pour les périodes sans vent et sans soleil. La production d’électricité devrait tripler ou quadrupler.

Les éoliennes et les panneaux solaires dépendants des conditions météorologiques nécessiteraient des milliards de modules de batterie pour stabiliser les réseaux électriques et éviter les pannes lorsque le vent et le soleil ne coopèrent pas.

Tous ces équipements de transformation « zéro émission nette » — plus les lignes de transmission, les sous-stations et les transformateurs — nécessiteront des milliards de tonnes de cobalt, de lithium, de cuivre, de nickel, de graphite, de fer, d’aluminium, de terres rares et d’autres matières premières à des échelles sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Cela nécessitera des activités d’extraction, de traitement des minerais, de fabrication, de perturbation des terres et de pollution à des niveaux tout aussi inédits.

La première tranche de turbines éoliennes en mer américaines (30 000 mégawatts d’ici 2030) proposée par le président Biden nécessitera 110 000 tonnes de cuivre, rien que pour les turbines. Les lignes de transmission, les transformateurs et les batteries viennent s’y ajouter. Sur la base des concentrations moyennes de minerai à l’échelle mondiale, l’obtention de ce cuivre nécessiterait l’extraction de 40 000 000 tonnes de roches de surface (morts-terrains) et de 25 000 000 tonnes de minerai de cuivre.

Cependant, ces 2500 turbines de 12 mégawatts et de 240 mètres de haut fourniraient à peine assez d’électricité pour alimenter l’État de New York par une chaude journée d’été, si le vent souffle, et avant que ne s’appliquent les dispositions relatives au zéro émission nette.

Cependant, l’administration Biden s’oppose à l’exploitation minière aux États-Unis, même pour les matériaux essentiels pour atteindre la cible nette zéro, même dans le cadre des réglementations américaines strictes en matière de pollution, de sécurité sur les lieux de travail et de remise en état des terrains minés. Le secrétaire de l’Intérieur2, portant les œillères idéologiques du président, a opposé son veto à l’exploitation minière de matériaux en Alaska3, dans le Minnesota4 et dans presque tous les endroits où l’on pourrait trouver des métaux et des minéraux essentiels5.

L’administration porte toute son attention à chercher à mettre fin à la « crise climatique » en passant à l’énergie « propre ». Elle n’a aucun scrupule à importer de l’étranger, principalement de Chine, des matériaux dont elle a cruellement besoin, quelles que soient les implications en matière d’économie, de défense, de sécurité nationale, d’écologie ou de droits de l’homme. Elle veut simplement que les aspects sales de l’énergie « propre » soient éloignés et hors de vue6.

L’extraction du cobalt implique des horreurs inimaginables. Le livre Cobalt Red [Rouge cobalt]7, de Siddharth Kara, professeur agrégé à l’université de Nottingham et expert en esclavage moderne, expose les réalités atroces que les militants de la fin du pétrole et du zéro émission nette s’efforcent de garder enfouies — avec les corps de parents et d’enfants tués dans des effondrements ou mourant lentement et douloureusement après avoir été mutilés ou empoisonnés dans les mines de cobalt.

Le professeur Kara s’est rendu à plusieurs reprises en République démocratique du Congo (RDC), risquant sa santé et sa vie pour documenter les conditions de vie d’Africains désespérés dans une région qui détient 72 % des réserves mondiales connues de cobalt. Il estime que 70 % de ce cobalt (soit la moitié de l’offre mondiale) est le fruit du travail d’enfants, tandis qu’une grande partie du reste est le fruit d’un travail proche de l’esclavage8.

Le sud-est de la RDC, autrefois verdoyant, abrite les gisements de minerai de cobalt les plus importants, les plus accessibles et les plus riches en cobalt que l’on connaisse sur Terre. Pour les acheteurs de véhicules électriques, les passionnés du zéro émission nette et les élites des entreprises et des gouvernements, la terre dans ce pays est bénie avec du cobalt, du cuivre, d’autres métaux zéro émission nette, de l’uranium, du chrome, de l’or et de l’argent. Pour ceux qui travaillent au bas de la chaîne d’approvisionnement congolaise, la terre est maudite par ces métaux.

Dans les mines de la RDC, « le travail est valorisé au centime près, tandis que la vie n’a pratiquement aucune valeur », explique Kara. Dans les grandes mines industrielles, les mineurs bénéficient de conditions de travail, de soins médicaux et d’un salaire à peu près décents (peut-être 10 dollars par jour).

Toutefois, près d’un tiers du cobalt congolais est extrait de la terre par des mineurs artisanaux : des hommes et des femmes, des garçons et des filles âgés d’à peine six ans. Eux et leurs familles vivent et travaillent dans « un paysage infernal de cratères et de tunnels patrouillés par des maniaques armés ».

Des nuages de gaz nocifs imprègnent l’air que même les enfants en bas âge doivent respirer. Les familles pêchent, jouent, se baignent et boivent dans des rivières et des lacs contaminés par des métaux et des produits chimiques industriels.

Ils travaillent dix à douze heures par jour dans une chaleur étouffante et dans la boue, l’eau et la poussière toxiques, dans d’énormes puits de plusieurs centaines de mètres de profondeur, en se fracassant sur les parois rocheuses et dans de longs tunnels étroits qui s’effondrent à une fréquence effrayante. Les mineurs blessés peuvent recevoir des soins médicaux initiaux de base, puis ils ne reçoivent plus aucun soin.

Dans certaines régions, leurs vêtements et leur peau sont recouverts d’une poussière couleur moutarde : c’est de l’acide sulfurique séché provenant du traitement des minerais. Presque partout, les cancers du sein, des reins et des poumons sont en augmentation, car les adultes, les enfants et les bébés sont constamment exposés aux métaux lourds et à l’uranium présents dans tout ce qui les entoure. Des niveaux élevés de plomb provoquent des lésions neurologiques permanentes.

Muteba, 15 ans, boitillait sur des béquilles, ses jambes déchiquetées et mutilées pendouillant sous sa taille maigre. Il est le seul survivant d’un effondrement qui a enseveli son frère et six autres personnes vivantes. Makano, 16 ans, est tombé dans une fosse, s’est cassé la jambe et la hanche, et s’est retrouvé avec une plaie infectée et suppurante qui nécessitait désespérément des antibiotiques et des soins médicaux qu’il ne recevra probablement pas.

Il y en a des milliers d’autres comme eux — mutilés, paralysés, défigurés ou morts.

Des salaires « équitables »? Les mineurs artisanaux de sexe masculin reçoivent environ 2 à 4 dollars par jour, pour une production qui peut atteindre deux sacs de 40 kilogrammes de minerai de cobalt hétérogénite. Les femmes et les enfants sont généralement payés moitié moins, quelle que soit leur production ou la pureté du minerai qu’ils extraient.

Ceux qui désobéissent aux surveillants de la mine peuvent être « enfermés dans un conteneur d’expédition sans eau ni nourriture pendant deux jours ». À Kanina, deux garçons qui tentaient d’obtenir plus que la pitance habituelle pour leurs sacs de minerai de 30 kilogrammes ont été abattus, assassinés par les gardes de sécurité.

« Ici, il vaut mieux ne pas naître », se lamente une mère. Un mineur s’est dit : « Ici, nous travaillons dans nos tombes. » « Bien sûr, nous craignons les dangers, dit un autre, mais si nous ne travaillons pas, nous ne mangeons pas. »

Et pourtant, les entreprises minières, technologiques et de véhicules électriques, les sociétés d’investissement sur les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG)9, les politiciens et les fanatiques du climat nous disent qu’ils exigent et garantissent un « approvisionnement responsable » des chaînes d’approvisionnement zéro émission nette, de bons salaires, des environnements de travail sûrs et la prévention du travail des enfants et de l’esclavage. Quelle fraude indifférente et intéressée!

Aucun acheteur de la RDC ne sait ou ne se soucie de savoir d’où provient telle quantité de minerai de cobalt, dans quelles conditions il a été extrait, ou si des enfants l’ont creusé. L’ensemble du marché est conçu pour collecter et mélanger des minerais provenant de mines industrielles officielles et d’exploitations artisanales légales ou illégales, ce qui rend impossible la traçabilité des sources ou la détermination de l’implication d’enfants esclaves ou de milices brutales.

Il arrive que le marché soit en opération nocturne isolée, ce qui ne peut avoir d’autres buts « que de blanchir le cobalt extrait de manière artisanale dans la chaîne d’approvisionnement officielle, à l’abri des regards ». Chaque chargement de minerai mélangé est ensuite jeté dans des bains d’acide pour un traitement initial, avant d’être expédié hors du pays, principalement vers la Chine.

Nous entendons beaucoup parler de réparations pour les descendants d’esclaves américains, mais peu de réparations pour les Amérindiens, et rien du tout pour l’indemnisation de ces esclaves africains modernes.

Nous n’entendons pas non plus parler de milliardaires10 comme Bill Gates, John Kerry11, Mark Zuckerberg, George Soros et Michael Bloomberg. Ils financent abondamment les campagnes sur la « crise climatique » et les « énergies propres ». Ont-ils dépensé un seul centime pour assurer des salaires décents, de bonnes conditions de travail, un niveau de vie convenable et des soins médicaux appropriés aux mineurs du Congo?

Ces questions de droits de l’homme devraient figurer en tête de leurs dons de charité et du programme de tous ceux qui promeuvent la crise climatique, les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance, le zéro émission nette et les batteries, en particulier le président Biden, le sénateur Sheldon Whitehouse et le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres.

Notes

1. Kevin Clemens, « Understanding the Role of Cobalt in Batteries » [Comprendre le rôle du cobalt dans les batteries], DesignNews, 16 février 2023.

2. Michael Doyle, « Haaland, GOP clash over critical minerals, Green New Deal » [Haaland et le parti républicain s’affrontent sur les minéraux essentiels et le pacte vert], E&E News, 28 mars 2023.

3. Carrie Sheffield, « Hypocrite Biden blocks mineral mining his clean-energy goals require » [L’hypocrite Biden bloque l’exploitation des minerais que ses objectifs en matière d’énergie propre requièrent], New York Post, 22 mars 2023.

4. « Biden Administration Blocks Minnesota’s Twin Metals Mine » [L’administration Biden bloque la mine Twin Metals dans le Minnesota], Institute for Energy Research, 31 janvier 2023.

5. Abby Smith, « Biden’s plan to stop mining critical minerals ‘irresponsible’ » [Le projet de M. Biden de mettre fin à l’exploitation des minéraux critiques est « irresponsable »], Washington Examiner, 28 mai 2021.

6. NDT : Il en est de même de la majorité des pays occidentaux qui ont adopté des politiques semblables.

7. Siddharth Kara, Cobalt Red : How the Blood of the Congo Powers Our Lives [Rouge cobalt : comment le sang du Congo alimente nos vies], St. Martin’s Press, 2023, 288 pages.

8. NDT : Siddharth Kara résume le résultat de ses recherches au Congo de la manière suivante : « En vingt-et-un ans de recherche sur l'esclavage et le travail des enfants, je n'ai jamais vu une prédation aussi extrême pour le profit que celle dont j'ai été témoin au bas des chaînes d'approvisionnement mondiales en cobalt. Les entreprises titanesques qui vendent des produits contenant du cobalt congolais valent des billions, mais les personnes qui extraient le cobalt du sol mènent une existence de base caractérisée par une extrême pauvreté et d'immenses souffrances. Ils vivent à la limite de la vie humaine dans un environnement qui est traité comme une décharge toxique par les sociétés minières étrangères. Des millions d'arbres ont été coupés à blanc, des dizaines de villages ont été rasés, les rivières et l'air ont été pollués et les terres arables ont été détruites. Notre vie quotidienne est rythmée par la catastrophe humaine et environnementale du Congo » (p. 5). « De nombreux épisodes de l'histoire du Congo ont é plus sanglants que ce qui se passe aujourd'hui dans le secteur minier, mais aucun de ces épisodes n'a jamais impliqué autant de souffrances pour autant de profits liés de manière aussi indissociable à la vie de milliards de personnes dans le monde » (p. 8).

9. Craig Rucker, « Are we Finally Heading Toward ESG sanity? » [Sommes-nous enfin sur la voie de la rationalité ESG?], CFACT, 9 juillet 2023.

10. Dan Mosokowitz, « The 10 Richest People in the World » [Les 10 personnes les plus riches du monde], Investopedia, 2 août 2023.

11. Paul Driessen, « Legalized Climate Grifting » [L’escroquerie climatique légalisée], Townhall, 20 mars 2023.